Archive pour février, 2015
LE DÉSERT: FOI ÉPROUVÉE
19 février, 2015http://le-refuge.over-blog.fr/article-le-desert-foi-eprouvee-122242965.html
LE DÉSERT: FOI ÉPROUVÉE
Blog d’Expression Protestante
Le désert, de prime abord, n’évoque rien de réjouissant : chaleur, aridité, sècheresse, soif, bêtes sauvages, danger, silence, solitude, peur, etc.
Pourtant, on y trouve aussi, en des lieux précis, des pâturages, prairies, sources d’eau (même d’eau chaude), oasis, puits …
Pour nous qui sommes chrétiens, ces réalités peuvent nous enseigner de profondes et édifiantes leçons si nous savons y discerner le sens spirituel.
Entre autre, le désert peut s’avérer être un lieu privilégié pour rencontrer Notre Créateur car notre oreille sera devenue attentive à Sa Voix.
C’est ce que nous dit, par exemple, le prophète Osée :
« C’est pourquoi voici, je veux l’attirer et la conduire au désert, et je parlerai à son cœur. » (Osée 2 :16)
Le désert nous fait peur, parce que c’est un lieu hostile, inconfortable, mais si nous sommes conduits par Dieu dans le désert, ce dernier peut alors devenir une réelle source de grandes bénédictions spirituelles.
Dans le désert nous sommes dépouillés.
Il n’y a guère d’occasions de se distraire, et nous nous retrouvons face à nous-mêmes, face à Dieu, même si nous ne sommes pas forcément et toujours conscients de cette réalité.
Dans le désert nous pouvons aussi bien y mourir, ou alors, crier à Dieu.
Si nous voulons marcher avec Dieu, sachons-le : nous connaitrons le désert.
Non seulement le désert, mais voire même plusieurs déserts durant notre pèlerinage ici-bas.
La sanctification fait partie du programme du Seigneur pour ses enfants, et le désert est un lieu de sanctification.
Nous y serons tentés et éprouvés, comme le fut Jésus lorsqu’Il dût affronter le malin, même si c’est dans une moindre mesure.
Nous y serons éprouvés par la chaleur de l’épreuve, comme nous le rappelle entre autre, l’apôtre Pierre dans son épître :
« Mes bien-aimés, ne trouvez pas étrange d’être dans la fournaise de l’épreuve, comme s’il vous arrivait quelque chose d’extraordinaire. » (1 Pierre 4 :12)
J’ai entendu dans un reportage, un vigneron dire la chose suivante :
« Le pied de vigne a besoin d’être dans une terre aride et de souffrir, pour donner une bonne récolte. Plus il souffre, meilleur sera le vin. Lorsque la terre est aride, le cep fait descendre ses racines en profondeur jusqu’à ce qu’il trouve de l’eau ».
Sans le réaliser, ce vigneron nous livre une leçon spirituelle très enrichissante.
Bénissons Dieu pour Sa Fidélité.
Les déserts dans nos vies sont inévitables, et c’est tant mieux quoi qu’on en pense ou dise.
Ils sont des bénédictions de Dieu si nous les acceptons non par résignation ou fatalisme, mais pour apprendre, savoir que Dieu nous aime comme Filles et Fils, rachetés par le Sang de Son Fils.
Dieu veut quelquefois nous libérer de notre superficialité, Il veut que nous croissions, que notre foi aille en profondeur, et que nous devenions des chrétiens affermis.
N’oublions pas le « puits » de sa Parole où nous pouvons nous désaltérer à tout moment, mais encore davantage lorsque nous sommes en pèlerinage dans le désert.
Abreuvons-nous de cette eau vive qui vient du ciel et remplissons-en notre outre pour la route.
Désaltérés par cette eau pure de la Parole, notre foi en sera affermie, et ainsi, monterons vers Dieu nos prières, supplications, intercessions, mais aussi nos actions de grâce, nos louanges, notre reconnaissance.
Gardons à l’esprit que Dieu est avec nous dans le désert.
Le Seigneur se prépare des ouvriers dans le désert afin qu’ils puissent devenir des instruments de choix au travers desquels Il pourra se glorifier lorsque nous accomplirons avec joie les bonnes œuvres que Dieu a préparé d’avance, car ne l’oublions surtout pas :
« La moisson est grande mais il y a peu d’ouvriers » ((Luc 10:2).
L’Eglise a besoin d’ouvriers qui œuvreront pour le royaume de Dieu.
Il y a du travail pour tous les enfants du Seigneur, que ce soit dans la prière ou en nous mettant au service de Dieu avec les talents dont Il nous a pourvus.
Il ne s’agit pas de tomber dans l’activisme, pour être dans « le faire », mais surtout parce que formés à l’école du désert, nous serons différents.
Etant dans « l’être » au lieu du « faire », ce que nous ferons sera le fruit de ce que Dieu aura fait de notre être.
Martin Luther disait :
« Il ne sert à rien à un arbre de croître, de fleurir si, avec ses fleurs, il ne porte pas de fruits. Beaucoup, justement, périssent tout en fleurs. »
Ne vivons donc plus exclusivement selon la tendance de ce siècle qui accentue sur le « bien-être », mais prions que Dieu nous montre ce qu’Il attend de chacun de nous individuellement dans « l’être » selon LUI.
Amen,
PAPE FRANÇOIS: LA DOUCEUR, UNE VERTU UN PEU OUBLIÉE
19 février, 2015PAPE FRANÇOIS
MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA MAISON SAINTE-MARTHE
Mardi 9 avril 2013
(L’Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 16 du 18 avril 2013)
LA DOUCEUR, UNE VERTU UN PEU OUBLIÉE
« La tentation de commérer à propos des autres et de mal parler d’eux est toujours aux aguets. En famille aussi, entre amis et dans la paroisse, où les dames du catéchisme se chamaillent avec celles de la Caritas ». Ce sont des « tentations quotidiennes » — « ennemies de la douceur » et de l’unité entre les personnes et au sein de la communauté chrétienne — « qui arrivent à tous, même à moi ».
C’est précisément contre cette attitude que le Pape François a mis en garde au cours de la célébration de la Messe du mardi 9 avril, dans la chapelle de la Domus Sanctae Marthae. Le Pape a indiqué la voie de la douceur évangélique pour laisser à l’Esprit la possibilité d’œuvrer et de nous régénérer à une « vie nouvelle », faite d’unité et d’amour. « Demandons la grâce », a-t-il dit, de « ne juger personne » et d’apprendre à « ne pas commérer » sur le dos des autres— ce serait « vraiment un grand pas en avant » — en nous efforçant de « faire preuve de charité les uns envers les autres », « de respect » et en laissant avec douceur « la place à l’autre ». « Dans la prière au début de la Messe — a dit le Pape dans son homélie— nous avons demandé au Seigneur que, par la force de Jésus ressuscité, il manifeste au monde la plénitude de la vie nouvelle. Après la résurrection de Jésus, commence une vie nouvelle ! C’est ce que Jésus a dit à Nicodème. Il dut “naître d’en haut”, commencer». Nicodème — a expliqué le Pape François en référence au passage évangélique de saint Jean (3, 7-15) — « est un érudit. Un peu auparavant, dans l’Évangile, il avait répondu à Jésus : mais comment un homme peut-il naître à nouveau, retourner dans le sein de sa mère et naître à nouveau ? Jésus parlait d’une autre dimension : “naître d’en haut”, naître de l’Esprit. C’est une nouvelle naissance, c’est la vie nouvelle, la puissance, la beauté de la vie nouvelle que nous avons demandée dans la prière. C’est la vie nouvelle que nous avons reçue dans le baptême, mais qui doit se développer ». « La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme. Une seule âme, un seul cœur : l’unité, cette unité, cette unanimité, cette harmonie des sentiments dans l’amour, l’amour réciproque. Penser que “les autres sont meilleurs que moi” : c’est beau, non ? ». « Mais la réalité nous dit qu’après le baptême, cela ne vient pas automatiquement. C’est un travail à faire sur le chemin de la vie, c’est un travail à faire par l’Esprit en nous et c’est une fidélité à l’Esprit de notre part ». Et « cette douceur dans la communauté est une vertu un peu oubliée. Être doux, laisser la place à l’autre. Il y a tant d’ennemis de la douceur, à commencer par les commérages, n’est-ce pas ? Lorsque l’on préfère commérer, commérer sur l’autre, dire du mal de l’autre. Ce sont des choses quotidiennes qui arrivent à tous, même à moi ». « Ce sont des tentations du malin — a-t-il ensuite poursuivi — qui ne veut pas que l’Esprit vienne à nous et fasse cette paix, cette douceur dans les communautés chrétiennes. Nous allons à la paroisse, et les dames du catéchisme se chamaillent avec celles de la Caritas ». Et « il y a toujours ces conflits. Même en famille ou dans le quartier. Et même entre amis. Et cela, ce n’est pas la vie nouvelle. Lorsque vient l’Esprit et qu’il nous fait naître à une vie nouvelle, il nous rend doux, charitables. Il ne faut juger personne : l’unique Juge est le Seigneur ». Voilà alors la suggestion de « ne rien dire. Et si je dois dire quelque chose, je lui dis à lui, à elle : mais pas à tout le quartier. Seulement à celui qui peut résoudre la situation ». « Cela — a conclu le Pape François — n’est qu’un petit pas dans la vie nouvelle, mais c’est un pas quotidien ».
