Archive pour le 19 mars, 2015
LA PÂQUE, LE PASSAGE DU SEIGNEUR
19 mars, 2015http://www.comayala.es/Proyecto/frances/lapaque.htm
LA PÂQUE, LE PASSAGE DU SEIGNEUR
1.La Pâque n´est plus ce qu´elle fut. Il faut la récupérer. Fêter la Pâque suppose assumer l´essentiel des deux traditions: de la pâque juive qui fête (dans le passé ) la sortie d´Égypte et (dans le présent) le passage de l´oppression à la liberté: Dieu passe en sauvant; et de la pâque chrétienne qui fête (dans le passé) le passage du Christ de ce monde vers le Père et (au présent) son passage au milieu de nous comme Seigneur de l´histoire : il passe en apportant le salut. Avant le quatrième siècle , il n´y a qu´une célébration qui a lieu le soir de pâque. Nous pouvons nous demander ce que signifient les paroles de Jésus, aujourd´hui: allez nous préparer la Pâque (Lc 22,8).
2. La pâque juive est fêtée dans une ambiance familiale, dans les maisons, dans le cadre d´un repas, avec du mouton: Vous le garderez jusqu´au quatorzième jour de ce mois, et toute l´assemblée de la communauté d´Israël l´égorgera au crépuscule (Ex 6; cf. 12,1-5). La pâque juive est un dîner avec des lectures et des psaumes (récit de l´exode, Ps 113-118; cf. Mc 14,26). Le pain azyme (de même que les herbes amères) est un symbole des difficultées vécues. C´est le pain des persécutés, le pain de la misère et de la hâte, le pain qu´il fallut emporter et cuire avant sa fermentation. Le rituel juif le dit ainsi: Voici le pain de misère que nos ancêtres ont mangé en Égypte, que celui qui en aura besoin vienne fêter la pâque. L´exode est une expérience d´une valeur permanente: le Dieu vivant, qui agit dans l´histoire, ouvre un chemin de libération pour celui qui est opprimé. Le croyant, reconnaissant et plein d´espoir, élève la coupe du salut (Ps 116,13; Lc 22,20).
3. Dans le cadre juif de la pâque, chacun raconte son histoire: et, tous ensemble fêtent l´histoire commune d´Israël: en répètant un refrain ( dayenou: cela nous aurait suffi), ils proclament l´action libératrice de Dieu: Il nous a comblé de tants de faveurs!.. S´il avait simplement divisé la mer pour nous sans nous l´avoir fait passer à pied sec, cela nous aurait suffi… S´il nous avait donné la loi sans entrer dans le pays d´Israël, cela nous aurait suffi. S´il nous avait fait entrer dans le pays d´Israël sans bâtir la maison d´Élection pour nous, cela nous aurait suffi.
4. Dans les premiers siècles, la pâque chrétienne est précédée d´un jeûne court et rigoureux (un jour, deux ou davantage), qui provient d´une interprétation littérale du passage évangélique où l´on demande à Jésus pourquoi ses disciples ne jeûnent pas. Le jour où ils seront privés de la présence de Jésus, alors ils jeûneront (Mt 9,15), mais d´une façon différente. Ce qui souille l´homme ce n´est pas ce qui entre par la bouche mais ce qui sort du coeur (cf. Mc 7,5-23). Sur ce sens-là porte la question: quel genre de jeûne devons-nous faire pour fêter la Pâque? Du reste, il est significatif que Jésus, l´Agneau de Dieu, (Jn 1,29), ait été sacrifié le jour de la préparation de la Pâque (19,14: 1 Co 5,7).
5. Une réalité fondamentale que nous n´arrivons pas à comprendre est la suivante: la veillée pascale est la célébration de la Pâque tout entière. La pâque n´est pas seulement la passion et la résurrection considérés comme deux événements successifs. C´est le passage de l´un à l´autre, des ténébres à la lumière, de la mort à la vie, de la tristesse à la joie (Jn 16,20). C´est une veillée. Par conséquent on va veiller (cf. Ex 112,42) avec les lampes allumées (Mt 25,4) et le contenu de cette veillée est, en premier lieu, la Parole de Dieu (vivante et abondante), et ensuite l´eucharistie (action de grâces).
