Archive pour novembre, 2014

LE MAÎTRE JÉSUS

18 novembre, 2014

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LE MAÎTRE JÉSUS

« Magister vester unus est, Christus ». (Matth. ; XXIII, 11).

N’est-il pas remarquable qu’aux origines mêmes de l’Église, les Apôtres durent mettre les premiers chrétiens en garde contre des doctrines qui tendaient déjà à pervertir l’enseignement du Christ et à opposer à la révélation du Maître de Nazareth une
prétendue tradition, dont la source et les principes demeuraient occultes ? « Prenez garde, écrit Saint Paul aux Colossiens, que personne ne vous séduise par la philosophie et une vaine tromperie, selon la tradition des hommes, selon les rudiments du monde
et non selon le Christ. » (Coloss. II. 8). A son fidèle Timothée, il recommande surtout de « garder le dépôt, évitant les nouveautés profanes de langage et les controverses d’une science qui ne mérite pas ce nom. C’est pour en avoir fait profession, que quelques-uns ont erré dans la foi. » (I Tim., VI, 20-21).
L’Apôtre Jean adresse à ses frères dans le Christ les mêmes avertissements : « quiconque s’éloigne et ne demeure pas dans la doctrine du Christ, n’a point Dieu, celui qui demeure dans cette doctrine a le Père et le Fils. Si quelqu’un vient à vous et n’apporte pas cette doctrine, ne le recevez dans votre maison. » (II. Jean, 9-10). Jésus n’avait-il pas déjà dit aux juifs qui l’entouraient : « vous n’avez qu’un Maître, le Christ » ? (Matth., XXIII, 11). « L’onction que vous avez reçue de Lui, conclut l’apôtre Jean, demeure en vous et vous n’avez pas besoin que personne vous enseigne ; mais, comme son onction vous enseigne sur toutes choses, cet enseignement est véritable et n’est point un mensonge ; et, selon qu’elle vous a enseignés, demeurez en Lui. » (I. Jean, II, 27).
Puisque nous autres, Chrétiens d’Occident, nous n’avons pas d’autre Maître que Jésus, qui est le Christ, essayons en quelques pages de fixer les principaux traits de son enseignement.
A la première tentation du démon dans le désert, Jésus, conduit par l’Esprit, oppose cette phrase de l’Écriture : «L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Matth. IV, 4 ; Deut., VIII, 3). C’est cette parole de Dieu que Jésus déclare être venu apporter aux hommes sur la terre, afin qu’ils ne périssent point, mais qu’ils aient la vie éternelle. Sans doute, ils ont Moïse et les Prophètes ; mais « la Loi et les Prophètes vont jusqu’à Jean-le-Baptiste ; depuis Jean, le Royaume de Dieu est annoncé. » (Luc., XVI, 16). Jésus est envoyé par le Père pour annoncer le Royaume, de sorte que, « si la Loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont. venus par Jésus-Christ ». (Jean, I. 17). Il est « la Voie, la Vérité, la Vie » (Jean, XIV, 6) et « quiconque n’amasse pas avec lui dissipe. » (Luc., XI 23).
Est-ce à dire que la Loi et les Prophètes sont désormais périmés ? « Ne pensez pas, dit Jésus, que je sois venu abolir la Loi et les Prophètes ; je ne suis pas venu les abolir, mais les accomplir. » (Matth., V, 17). Il est Celui qui a été annoncé par les Prophètes et qui doit parfaire l’Oeuvre du grand Législateur. Ne suffit-il pas de scruter les Écritures pour reconnaître en lui la figure du juste souffrant, qui doit racheter les péchés de son peuple ? Aux deux disciples qui l’accompagnent sur le chemin d’Emmaüs il expliquera, « en commençant par Moïse et parcourant tous les Prophètes », tout ce qui, dans les Écritures, le concernait (Luc., XXIV, 27). Aussi aux Pharisiens qui lui reprochent de tromper le peuple, il réplique : « ne pensez pas que ce soit moi qui vous accuserait devant le Père ; votre accusateur, c’est Moïse en qui vous avez mis votre espérance. Car, si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi, parce qu’il a parlé de moi. Mais, si vous ne croyez pas à ses écrits, comment croiriez-vous a mes paroles ? » (Jean, V, 45-47). « Vous scrutez les Écritures, leur dit-il encore, parce que vous pensez trouver en elles la vie éternelle ; or ce sont elles qui rendent témoignage de moi. » (Jean, V, 39).
Et, parce qu’il est venu parmi les hommes, c’est en lui seulement qu’il faut croire maintenant pour posséder la vie éternelle. Moïse ne vous a pas donné le pain du Ciel, crie-t-il aux juifs. ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain du Ciel. » (Jean, VI, 32). Il est ce vrai pain du Ciel, le « pain de vie » : quiconque mangera de ce pain n’aura plus jamais faim et il ne mourra pas, comme sont morts les juifs qui avaient mangé la manne dans le désert : « travaillez donc, non pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui demeure pour la vie éternelle et que le Fils de l’homme vous donnera. Car c’est lui que le Père a marqué d’un sceau ». Ils lui dirent : « Que devons-nous faire pour faire les Oeuvres de Dieu ? » Jésus répondit : « L’Oeuvre que Dieu demande, c’est que vous croyiez en Celui qu’il a envoyé. » (Jean, VI, 27-29).

