LE « CREDO » CONTRE LES FAUX DIEUX – par Sandro Magister
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LE « CREDO » CONTRE LES FAUX DIEUX
C’est l’objectif prioritaire de l’année de la foi que Benoît XVI a voulue. Rapprocher les hommes de l’unique vrai Dieu. Et renverser de leur trône les fausses divinités qui dominent le monde
par Sandro Magister
ROME, le 1er novembre 2012 – Une bataille navale dans l’obscurité de la tempête. C’est le spectacle que l’Église donnait d’elle-même après le premier concile œcuménique de l’histoire, celui de Nicée, au IVe siècle.
Benoît XVI aime à le rappeler aux prophètes de malheur d’aujourd’hui. Cette bataille de tous contre tous – dit-il – a fini par produire le « Credo », ce même « Credo » que l’on proclame à toutes les messes dominicales. Ce ne fut pas un désastre, mais une victoire de la foi.
C’est bien là que se trouve la différence entre jadis et aujourd’hui. La crise profonde que l’Église traverse actuellement est une crise de la foi. Le pape Joseph Ratzinger en est tellement convaincu que, le 11 octobre dernier, il a voulu inaugurer une année spéciale, une année de la foi, et que chaque mercredi, jour de ses audiences publiques hebdomadaires, il s’est mis à expliquer le « Credo » article par article.
Théologien, le pape se fait catéchiste. Son rêve est qu’un grand nombre de gens, dans le monde entier, prennent exemple sur lui et recommencent à enseigner aux hommes « les vérités centrales de la foi à propos de Dieu, de l’homme, de l’Église, de toute la réalité sociale et cosmique », en somme l’abc de la foi chrétienne.
Allant encore plus au fond des choses, Benoît XVI a indiqué, à plusieurs reprises, que la « priorité » de son pontificat était de ramener les hommes à Dieu, et « pas à un dieu quelconque », mais à ce Dieu qui a révélé son visage en Jésus crucifié et ressuscité.
Parce que le déclin du « Credo in unum Deum » dans les pays de vieille chrétienté a coïncidé précisément avec la montée d’autres dieux au firmament. Cela aussi, c’est un fait récurrent dans l’histoire. Dans l’Église des premiers siècles, celle des persécutions et des martyrs, le drame le plus aigu était celui des « lapsi », ceux qui succombaient à la tentation de brûler de l’encens en l’honneur du « divus imperator » pour sauver leur vie. Ils étaient extrêmement nombreux et les puristes, sectaires, voulaient les chasser en tant qu’apostats. L’Église les garda parmi ses enfants et élabora de nouvelles formes de confession, de pénitence, de pardon. Ce sacrement qui aujourd’hui, de nouveau, est le plus en danger.
Les nouveaux dieux, Benoît XVI les appelle par leur nom. Il l’a fait, par exemple, lors de la mémorable « lectio divina » qu’il a prononcée devant plus de deux cents évêques à l’occasion de l’avant-dernier synode.
Les nouveaux dieux, ce sont les « capitaux anonymes qui réduisent l’homme en esclavage ».
C’est la violence terroriste « exercée apparemment au nom de Dieu » mais en réalité « au nom de fausses divinités qu’il faut démasquer ».
C’est la drogue qui, « comme une bête vorace, étend ses mains sur toute la terre et détruit ».
C’est « la manière de vivre qui est répandue par l’opinion publique : aujourd’hui c’est comme cela, le mariage ne compte plus, la chasteté n’est plus une vertu, et ainsi de suite ».
L’opinion de Benoît XVI – une opinion qu’il a de nouveau exprimée récemment dans la préface aux deux volumes de ses « opera omnia » qui contiennent les écrits conciliaires – est que c’est justement là que se trouvent la force et la faiblesse de Vatican II, au cinquantième anniversaire duquel il a fixé l’année de la foi.
Le concile a voulu redonner de la vigueur à l’annonce de la foi chrétienne au monde d’aujourd’hui, sous des formes « mises à jour ». Et il y est en partie parvenu. Mais il n’a pas su aller jusqu’au cœur de « ce qui est essentiel et constitutif de l’époque moderne ».
Il est vrai, par exemple, qu’il a fallu à l’Église le coup de fouet des Lumières pour qu’elle redécouvre la conception de la liberté de religion qui avait été celle de la chrétienté de l’Antiquité. Sur ce point, le pape Ratzinger est d’accord avec le cardinal Carlo Maria Martini : l’Église était vraiment « en retard de deux cents ans en ce domaine ».
Mais le pape est encore davantage d’accord avec le cardinal Camillo Ruini, lorsque celui-ci objecte que, de toute façon, « il doit y avoir une distance de l’Église par rapport à n’importe quelle époque, y compris par rapport à la nôtre mais aussi par rapport à celle où Jésus a vécu », une distance « qui nous appelle à convertir non seulement les personnes, mais aussi la culture et l’histoire ».
Cette distance, les Parvis des Gentils organisés par le cardinal Gianfranco Ravasi la mettent en évidence, en donnant à la culture de notre époque, éloignée de Dieu, des occasions de s’exprimer.
Mais ce qui est le plus important pour le pape Ratzinger, c’est que les faux dieux soient renversés de leur trône, afin que les hommes retrouvent le seul vrai Dieu.
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Cette note a été publiée dans « L’Espresso » n° 33 du 2012, en vente en kiosque à partir du 2 novembre, à la page d’opinion intitulée « Settimo cielo », confiée à Sandro Magister.
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