Beato Angelico, Tabernacle Linaioli, Florence
18 février, 2015BX FRA’ ANGELICO (GIOVANNI DE FIESOLE) – PRÊTRE O.P. ET PEINTRE († 1455)
18 février, 2015BX FRA’ ANGELICO (GIOVANNI DE FIESOLE)
PRÊTRE O.P. ET PEINTRE († 1455)
Fra’ Angelico, dans le siècle Guido di Pietro, naît en 1387 à Vicchio di Mugello (Toscane, Italie).
Son éducation artistique se déroule à Florence à l’époque de Lorenzo Monaco et Gherardo Starnina.
Du premier, il reprend l’usage de couleurs accentuées et peu naturelles, mais aussi une lumière très forte qui annule les ombres et participe au mysticisme des scènes sacrées, thèmes qu’on retrouve dans ses miniatures et dans ses premières compositions.
En 1418 il entre chez les Dominicains Observants au Couvent Saint-Dominique à Fiesole. Il commence sa carrière comme enlumineur dans le scriptorium du Couvent.
Il réalise la décoration d’un autel pour la chapelle Gherardini de l’église Santo Stefano à Florence.
Le triptyque de Saint Pierre Martyr est daté d’environ 1425.
En 1427, il est ordonné Prêtre.
En 1430 il peint l’Annonciation, une œuvre où apparaissent de nouvelles techniques inspirées de Masaccio.
Pour la première fois est utilisée une lumière diaphane qui enveloppe la composition, exaltant les couleurs et les masses plastiques des figures, et unifie l’image.
Entre 1430 et 1433 il réalise le Jugement Dernier, encore très influencé par le style de Lorenzo Monaco, mais le rythme des plans démontre un intérêt naissant pour l’organisation en perspective de l’espace.
Entre 1434 et 1435 il peint a tempera sur bois.
En 1436, les Dominicains de Fiesole s’installent au Couvent San Marco à Florence, récemment reconstruit par Michelozzo.
L’Angelico, aidé parfois d’assistants, peint de nombreuses fresques pour le cloître, le chapitre et une vingtaine de cellules.
Les travaux sont dirigés par son ami St Antonin de Florence.
Invité à Rome par le Pape Eugène IV, il peint une chapelle. En 1447 il se rend à Orvieto pour peindre la nouvelle chapelle de la Cathédrale en collaboration avec son élève Benozzo Gozzoli.
De 1449 à 1452, Fra’ Angelico est Prieur de son Couvent.
Il meurt à Rome le 18 Février 1455 dans le Couvent de Santa Maria sur la Minerve, où il est enterré.
C’est seulement après sa mort qu’il est appelé ‘Beato Angelico’.
« Fra’ Giovanni fut un homme simple et de mœurs très saintes. Il ne cessa de pratiquer la peinture et ne voulut jamais faire que des sujets religieux.
Il aurait pu être riche mais il ne s’en soucia point. Il fut d’une profonde humanité, sobre, menant une vie chaste, et échappa ainsi aux pièges du monde.
Jamais les frères ne l’ont vu en colère; il avait coutume d’admonester ses amis avec un simple sourire.
Avec une gentillesse incroyable, il disait à tous ceux qui lui demandaient une œuvre de se mettre d’accord avec le Prieur, et qu’ensuite il ne manquerait pas de les satisfaire.
Nul autre n’offre des Saints qui aient autant l’air de Saints. Il ne retoucha et ne transforma jamais aucune de ses peintures.
Il n’aurait jamais touché ses pinceaux sans avoir auparavant récité une Prière. » (Giorgio Vasari).
La représentation du mystère pour l’Angelico ne peut se réduire à une simple figuration, car la finalité de la peinture, objet matériel en soi, est contradictoire avec le désir de représenter l’immatériel absolu, c’est-à-dire le Divin.
La peinture de l’Angelico est profondément liée aux réflexions théologiques menées à l’époque autour de l’œuvre de Saint Thomas d’Aquin par les Dominicains florentins.
Il ne peignit jamais d’autres visages que ceux du Seigneur, de la Vierge, des Saints et des anges.
Saint Jean-Paul II (Karol Józef Wojtyla, 1978-2005), qui l’a Béatifié le 03 Octobre 1982, et déclaré Patron Universel des artistes le 18 Février 1984, a défini son œuvre comme “une Prière peinte”.
Lecture.
Fra Angelico chanta la gloire de Dieu par toute sa vie, ce Dieu qu’il portait comme un trésor au plus profond de son cœur et qu’il exprimait dans ses œuvres d’art.
Il est resté dans la mémoire de l’Église et dans l’histoire de la culture comme un extraordinaire artiste-religieux.
Fils spirituel de saint Dominique, par son pinceau il exprima sa « somme » des mystères divins, comme Thomas d’Aquin l’énonça en langage théologique.
Dans ses œuvres les couleurs et les formes « se prosternent vers le temple saint de Dieu » et proclament une exceptionnelle action de grâces à son Nom.
La fascination particulièrement mystique de la peinture de fra Angelico nous oblige à nous arrêter émerveillés devant son génie et à nous exclamer avec le psalmiste :
« Que Dieu est bon pour les hommes au cœur pur ! » (Jean-Paul II, Homélie du 18 Février 1984).
Prière.
» Par un don merveilleux de ton Amour, ô Dieu, le Bienheureux Fra Angelico a contemplé et enseigné avec une active ferveur les mystères de ton Verbe.
Par son intercession, accorde-nous à nous qui t’avons déjà connu par la Foi, de Contempler la Beauté de ta Gloire. Par Notre Seigneur Jésus-Christ. «
MEDITATIONS POUR LE CAREME
18 février, 2015MEDITATIONS POUR LE CAREME
Le carême : une chance pour notre vie chrétienne !
Ce mercredi 5 mars, nous « entrons en Carême ». Quelle chance ! Une nouvelle fois, l’Église nous invite à un beau et grand parcours de foi et de charité. « En effet, c’est un temps favorable pour renouveler, à l’aide de la Parole de Dieu et des Sacrements, notre itinéraire de foi, aussi bien personnel que communautaire. C’est un cheminement marqué par la prière et le partage, par le silence et le jeûne, dans l’attente de vivre la joie pascale » (message de Benoît XVI pour le Carême 2012). Quelle chance de pouvoir vivre, de plus en plus intensément, de manière de plus en plus intérieure, ce beau parcours qui va nous mener jusqu’à la Résurrection, la nôtre, celle de toute l’humanité, en Jésus-Christ mort et ressuscité. Nous avons laissé derrière nous Noël et l’Incarnation, le Baptême de Jésus, sa présentation au temple, nous avons commencé à cheminer personnellement et en Église sur la belle et lumineuse route qui, année après année, nous rapproche du Père et de la pleine communion avec notre Créateur. C’est la route du Salut, c’est le chemin de la sainteté, c’est la voie de la charité.
