Archive pour le 14 janvier, 2015

Musicians, ca 1600

14 janvier, 2015

Musicians, ca 1600 dans images sacrée 1280px-Gerard_van_honthorst_-_the_concert_-_1623

http://en.wikipedia.org/wiki/Renaissance_music

 

LOUEZ DIEU DANS SES SAINTS ! (Ps 150, 1)

14 janvier, 2015

http://www.monastere-transfiguration.fr/synaxaire/introduction_synaxaire.html

LOUEZ DIEU DANS SES SAINTS !

(Ps 150, 1)

Lorsqu’il fut transporté en esprit devant le trône de Dieu préparé pour le jugement de toute chose à la fin des temps, l’Apôtre saint Jean dit : Puis j’entendis comme la voix d’une foule nombreuse et comme la voix de grandes eaux, et comme la voix de puissants tonnerres qui disaient : Alléluia, car le Seigneur, notre Dieu le Tout-Puissant, a pris possession de la royauté. Réjouissons-nous, soyons dans l’allégresse et rendons lui gloire, car les noces de l’Agneau sont venues, son Épouse est parée, et il lui a été donné de se vêtir de lin fin d’une blancheur éclatante – le lin fin, ce sont les œuvres des saints (Ap 19, 6-8). Cela n’arrivera pas seulement à l’aube de la Résurrection, mais aujourd’hui déjà, la sainte Église, l’Épouse du Christ, s’est revêtue, comme d’un habit de pourpre et de lin fin, du sang des martyrs, des larmes des ascètes, de la tempérance des vierges, de la proclamation des apôtres, des écrits des docteurs, de la miséricorde des justes… Elle est ornée de toutes les vertus et de toutes les grâces que le Saint-Esprit a fait éclore dans les saints, en tout temps et en tout lieu. Qui pourrait dénombrer cette nuée de témoins (Hbr 12, 1) qui nous entoure ? Qui pourrait nommer chacun de ces vivants qui, avec le Christ, par le Christ et dans le Christ ont triomphé de la mort, se sont approchés du trône de Dieu, eux en qui Dieu se réjouit (cf. Is 62, 5) et trouve son repos (ibid. 57, 15) ?
Ils sont devenus concitoyens des anges et frères du Christ. Et lui, tel le soleil se reflétant sur les eaux, apparaît en eux, multiple et unique à la fois. Les saints qui habitent aujourd’hui la Jérusalem céleste, la Terre des Vivants, la Cité du grand Roi, sont les astres innombrables d’un firmament spirituel qu’éclaire le Christ, Soleil de Justice (Mal 4, 2). À mes yeux tes amis ont beaucoup de prix, ô Dieu – chante David le roi-prophète –, je les compte et ils sont plus nombreux que le sable (Ps 138, 17). Les milliers de saints commémorés dans tous les synaxaires et martyrologes d’Orient et d’Occident ne représentent qu’une infime partie de cette grande assemblée (Ps 39, 10). Ce sont les saints qui font l’objet d’un culte public. Mais combien plus nombreux sont ceux qui cachèrent Dieu dans le secret de leur cœur, restant humblement ignorés de tous et protégés de la vaine gloire des hommes. Il y en eut de toutes conditions, en tous temps et en tous lieux : patriarches, prophètes, apôtres, martyrs, confesseurs, évêques, prêtres, diacres, moines et vierges, hommes et femmes, enfants et vieillards, riches et pauvres, princes, prostituées, brigands… Ils ont, par amour de Dieu et au prix de souffrances volontaires, fait éclore en notre nature humaine les fleurs variées de la grâce du Saint-Esprit. À l’un en effet, c’est le discours de sagesse qui est donné par l’Esprit, à un autre, le discours de science selon le même Esprit ; à un autre, la foi dans le même Esprit ; à un autre les dons de guérison dans cet unique Esprit ; à un autre le pouvoir d’opérer des miracles ; à un autre la prophétie, à un autre le discernement des esprits ; à un autre diverses sortes de langues : à un autre l’interprétation des langues. Mais tout cela, c’est l’œuvre de l’unique et même Esprit qui distribue ses dons à chacun en particulier selon son gré. (1 Cor 12, 8-11).