6. Des témoignages très anciens (La Lettre des Apôtres au milieu du IIème siècle et la Didacalie au IIIème siècle) nous montrent une veillée fêtée pendant toute la nuit jusqu´au chant du coq; par conséquent, elle commençait au crépuscule et finissait après minuit avec l´eucharistie. Â un moment donné, surtout à l´époque du catéchuménat (IIIème et IVème siècles) la veillée pascale finit par inclure la célébration du baptême (cf. Rm 6,3-11). On discuta beaucoup au IIème siècle à cause de la date: les communautés de l´Asie Mineure fêtaient la Pâque le 14 Nisan, de même que les Juifs et les premiers disciples; le reste de l´Église le faisait la nuit du samedi au dimanche et mettait en relief la résurrection. Victor, évêque de Rome, proclama l´excommunication . Mais Irénée de Lyon et Polycrates d´Éphèse, ainsi que les évêques d´Asie, lui rappelèrent la tradition écclésiastique: Polycarpe d´ Esmine et Anicète de Rome ( passant outre ces différences d´opinion) étaient en communion (Eusèbe de C. HEV,24,17).
7. La Didascalie décrit la veillée pascale de la façon suivante: Vous vous réunirez et veillerez, et pendant toute la nuit vous veillerez avec des prières et des larmes, vous lirez les prophètes et les évangiles et les psaumes, dans la crainte et le tremblement avec des prières, jusqu´à la troisième heure de la nuit qui suit le samedi. Alors vous romprez le jeûne, vous offrirez le sacrifice et vous mangerez et vous serez heureux dans la joie et l´allègresse, puisque le Christ, les primices de notre résurrection, a ressuscité.
8. Vers la fin du IVème siècle apparaît déjà la tradition du triduum saint, dans lequel on fête les aspects successifs du mystère pascal. Saint Ambroise dit: C´est le triduum saint … pendant lequel (le Christ) a souffert, s´est reposé et est ressuscité (Ep. 23,12-13:Pl 16,1030). Saint Augustin met en relation le passage de Jonas dans la baleine avec le triduum pendant lequel le Seigneur est mort et est ressuscité: vendredi, samedi, dimanche (De consensu Evang.,3,66: Pl 34,1199).
9. À partir du Vème siècle, le catéchuménat, ainsi que l´aspect baptismal de la veillée pascale disparaissent progressivement. On essaie, alors, de pallier ce défaut au moyen d´un élargissement du symbolisme rituel: bénédiction du feu, du cierge, de l´eau. Cette phase symbolique fut bientôt suivie de la phase dramatique, quand, sous l´influence de la litturgie de Jérusalem, on scénifie les circonstances de la passion.
10. Déjà au Vème siècle, le dimanche qui inaugure la Semaine Sainte, la liturgie orientale fête l´entrée messianique de Jésus à Jérusalem tandis que la liturgie romaine (avec Saint Léon le Grand) inclut déjà la passion (mercredi et vendredi saint aussi). D´un autre côté, Saint Augustin répond à une question sur ce qu´on devait faire le jeudi saint: la règle d´or est de suivre les pratiques de l´Église dans laquelle on se trouve (Ep.54,5:Pl 32,202). Depuis le VIIIème siècle, une nouvelle conception du triduum s´impose dans l´église latine, le triduum avant la Pâque: jeudi, vendredi et samedi. Peu à peu, la dégradation de la Pâque avance. Pie V (1566) défend de célébrer la messe l´après midi, ce qui fait que l´office de la veillée pascale est avancé au matin du samedi . Cependant, le 9 février 1951 la Congrégation des Rites décide de restaurer la veillée pascale.
11. Malgré toutes les réformes (de 1955 et de 1970) il existe encore des problèmes: le dimanche des rameaux, on mêle l´entrée messianique avec la passion, et, en plus, on évite la dénonciation du temple, qui explique la mort de Jésus (Mc 11,18); le Jeudi Saint, le lavement des pieds l´emporte sur la Cène (Jn 13,-17; 1 Co 11,23-26); le Vendredi Saint, on néglige l´impressionante Parole de la croix (Ps 22); dans la veillée pascale, la rénovation des promesse baptismales est insuffisante et uniquement formelle; le déficit actuel d´évangélisation des baptisés demande quelquechose de plus: un processus d´inspiration catéchuménale qui puisse aider à découvrir ce que le baptême signifie vraiment; finalement, on ne met pas en relief le dynamisme indivisible du mystère pascal ( le passage de l´oppression à la liberté, de la mort à la vie) et, la Pâque n´est plus ce qu´elle fut.