II Parce que « celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu » (Jean, III, 34), son enseignement s’impose avec une autorité qui porte en elle-même sa propre certitude et exige l’assentiment dans la foi et l’humilité : « le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas » (Marc, XII, 31). On comprend l’étonnement de ses contemporains, lorsqu’ils l’entendirent pour la première fois prêcher dans leurs synagogues « quand le Sabbat fut venu, il se mit à enseigner dans la synagogue et beaucoup de ceux qui l’entendaient, admirant sa doctrine, disaient d’où lui viennent toutes ces choses ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée et d’où vient que de telles merveilles se font par ses mains ? N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie ? » (Marc, VI, 2-3). Car « il les enseignait comme ayant autorité, et non comme leurs scribes et leurs pharisiens. » (Matt., VII, 29).
Ses ennemis, assurément, ne manqueront pas l’occasion qui leur est offerte au Temple, de lui demander ses titres. « Un de ces jours-là, comme Jésus enseignait le peuple dans le Temple et qu’il annonçait la bonne nouvelle, les Princes des prêtres et les Scribes survinrent avec les Anciens et lui dirent : Dites-nous par quelle autorité vous faites ces choses ou qui vous en a donné le droit ? » (Luc., XX, 1). Mais à la question que leur pose à son tour Jésus sur le baptême de Jean ils n’osent pas répondre et se retirent.
A l’égard des juifs qui l’écoutent avec sympathie ou docilité, Jésus est moins réservé et il soulève un des voiles qui cache le mystère de son origine. « On était déjà au milieu de la fête (des Tabernacles), lorsque Jésus monta au Temple et il se mit à enseigner. Les juifs étonnés disaient : « Comment connaît-il les Écritures, lui qui n’a pas fréquenté les écoles ? » Jésus leur répondit : « Ma doctrine n’est pas de moi, mais de Celui qui m’a envoyé. Si quelqu’un veut faire la volonté de Dieu, il connaîtra si ma doctrine est de Dieu ou si je parle de moi-même » (Jean, VII, .14-17). De même qu’il n’est pas venu sur la terre pour accomplir sa volonté, mais celle de son Père, il n’est pas venu pour parler en son nom, mais seulement pour « dire ce que son Père lui a enseigné » (Jean, VII, 28) ; de sorte que celui qui écoute sa parole et croit à celui qui l’a envoyé, est passé de la mort à la vie et n’encourt pas la condamnation. (Jean, V, 24) : quiconque rejette le message de Jésus n’a donc pas Dieu en lui, puisqu’il refuse de croire en Celui que Dieu a envoyé ; et celui-là est déjà jugé.