En unissant en sa Personne, par son Incarnation, notre nature humaine, mortelle et pécheresse à sa nature divine, le Seigneur Jésus-Christ nous a ouvert les cieux et nous appelle à l’y suivre, lorsque nous aurons manifesté la gloire de sa divinité dans notre vie, dans les conditions où il nous a placés. Tout chrétien est appelé à la sainteté, en Christ et par le Christ : Soyez saints, car Je suis saint, disait déjà le Seigneur dans la Loi ancienne (Lv 11, 44 ; 1 Pt 1, 16). Tout chrétien, né à la vie nouvelle de l’Esprit par le baptême, est appelé à l’accomplissement de la vocation d’Adam : faire régner ici-bas la gloire de Dieu. Voilà pourquoi il n’est pas un endroit du monde qui ne doive être aspergé du sang des martyrs, baigné des larmes des moines, ou qui ne doive résonner de la prédication de la Bonne Nouvelle. C’est en tout temps et en tout lieu que s’est élevée, que s’élève et que s’élèvera la prière des saints pour le salut du monde. Car, selon le témoignage des premiers Pères, c’est par la prière des chrétiens que le monde peut subsister 1.
Le monde est sanctifié, sauvé, racheté par la présence des saints qui, comme le levain faisant lever la pâte (Mt 13, 33), préparent l’humanité à l’ultime révélation du Seigneur Jésus-Christ. Il viendra dans sa gloire, pour que la lumière de sa divinité resplendisse sans ombre aucune sur son Corps, l’Église. Alors, le nombre des saints devant apparaître sur la terre et dont Dieu seul connaît les noms, qu’il garde mystérieusement inscrits dans le livre de vie de l’Agneau (Ap 21, 27), sera complet. Le monde d’en haut sera consommé 2 et les saints de tous les temps seront réunis dans le Corps unique du Christ. Son union à l’Église-Épouse aura atteint sa plénitude, et l’humanité sera pour toujours la Demeure de Dieu, la Jérusalem céleste (Ap 22). Le Christ, qui se tient présentement caché dans ses saints, rayonnera en eux avec l’intensité de la gloire que, de toute éternité, il a en commun avec le Père et le Saint-Esprit : Afin que tous soient un, comme toi. Père tu es en moi et moi en toi, afin qu’eux aussi soient en nous (Jn 17, 21), dit-il, au moment de s’offrir en sacrifice pour notre salut.
Mais jusqu’à ce jour, la maison de Dieu est encore en cours d’édification. Le Seigneur patiente et temporise, attendant que tous les saints entrent dans la construction, telles des pierres vivantes (1 Pt 2, 4), adhérant, chacun à son tour, au Christ, la Pierre angulaire (ibid. et Is 28, 16), selon la grâce et les qualités qui lui ont été données. Les saints sont tout à la fois un et multiple, et chacun contribue de manière irremplaçable à la constitution du Corps du Christ, comme autant de membres. On pourrait encore les comparer à l’or et aux pierreries ornant la robe de la Reine se tenant à la droite du Seigneur, en vêtements tissés d’or, parée de couleurs variées (Ps 44, 10). Tels des diamants et des pierres précieuses, ils renvoient partout, en rayons multicolores, l’unique lumière du triple Soleil. Mais pour être ainsi pénétrés de lumière, il a fallu auparavant qu’ils soient taillés, ciselés, dégagés de la matière et de ses lourdeurs par le ciseau et le marteau des souffrances, des persécutions, des afflictions de toutes sortes. Ils ont dû passer, comme l’or encore grossier, dans la fournaise des tentations, afin d’être affinés et de resplendir comme nobles joyaux sur la robe de l’Église-Épouse.
Les saints brillent de la lumière de Dieu, ils sont devenus dieux par la grâce du Saint-Esprit, dans la mesure même où, baptisés dans le Christ, ils ont revêtu le Christ (Gal 3, 27). Dans la mesure où, avec le Christ, ils se sont chargés de leur croix (Mt 16, 24) pour crucifier en eux le vieil homme plein de passions, de péchés et d’impuretés, ils peuvent participer aussi à la gloire de sa Résurrection. En communiant à la Passion du Christ par le martyre, l’ascèse, les larmes et la pratique de toutes les vertus évangéliques, les saints ont vaincu la mort avec lui. Ils sont désormais vivants en Dieu, car le Christ a établi en eux sa demeure. Je suis crucifié avec le Christ, nous crient-ils ; ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi… (Gal 2, 20). Le Christ est monté au ciel, mais il n’a pas quitté l’Église terrestre. Le Christ est monté au ciel, mais il nous a envoyé le Saint-Esprit, qui fait de tous les saints autant de christs, de dieux par la grâce. L’œuvre de notre Seigneur Jésus-Christ, et sa Personne elle-même, divine et humaine, sont à la fois répétées et prolongées par la vie des saints dans l’Église, sous l’action du Saint-Esprit.