Le Carême, ce sont quarante jours durant lesquels nous sommes invités à nous dépouiller de nous-mêmes, de notre suffisance, de nos encombrements, quarante jours pour faire le « nettoyage de printemps », pour rendre notre cœur propre et accueillant, pour nous ouvrir à l’Amour de Celui qui, par amour pour nous, s’est offert sur la Croix, donnant sa vie par amour. Nous l’invitons ainsi à « faire sa demeure en nous » ; nous acceptons ainsi de nous laisser transformer par Lui. Se laisser transformer par Jésus, c’est entrer dans son parcours d’amour envers le Père et envers chaque frère et sœur que nous rencontrerons dans notre vie. Guidés par notre foi, nous, chrétiens, devons tout faire pour nous stimuler dans la charité, « dans le service et les œuvres bonnes » (He 10,24).
Croître dans la foi et, dans le même temps, croître dans la charité. Y arriverons-nous par nos propres moyens? Nous savons bien que non. Mais ce que nous pouvons faire, c’est, humblement et avec courage, nous tourner vers le Seigneur : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle » (rite de l’imposition des cendres).
Pour nous aider à avancer, l’Église met sur notre chemin au cours du carême de grands témoins de foi : Saint Joseph, « serviteur fidèle et prudent » (fêté le 19 mars), à qui est confié « la garde des mystères du salut » ; la Vierge Marie, qui, « à l’ombre de l’Esprit Saint, accueille le Christ dans la foi et qu’elle porte avec tendresse dans sa chair » (Annonciation le 25 mars). La route est ouverte et balisée : nous pouvons nous y engager en toute confiance et surtout sans tarder, car « c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut ! »
Réflexion pour entrer en carême : faire pénitence (*)
(avec Mgr Jacques Perrier, ancien évêque de Lourdes)
A la Salette, la Vierge Marie nous invite à la conversion et à la pénitence. A Lourdes, lors de sa huitième apparition à Bernadette, Marie a répété trois fois le mot « pénitence ». Un mot répété trois fois, c’est rare. Il faut vraiment que la chose soit d’importance. Mais que veut-il dire, d’ailleurs, ce mot ? En Français, on peut utiliser deux mots qui sonnent assez différemment : pénitence et conversion. Conversion paraît beaucoup plus positif que pénitence. L’histoire de l’Eglise est jalonnée d’innombrables « convertis », depuis saint Paul sur le chemin de Damas jusqu’aux adultes baptisés de nos jours. Le danger serait que, étant chrétiens, nous pensions n’avoir pas besoin de conversion. Evidemment, nous n’allons pas passer notre vie à prendre chaque jour un virage à 180 degrés. Mais, comme un bateau dans sa traversée a, sans cesse, besoin de corriger sa trajectoire, de même nous devons chaque jour nous replacer dans le sillage du Christ. Se convertir, c’est prendre plus au sérieux les appels du Christ, pour aller plus loin. Nous constatons combien nous nous sommes écartés du chemin de l’Evangile, parfois nous en sommes complètement sortis ou bien nous nous sommes arrêtés. Repartir ne se fera pas sans peine. Reconnaître ses péchés, pleurer sur ses péchés est déjà une grâce. Il faut demander le don des larmes.
Marie, l’Immaculée Conception, est indemne de tout péché. C’est pour cela qu’elle en voit l’horreur, bien mieux que nous. Comme elle est notre mère, elle n’est pas là pour nous accuser. Elle est le « refuge des pécheurs ». Unie à son Fils, elle porte la croix de nos péchés. Elle est Notre-Dame des Douleurs, fêtée le lendemain de la Croix glorieuse.
Chaque site d’apparition mariale a ses caractères propres. La Salette et Lourdes ne se ressemblent pas. Mais un trait réunit tous ces sanctuaires, c’est l’appel à la pénitence. La pénitence peut prendre de multiples visages. Sa forme la plus haute est le sacrement de pénitence, largement célébré dans les sanctuaires marials et demandé par l’Eglise dans le temps du Carême.
Prière : O Marie, Toi, la disciple parfaite de ton Fils : Aide-moi à voir mon péché, donne-moi de pleurer sur tout le mal dont je suis coupable. Réveille ma foi, ranime mon espérance, ravive ma charité. Tu es le refuge des pécheurs. Parce que tu connais l’infinie miséricorde de ton Fils, sois pour nous une mère énergique et attentive. Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen !
(*) Le premier sens du mot « pénitence » signifie : « regret d’avoir offensé Dieu, accompagné de la ferme intention de ne plus recommencer ». Dans un deuxième sens, on peut l’entendre comme « le travail, les efforts que nous avons à faire sur nous-mêmes pour ne plus retomber dans nos péchés ». La notion de mortification, de « réparation » des péchés que l’on attribue souvent à ce mot n’est sans doute pas la plus adéquate, car dans sa grande miséricorde, si nous reconnaissons humblement notre péché, Dieu nous a déjà pardonné. « Va et ne pèche plus », a dit simplement Jésus à la femme adultère !
Michelangelo, Conversion de saint Paul ( 1 543 environ )
17 février, 2015LE CARÊME NOUS MÈNE AU DÉSERT …
17 février, 2015http://www.bible-service.net/extranet/current/pages/738.html
LE CARÊME NOUS MÈNE AU DÉSERT …
Le Carême, quarante jours qui nous mènent au désert pour que nous passions à la vie nouvelle…
La liturgie propose de relire le récit de la Tentation de Jésus (selon Lc 4, 1-13), de la Transfiguration du Seigneur (selon Lc 9, 28-36), le rappel du Christ à l’urgence de la conversion (Lc 13, 1-9) et [_REF:233]la parabole du fils retrouvé (Lc 15, 1-32). Mais il est bien d’autres textes qui peuvent enrichir notre lecture du « désert »…
Le désert : abri pour l’élu de Dieu Le désert semble, par sa désolation et son manque d’eau, une terre qui n’est pas faite pour les hommes. Pourtant, le Premier Testament rappelle que le désert fut lieu de refuge, protection contre les ennemis. Ouvrez votre Bible et allez relire :
- comment David fuit la haine de Saül au désert de Zif : 1 S 23
- comment Élie fuit la colère de Jézabel : 1 R 19
- comment le psalmiste rêve d’un abri au désert : Ps 55, 6-9
- comment la femme échappe au dragon en s’envolant au désert : [_REF:240]Ap 12, 13-14
Le désert : chemin pour l’accueil des dons de Dieu
C’est YHWH (Le Seigneur) qui choisit le chemin du désert pour mener et guider son peuple vers la Terre promise (Ex 13, 17). C’est YHWH qui, au désert, se révéla et donna aux fils d’Israël ce qu’il leur fallait pour « marcher avec Dieu ».
Ouvrez votre Bible et allez relire :
- la rencontre de YHWH et Moïse au désert, à l’Horeb : Ex 3
- le don de l’eau et de la manne : Ex 15, 22 – 16
- le don de la Loi de l’Alliance et naissance du peuple de Dieu : Ex 20
Le désert : lieu révélateur du péché et du cœur de l’homme
Durant les 40 ans au désert, le peuple pécha en maintes circonstances, mais, maintes fois aussi le Seigneur l’enseigna sur ce qu’Il attendait de lui, sur ce que c’était que de « garder l’Alliance ». Ouvrez votre Bible et allez relire :
- murmures et lamentations : Ex 16 et Nb 11
- refus d’avancer : Nb 14, 1-9
- contestation du rôle de Moïse et d’Aaron : Nb 16
- bouc emportant les péchés au désert le jour du grand Pardon : Lv 16
Le désert : lieu de conversion et des retrouvailles avec Dieu
C’est au désert que l’homme peut reconnaître qui est son Dieu, se souvenir de tout ce qu’Il a fait pour lui et revenir à Lui dans l’espérance… Ouvrez votre Bible et allez relire :
- reconnaître le salut : Nb 21, 4-9; Dt 1, 31
- reconnaître que Dieu fait vivre : Dt 8, 2; Dt 29, 4; Dt 32, 10
- renouer un amour fidèle : [_REF:221]Os 2, 16-25
- avoir foi dans le Dieu qui sauve : Is 35, 1-7 ; Is 40, 3-5 ; Is 43, 19-20
C’est dans le « désert de Judée » que retentira l’appel à la conversion de Jean le Baptiste (Mt 3, 1-12, Lc 3, 1-20, Mc 1, 2-8). C’est dans le « désert » que Jésus repoussera le diable après avoir jeûné pendant 40 jours et 40 nuits (Mt 4, 1-11 ou Lc 4, 1-13) : il se révèlera, ainsi, comme le Fils obéissant en tout à la volonté du Père. Jésus est donc, aussi, à sa façon, passé par le désert pour nous ouvrir le Royaume, car Dieu n’a pas demandé à son peuple de vivre au désert, mais de traverser le désert pour vivre le Royaume.
