Archive pour le 9 mars, 2015
BENOÎT XVI – (la prière dans les Actes des Apôtres)
9 mars, 2015http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2012/documents/hf_ben-xvi_aud_20120314.html
BENOÎT XVI – (la prière dans les Actes des Apôtres)
AUDIENCE GÉNÉRALE
Place Saint-Pierre
Mercredi 14 mars 2012
Chers frères et sœurs,
Avec la catéchèse d’aujourd’hui, je voudrais commencer à parler de la prière dans les Actes des Apôtres et dans les Lettres de saint Paul. Saint Luc nous a remis, comme nous le savons, l’un des quatre Evangiles, consacré à la vie terrestre de Jésus, mais il nous a également laissé ce qui a été défini comme le premier livre sur l’histoire de l’Eglise, c’est-à-dire les Actes des Apôtres. Dans ces deux livres, l’un des éléments récurrents est précisément la prière, de celle de Jésus à celle de Marie, des disciples, des femmes et de la communauté chrétienne. Le chemin initial de l’Eglise est rythmé avant tout par l’action de l’Esprit Saint, qui transforme les Apôtres en témoins du Ressuscité jusqu’à l’effusion de sang, et par la rapide diffusion de la Parole de Dieu vers l’Orient et l’Occident. Toutefois, avant que l’annonce de l’Evangile ne se diffuse, Luc rapporte l’épisode de l’Ascension du Ressuscité (cf. Ac 1, 6-9). Le Seigneur remet aux disciples le programme de leur existence vouée à l’évangélisation et dit : « Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8). A Jérusalem, les apôtres, demeurés au nombre de Onze après la trahison de Judas Iscariote, sont réunis dans la maison pour prier, et c’est précisément dans la prière qu’ils attendent le don promis par le Christ Ressuscité, l’Esprit Saint.
Dans ce contexte d’attente, situé entre l’Ascension et la Pentecôte, saint Luc mentionne pour la dernière fois Marie, la Mère de Jésus, et sa famille (v. 14). Il a consacré à Marie les débuts de son Evangile, de l’annonce de l’Ange à la naissance et à l’enfance du Fils de Dieu fait homme. Avec Marie commence la vie terrestre de Jésus et avec Marie commencent également les premiers pas de l’Eglise ; dans les deux moments, le climat est celui de l’écoute de Dieu, du recueillement. C’est pourquoi je voudrais m’arrêter aujourd’hui sur cette présence orante de la Vierge dans le groupe des disciples qui seront la première Eglise naissante. Marie a suivi avec discrétion tout le chemin de son Fils au cours de sa vie publique jusqu’aux pieds de la croix, et elle continue à présent de suivre, avec une prière silencieuse, le chemin de l’Eglise. Lors de l’Annonciation, dans la maison de Nazareth, Marie reçoit l’Ange de Dieu, elle est attentive à ses paroles, elle les accueille et répond au projet divin, en manifestant sa pleine disponibilité : « Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta volonté » (cf. Lc 1, 38). Marie, précisément en raison de l’attitude intérieure d’écoute, est capable de lire son histoire, en reconnaissant avec humilité que c’est le Seigneur qui agit. En rendant visite à sa parente Elisabeth, Elle se lance dans une prière de louange et de joie, de célébration de la grâce divine, qui a empli son cœur et sa vie, en faisant d’elle la Mère du Seigneur (cf. Lc 1, 46-55). Louange, action de grâce, joie: dans le cantique du Magnificat, Marie ne regarde pas seulement ce que Dieu a opéré en Elle, mais également ce qu’il a accompli et accomplit continuellement dans l’histoire. Saint Ambroise, dans un célèbre commentaire au Magnificat, invite à avoir le même esprit dans la prière et écrit : « Qu’en tous réside l’âme de Marie pour glorifier le Seigneur ; qu’en tous réside l’esprit de Marie pour exulter en Dieu » (Expositio Evangelii secundum Lucam, 2, 26 : PL 15, 1561).