Des gens, dont le cœur et l’esprit sont insensibles à la vie spirituelle, trouvent les Vies des saints ennuyeuses. « C’est toujours la même histoire », disent-ils. Martyrs, confesseurs, ascètes, vierges et saints laïcs ; qu’ils aient vécu dans les premiers siècles ou hier, en Asie, en Palestine, en Égypte, en Italie, en Afrique ou en Amérique, c’est en effet toujours la même histoire. Tous ont eu un cœur brûlant d’amour pour le Seigneur et ont participé à son sacrifice, s’offrant volontairement à la mort pour avoir part à sa Résurrection. Tous ont été baptisés dans sa mort par le baptême d’eau, par le baptême de sang, par le baptême des larmes, pour que la vie nouvelle de l’Esprit pénètre en eux et que la gloire de Dieu, qui resplendit sur le visage du Christ, demeure dans leur cœur et rejaillisse sur leur corps.
Les saints vivent dans le Christ Jésus et le Christ vit en eux. Dans les saints, Il répète inlassablement, jusqu’à la fin du monde, le mystère unique de sa mort et de sa résurrection, de l’incarnation de Dieu et de la déification de l’homme. Sur les fresques représentant les martyrs et les saints militaires – celles de certains réfectoires du Mont Athos notamment – on constate que si les saints ont des postures, des vêtements et des attributs différents, ils ont à peu près tous le même visage, et ce visage est celui du Christ. Tels sont en effet les saints : identiques en Christ, mais infiniment divers dans leurs caractères personnels et les conditions dans lesquelles ils ont reproduit l’œuvre du Sauveur, dans un lieu et à un moment donnés. Chez les saints toutefois cette reproduction de la Passion du Seigneur n’est pas morne répétition. Elle est toujours nouvelle, toujours originale, toujours unique et contribue de manière irremplaçable à l’édification de l’Église des premiers-nés. Le Seigneur Jésus a ouvert la voie, il a sauvé la nature humaine en mettant à mort dans son propre corps la mort, mais il faut maintenant que chaque personne participe librement à cette œuvre de salut. Ce qui manque aux tribulations du Christ, écrit saint Paul, je le complète dans ma chair au profit de son corps qui est l’Église (Col 1, 24). Ces paroles de l’Apôtre ne signifient pas qu’il manque quoi que ce soit à l’œuvre du Christ et à notre Rédemption, mais seulement que chacun d’entre nous doit communier volontairement et de manière personnelle à sa Passion, pour avoir part à l’héritage des saints dans la lumière de Dieu (ibid.).
Unis au Christ par la foi et la grâce, les saints accomplissent les œuvres du Christ (Jn 14, 12). Habitant en eux par le Saint-Esprit, c’est le Christ lui-même qui accomplit par eux des miracles, convertit les païens, enseigne les secrets de la science spirituelle, réconcilie les ennemis et donne à leur corps la force d’affronter avec joie les plus horribles tortures ; de sorte que l’Évangile ne cesse d’être écrit jusqu’aujourd’hui par les œuvres évangéliques des saints 3. Voilà pourquoi les saints, proches et lointains, anciens et nouveaux, sont pour nous des guides sûrs nous conduisant au Christ qui habite en eux. Devenez mes imitateurs, tout comme je le suis moi-même du Christ (1 Cor 11, 1), nous disent-ils avec saint Paul. Si nous voulons faire resplendir en nous l’image du Christ, nous devons donc souvent tourner nos regards vers les saints pour avoir des exemples vécus et pratiques de la marche à suivre. Le peintre qui désire faire le portrait d’une personne qu’il ne voit pas devant lui, se sert de reproductions, les regarde attentivement, les compare pour s’en inspirer, de même nous faut-il regarder vers les saints, lire leurs Vies, les comparer, pour savoir comment progresser dans la vie en Christ.
