L’HISTOIRE DU RÊVE QUE DIEU RÊVA
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L’HISTOIRE DU RÊVE QUE DIEU RÊVA
Écoute! je vais te conter le rêve que Dieu rêva.
Après la longue chaîne de siècles des patientes évolutions de sa Création “belle à voir”, Dieu “planta un jardin en Éden, à l’Orient”. Il y mit l’humanité naissante “faite à son image”. Il lui confia la gérance du grand Oeuvre inachevé. Et s’imagina y voir grandir une immense famille multipliée d’enfants beaux et joyeux, s’ébattant aux prés verts de sa création, et savourant les fruits du jardin, servis à profusion. Ainsi conçut-il le beau et unique Jardin-Terre, planté au coeur du vaste Univers des astres mouvants, et pourvu de tout ce qu’il fallait pour y réjouir le coeur de ses enfants. Il n’y voyait que du bonheur à vivre l’amour débordant de l’Éternel, amour revêtant toutes formes, goûts et couleurs de joie imaginables.
Or, un jour, Dieu décida de rendre visite à son petit monde d’enfants gâtés, saturés des bienfaits préparés dans le silence de ses longs siècles d’invention.
Le Récit des Origines, au Livre sacré, qui nous rapporte cette visite divine, nous dit que, “à la brise du jour” de l’humanité naissante, Dieu vint se promener au Jardin joli de sa Création. Il y voulait rencontrer ses petites créatures libres, fraîches émoulues de la Terre créatrice. Il se plaisait à l’idée de causer avec elles, presque d’égal à égal, les voyant heureuses de vivre le printemps de l’Histoire en présence de l’Éternel.
Dieu appela. Il appela et il appela! Sa Parole créatrice retentit dans le vide d’une brise matinale désertée. Car l’humanité, se sentant nue au regard du Maître de la vie, fut prise de peur et alla se cacher. Et Dieu ne rencontra que des pécheurs honteux. Ce qui lui gâta, tu penses bien, le plaisir de son oeuvre si longuement édifiée, si vite déchue.
Alors, Dieu pensa qu’il se rattraperait un jour – il en fit promesse à la gent d’Au-Delà. Il laisserait sa Voix résonner par les beaux et mauvais temps de l’Histoire. Sa Parole se fit pleine d’affection et d’invitation, et parfois un peu coléreuse pour rappeler à l’Ordre créateur. Mais, à longueur de temps, les petits d’humains ressemblaient toujours à leurs paternels de la terre esseulée. Ils avaient l’oreille endurcie par le vice de l’égoïsme contracté du Serpent venimeux.
Patiemment, Dieu leur donna de la corde, beaucoup de corde, des siècles de cordes, pour qu’ils fassent leur expérience et souhaitent timidement reprendre, un jour, le chemin du Bercail. Il avait semé dans leur coeur la nostalgie d’une origine lointaine qu’il n’avait pas connue. Peut-être qu’un jour ils goûteraient cette attirance irrésistible de la Maison paternelle. Ce fut une longue attente, un pénible cheminement arraché aux convoitises de la terre; un chemin qui ne mena pas toujours aux lieux de la Vie. L’humanité, comme tel“fils prodigue” dont parle le Livre, avait reçu l’héritage du Père afin d’en gérer la croissance. Et, comme le prodigue du Livre, elle gaspilla tout, ne pensant qu’à son plaisir.
Pourtant, il y avait parfois des lueurs d’espoir qui perçaient dans un ici ou un là lointain du firmament de Dieu. Car bien des gens sortaient hébétés des stérilités de leur vie. Ils retrouvaient péniblement leur coeur d’enfant et se mettaient à rêver – ô suprême victoire de la vie – comme le prodigue du Livre qui eut faim. Le Seigneur Dieu compta sur ces personnes singulières, renées à la vie, pour recommencer. Et il recommença, le pauvre, bien des fois: aux temps des Patriarches et de l’Israël au désert; aux temps des Juges et des Rois, des Prophètes et des Sages; et aux temps – plus avides d’écoute – des “pauvres de coeur”, un “petit reste” de rien, de fidèles enivrés de Parole, qui aspiraient à “connaître” Dieu. Il recommença ainsi, sans se lasser, au cours des siècles qui dévalèrent la pente du temps.