III L’enseignement du Maître Jésus présente en effet ce caractère particulier de n’être point un enseignement purement spéculatif ou théorique, mais de constituer un jugement : « Celui qui croit en lui n’est pas condamné, mais celui qui ne croit pas est déjà condamné, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Et voici la cause de cette condamnation : la lumière est venue dans ce monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, parce que leurs Oeuvres étaient mauvaises. » (Jean,III, 18-19).
Non point que le Christ soit venu pour juger le monde ; il est venu pour le sauver, et c’est pourquoi il appelle à lui tous les hommes de bonne volonté : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive. Celui qui croit en moi, de son sein, comme dit l’Écriture, couleront des fleuves d’eau vive. » (Jean, VII, 38). Mais celui qui écoute la parole de Dieu n’est-il pas déjà de Dieu ? Mépriser l’envoyé de Dieu, c’est aussi mépriser celui qui l’a envoyé. «Celui qui croit en moi, dit Jésus, croit, non pas en moi, mais en Celui qui m’a envoyé ; car celui qui me voit, voit celui qui m’a envoyé. je suis venu dans le monde comme une lumière, afin qu’aucun de ceux qui croient en moi ne demeure dans les ténèbres. Si quelqu’un entend ma parole et ne la garde pas, moi, je ne le juge pas ; car je suis venu, non pour juger le Monde, niais pour sauver le monde. Celui qui me méprise et ne reçoit pas ma parole a son juge : c’est la parole même que j’ai annoncée ; elle le jugera au dernier jour, car je n’ai point parlé de moi-même ; mais le Père, qui m’a envoyé m’a prescrit lui-même ce que je dois dire et ce que je dois enseigner. Et je sais que son commandement est la vie éternelle. Les choses donc que je dis, je les dis comme mon Père me les a enseignées » (Jean, XII, 44-50).
Parce que la parole qu’il enseigne n’est pas de lui, mais du Père qui l’a envoyé, les juifs sont sans excuse de rejeter son témoignage. Sommes-nous des aveugles,? » répliquent-ils si vous étiez aveugles, leur répond Jésus, vous n’auriez point de péché mais maintenant vous dites : Nous voyons; votre péché demeure. » (Jean, IX, 41). Mais aussi pour entendre et garder la parole du Maître ne suffit-il pas de l’écouter : « celui qui ne m’aime pas ne gardera ma parole… si quelqu’un m’aime, c’est celui-là qui gardera ma parole » (Jean, XV, 23-24). Qui ne connaît la parabole de la semence ? Des auditeurs, les uns entendent la parole, « mais le démon vient et l’enlève de leur coeur, de peur qu’ils ne croient et ne soient sauvés » ; les autres ont reçu la parole avec joie, « mais ils n’ont point de racine : ils croient pour un temps et ils succombent à l’heure de la tentation. » Ceux-ci, après avoir entendu la parole, « s’en vont et la laissent étouffer par les soucis, les richesses, les plaisirs de la vie, et ils ne portent point de fruits. » Ceux-là, enfin, « ont entendu la parole avec un coeur bon et excellent, ils la gardent et portent du fruit avec persévérance » (Luc., VIII, 9 et suiv. ; cf. Matth.,XIII, 18 et suiv. ; Marc., IV, 10 et suiv.).
Garder la parole c’est donc « porter du fruit » ; et le Maître compare celui qui, ayant entendu la parole, la met en pratique « à un homme sage qui a bâti sa maison sur la pierre. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont déchaînés contre cette maison, et elle n’a pas été renversée, car elle était fondée sur la pierre. Mais quiconque entend les paroles que je dis et ne les met pas en pratique, est semblable à un insensé qui a bâti sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et ont battu cette maison, et elle a été renversée et grande a été sa ruine. » (Matth., VII, 24-28, cf. Luc., VI, 47-49).