Catherine Bizot, Service biblique catholique Évangile et Vie
CONFÉRENCE DU MERCREDI 24/7 : PSAUME 50
17 février, 2015http://www.orval.be/fr/108/Conference-du-mercredi-247-Psaume-50
CONFÉRENCE DU MERCREDI 24/7 : PSAUME 50
3 Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
4 Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.
5 Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
6 Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait.
Ainsi, tu peux parler et montrer ta justice,
être juge et montrer ta victoire.
7 Moi, je suis né dans la faute,
j’étais pécheur dès le sein de ma mère.
8 Mais tu veux au fond de moi la vérité ;
dans le secret, tu m’apprends la sagesse.
9 Purifie-moi avec l’hysope, et je serai pur ;
lave-moi et je serai blanc, plus que la neige.
10 Fais que j’entende les chants et la fête :
ils danseront, les os que tu broyais.
11 Détourne ta face de mes fautes,
enlève tous mes péchés.
12 Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
13 Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.
14 Rends-moi la joie d’être sauvé ;
que l’esprit généreux me soutienne.
15 Aux pécheurs, j’enseignerai tes chemins ;
vers toi, reviendront les égarés.
16 Libère-moi du sang versé, Dieu, mon Dieu sauveur,
et ma langue acclamera ta justice.
17 Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange.
18 Si j’offre un sacrifice, tu n’en veux pas,
tu n’acceptes pas d’holocauste.
19 Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé ;
tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé.
20 Accorde à Sion le bonheur,
relève les murs de Jérusalem.
21 Alors tu accepteras de justes sacrifices, oblations et holocaustes ;
alors on offrira des taureaux sur ton autel.
Commentaire du Psaume 50 (51)
J’aborde immédiatement le texte, verset par verset.
Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
Selon ta grande miséricorde, efface mon péché. (v.3)
Comme souvent dans les psaumes, les premiers mots donnent le thème (et le ton). Pitié… pour moi, mon Dieu… c’est la prière d’une seule personne et cette prière concerne cette personne même, dans sa propre réalité intime. C’est du moins la première impression. Il est vrai que sans individus il n’y a pas de communauté. Mais il est vrai aussi que l’individu contribue à faire la communauté. L’homme est un être social. Le psaume nous l’apprendra et nous le verrons vers la fin.
Apparemment la relation entre Dieu et le psalmiste est brisée par quelque chose de grave. Le psalmiste demande donc pardon. Le mot pitié, dans le langage biblique, n’a pas la même résonance négative que dans le français courant. En français, le mot pitié a une connotation un peu négative. Il sonne paternaliste. Mais, dans le langage biblique, le mot veut dire : com-passion (souffrir avec). Le psalmiste compte sur Dieu parce qu’il sait que Dieu est amour et compassion .
La compassion est le fleuron, la forme la plus achevée de l’amour. Dans ce premier verset ce n’est pas l’image du Dieu juge qui est mise en avant (pas encore parce qu’il viendra bientôt).
Il est clair que le psalmiste veut être libéré de quelque chose. Le mot « effacer » est en effet repris par des synonymes dans le verset suivant. L’image est surtout celle de l’eau qui lave et purifie :
Lave-moi tout entier de ma faute
Purifie-moi de mon offense. (v.4)
Purifier renvoie aux rites de purification dans l’eau courante. Il faut sentir ce que veut dire être lavé entièrement, être plongé dans un bain, jusqu’au-dessus de la tête. Aucune partie de l’homme n’est oubliée.
Aussi le mot péché du v. 1 est repris :
Oui, je connais mon péché,
Ma faute est toujours devant moi. (v.5)
La première ligne de ce verset est touchante par sa simplicité. Dans la phrase « oui, je connais mon péché » il n’y a aucune emphase, aucun faux-semblant. L’aveu est confondant. « Oui, je connais mon péché ». Aucune excuse. La deuxième partie du verset dit qu’il s’agit d’une faute très concrète. Le psalmiste se rappelle cette faute constamment. C’est une obsession qui envahit sa vie. Le film tourne tout le temps devant ses yeux. Mais de quoi s’agit-il ? Nous ne le savons pas encore et le psalmiste ne semble pas prêt à le dire. Cela lui pèse trop lourd, sans doute. Il devra aller tout un chemin avant de pouvoir nommer simplement l’acte qu’il a commis. Et c’est vrai pour nous aussi : pour nommer les choses – surtout nos grandes souffrances – il faut quelquefois beaucoup de temps. Et il faut même être déjà un peu au-delà pour pouvoir les dire. Celui qui peut dire sa souffrance est déjà en voie de guérison. Le psalmiste est sur le chemin, au début du chemin. Il avoue… mais quoi exactement ? Il s’identifie à sa faute. Et en cette faute sont concentrées toutes ses autres fautes.
Quelque chose au moins est clair dans la tête et le cœur du psalmiste. Quoi qu’il ait fait, il en connait la dimension de péché. Il fait donc la distinction entre faute et péché. Mais qu’est-ce que cela veut dire ?
Aujourd’hui nous voyons plus facilement la dimension sociale de la faute. Nous la verrons aussi chez le psalmiste, quand il sera capable de dire de quoi il s’agit. Mais ici, il se situe dans sa relation à Dieu :
Contre toi, et toi seul, j’ai péché,
Ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait. (v.6ab)
Cette façon de se positionner est importante du point de vue religieux. Le péché est toujours par rapport à Dieu. Mais chez nous, le péché et la culpabilité psychologique sont mêlés, mélangés. Si certains n’aiment plus parler de péché, ce n’est pas nécessairement parce que leur sens du péché est sous-développé, mais parce qu’ils veulent se libérer d’un sentiment de culpabilité exacerbé. C’est le côté psychologique qui les gêne. Pourtant les deux ne sont pas la même chose. Pour dire la différence en une seule phrase, on peut dire que dans le péché, Dieu est au centre et dans la culpabilité, je suis moi-même au centre. Ou plus concrètement, mon idéal du moi est au centre ainsi que les normes que j’ai intériorisées de l’extérieur, mais avec lesquelles je m’identifie. Comme pour nous donc, chez le psalmiste le sens du péché se mêle très vite avec sa culpabilité. Et cela le mène sur une mauvaise piste. Le Dieu d’amour, du v. 1, devient un juge, et surtout un juge sévère. Le Dieu d’amour se confond avec un gendarme intérieur. Mais c’est en fait le psalmiste qui projette sur Dieu sa propre sévérité envers lui-même. C’est inévitable. Il est bon de le voir dans le psaume et de cheminer avec le psalmiste. Avant d’avoir une vision juste de Dieu, nous traversons quelquefois pendant de longues années une vision de Dieu très mélangée.
Le psalmiste commence donc par dire :
Ainsi tu peux parler et montrer ta justice,
Être juge et montrer ta victoire. (v.6cd).