Elle est aussi présente au Cénacle, à Jérusalem, dans « la chambre haute où se tenaient habituellement » les disciples de Jésus (cf. Ac 1, 13), dans un climat d’écoute et de prière, avant que ne s’ouvrent les portes et que ces derniers ne commencent à annoncer le Christ Seigneur à tous les peuples, enseignant à observer tout ce qu’Il avait commandé (cf. Mt 28, 19-20). Les étapes du chemin de Marie, de la maison de Nazareth à celle de Jérusalem, à travers la Croix où son Fils lui confie l’apôtre Jean, sont marquées par la capacité de conserver un climat de recueillement persévérant, pour méditer chaque événement dans le silence de son cœur, devant Dieu (cf. Lc 2, 19-51) et, dans la méditation devant Dieu, de comprendre également la volonté de Dieu et devenir capables de l’accepter intérieurement. La présence de la Mère de Dieu avec les Onze, après l’Ascension, n’est donc pas une simple annotation historique d’une chose du passé, mais elle prend une signification d’une grande valeur, parce qu’Elle partage avec eux ce qu’il y a de plus précieux : la mémoire vivante de Jésus, dans la prière ; elle partage cette mission de Jésus: conserver la mémoire de Jésus et conserver ainsi sa présence.
La dernière mention de Marie dans les deux écrits de saint Luc se situe le jour du samedi : le jour du repos de Dieu après la Création, le jour du silence après la mort de Jésus et de l’attente de sa Résurrection. Et c’est sur cet épisode que s’enracine la tradition de la sainte Vierge au samedi. Entre l’Ascension du Ressuscité et la première Pentecôte chrétienne, les apôtres et l’Eglise se rassemblent avec Marie pour attendre avec Elle le don de l’Esprit Saint, sans lequel on ne peut pas devenir des témoins. Elle qui l’a déjà reçu pour engendrer le Verbe incarné, partage avec toute l’Eglise l’attente du même don, pour que dans le cœur de chaque croyant « le Christ soit formé » (cf. Ga 4, 19). S’il n’y a pas d’Eglise sans Pentecôte, il n’y a pas non plus de Pentecôte sans la Mère de Jésus, car Elle a vécu de manière unique ce dont l’Eglise fait l’expérience chaque jour sous l’action de l’Esprit Saint. Saint Chromace d’Aquilée commente ainsi l’annotation des Actes des Apôtres : « L’Eglise se rassembla donc dans la pièce à l’étage supérieur avec Marie, la Mère de Jésus, et avec ses frères. On ne peut donc pas parler d’Eglise si Marie, la Mère du Seigneur, n’est pas présente… L’Eglise du Christ est là où est prêchée l’Incarnation du Christ par la Vierge, et où prêchent les apôtres, qui sont les frères du Seigneur, là on écoute l’Evangile » (Sermo 30, 1 : sc 164, 135).
Le Concile Vatican ii a voulu souligner de manière particulière ce lien qui se manifeste de manière visible dans la prière en commun de Marie et des Apôtres, dans le même lieu, dans l’attente de l’Esprit Saint. La constitution dogmatique Lumen gentium affirme : « Dieu ayant voulu que le mystère du salut des hommes ne se manifestât ouvertement qu’à l’heure où il répandrait l’Esprit promis par le Christ, on voit les Apôtres, avant le jour de Pentecôte, “persévérant d’un même cœur dans la prière avec quelques femmes dont Marie, Mère de Jésus, et avec ses frères” (Ac 1, 14); et l’on voit Marie appelant elle aussi de ses prières le don de l’Esprit qui, à l’Annonciation, l’avait déjà elle-même prise sous son ombre » (n. 59). La place privilégiée de Marie est l’Eglise où elle est « saluée comme un membre suréminent et absolument unique… modèle et exemplaire admirables pour celle-ci dans la foi et dans la charité » (ibid., n. 53).
Vénérer la Mère de Jésus dans l’Eglise signifie alors apprendre d’Elle à être une communauté qui prie : telle est l’une des observations essentielles de la première description de la communauté chrétienne définie dans les Actes des Apôtres (cf. 2, 42). Souvent, la prière est dictée par des situations de difficulté, par des problèmes personnels qui conduisent à s’adresser au Seigneur pour trouver une lumière, un réconfort et une aide. Marie invite à ouvrir les dimensions de la prière, à se tourner vers Dieu non seulement dans le besoin et non seulement pour soi-même, mais de façon unanime, persévérante, fidèle, avec « un seul cœur et une seule âme » (cf. Ac 4, 32).