Mais, dira-t-on, comment donc imiter ces martyrs qui ont souffert de si terribles tourments, alors qu’il n’y a plus de persécutions ? Comment suivre la voie de ces ascètes qui se sont retirés au fond des déserts pour soumettre leur corps à des privations que personne ne pourrait supporter aujourd’hui ? Cela n’est pas possible. Certes, les conditions géographiques, historiques, sociologiques, etc. qui sont les nôtres sont fort différentes de celles dans lesquelles vécurent nombre de saints dont nous lisons les Vies. Mais est-ce vraiment là une raison pour dire que la sainteté n’est plus possible et succomber à la négligence ou réduire l’Évangile à un simple code moral ? Le Seigneur n’a-t-il pas dit que le Royaume des cieux est objet de violence et que ce sont les violents qui s’en emparent (Mt 11, 12) ? Le langage de la Croix n’a-t-il pas rendu folle la sagesse du monde (1 Cor 1, 20) ? De tels arguments, si raisonnables qu’ils paraissent, ne reviennent-ils pas à réduire à néant la Croix du Christ (idem, 17) en justifiant notre paresse et nos passions ? Les exploits des martyrs et des ascètes sont des réalités historiques, la gloire et l’ornement de l’Église ; et ils ne nous paraissent inaccessibles ou exagérés qu’à cause de notre manque de foi et d’amour de Dieu. Il nous est facile d’écouter l’enseignement de l’Évangile, d’assister à la divine Liturgie, de prier dans notre chambre, mais croyons-nous vraiment que le Royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en puissance (idem 4, 20), et que, par la grâce de Dieu, notre nature humaine peut être élevée au-dessus d’elle-même et accomplir des œuvres qui semblent impossibles à ceux qui sont prisonniers de ce monde ? La lecture des exploits des saints ne porte au découragement que les orgueilleux qui se confient en leurs propres forces ; tandis que, pour les humbles, elle est une occasion de voir leur propre faiblesse, de pleurer sur leur impuissance et d’implorer le secours de Dieu 4. Lisons donc les Vies des saints en psalmodiant avec David : Dieu est admirable dans ses saints, lui le Dieu d’Israël (Ps 67, 35). Tout comme eux, nous n’avons que notre faiblesse à offrir au Seigneur (2 Cor 11, 30). C’est lui qui agit et nous donne la victoire. Ceux qui sont prisonniers de la vaine gloire de ce monde mettent tout leur soin, nous dit saint Jean Chrysostome 5, à orner leur demeure de fresques, de peintures et d’objets précieux; de même, en lisant les Vies des saints, nous faut-il, à nous les fils de la Résurrection, orner la maison de notre âme par le souvenir de leurs souffrances et de leurs exploits, pour la préparer à recevoir le Christ et à être à jamais la demeure du Roi du Ciel.
En lisant assidûment les Vies des saints, en vivant avec tous les saints (Eph 3, 18), en nous promenant chaque jour dans ce jardin spirituel qu’est le Synaxaire, nous trouverons peu à peu certains saints qui attirent davantage notre sympathie, notre émotion, notre affection. Ils deviendront pour nous comme des amis intimes à qui nous aimerions confier nos joies et nos peines, à qui nous demanderions plus spécialement le secours de leurs prières, dont nous aimerions souvent relire la Vie, chanter les tropaires et vénérer l’icône. Ces amis intimes seront pour nous une puissante consolation et des guides privilégiés sur la route étroite qui nous mène au Christ (Mt 7, 14). Nous ne sommes pas seuls sur ce chemin et dans ce combat, nous avons avec nous notre Mère, la Toute-Sainte Mère de Dieu, notre Ange Gardien, le saint dont nous portons le nom et ces quelques amis que nous aurons choisis parmi la grande Assemblée des témoins de l’Agneau. Et si nous trébuchons sous l’effet du péché, ils nous relèveront ; lorsque nous serons tentés par le désespoir, ils nous rappelleront qu’avant nous, et plus que nous, ils ont souffert pour le Christ et goûtent désormais à la joie éternelle. Ainsi, sur le chemin rocailleux de cette vie, ces saints amis nous feront voir un peu de la lumière de la Résurrection. Cherchons donc dans les Vies des saints ces quelques amis intimes et, avec tous les saints, marchons vers le Christ.