Le mot « victoire » est un peu discutable comme traduction , mais je garde le texte comme il est. On a l’impression que le psalmiste s’écrase devant un jugement qu’il reconnaît toutefois comme juste. Il attend sa punition. Il accepte les conséquences logiques d’un acte qui n’était pas une peccadille. Nous ne sommes pas devant un scrupuleux. En même temps dans les mots « tu peux montrer ta victoire » on sent une sorte d’inimitié. Dieu est vu comme quelqu’un qui se met en opposition. Il sera l’adversaire qui a raison. Dieu, le Saint par excellence, et le péché sont incompatibles. Le psalmiste reconnaît donc son tort. Il se prépare intérieurement à s’incliner… à s’écraser. Il donne même le droit à Dieu de prononcer un jugement sévère (sans se douter qu’il se trompe peut-être sur Dieu).
Alors, vient un verset qui est très important. Les commentateurs du psaume vont un peu dans tous les sens. Les premiers mots en hébreu sont une exclamation : הֵן (hên) qu’on pourrait traduire par « Oh ! Oh, je sais bien ! Nous voilà ! ». Une autre traduction, mais plus faible, est : MAIS. Ce petit mot significatif n’est pas repris dans notre traduction. On le sent tout de même derrière le texte et la diction du texte peut aider :
[MAIS] Moi, je suis né dans la faute, [oh, je le sais bien ]
J’étais pécheur dès le sein de ma mère. (v. 7)
Comment comprendre cela ? Pauvre mère ! Est-elle responsable de mon péché ? (Et le père alors ?) Sans s’en rendre compte, le psalmiste sort d’un contexte purement religieux (« contre toi et toi seul j’ai péché »), pour entrer dans le cercle infernal de la culpabilité. Mais le psalmiste essaie de se défendre . Il doit le faire pour ne pas se noyer psychologiquement. Il le fait en « rationalisant » la situation, en donnant une raison qui explique sa culpabilité. On est toujours dans la faute. Cela vaut pour tout être humain. On n’est pas né parfait. Je lis ces phrases comme une sorte de défense contre le Dieu juge. Le psalmiste dit : d’accord, je reconnais ma faute. Toi, Dieu, tu es un Dieu qui a raison (bien sûr). Tu as gagné et moi j’ai tort. Seulement, n’oublie pas que je suis né dans la faute, que tout le monde est pécheur et que, par conséquent, tout le monde est coupable. Dès qu’on respire l’air, on respire les microbes. C’est ainsi.
Le psaume aurait pu s’arrêter ici. Le jugement est fait et accepté. Mais avec ce qui est dit, où est la liberté et donc la vraie responsabilité de l’homme ? Et au Dieu Créateur je peux répondre : ce n’est pas ma faute si le monde n’est pas parfait. Tandis que moi, je dois en subir les conséquences. C’est le sentiment de beaucoup de gens. Finalement, ce Dieu juge est-il vraiment juste ?
Le reste du psaume est une réaction contre cette vision des choses, exprimée dans notre verset 6 ; vision très répandue chez les personnes et qui mène souvent au rejet de Dieu. Il faut se débarrasser de ce Dieu qui est en concurrence avec l’homme.
Le psaume nous apprend que Dieu lui-même n’est pas d’accord avec cette façon de voir du psalmiste. Et le psalmiste, au plus intime de lui-même, le sait bien. De là une deuxième fois ce petit mot « mais » par lequel commence aussi la phrase suivante et qui exprime une rectification. « MAIS » est de nouveau la traduction du même mot hébreu qui avait été omis dans la traduction du verset précédent : הֵן (hên : oh, je sais bien). Donc, à la première négation – « mais, tu es un juge injuste » – suit la négation de cette négation, comme pour dire : « mais ce n’est pas ainsi que toi, tu vois les choses ; et tu m’en fais prendre conscience ».
MAIS tu veux au fond de moi la vérité ;
Dans le secret, tu m’apprends la sagesse. (v. 8)
Le psalmiste dit : s’il est vrai que nous, les humains, nous vivons toujours dans un climat d’imperfection, de faute, de péché, toi (Dieu), tu ne te contentes pas de cette explication. Il est trop facile de se cacher derrière un principe général pour ne pas assumer sa propre responsabilité. Toi, Dieu, tu me prends à part et tu me demandes : « et toi ? Où en es-tu ? Comment as-tu vécu dans ce climat général ? Où est ta complicité avec le mal ? En as-tu profité pour faire ce que tu voulais faire en sachant que ce n’était pas bien ? » Le psalmiste comprend. « Tu veux au fond de moi (au plus intime de moi, là où je ne peux plus me cacher derrière des excuses) la vérité (la vraie vérité ; pas la vérité abstraite qui vaut pour tout le monde, mais ce qui vaut pour moi, sans pouvoir me retrancher derrière autre chose). » Et dans ce silence intérieur, dans le recueillement, dans le secret de moi-même, Dieu, tu abordes les choses bien autrement. Tu m’aides à convertir ma situation de coupable en expérience de sagesse (voilà la vraie conversion !). Tu me l’apprends en me faisant traverser mes propres obscurités ! Ainsi donc, Dieu, tu m’obliges à voir ma vie, ma propre vie (pas celle des autres, derrière laquelle je voudrais me cacher). Tu m’apprends ainsi une vérité, qui a la densité de mon histoire, de ma chair, de mon sang (on reviendra sur le sang !). C’est cela : la sagesse.
Immédiatement après en avoir pris conscience, le psalmiste demande :
Purifie-moi avec l’hysope et je serai pur ;
Lave-moi et je serai blanc, plus que la neige. (v. 9)
Nous lisons plusieurs choses dans ce verset. Dans la bible, l’hysope est un arbrisseau utilisé pour asperger avec de l’eau ou du sang . Le verset est une reprise du début : « lave-moi tout entier de ma faute, / purifie-moi de mon offense » (v. 4). Mais la phrase se dit maintenant après une prise de conscience intérieure qu’il y a vraiment une relation personnelle entre Dieu et le psalmiste. Au début du psaume, le psalmiste voulait retrouver son intégrité personnelle, pour être pur à ses propres yeux, pour n’avoir rien à se reprocher. Attitude très narcissique, finalement, qui plaçait le psalmiste au centre. Il luttait avec sa culpabilité psychologique. Ici on a l’impression que le psalmiste se jette dans les bras de Dieu. Il s’abandonne vraiment et il croit (vraiment) que Dieu peut le purifier. Il ne se cache plus derrière la constatation (exacte par ailleurs) que tout le monde est né dans la faute et qu’on est pécheur dès le sein de sa mère. Non, Dieu peut rétablir la relation avec lui ; il peut libérer quelqu’un du péché. L’image est évidemment absolue : je serai pur, totalement. Et blanc, plus que la neige. Mais la pureté n’est pas la perfection. Elle est une relation rétablie !!!! L’eau qui lave et la blancheur de l’homme renouvelé renvoient le chrétien directement au baptême.
La conséquence ne se fait pas attendre :
Fais que j’entende les chants et la fête :
Ils danseront, les os que tu broyais. (v. 10)
Les chants et la fête sont là, indépendamment de la nuit intérieure du psalmiste. Mais il ne les entendait plus. Le soleil brillait en dehors de lui, pour les autres. Intérieurement il était dans les ténèbres. La joie de son entourage ne l’atteignait plus.
Dieu peut guérir et faire qu’on ne voie plus seulement la misère dans l’humanité (oui, la faute est partout – v. 7). Libéré d’un poids intérieur, on peut de nouveau s’ouvrir à l’extérieur, et participer à la joie de vivre qui y existe elle aussi. Pour le psalmiste c’est une vie renouvelée. « Ils danseront, les os que tu broyais ». Que tu broyais ?… image du Dieu vengeur… ? Le psalmiste est toujours en train de s’en distancier. Chaque être humain doit se libérer de cette image. Combien de fois entend-on dire : « Où ai-je mérité cela ? » « Qu’est-ce que j’ai fait pour être puni ? ». Longtemps on a interprété le mal subi ou la maladie comme une punition de Dieu. Et on continue à le faire. On se le dit pour trouver une raison quelque part. Mais avec le psalmiste nous évoluons vers une perception plus juste de Dieu. Au point où nous en sommes dans le psaume, Dieu reste quelque peu ambigu. Est-ce pour cela, par une peur qui traine toujours dans son inconscient, que le psalmiste n’est pas encore capable de nommer sa faute ? Nous ne savons toujours pas pourquoi il demande pardon !