IV Si le sens général de l’enseignement qu’est venu apporter Jésus ne pouvait laisser place à aucune équivoque, puisqu’il s’agissait expressément de fonder sur cet enseignement un mode de vie, une pratique spirituelle qui assurât aux fidèles la possession de la vie éternelle, il n’est pas douteux cependant que le Maître « enseignait par diverses paraboles, selon que les auditeurs étaient capables de l’entendre. » (Marc, IV, 33). Et il semble qu’aux Apôtres seuls il ait été donné de connaître « le mystère du Royaume de Dieu » (Marc, IV, 10). On a conclu qu’il fallait distinguer, dans l’enseignement de Jésus, une partie ésotérique réservée au cercle étroit de ses familiers et une partie exotérique destinée à ceux « qui sont dehors ».
Il y a pourtant contre cette interprétation, des textes de l’Évangile qui paraissent tout à fait formels. Non seulement, dans une circonstance solennelle de sa vie, lorsque le Grand-Prêtre l’interroge sur sa doctrine, Jésus répond : « J’ai parlé ouvertement au monde ; j’ai toujours enseigné dans la synagogue et dans le Temple, où tous les juifs s’assemblent, et je n’ai rien dit en secret. Pourquoi m’interroges-tu ? Demande à ceux qui m’ont entendu, ce que je leur ai dit, ils savent ce que j’ai enseigné. » (Jean, XVII, 20-21). Mais déjà, auparavant, il avait insisté sur le caractère public de son enseignement : « Apporte-t-on la lampe pour la mettre sous le boisseau ou sous le lit ? N’est-ce pas pour la mettre sur le chandelier ? Car il n’y a rien de caché qui ne doit être révélé, rien de secret qui ne doive venir au jour. » (Marc, IV, 21 -22 ; cf Luc, XI, 23).
Peut-être serait-il permis de reconnaître ici comme une allusion à des doctrines que les Docteurs de la Loi gardaient jalousement cachées, à ceux qu’ils considéraient comme étant « tout entiers dans le pêche ». Que signifie cette parole énigmatique de Jésus… à Nicodème à propos de la renaissance dans l’eau et l’Esprit Saint : « Tu es docteur en Israël et tu ignores ces choses » (Jean, III, 10). Et cette apostrophe aux mêmes Docteurs de la loi : « Malheur à vous, Docteurs de la Loi, parce que vous avez enlevé la clef de la science ; vous-mêmes n’êtes point entrés, et vous avez empêché ceux qui entraient. » (Luc. XI, 52). Si on allume la lampe et qu’on la met sur le chandelier, c’est afin que ceux qui entrent voient la lumière. « Pendant que je suis dans le monde, s’écrie Jésus, je suis la lumière du monde. » (Jean, IX, 5).
Mais, précisément, il faut « entrer » et non point « rester dehors », et à tous ceux qui frapperont » il est bien dit qu’on « ouvrira ». L’enseignement parabolique n’est donc qu’une méthode pédagogique qui a pour fin d’amener plus facilement les auditeurs à la compréhension de la grande Vérité que le Christ est venu apporter sur la terre pour le salut de tous les hommes. Nul n’est exclu que par sa faute du Royaume de Dieu : il suffit de croire pour être sauvé. C’est de la foi à la divinité de Jésus, et non point de l’adhésion à une doctrine secrète, à laquelle seuls quelques privilégiés auraient été initiés, que dépend notre destinée éternelle. Et la condition de cette foi, c’est justement, non point une pénétration de pensée qui est refusée à la plupart des hommes, mais au contraire une simplicité d’esprit qui veut que « quiconque ne recevra pas le Royaume de Dieu comme un petit enfant n’y entrera pas. » (Marc, X, 15 ; Luc, XVIII, 17).

V Est-ce à dire que le Maître de Nazareth nous ait enseigné toutes choses ? « Tout ce que j’ai entendu de mon Père, dit-il à ses Apôtres, je vous l’ai fait connaître ». (Jean, XV, 15). Il avait les paroles de la vie éternelle et jamais homme n’a parlé comme lui. Mais ce n’est pas en vain qu’à plusieurs reprises il a reproché aux disciples, qu’il avait pourtant choisis lui-même, leur lenteur à comprendre : « n’avez-vous donc encore ni sens ni intelligence ? Votre coeur est-il encore aveugle ? Avez-vous des yeux pour ne pas voir, des oreilles pour ne pas entendre ? Et n’avez-vous point de mémoire ? » (Marc, VIII, 17-18). Au moment même où il va se séparer d’eux, après la Cène, il doit reprendre Philippe pour sa sotte question « il y a longtemps que je suis avec vous, et vous ne m’avez point connu ? Philippe, celui qui me voit a vu aussi le Père. Comment peux-tu dire : montre-nous le Père .? » (Jean XIV, 9).
Il avait encore beaucoup de choses à dire, mais les siens ne pouvaient pas les porter ; et c’est pourquoi il leur annonce, l’envoi de l’Esprit-Saint, qui procède du Père et qui demeurera toujours avec eux : « Quand le consolateur, l’Esprit de vérité sera venu, il vous enseignera toute la vérité. Car il ne parlera pas de lui-même ; mais il dira tout ce qu’il aura entendu et il vous révélera les choses à venir. » (Jean, XVI, 12-13). La mission de l’Esprit-Saint achèvera et consommera la mission du Verbe incarné, quant à l’enseignement de l’humanité en marche vers son salut dans l’Église ; Mais cet Esprit glorifiera le Fils de Dieu, « parce que, dit Jésus, il prendra de ce qui est à moi et il vous l’annoncera. Tout ce que le Père a est à moi, C’est pourquoi j’ai dit qu’il prendra de ce qui est à moi et qu’il vous l’annoncera. » (Jean, XVI, 14-15). L’Esprit-Saint poursuivra son oeuvre dans la lumière du Verbe, et ce sont encore les paroles du Maître que nous entendrons dans l’effusion de l’Esprit.
*
Avec Marie, agenouillons-nous, aux pieds du Seigneur pour écouter sa voix, dans le silence et le recueillement de notre âme ; car « une seule chose est nécessaire, et Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point enlevée. » (Luc., X, 42).
Gabriel HUAN.