Chers amis, la vie humaine traverse différentes phases de passage, souvent difficiles et exigeantes, qui exigent des choix imprescriptibles, des renoncements et des sacrifices. La Mère de Jésus a été placée par le Seigneur à des moments décisifs de l’histoire du salut et elle a su répondre toujours avec une pleine disponibilité, fruit d’un lien profond avec Dieu mûri dans la prière assidue et intense. Entre le vendredi de la Passion et le dimanche de la Résurrection, c’est à elle qu’a été confié le disciple bien-aimé et avec lui toute la communauté des disciples (cf. Jn 19, 26). Entre l’Ascension et la Pentecôte, elle se trouve avec et dans l’Eglise en prière (cf. Ac 1, 14). Mère de Dieu et Mère de l’Eglise, Marie exerce cette maternité jusqu’à la fin de l’histoire. Confions-lui chaque étape de notre existence personnelle et ecclésiale, à commencer par celle de notre départ final. Marie nous enseigne la nécessité de la prière et nous indique que ce n’est qu’à travers un lien constant, intime, plein d’amour avec son Fils que nous pouvons sortir de « notre maison », de nous-mêmes, avec courage, pour atteindre les confins du monde et annoncer partout le Seigneur Jésus, Sauveur du monde. Merci.
LES FEMMES DE LA BIBLE PORTENT L’INTUITION DE DIEU
9 mars, 2015LES FEMMES DE LA BIBLE PORTENT L’INTUITION DE DIEU
Voici mis en lumière quelques beaux portraits de ces femmes extraordinaires qui sont citées dans la Bible. On dit que la Bible est rude avec les femmes. Le jugement est trop dur.
Clair-obscur
Dans une société où la femme avait peu de droit pour beaucoup de devoirs, la Bible a sculpté des portraits d’exception, avec cette intuition majeure : magnifiques, tenaces, parfois fourbes ou astucieuses, ces femmes sont souvent étonnamment ajustées au projet de Dieu. Elles veillent sur lui comme sur un nouveau né, elles ouvrent large l’espace de Dieu au pays des hommes.
Les femmes de la Bible portent l’intuition de Dieu (1)
Ouvrant ces portraits, il faut bien parler d’ Eve! Beaucoup, pour parler d’elle, ont des mots au parfum de pomme acide. Eve ne mérite peut-être pas tout cela. Quand elle apparaît, ils sont deux à chercher tant bien que mal les chemins de Dieu, l’oreille encore si mal affinée à sa voix…
On retiendra qu’Eve est nommée, au terme du récit de la Genèse, « mère des vivants » (Gn 3). Car c’est toujours de vie que parle la Bible.
La Genèse voit alors défiler de grandes figures, avec lesquelles nous parcourons les premiers sables bibliques, étonnés. Ainsi
Sarah, déjà âgée, rit de ce qu’elle entend de l’étranger qui passe et dans lequel le lecteur reconnaît l’ange de Dieu.
Il parle de naissance alors qu’elle se sent toute sèche, trop vieille pour rouvrir le chapitre des imprévus et de la vie. Elle rit. Et l’enfant qui naîtra d’elle, puisqu’elle enfantera, s’appellera l’enfant du rire, selon le jeu de mots hébreu qui entoure le nom d’Isaac (Gn 18).
Tenaces pour veiller sur la vie
Puis vient Rébecca, qui entre dans l’histoire d’Isaac par la porte du courage et de la fidélité à l’accueil, au respect de l’étranger de passage, à la vie. Elle ne ménage pas sa peine au bord du puits, pour les chameaux de l’étranger qui arrive.
Bien lui en prend, car c’était pour lui le signe attendu. Et il la ramène vers Isaac, son maître, qui désirait une femme prête à un grand rêve, à une histoire où Dieu aurait sa place. Rébecca épouse Isaac.(Gn 24).