Continuons donc l’approfondissement de notre relation à Dieu. Il y a plusieurs étapes.
Détourne ta face de mes fautes,
Enlève tous mes péchés. (v. 11)
C’est la première fois que le psalmiste parle de la « face » de Dieu. Dans une relation, le visage est important. Ne pas avoir un contact des yeux avec quelqu’un exprime (dans beaucoup de cultures) ou bien la peur (la timidité) ou le mépris (le rejet). D’autre part, on peut détourner la face pour ne pas voir ce qui est laid, comme si on ne l’avait pas vu. C’est la première chose que le psalmiste demande : ne regarde pas. Dans l’ancien testament, on ne peut voir la face de Dieu. Mais pour nous, chrétiens, la situation a beaucoup changé. Jésus est la face de Dieu, tournée vers nous. Une fois qu’on a découvert Jésus, on ne demande plus à Dieu de détourner la face. Au contraire : qu’il me regarde et qu’il regarde mon mal-être avec ses yeux à lui. Si j’y lis de l’exigence, c’est l’exigence de l’amour.
Le psalmiste demande encore autre chose : « enlève tous mes péchés ». En fait, cette demande va beaucoup plus loin. Fais disparaître mes péchés. Et pas seulement ce péché que j’ai toujours devant les yeux comme une obsession. Non, tous les péchés. Une fois de plus ce verset a pour nous, chrétiens, une forte résonnance christique. Là encore, Jésus va au-delà de la demande. Non seulement il « enlève tous mes péchés », mais tous les péchés du monde. « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Avec Jésus, la prière du psalmiste est plus qu’exaucée. Quelqu’un – Jésus – a pris sur lui d’enlever radicalement ce qui nous gênait tellement dans notre rapport à Dieu. Même si nous devons toujours faire notre chemin, refaire le chemin… et le psaume est en train de nous y aider.
Enlève le péché, tous mes péchés. Mais avec le cœur que j’ai, il est sûr que je recommencerai. Alors,
Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
Renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. (v. 12)
Le cœur est le centre de l’humain, là où le cerveau (l’intelligence) et les entrailles (les sentiments) se rencontrent. Le cœur est encore plus que cela. Il est le centre de la décision et de la volonté. Et en plus : le lieu de Dieu, la demeure de l’Esprit. C’est le verset le plus fort du psaume, juste au milieu du texte. Au centre du texte, nous descendons dans le centre de l’homme. Au début du psaume, en se cachant derrière l’idée d’une culpabilité universelle, le psalmiste restait dans la tête. Mais le cœur du psalmiste restait malade. Il était atteint par le mal, objectivement. Il luttait avec sa culpabilité – sentiment subjectif tellement humain. Il est aussi spirituellement malade, parce que sa relation envers Dieu est blessée. De là, une nouvelle demande, plus radicale encore : « Crée en moi un cœur pur ».
Le centre de notre psaume – la lumière dont nous avons besoin – nous renvoie ainsi à la création. Le verbe créer, utilisé dans notre verset, est effectivement le même verbe qu’au début de la bible : בָּרָא (bârâ‘) : « Au commencement Dieu créa le ciel et la terre » . Mon cœur a besoin d’être re-créé. J’ai besoin d’un cœur nouveau. Ezéchiel avait déjà prophétisé: « Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’enlèverai votre cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon esprit : alors vous suivrez mes lois, vous observerez mes commandements et vous y serez fidèles » (Ez 36, 26-27). Il y a plusieurs thèmes que ce chapitre d’Ezéchiel a en commun avec notre psaume . La pureté, dont le psaume a parlé déjà plusieurs fois (v. 4, v. 9) ne peut donc venir que par une nouvelle création, un renouveau spirituel complet. Le cœur pur n’est pas tellement un cœur lavé de l’impureté, mais un cœur sans mélange, qui est dirigé uniquement vers Dieu. Pensons aux Béatitudes : « heureux les cœurs purs ; ils verront Dieu » (Mt 5, 8). Ceci est une nouveauté radicale.
Le psalmiste demande aussi que cette nouveauté demeure et ne soit pas quelque chose d’un instant : « raffermis au fond de moi mon esprit ». Que mon esprit soit solidement dirigé vers Dieu. Le psalmiste introduit ici un nouveau mot, important : l’esprit (ruah). La ‘ruah’ (au féminin) ne désigne pas l’esprit au sens d’intelligence (‘nous’ en grec), mais le souffle (‘pneuma’ en grec ; il s’agit du souffle qui traverse les poumons). Il faut du souffle pour que ce retournement personnel dure et pour poursuivre sur le bon chemin.
Ainsi, pas seulement un nouveau cœur, mais aussi un nouvel esprit/souffle. Dans notre verset, il s’agit bien de « mon esprit/souffle », le mien. Si Dieu crée quelque chose de nouveau en moi, ce n’est pas pour m’aliéner, pour me désapproprier de moi-même. Au contraire, c’est pour que je sois enfin moi-même (c’est le péché qui est une aliénation !). Et cet esprit/souffle, qui est le mien – qui est moi – est en même temps reçu comme une nouvelle création, qui ne vient pas de moi. Un organe nouveau qui m’introduit dans la relation avec Dieu et qui fait de cette relation un cœur à cœur. Bien sûr je ne veux plus perdre cette relation :
Ne me chasse pas loin de ta face,
Ne me reprends pas ton esprit saint. (v. 13)
La face revient. À l’inverse du verset qui disait « détourne ta face de mes fautes », maintenant il est clair que Dieu continue à me regarder. Mais je ne veux pas être chassé de sa face. Moi, chrétien, je ne peux plus me passer du visage de Jésus. Être chassé me rappelle aussi l’épisode qui suit immédiatement la création et la chute : Dieu chassa Adam et Eve du paradis. Mon paradis, c’est d’avoir trouvé la face de Dieu, la face de Jésus, grâce au cœur re-créé. Être chassé loin de lui serait comme être chassé hors du paradis. Mon paradis, c’est la relation à Dieu. « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ » (Jn 17, 3).
Nous rencontrons ici les trois personnes de Dieu, dont les chrétiens ont compris petit à petit qu’Il est communion dans la Trinité : on s’adresse à Dieu-Père, en lui demandant de ne pas être chassé de sa face (Jésus) et de ne pas perdre sa Ruah, son Esprit/Souffle. Le Souffle de Dieu, l’Esprit, est le principe de toute vie (en même temps physique et spirituelle, comme on le voit dans le récit de la création). Le psalmiste est maintenant entré dans une toute nouvelle réalité : celle de sa relation à Dieu. Il le fait comme un homme nouveau. Nous dirons : dans l’Homme Nouveau qui est Jésus, par le baptême.
C’est ce que nous appelons le salut. Le psalmiste le dit d’ailleurs dans le verset suivant :
Rends-moi la joie d’être sauvé ;
Que l’esprit généreux me soutienne. (v. 14)
Le salut, être sauvé, va ensemble avec la joie. Le salut c’est être unifié, réconcilié, intégré. En néerlandais (comme en allemand), le mot pour salut est « Heil », qui vient de « heel » (entier, réunifié) .
Quand l’homme est unifié, en harmonie, il est heureux. Mais, une fois de plus, le psalmiste demande que ce bonheur reste. C’est pourquoi il a besoin du soutien de l’esprit généreux. Littéralement c’est la joie du salut, du sauvetage. Le salut, c’est יֶשַׁע יֵשַׁע (yesha‛ yêsha‛). Le prénom ישוע (Iéshua) – Dieu sauve – est le prénom même Jésus en hébreu.