12. Quel que soit le moment où on le célèbre, avant la fête de Pâques (Jn 13,1), le premier jour de la semaine (Jn 20,1), huit jours après (Jn 20,26), pendant quarante jours (Ac 1,3), pendant cinquante jours (2,1), chaque semaine (20,7; Ap1,10), pendant toute l´année, le fait fondamental est celui-ci: Ce Jésus que vous, vous avez crucifié, est le Seigneur (Ac 2,36) . Nous aussi, nous pouvons reconnaître sa présence et son action à de multiples signes (1Co 15,16;Jn 21,7), qui se produisent comme fruits de la Pâque. Sa Pâque, son passage, a inauguré, pour le monde entier, l´aube d´un nouveau jour qui ne finira jamais.
PAPE FRANÇOIS – (LES PERSONNES ÂGÉES)
19 mars, 2015PAPE FRANÇOIS – (LES PERSONNES ÂGÉES)
AUDIENCE GÉNÉRALE
Place Saint-Pierre
Mercredi 11 mars 2015
Chers frères et sœurs,
Dans la catéchèse d’aujourd’hui, nous poursuivons la réflexion sur les grands-parents, en considérant la valeur et l’importance de leur rôle dans la famille. Je le fais en m’identifiant à ces personnes, car moi aussi j’appartiens à cette tranche d’âge.
Quand j’ai été aux Philippines, le peuple philippin me saluait en disant : « Lolo Kiko » — c’est-à-dire grand-père François — « Lolo Kiko », me disaient-ils ! Il est important de souligner une première chose : c’est vrai que la société tend à nous mettre de côté, mais certainement pas le Seigneur. Le Seigneur ne nous met jamais de côté ! Il nous appelle à le suivre à tous les âges de la vie, et être âgé contient aussi une grâce et une mission, une véritable vocation du Seigneur. Être âgé est une vocation. Ce n’est pas encore le moment de « baisser les bras ». Cette période de la vie est différente des précédentes, cela ne fait aucun doute ; nous devons également un peu « l’inventer », car nos sociétés ne sont pas prêtes, spirituellement et moralement, à donner à celle-ci, à ce moment de la vie, sa pleine valeur. En effet, autrefois il n’était pas aussi normal d’avoir du temps à disposition ; aujourd’hui cela l’est beaucoup plus. Et la spiritualité chrétienne a elle aussi été prise de court, il s’agit de tracer une spiritualité des personnes âgées. Mais grâce à Dieu les témoignages de saints et de saintes âgées ne manquent pas !
J’ai été très frappé par la « Journée pour les personnes âgées » que nous avons célébrée ici sur la place Saint-Pierre l’année dernière, la place était pleine. J’ai écouté des récits de personnes âgées qui se prodiguent pour les autres, et aussi des histoires de couples d’époux, qui disaient : « Nous fêtons notre 50e anniversaire de mariage, nous fêtons notre 60e anniversaire de mariage ». Cela est important de le faire voir aux jeunes qui se lassent vite ; le témoignage des personnes âgées concernant la fidélité est important. Et sur cette place elles étaient très nombreuses ce jour-là. C’est une réflexion qu’il faut poursuivre, aussi bien dans le domaine ecclésial que civil. L’Évangile vient à notre rencontre avec une très belle image émouvante et encourageante. C’est l’image de Siméon et Anne, dont nous parle l’Évangile de l’enfance de Jésus composé par saint Luc. Ils étaient assurément âgés, le « vieux » Siméon et la « prophétesse » Anne qui avait 84 ans. Cette femme ne cachait pas son âge. L’Évangile dit qu’ils attendaient la venue de Dieu chaque jour, avec une grande fidélité, depuis de longues années. Ils voulaient vraiment voir ce jour, en saisir les signes, en pressentir le début. Peut-être étaient-ils aussi un peu résignés, désormais, à mourir avant : mais cette longue attente continuait à occuper toute leur vie, ils n’avaient pas d’engagements plus importants que celui-ci : attendre le Seigneur et prier. Et bien, quand Marie et Joseph arrivèrent au temple pour obéir aux prescriptions de la Loi, Siméon et Anne s’élancèrent, animés par l’Esprit Saint (cf. Lc 2, 27). Le poids de l’âge et de l’attente disparut en un instant. Ils reconnurent l’Enfant, et découvrirent une nouvelle force, pour une nouvelle tâche : rendre grâce et rendre témoignage pour ce Signe de Dieu. Siméon improvisa un très bel hymne de joie (cf. Lc 2, 29-32) — il a été poète à ce moment-là — et Anne devint la première prédicatrice de Jésus : « Elle parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38).