Un jour, un moine doux et simple de l’Athos – un de ceux à qui le Christ a promis la terre en héritage (Mt 5, 5) – se préparait, comme d’habitude, à prier le saint du jour avec d’abondantes larmes et de nombreuses prosternations. Mais au moment de regarder son calendrier, il constata qu’il l’avait égaré et n’avait plus aucun moyen de savoir quel était le saint commémoré ce jour-là. Aussi commença-t-il sa prière en disant : « Saint du jour, intercède pour nous ! » Après quelques instants, le saint apparut devant lui et lui révéla son nom : Lucillien [3 juin]. Sans guère s’étonner, le bon vieillard compléta donc sa prière par le nom du saint, mais comme il était un peu sourd et qu’il n’avait pas bien compris le nom, il dit : « Saint Lucien, intercède pour nous ! ». Le saint apparut alors de nouveau et lui dit sur un ton de reproche : « Je ne suis pas Lucien, mais Lucillien », et il disparut, laissant le moine continuer paisiblement sa prière 6.
Un frère demanda à un autre athonite, le Père Abrahamios de Néa-Skitie († 1989) : – « Père, est-ce que tu ne te lasses pas de lire ainsi continuellement le synaxaire du saint du jour ? » L’Ancien lui répondit en souriant : – « Mon enfant, tous les saints, et spécialement les martyrs, il nous faut les aimer et les honorer, car “l’honneur rendu aux saints, c’est l’imitation des saints” 7. Puisque nous sommes incapables et pécheurs et que nous ne pouvons pas les imiter, étudions donc au moins leur Vie, pour ne pas passer notre temps en bavardage. De plus, par la lecture de leur Vie, nous nous les concilions en quelque sorte, pour qu’ils soient nos intercesseurs et nos aides, ici-bas comme lors de notre grand voyage vers les cieux. En outre, en étudiant les Vies des saints, nous voyons nos propres passions dans notre cœur, et il nous est donné l’occasion de lutter contre elles et d’utiliser pour cela les mêmes moyens qu’eux-mêmes ont utilisés. » 8
Ces deux anecdotes illustrent la familiarité que nous devons avoir avec les saints et montrent combien ils sont proches de nous, interviennent dans notre vie quotidienne, nous écoutent dans nos prières, nous reprennent dans nos chutes et nous montrent par d’innombrables signes de leur présence, que notre vie n’est pas vraiment de ce monde, que nous vivons comme des étrangers et des voyageurs entre ciel et terre.
Dans notre vie spirituelle, nous pouvons communiquer quotidiennement avec les saints de trois façons : en chantant leurs hymnes et leur office liturgique, en vénérant leur icône et en lisant leur Vie dans le Synaxaire. S’il est difficile à ceux qui vivent dans le monde de se rendre chaque jour à l’église pour chanter les louanges des saints, tous les chrétiens peuvent cependant chez eux, seuls ou en famille, chanter le tropaire des saints du jour, tous peuvent vénérer leur icône, tous peuvent consacrer quelques instants à lire ou à relire leur Vie dans le Synaxaire. Toutefois, la lecture quotidienne de ces résumés des Vies des saints ne nous sera vraiment profitable que si nous nous approchons d’eux avec les mêmes dispositions que lorsque nous vénérons une icône. Si imparfaites soient-elles, les notices du Synaxaire sont, en effet, dans le domaine du récit ce que sont les icônes dans le domaine de l’image : elles nous rendent le saint présent et peuvent nous apporter autant de grâce que les saintes icônes. Tout dépend de la simplicité de notre cœur. Ainsi, où que nous nous trouvions, quel que soit l’état de notre avancement spirituel, quel que soit notre désir de consacrer notre vie à Dieu, nous trouverons dans le Synaxaire un renouvellement de nos forces et comme un avant-goût de la vie éternelle, où tous les saints danseront avec les anges autour du trône de Dieu en disant :