L’esprit me donne de la dignité, de la noblesse. L’esprit est appelé généreux. « Généreux » veut dire ici, magnanime, volontaire, libre. Je traduirais par « bien disposé ; bien-veillant ». C’est l’esprit qui me permet d’être libéré de moi-même et donc de me donner aux autres. Je me rends disponible. Pensons à la liberté de Jésus dans son amour jusqu’au bout. Jésus a dit aussi : « Tout homme qui commet le péché est un esclave. Mais…si le Fils vous affranchit, vous serez vraiment libres » (Jn 8, 34-36). La liberté est assentiment. Notons le jeu entre « mon esprit » et l’Esprit Saint. En fait, les deux vont ensemble . Mon esprit est d’autant plus le mien qu’il est habité par l’Esprit Saint. Le salut signifie que nous sommes rendus à nous-mêmes.
La générosité, le don libre de soi, doit nécessairement déborder sur les autres. Celui qui est généreux est tourné vers l’extérieur. L’Esprit qui travaille à l’intérieur, dans le secret, au fond du psalmiste devient communication :
Aux pécheurs, j’enseignerai tes chemins ;
Vers toi, reviendront les égarés. (v.15)
Ce qu’on a reçu comme guérison ne peut pas rester privé. On veut aider les autres à trouver les chemins de la vie, eux aussi. Pour le Juif, « tes chemins », ce sont les recommandations de Dieu comme on les trouve dans la bible (notamment dans la Thora). Ce sont les paroles de vie, de la part de Dieu. Pour nous, les chrétiens, ce sont les chemins de l’amour comme Jésus nous l’a appris. On devient intermédiaire soi-même, passeur ; on devient messager, « missionnaire », envoyé en mission. On veut travailler à l’unification des autres : l’unité en eux-mêmes et par le fait même, l’unité entre les personnes. Avec le pardon naît une vie nouvelle tournée vers les autres. Dieu continue à écrire l’histoire à travers la fragilité de ceux qu’il envoie. Le pécheur pardonné est le seul à comprendre ce qu’il avait perdu.
Nous sommes déjà assez loin dans notre cheminement spirituel (chemin sous la conduite de l’Esprit, comme le psalmiste l’a demandé : « renouvelle mon esprit », « ne me reprends pas ton esprit saint », « que l’esprit généreux me soutienne »). Petit à petit le psalmiste s’est libéré de la culpabilité qui l’enchainait à lui-même pour être en relation avec Dieu, pour être devant sa face, pour entendre de nouveau les chants et la fête autour de lui. Maintenant seulement il est capable de nommer son péché qui l’a mis en route. Il peut dire enfin le mot qui est le seul vrai et simple et concret. Un mot de vérité, qui, parce qu’il est vrai, libère. Le psalmiste a pris suffisamment de distance par rapport à lui-même – il se sent suffisamment en confiance avec Dieu – pour pouvoir dire :
Libère-moi du sang versé, Dieu, mon Dieu sauveur (v. 16a).
Le psalmiste est… un meurtrier. (C’est l’interprétation traditionnelle). Il a versé du sang. C’est un assassin. Maintenant il est capable de le dire, il peut nommer sa faute. Pour lui, être sauvé signifie être libéré du sang versé. Voilà l’énormité de l’acte, un acte qui est bien le sien, qui n’a plus rien à voir avec le fait que, « bah, oui », tout le monde est né dans la faute et on est pécheur dès le sein maternel. Tout le monde n’est pas pour autant assassin ! Dans cette situation tout à fait particulière, Dieu devient aussi plus que jamais particulier : « Dieu, mon Dieu sauveur », et pas seulement le Dieu de tout le monde. Une fois de plus, Dieu sauveur est le sens du nom de Jésus.
Nous devons arriver, un jour – espérons sans faire de crimes majeurs – à cette confession de foi, que nous trouvons dans la bouche de saint Paul : « le Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi » (Gal 2, 20). De la part de Paul qui n’a jamais connu Jésus de son vivant (comme nous d’ailleurs) c’est aussi une énormité ; surtout quand on se rappelle que Paul a poursuivi et assassiné des chrétiens !
Le verset – « Libère-moi du sang versé » – a fait attribuer ce psaume à David. David a volé Bethsabée, la femme d’Urie, pour coucher avec elle. Mais pour garder Bethsabée, David a fait tuer Urie, son époux. Urie était pourtant un de ses plus fidèles collaborateurs. Le prophète Nathan s’indignera pour tout cela fortement contre David (1Sam 11-12).
La libération de son crime fait dire au psalmiste (David) des paroles tout de même surprenantes (la deuxième partie du même verset) :
Et ma langue acclamera ta justice. (v. 16b)
N’est-ce pas choquant ? Où est la justice là-dedans ? Nous sommes certainement très loin du juge dont le psaume parlait au début, ce juge écrasant. Mais de là à appeler encore juste quelqu’un qui justifie un assassin, n’est-ce pas aller trop loin dans l’autre sens ? Cette soi-disant justice ne restitue pas la vie à Urie et ne redonne pas son mari à Bethsabée ! C’est irréaliste. Pensons (pour les Belges) à toute l’indignation dans l’affaire Dutroux et aux réactions suite à la libération conditionnelle de sa femme, Michèle Martin. Pour entendre ceci, nous préférerions que le psalmiste ait parlé de peccadilles. Mais dans une affaire aussi sérieuse ? C’est révoltant. Et qu’il s’agisse de David, ne fait qu’aggraver la situation (c’est ce que le prophète Nathan avait bien compris par ailleurs).
En fait nous sommes passés d’une justice vindicative (il faut condamner l’homme pécheur) à une justice de grâce (Dieu supprime le péché et recrée l’homme ; chez Lui il y a la gratuité à l’excès) . Mais ce n’est pas au psalmiste de s’en vanter. Le psalmiste l’a compris immédiatement. Oui, il a parlé trop vite et à la légère. C’est pourquoi il rectifie le tir :
Seigneur, ouvre mes lèvres,
Et ma bouche annoncera ta louange. (v. 17)
Si Dieu n’ouvre pas ses lèvres, rien n’en sortira. Mais si Dieu ouvre ma bouche, ce sera pour faire une annonce : l’annonce de la louange de Dieu (même pas de la libération du psalmiste, parce qu’il n’y a pas de quoi être vraiment fier). D’autre part, le psalmiste est vraiment capable de montrer le chemin aux pécheurs (comme il le disait au v. 15), parce qu’il est allé lui-même par ce chemin. Il ne présume plus de ses propres forces. Il sait qu’il ne peut pas se racheter lui-même. Mais il vit maintenant avant tout de sa relation à Dieu, « mon Dieu sauveur » (v. 16). Il n’a aucun mérite devant Dieu.
Un grand pas supplémentaire a été fait. Pas de mérite, pas de donnant-donnant. Le psalmiste sait maintenant, plus intimement que jamais, qu’on ne peut acheter Dieu.
Si j’offre un sacrifice, tu n’en veux pas,
Tu n’acceptes pas d’holocauste. (v. 18)
Nous sommes tout à fait dans la spiritualité des prophètes. Jésus rappellera à plusieurs reprises la citation d’Osée (6, 6) : « C’est la miséricorde que je veux, et non le sacrifice » (Mt 9, 13 ; 12, 7) . Le psaume précédent au nôtre – Ps 49 (50) – est d’ailleurs un long réquisitoire contre le peuple qui pense être juste à cause des sacrifices.
Le psalmiste a compris de quoi il s’agit, mais il l’a appris à travers la chute, l’échec, et l’humiliation :
Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé ;
Tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé. (v. 19)
Nous ne sommes pas devant un Dieu sadique qui veut que l’homme s’humilie pour être accepté. « L’esprit brisé » et « le cœur brisé et broyé » parlent de l’orgueil, de la prétention. Le psalmiste pensait pouvoir mépriser la loi. Il pouvait donc minimaliser l’importance de ses actes injustes. Maintenant ses yeux se sont ouverts et il voit tout le mal qu’il a fait. Cette humiliation le conduit vers la vraie humilité, celle qui aide à s’abandonner à Dieu et à entrer en même temps dans une relation de compassion avec le prochain.
Il se rend compte qu’avec son injustice, il a contribué à la destruction de sa communauté, de la « ville de Jérusalem ».