Champaigne, Sermon sur la montagne

17 novembre, 2014

Champaigne, Sermon sur la montagne dans images sacrée 18%20CHAMPAIGNE%20SERMON%20SUR%20LA%20MONTAGNE
http://www.artbible.net/3JC/-Mat-05,01-07-Sermon_%20on%20the%20mount_sur%20la%20montagne/slides/18%20CHAMPAIGNE%20SERMON%20SUR%20LA%20MONTAGNE.html

HOMÉLIE SUR LA PENTECÔTE – SAINT GRÉGOIRE DE NYSSE

17 novembre, 2014

http://www.cathoweb.org/catho-bliotheque/lecture-spirituelle/docteurs-et-pere-de-l-eglise/homelie-sur-la-pentecote-saint.html

HOMÉLIE SUR LA PENTECÔTE – SAINT GRÉGOIRE DE NYSSE

30 mai 2009 par Jean-Baptiste Balleyguier

Traduction de Serge VIUDEZ

D’après l’édition de la P. G. 46 (695 – 702)

La cithare de David, toujours si harmonieusement accordée avec son sujet, donne au contenu de toute fête un éclat tout particulier. Laissons donc le chant de ce même prophète, entonnant avec le plectre de l’Esprit sur les cordes de la Sagesse, illustrer pour nous la grande fête de la Pentecôte, laissons lui nous dire, sur l’air de cette mélodie divine, le psaume en rapport avec la grâce de ce jour : « Venez crions de joie pour le Seigneur ! ». Mais songeons auparavant à nous enquérir de la nature de cette grâce puis à adapter les paroles du prophète au sujet de notre discours ; qu’il me soit permis aussi, par la même occasion, de vous exposer selon un ordre logique l’opinion sur la matière : au commencement du monde, l’humanité était plongée dans l’erreur au regard de la connaissance de Dieu.
Négligeant le Seigneur de l’univers, les uns adoraient par méprise les phénomènes naturels de ce monde, les autres rendaient un culte aux créatures démoniaques ; toutefois, la plupart étaient d’avis que Dieu résidait dans les images sculptées des idoles et, pour la vénération de ces prétendus dieux, on vit surgir autels, temples, célébrations à mystères, victimes, sanctuaires, statues et autres choses du même ordre. Aussi, c’est d’un œil bienveillant que le Maître de la nature contemplait la corruption naturelle des humains et conduisait progressivement leur vie de l’erreur à la connaissance de la vérité. Ils étaient comme ces personnes tiraillées par une longue faim et revigorées par une prescription médicale, qui ne se jettent pas aussitôt à manger jusqu’à satiété (eu égard à leur faiblesse), mais qui ne se rassasient pleinement, si elles le désirent, qu’une fois en pleine possession de leurs forces, par l’absorption de quantités de nourriture raisonnables. L’exemple vaut aussi pour le genre humain, au moment où il était épuisé par une faim effroyable, et que l’économie divine le fit participer à la nourriture des mystères.
Car ce qui nous sauve, c’est cette force de vie en laquelle nous avons foi sous le nom du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. Cependant, le genre humain, à cause de la faiblesse d’âme qu’avait provoquée sa famine, était incapable d’englober la totalité. D’abord, abandonnant le polythéisme, il s’accoutuma grâce aux prophètes et à la loi, à ne considérer qu’une seule divinité, et à ne concevoir en elle que la seule puissance du Père, incapable qu’il était, comme je l’ai dit, de contenir la nourriture parfaite. Puis le Fils Monogène fut révélé par l’Évangile à ceux que la loi avait préparés. Ce n’est que par la suite que fut accordée à notre nature la nourriture parfaite, en qui réside la vie : l’Esprit Saint. Tel est le sujet de la fête d’aujourd’hui. Aussi nous faut-il, à nous les choreutes de l’Esprit, obéir à la voie du coryphée de ce cœur spirituel : « Venez crions de joie pour le Seigneur ! », or, « le Seigneur est Esprit », comme le dit l’apôtre.