Chers grands-parents, chères personnes âgées, plaçons-nous dans le sillage de ces vieux extraordinaires ! Devenons nous aussi un peu poètes de la prière : prenons goût à chercher nos mots, réapproprions-nous de ce que nous enseigne la Parole de Dieu. La prière des grands-parents et des personnes âgées est un grand don pour l’Église ! La prière des personnes âgées et des grands-parents est un don pour l’Église, c’est une richesse ! C’est également une grande transfusion de sagesse pour toute la société humaine, en particulier pour celle qui est trop affairée, trop prise, trop distraite. Quelqu’un doit bien chanter, pour eux aussi, chanter les signes de Dieu, proclamer les signes de Dieu, prier pour eux ! Regardons Benoît XVI, qui a choisi de passer dans la prière et dans l’écoute de Dieu la dernière période de sa vie ! C’est beau ! Un grand croyant du siècle dernier, de tradition orthodoxe, Olivier Clément, disait : « Une civilisation où l’on ne prie plus est une civilisation où la vieillesse n’a plus de sens. Et cela est terrifiant, nous avons besoin avant tout de personnes âgées qui prient, car la vieillesse nous est donnée pour cela ». Nous avons besoin de personnes âgées qui prient car la vieillesse nous est donnée précisément pour cela. C’est une belle chose que la prière des personnes âgées.
Nous pouvons rendre grâce au Seigneur pour les bienfaits reçus, et remplir le vide de l’ingratitude qui l’entoure. Nous pouvons intercéder pour les attentes des nouvelles générations et donner dignité à la mémoire et aux sacrifices des générations passées. Nous pouvons rappeler aux jeunes ambitieux qu’une vie sans amour est une vie desséchée. Nous pouvons dire aux jeunes qui ont peur, que l’angoisse de l’avenir peut être vaincue. Nous pouvons enseigner aux jeunes qui s’aiment trop qu’il y a plus de joie à donner qu’à recevoir. Les grands-pères et les grands-mères forment la « chorale » permanente d’un grand sanctuaire spirituel, où la prière de supplication et le chant de louange soutiennent la communauté qui travaille et lutte sur le terrain de la vie.
La prière, enfin, purifie sans cesse le cœur. La louange et la prière à Dieu préviennent le durcissement du cœur dans le ressentiment et dans l’égoïsme. Comme le cynisme d’une personne âgée qui a perdu le sens de son témoignage, qui méprise les jeunes et ne communique pas une sagesse de vie est laid ! Comme est beau, en revanche, l’encouragement qu’une personne âgée réussit à transmettre aux jeunes à la recherche du sens de la foi et de la vie ! C’est vraiment la mission des grands-parents, la vocation des personnes âgées. Les paroles des grands-parents ont quelque chose de spécial, pour les jeunes. Et ils le savent. Je conserve encore avec moi les paroles que ma grand-mère me remit par écrit le jour de mon ordination sacerdotale ; elles sont toujours dans mon bréviaire, je les lis souvent et cela me fait du bien.
Comme je voudrais une Église qui défie la culture du rebut par la joie débordante d’une nouvelle étreinte entre les jeunes et les personnes âgées ! C’est ce que je demande aujourd’hui au Seigneur, cette étreinte !
Je salue les pèlerins de langue française, en particulier les membres de l’enseignement catholique du diocèse de Nanterre.
J’invite vos familles à accueillir avec reconnaissance au milieu d’elles les personnes âgées, afin de recevoir leur témoignage de sagesse nécessaire aux jeunes générations.
Que Dieu vous bénisse.