Le psaume montre aussi que le péché n’est pas effacé magiquement. Il laisse des traces profondes dans l’histoire et dans la conscience du psalmiste. Le pécheur pardonné reste encore fragile et vulnérable ; mais il est devenu plus humain . Nul ne peut consoler s’il n’a jamais souffert.
Accorde à Sion le bonheur,
Relève les murs de Jérusalem. (v. 20)
Selon certains commentateurs ce verset et le suivant, le dernier du psaume, sont un rajout. Peu importe pour nous. Ils font partie de notre texte. Le cœur sauvé, renouvelé qu’a reçu le psalmiste lui permet maintenant de s’ouvrir à la communauté, à la ville de Jérusalem, ville de paix. L’image est celle d’une ville ruinée. Et la ruine de Sion a eu lieu en 587 avant le Christ. Nous sommes donc historiquement parlant, à une époque bien plus tardive que celle de David (qui a vécu vers l’an 1000 a. JC.). Mais peu importe. Tout le processus que j’ai décrit de la culpabilité jusqu’au vrai sens du péché, le passage d’un Dieu jaloux au Dieu de vie, aide à la construction de la communauté. « Relève les murs de Jérusalem ». Qui les relève ? Dieu ? Le psalmiste bien sûr. Mais il s’appuie sur le pardon de Dieu grâce auquel il ne se noie plus dans le remords, comme au début du psaume. Sa guérison spirituelle lui permet maintenant de vivre un authentique repentir (volontaire et actif, au niveau moral) en travaillant à la reconstruction de sa communauté. Il n’est plus paralysé par sa faute. Au contraire, il assume sa responsabilité. Collaborer avec Dieu à la reconstruction de la ville est ainsi, dans la vision prophétique, de la part du psalmiste, un acte de réparation.
« La joie d’être sauvé » (v. 14) s’étend maintenant au peuple : c’est « le bonheur de Sion » (v. 20). On ne reste pas dans un monde individualiste et spirituel. Selon les prophètes c’est l’infidélité du peuple qui avait déclenché la destruction de Jérusalem et l’exil. L’homme sauvé et justifié pratique la justice. Ainsi il reconstruit la cité, il travaille pour la société humaine, il relève des murs qui mettent le prochain en sécurité. Cette ouverture sur la société plus large nous fait poser la question aujourd’hui, quel est le lien entre notre culpabilité personnelle d’une part et d’autre part le mal structurel, le péché collectif qui menace la création et l’humanité ?
Et alors seulement, les vieux rites peuvent avoir de nouveau un sens.
Alors tu accepteras de justes sacrifices, oblations et holocaustes ;
Alors on offrira des taureaux sur ton autel. (v. 21)
Le peuple (purifié dans ses membres) peut maintenant vivre de façon authentique l’Alliance. Celle-ci a effectivement prévu des sacrifices. Quand le peuple est fidèle, le rite est (ou redevient) agréable à Dieu. Evidemment, ce n’est pas dans la société d’aujourd’hui qu’on va encourager le sacrifice des animaux comme c’était le cas en Israël. Il me semble que l’idée à retenir est que des attitudes qui pourraient être seulement formalistes, trouvent un nouveau sens, leur vrai sens. Exactement comme Jésus n’a pas aboli les rites du temple (il y assistait et ses disciples l’ont fait aussi longtemps qu’ils n’étaient pas exclus de la synagogue). Et pourtant : quelle distance énorme entre la liberté de Jésus et le formalisme existant.
Des remarques qui auraient pu venir en introduction :
Il est bon d’approfondir les psaumes dans le cadre d’OJP. C’est que les psaumes sont déjà une prière. Ils nous aident donc à vivre notre relation à Dieu sous forme de prière… c’est précisément ce qu’OJP se pose comme but. Nous essayons de faire une expérience de la prière. Et la meilleure façon est d’entrer dans un texte concret. Aujourd’hui nous avons regardé d’un peu plus près un des psaumes les plus connus, les plus priés aussi : le Psaume 50 (51).
J’ai été guidé par quelques options qu’il est bon de rappeler plus clairement.
J’ai pris le texte du Ps 50 (51) comme nous le lisons en français pendant l’office à Orval, qui est la version œcuménique du texte liturgique. Je n’en discute pas la valeur. Comme tout texte il a ses limites. Cela vaut pour n’importe quelle traduction. Mais une fois qu’on a un texte devant soi, dans le cadre de la lectio, le but est de prier sans se laisser encombrer par des réflexions qui nous replient finalement sur nous-même au lieu de diriger notre attention vers Dieu. Dans la lectio, la première signification du texte est d’être comme un intermédiaire entre Dieu et nous. Dans la bible, Dieu nous donne des mots pour que nous puissions lui parler. Quand on rencontre un ami, on s’intéresse à sa personne plus qu’à ce qu’il dit ou ce qu’il fait. On s’intéresse à sa façon de parler et à son travail à cause de sa personne. Et pas l’inverse. On va de cœur à cœur ; pas d’idée en idée. Si on discute fermement, c’est encore d’abord pour le plaisir d’être ensemble. Nous nous situons dans l’amitié à un autre niveau. Dans un beau texte sur la lectio , Guillaume de Saint-Thierry, moine cistercien et théologien très instruit du 12e siècle, fait la distinction entre lectio et étude. Il dit que la lectio et l’étude sont comme l’amitié par rapport à l’hospitalité (les deux sont nécessaires, mais l’amitié est beaucoup plus intime) ; ou comme l’affection fraternelle en comparaison avec une simple salutation occasionnelle. Nous sommes à OJP pour faire l’expérience de l’amitié et l‘affection fraternelle ; pas pour séjourner quelques jours dans un hôtel où nous ne connaissons personne et pour nous contenter d’un geste de salutation à des inconnus.
Mon approche n’était pas exégétique (l’étude de la bible), aussi importante soit celle-ci. J’ai toutefois confronté mes réflexions à des études sérieuses. Le point de départ est resté le texte lui-même. Saint François demande de lire sa Règle « simplement et sans glose » , sans trop d’idées ajoutées. Ainsi, ma première option était de lire le texte, comme il nous est donné, offert dans la liturgie.
Deuxième option : s’attacher au texte ne veut pas dire seulement avoir de l’attention pour les mots utilisés. Un texte est plus qu’un assemblage de mots. Dans un texte il y a toute une dynamique. Et celui qui ne le voit pas, ne comprend pas le texte. Si un mot nous permet de faire une expérience spirituelle, c’est parce qu’il est utilisé dans le contexte plus large d’une phrase et du texte dans son ensemble. Dans le psaume 50 (51), le thème est celui de la faute et de la culpabilité. C’est une réalité avec laquelle chacun et chacune d’entre nous est confronté. Tout être humain – croyant ou pas – l’expérimente dans sa vie. Mais dans notre cas, le psalmiste se situe devant Dieu. Interviendra alors une autre notion : celle du péché. Aujourd’hui on n’aime pas trop parler du péché, peut-être parce que les générations précédentes en ont trop parlé. Le psaume nous aide, j’espère, à situer les choses de façon plus juste.
Voilà les deux principes : le texte comme il est (donc les mots comme ils se présentent) et la dynamique dans le texte.
Dans ce psaume, nous touchons de près la dimension psychologique et spirituelle de l’homme. Autant dire que le niveau spirituel se construit sur le niveau psychologique. Il doit le prendre en compte et ira en le renforçant ou en le guérissant. Le sujet est vaste.
Dans notre psaume, on part d’une culpabilité narcissique (le psalmiste est plus occupé de l’image de lui-même que de sa relation à Dieu). Puis, il passe par la phase névrotique : que Dieu me punisse. Le psalmiste est déjà préparé à encaisser la chose et à s’y conformer. Ces sentiments suscitent les désirs d’être purifié, de (re)devenir absolument pur. Heureusement, le psalmiste, à travers tous ces passages, ne rompt jamais la relation à Dieu. Il évolue petit à petit vers une vraie alliance de désir. Il sort d’une culpabilité pathologique pour vivre une vraie conversion. Il touche son vrai désir, qui élargit son existence vers Dieu en même temps que vers les autres et la communauté.