Cinquante jours se sont en effet écoulés aujourd’hui au calendrier de l’année, depuis la fête de Pâques, et c’est à l’heure où nous sommes, la troisième, que fut accordée la grâce indicible. C’est alors que l’Esprit Saint se mêla de nouveau à l’humain, lui qui avait fui loin de sa nature parce qu’elle n’était devenue que chair. Lors de sa descente, il mit en fuite par la force de son souffle les puissances spirituelles du mal, il chassa des airs tous les démons impurs, et les hommes qui se trouvaient au dernier étage de la maison se virent investis par la puissance de Dieu qui avait l’aspect d’un feu. Comment penser, en effet, qu’on puisse prendre part à l’Esprit Saint si on ne réside pas soi-même au sommet de sa propre vie ! Quiconque connaît les choses d’en haut transformera son mode de vie terrestre en mode de vie divin, et ce n’est qu’en devenant l’habitant du dernier étage de cette sublime cité qu’il participe à l’Esprit Saint.
Les Actes des apôtres nous racontent qu’alors que les disciples [du Seigneur] étaient assemblés au dernier étage d’une maison, un feu pur et immatériel, sous la forme de langues, se répartit sur chacun d’eux, autant qu’ils étaient. Et les voilà qui se mettent à parler la langue des Parthes, des Mèdes, des Élamites et des autres peuples, adaptant à leur gré leurs paroles au parler de chaque peuple, « Mais, dans l’assemblée, j’aime mieux dire cinq paroles avec mon intelligence pour instruire les autres que dix mille en langues », ainsi parle l’apôtre. Toutefois à ce moment, il se révéla avantageux que ceux qui allaient prêcher adaptassent leur langue à celle des autres nations, pour que leur prédication ne restât pas sans effet sur ces peuples qui ignoraient [la langue des apôtres]. Cependant maintenant, puisque nous en utilisons une seule, il nous faut partir à la recherche de cette langue de feu de l’Esprit, afin d’éclairer ceux que l’erreur a plongés dans les ténèbres.
Que David nous en indique donc le chemin et avec lui l’apôtre [Paul]. Le psaume, en effet, qui au début nous livrait une parole de joie dans le Seigneur : « Venez crions de joie pour le Seigneur ! », n’est pas la seule voie qui conduit à la glorification de l’Esprit ; mais c’est bien davantage de ce qui va suivre que nous apprendrons son caractère divin : je vais vous exposer les paroles du prophète auxquelles souscrit aussi l’illustre apôtre ; elles nous disent : « Aujourd’hui si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs comme cela s’est produit dans la querelle, au jour de la tentation dans le désert où vos pères me tentèrent ». Se rappelant ces paroles, le divin apôtre s’exprime ainsi : C’est pourquoi, comme le dit l’Esprit Saint … », et ayant dit cela, il cite les paroles du prophète, les appliquant à la personne de l’Esprit Saint. Qui est donc celui que les pères tentèrent dans le désert ? Qui irritèrent-ils ? Apprenez-le donc du prophète : « Ils tentèrent le Dieu Très-Haut ». Or l’apôtre, en introduisant la personne de l’Esprit, lui fait dire ces mêmes mots et affirme : « C’est pourquoi, comme le dit l’Esprit Saint, … , comme au jour de la tentation dans le désert, où vos pères me tentèrent ».