Saint, Saint, Saint est le Seigneur
le Dieu Tout-Puissant,
Celui qui était, qui est et qui vient ! (Ap 4, 8).

BENOÎT XVI – (LA «VOIE DE LA BEAUTÉ»)

14 janvier, 2015

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2011/documents/hf_ben-xvi_aud_20110831_fr.html

BENOÎT XVI – (LA «VOIE DE LA BEAUTÉ»)

AUDIENCE GÉNÉRALE

Castel Gandolfo

Mercredi 31 août 2011

Chers frères et sœurs,

Ces derniers temps, j’ai rappelé à plusieurs reprises la nécessité pour chaque chrétien de trouver du temps pour Dieu, pour la prière, parmi les nombreuses préoccupations qui remplissent nos journées. Le Seigneur lui-même nous offre de nombreuses occasions pour que nous nous souvenions de Lui. Aujourd’hui, je voudrais m’arrêter brièvement sur l’une des voies qui peuvent nous conduire à Dieu et nous aider également à le rencontrer: c’est la voie des expressions artistiques, qui font partie de la via pulchritudinis — «voie de la beauté» — dont j’ai parlé à plusieurs reprises et dont l’homme d’aujourd’hui devrait retrouver la signification la plus profonde.
Il vous est sans doute parfois arrivé, devant une sculpture ou un tableau, les vers d’une poésie ou en écoutant un morceau de musique, d’éprouver une émotion intime, un sentiment de joie, c’est-à-dire de ressentir clairement qu’en face de vous, il n’y avait pas seulement une matière, un morceau de marbre ou de bronze, une toile peinte, un ensemble de lettres ou un ensemble de sons, mais quelque chose de plus grand, quelque chose qui «parle», capable de toucher le cœur, de communiquer un message, d’élever l’âme. Une œuvre d’art est le fruit de la capacité créative de l’être humain, qui s’interroge devant la réalité visible, s’efforce d’en découvrir le sens profond et de le communiquer à travers le langage des formes, des couleurs, des sons. L’art est capable d’exprimer et de rendre visible le besoin de l’homme d’aller au-delà de ce qui se voit, il manifeste la soif et la recherche de l’infini. Bien plus, il est comme une porte ouverte vers l’infini, vers une beauté et une vérité qui vont au-delà du quotidien. Et une œuvre d’art peut ouvrir les yeux de l’esprit et du cœur, en nous élevant vers le haut.
Mais il existe des expressions artistiques qui sont de véritables chemins vers Dieu, la Beauté suprême, et qui aident même à croître dans notre relation avec Lui, dans la prière. Il s’agit des œuvres qui naissent de la foi et qui expriment la foi. Nous pouvons en voir un exemple lorsque nous visitons une cathédrale gothique: nous sommes saisis par les lignes verticales qui s’élèvent vers le ciel et qui attirent notre regard et notre esprit vers le haut, tandis que, dans le même temps, nous nous sentons petits, et pourtant avides de plénitude… Ou lorsque nous entrons dans une église romane: nous sommes invités de façon spontanée au recueillement et à la prière. Nous percevons que dans ces splendides édifices, est comme contenue la foi de générations entières. Ou encore, lorsque nous écoutons un morceau de musique sacrée