Le gros problème, vois-tu, c’est que Dieu est PAROLE , et que les humains ont L’OREILLE DURE. Je ne parle pas des mal-entendants de bonne volonté, mais de tous ceux qui ont l’ouïe du coeur endurcie par les bruits assourdissants de la vie, ou par leur raison raisonnante encombrante. Un petit prince fantaisiste, venu de l’astéroïde B 612, nous le rappela, lors de sa visite sur la Planète Terre (qui “a bonne réputation”, disait-il). “On ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux”. Et bien avant lui, le vieil Isaïe avait dénoncé la surdité des gens de son temps: “Ils ont des oreilles pour entendre et ils n’entendent pas. Ils ont des yeux pour voir et ils ne voient pas”. Sourds d’oreille, on ne peut plus!
Puis vint la “plénitude des temps”, déterminée par le Créateur de l’Histoire. Et le Verbe de Dieu, Parole Éternelle, s’incarna dans le temps, en Jésus de Nazareth. Il y a de cela quelque 2000 ans.
Obsédé par son rêve originel, Dieu envoya son propre Fils restaurer le chemin de vie entre Lui et sa création. Avec son coeur d’enfant, Jésus nous parla du Dieu Abba, Papito. À son tour, communiant au coeur du Père, Jésus chercha à découvrir le monde rêvé du Créateur. Il aurait tant aimé contempler le jardin fleuri d’enfants qui s’aiment au lieu de se faire souffrir; d’humains qui se plaisent à vivre au lieu de peiner à la sueur de leur front, et qui chantent et dansent au lieu de pleurer, alors qu’ils ont tout à portée de main. Infiniment triste, Jésus pleura sur son peuple fatigué, abandonné comme troupeau sans pasteur. Il se fit “Bon Pasteur”, dans l’espoir d’amener l’humanité à reprendre le chemin du Père. Hélas, la masse des gens ne voulut pas de ce prétendu prodigue repenti: sa Parole cria dans le désert de l’indifférence et de la lassitude.
Un jour, n’en pouvant plus de cette tristesse désabusée, Jésus lança cette plainte furtive, criée comme invitation subtile du Ciel aux enfants de la Terre:
À qui donc puis-je comparer les hommes de cette génération?
À qui ressemblent-ils? Ils ressemblent à des gamins qui sont assis
sur une place et s’interpellent les uns les autres, en disant
‘Nous avons joué de la flûte,
et vous n’avez pas dansé!
Nous avons entonné des chants de deuil,
et vous n’avez pas pleuré’.
Tous les instruments de la création de Dieu se sont mis à l’unisson pour nous faire danser, et nous n’avons pas dansé. Tous les pleurs de Dieu se sont exprimés en souffrance de désertion, et nous n’avons pas pleuré.
L’enfance du monde obsédait Jésus. Il répétait, à l’adresse de ceux qui avaient des oreilles pour entendre:“Laissez venir à moi les petits enfants, car le Royaume des Cieux est à ceux qui leur ressemblent”. Et plus encore: “Si vous ne redevenez comme des enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume de Dieu”. C’est une question de Parole et de coeur, avec des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. C’est une question de vie ou de mort!
Ami, tu te demandes peut-être: comment “redevenir comme un enfant” pour gagner le royaume de Dieu? Faut-il retourner au sein de sa mère pour naître à nouveau, comme l’imagina un instant le vieux Nicodème? Cela ne t’attire peut-être pas “redevenir enfant”, pour n’avoir pas que de beaux souvenirs de ton enfance. Et tu n’as certes pas plus que moi l’envie de “retomber en enfance”! Alors, comment vivre les paroles du Maître?
La réponse, c’est JÉSUS. Lui qui ne fut jamais autre que fils-enfant devant Dieu son Père. Certes, il ne s’agit de verser dans l’enfantillage spirituel. Mais, comme Jésus, notre frère aîné en Dieu, redevenir ce que nous sommes en toute réalité: les très petits enfants du Bon Dieu, perdus dans l’immense jardin de sa création… Des enfants qui devraient danser quand ils entendent jouer de la flûte et pleurer quand on entonne un chant de deuil. Ainsi Dieu nous voit, ainsi Dieu nous aime. Mais notre humanité a toujours eu l’oreille un peu dure; c’est un péché d’entendement!
Mais toi,
écoute la Parole créatrice,
la Parole révélatrice de sens,
et tu vivras à jamais
au lieu de mourir tous les jours.
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