Or de celui que le prophète a appelé le Dieu Très-Haut, le saint apôtre dit qu’il est l’Esprit Saint. Y a-t-il encore des sceptiques ? Considérons alors de nouveau ce qui a été dit : « C’est pourquoi, comme le dit l’Esprit Saint, n’endurcissez pas vos cœurs comme cela s’est produit dans la querelle, au jour de la tentation dans le désert où vos pères me tentèrent ». Le prophète affirme que celui qui a été tenté est le Dieu Très-Haut ; la bouche des Pneumatomaques est donc fermée, elle qui blasphème contre Dieu, alors que l’apôtre et le prophète proclament l’un et l’autre, par ce qu’ils ont dit, la divinité de l’Esprit : le prophète ne dit-il pas : « Ils tentèrent le Dieu Très-Haut », et ne prononce-t-il pas ces paroles : Vos pères me tentèrent dans le désert », comme venant de Dieu pour les Israélites, tandis que le grand [apôtre] Paul les attribue à l’Esprit Saint pour qu’il soit manifeste qu’il est le Dieu Très-Haut ?
Voient-ils vraiment ces gens, ennemis de la gloire de l’Esprit, la langue de flammes contenant les paroles de Dieu illuminer ce qui restait secret ? Ou se moqueront-ils de nous comme de gens ivres de vin doux ? Mais quoi qu’ils disent, suivez mon conseil, mes frères : ne craignez pas leurs injures, ne vous laissez pas abattre par leur mépris. Puisse-t-il un jour leur parvenir aussi ce vin doux, ce vin tout nouvellement pressé et qui jaillit du pressoir, que notre Seigneur a foulé avec l’aide de l’Évangile, pour que nous buvions le sang de sa propre grappe. Puissent-ils eux aussi être emplis de ce vin nouveau, qu’ils appellent vin doux, mais que le mélange des cabaretiers avec l’eau hérétique n’altère pas.
Ils seraient alors entièrement emplis de l’Esprit qui aide ceux qui bouillonnent de ferveur pour lui à rejeter la lie fangeuse de l’impiété. Mais ces hommes ne peuvent recueillir en eux ce vin doux, car ils transportent encore la vieille outre qui est incapable de contenir un vin tel que celui-là et que brise la fissure de l’hérésie. Quant à nous mes frères, « crions de joie pour le Seigneur ! » comme dit le prophète, et buvons la douceur de la piété, comme le recommande Esdras. Remplis de ce bonheur par le chœur des apôtres et des prophètes, crions de joie pour le don de l’Esprit et réjouissons-nous de ce jour qu’a fait le Seigneur, dans Jésus-Christ notre Seigneur à qui appartient toute gloire pour l’éternité. Amen.

NOËL : SARTRE INVOQUÉ DANS L’ÉLOGE DE LA TENDRESSE D’UN CARDINAL DU VATICAN

17 novembre, 2014

http://www.cardinalrating.com/cardinal_266__article.htm

NOËL : SARTRE INVOQUÉ DANS L’ÉLOGE DE LA TENDRESSE D’UN CARDINAL DU VATICAN

Jan 01, 2013

voir le site original:
http://www.lemonde.fr/europe/article/2012/12/24/noel-sartre-invoque-dans-l-eloge-de-la-tendresse-d-un-cardinal-du-vatican_1810068_3214.html