qui fait vibrer les cordes de notre cœur, notre âme est comme dilatée et s’adresse plus facilement à Dieu. Il me revient à l’esprit un concert de musiques de Jean Sébastien Bach, à Munich, dirigé par Leonard Berstein. Au terme du dernier morceau, l’une des Cantate, je ressentis, non pas de façon raisonnée, mais au plus profond de mon cœur, que ce que j’avais écouté m’avait transmis la vérité, la vérité du suprême compositeur, et me poussait à rendre grâce à Dieu. A côté de moi se tenait l’évêque luthérien de Munich et, spontanément, je lui dis: «En écoutant cela, on comprend que c’est vrai; une foi aussi forte est vraie, de même que la beauté qui exprime de façon irrésistible la présence de la vérité de Dieu. Mais combien de fois des tableaux ou des fresques, fruit de la foi de l’artiste, dans leurs formes, dans leurs couleurs, dans leur lumière, nous poussent à tourner notre pensée vers Dieu et font croître en nous le désir de puiser à la source de toute beauté. Ce qu’a écrit un grand artiste, Marc Chagall, demeure profondément vrai, à savoir que pendant des siècles, les peintres ont trempé leur pinceau dans l’alphabet coloré qu’est la Bible. Combien de fois, alors, les expressions artistiques peuvent être des occasions de nous rappeler de Dieu, pour aider notre prière ou encore la conversion du cœur! Paul Claudel, célèbre poète, dramaturge et diplomate français, ressentit la présence de Dieu dans la Basilique Notre-Dame de Paris, en 1886, précisément en écoutant le chant du Magnificat lors de la Messe de Noël. Il n’était pas entré dans l’église poussé par la foi, il y était entré précisément pour chercher des arguments contre les chrétiens, et au lieu de cela, la grâce de Dieu agit dans son cœur.
Chers amis, je vous invite à redécouvrir l’importance de cette voie également pour la prière, pour notre relation vivante avec Dieu. Les villes et les pays dans le monde entier abritent des trésors d’art qui expriment la foi et nous rappellent notre relation avec Dieu. Que la visite aux lieux d’art ne soit alors pas uniquement une occasion d’enrichissement culturel — elle l’est aussi — mais qu’elle puisse devenir surtout un moment de grâce, d’encouragement pour renforcer notre lien et notre dialogue avec le Seigneur, pour nous arrêter et contempler — dans le passage de la simple réalité extérieure à la réalité plus profonde qu’elle exprime — le rayon de beauté qui nous touche, qui nous «blesse» presque au plus profond de notre être et nous invite à nous élever vers Dieu. Je finis par une prière d’un Psaume, le psaume 27: «Une chose qu’au Seigneur je demande, la chose que je cherche, c’est d’habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, de savourer la douceur du Seigneur, de rechercher son palais» (v. 4). Espérons que le Seigneur nous aide à contempler sa beauté, que ce soit dans la nature ou dans les œuvres d’art, de façon à être touchés par la lumière de son visage, afin que nous aussi, nous puissions être lumières pour notre prochain. Merci.