Bien sûr on se souvient de sa rouerie quand Jacob devenu vieux et rendu aveugle par l’âge, doit donner sa bénédiction à l’aîné, Esaü. Elle, de ces deux jumeaux terribles, semble préférer Jacob, et l’aide à obtenir la bénédiction paternelle qui échappe à Esaü. Celui-ci pleure de s’être fait ainsi ravir la bénédiction de l’aîné. Ainsi Rébecca aide son fils Jacob, l’assoiffé de bénédiction et de Dieu !…(Gn 27).
Mais traversons ainsi le temps, et voici Myriam, qui aime tellement chanter qu’elle emporte tout le monde dans son chant. Le temps a passé depuis Rébecca. Le peuple a connu la servitude d’Egypte. Et si Myriam entreprend de chanter son étonnement pour Dieu, c’est que le peuple a traversé la mer sous la conduite de Moïse, son frère (Ex 15). Son chant est le premier grand, immense cantique du peuple de la Bible, au Dieu qui fait franchir la mort.
Franchissons les siècles. Et l’on aimerait ne pas oublier Rahab, la prostituée de Jéricho, qui a l’oreille fine à la « parole du Seigneur » (Jos 2) ! Rahab, la merveilleuse païenne qui ouvre ainsi les portes de Jéricho aux envoyés de Dieu, pour que le peuple qu’il aime entre en terre promise.
Ruth a une histoire différente. Elle est du pays de Moab. Elle est étrangère et a épousé un fils du pays de Juda venu par là, mais a connu très vite le veuvage. Par fidélité à sa belle-mère, ou peut-être par amour pour son amour qui n’est plus, elle vient au pays de Juda.
La Bible dit avec gratitude et presque tendresse sa fidélité à la Parole de Dieu ! Parvenue au pays de Juda, elle ira errer en pauvresse sur les champs moissonnés par Booz, pour y glaner. Elle glanera gros, puisque Booz la remarque et la choisit pour en faire sa femme.
D’eux naîtront Jessé et sa lignée, l’arbre de Jessé, l’arbre généalogique de David et… du Messie. La tradition juive chantera la foi de Ruth ? mais de quelle nature est-elle exactement ? devenue ainsi en sa ténacité et sa fidélité, l’ancêtre du Messie.(cf. livre de Ruth).
Et il nous faut aller plus loin vers le Nord, aux confins de la terre du Liban, un siècle plus tard peut-être. Comment ne pas évoquer en effet cette autre figure merveilleuse, de la femme que rencontre le prophète Elie au temps de la sécheresse et de la famine. On ne sait rien d’elle, pas même son nom, juste sa peine, elle que l’on appelle simplement la veuve de Sarepta. Elie lui demande à manger et, alors que ce sont ses dernières ressources avant de mourir, elle et son fils, elle donne son reste de farine et d’huile.
Comme si elle pressentait que l’identité même de Dieu est résurrection, vie plus grande, plus forte que la mort, et qu’avec ce Dieu là au coeur, on peut donner (1 R 17) !
On comprend, à regarder la vie de ces femmes trempées au rythme de Dieu, que les prophètes aient aimé comparer Jérusalem à une femme. Une femme dévoyée quand c’est le péché qui emporte le coeur de Jérusalem. Une veuve dévorée par le chagrin au temps de l’Exil, une femme resplendissante de beauté au temps où Dieu ramène son peuple des terres du mal et de l’Exil.
L’accueil de Dieu sans réserves
Marie, dans le Nouveau Testament, sera cette grâce venue du ciel et habitant au pays des hommes. Une disponibilité intégrale à la Parole, au point qu’en elle la Parole venue de Dieu se fait chair. Et l’humanité passe de façon nouvelle aux saisons de Dieu, ouvrant le temps pour chaque homme, chaque être, d’un enfantement.
D’autres femmes splendides traversent avec discrétion les évangiles, le temps de semer la vie, d’accueillir le pardon, de renaître, d’aimer. On pense à toutes ces Marie dont les visages se sont fondus, au fil de la tradition, avec celui de Madeleine, celle dont on dit tout aujourd’hui, au rythme des films et des romans. Elle a simplement laissé saisir sa vie pour que s’y inscrive, avec le pardon, la résurrection de Jésus.
Il est des êtres de lumière qui éveillent ainsi l’humanité et la sauvent. On reconnaîtra en eux la parole de Dieu, énoncée sans ombre, au coeur de notre histoire.