Le cardinal Giafranco Ravasi, « ministre » de la culture du Vatican, a cité, à l’occasion de Noël, un écrit de Jean-Paul Sartre sur la naissance de Jésus et plusieurs images féminines de Dieu dans la Bible, dans une tribune de presse originale consacrée à la « tendresse de Dieu ».
Dans ce texte publié ce week-end dans le quotidien italien Il Sole 24 Ore et repris lundi dans plusieurs médias du Vatican, le prélat italien, connu pour son intérêt culturel à 360 degrés et son foisonnement d’idées, rapporte cette fois un écrit du prisonnier de guerre Jean-Paul Sartre au stalag XX-D où il était interné en Allemagne, et qui a été publié dans Baronia ou le fils du tonnerre (1940).
Le cardinal Ravasi cite ces phrases de Sartre, qui décrit l’étonnement de la Vierge Marie devant l’enfant à qui elle vient de donner le jour : « Elle pense : ce Dieu est mon fils, cette chair divine est ma chair (…) Il me ressemble et Dieu me ressemble. Un Dieu tout petit qu’on peut prendre dans les bras et couvrir de baisers ». Selon le prélat, ce texte de celui qui allait devenir l’écrivain existentialiste le plus célèbre met en lumière une « valeur en déclin dans nos jours un peu vulgaires : la tendresse, et ses déclinaisons diverses, comme la douceur, la délicatesse, l’affection, la modération ».
Mgr Ravasi relève aussi l’importance dans la Bible de la symbolique nuptiale et reproductrice pour décrire l’action de Dieu. Rappelant que le pape Jean Paul Ier avait déconcerté le monde catholique quand il avait évoqué durant son unique mois de pontificat en 1978 le caractère « maternel » de Dieu, le « ministre de la culture » du pape cite plusieurs passages des livres d’Isaïe. Il mentionne notamment l’un d’eux, qui donne de Yahvé, à côté d’un dieu guerrier tout-puissant, l’image d’un Dieu qui « crie comme une femme qui accouche, respirant et aspirant en même temps ».

Baptême de saint Paul par Ananias, peint par Pietro da Cortona (1631, actuellement conservé à Sainte-Marie de l’Immaculée Conception

15 novembre, 2014

Baptême de saint Paul par Ananias, peint par Pietro da Cortona (1631, actuellement conservé à Sainte-Marie de l'Immaculée Conception dans images sacrée 640px-Ananias_restoring_the_sight_of_st_paul_%2834663925%29

http://it.wikipedia.org/wiki/Paolo_di_Tarso

BENOÎT XVI: LE CULTE QUE LES CHRÉTIENS DOIVENT RENDRE À DIEU DANS LA PENSÉE DE SAINT PAUL

15 novembre, 2014

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2009/documents/hf_ben-xvi_aud_20090107_fr.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 7 janvier 2009

LE CULTE QUE LES CHRÉTIENS DOIVENT RENDRE À DIEU DANS LA PENSÉE DE SAINT PAUL

Chers frères et sœurs,

En cette première audience générale de 2009, je désire adresser à tous mes vœux fervents pour la nouvelle année qui vient de commencer. Ravivons en nous l’engagement à ouvrir au Christ notre esprit et notre cœur, pour être et vivre comme ses véritables amis. Sa compagnie aura pour effet que cette année, malgré ses inévitables difficultés, soit un chemin plein de joie et de paix. En effet, ce n’est que si nous restons unis à Jésus, que l’année nouvelle sera bonne et heureuse.
L’engagement d’union avec le Christ est l’exemple que nous offre également saint Paul. En poursuivant les catéchèses qui lui sont consacrées, nous nous arrêtons aujourd’hui pour réfléchir sur l’un des aspects importants de sa pensée, celui qui concerne le culte que les chrétiens sont appelés à exercer. Par le passé, on aimait parler d’une tendance plutôt anti-cultuelle de l’apôtre, d’une « spiritualisation » de l’idée du culte. Aujourd’hui, on comprend mieux que Paul voit dans la Croix du Christ un tournant historique, qui transforme et renouvelle radicalement la réalité du culte. C’est en particulier dans trois textes de la Lettre aux Romains qu’apparaît cette nouvelle vision du culte.
1. Dans Rm 3, 25, après avoir parlé de la « rédemption accomplie dans le Christ Jésus », Paul continue par une formule mystérieuse pour nous et dit ceci: Dieu « l’a exposé, instrument de propitiation par son propre sang moyennant la foi ». Avec cette expression pour nous plutôt étrange – « instrument de propitiation » – saint Paul fait allusion à ce qu’on appelle la « propitiation » du temple antique, c’est-à-dire le couvercle de l’arche de l’alliance, que l’on pensait être un point de contact entre Dieu et l’homme, un point de sa présence mystérieuse dans le monde des hommes. Le grand jour de la réconciliation – « yom kippur » -, cette « propitiation » était aspergée avec le sang d’animaux sacrifiés – un sang qui portait symboliquement les péchés de l’année écoulée au contact de Dieu, et ainsi les péchés jetés dans l’abîme de la bonté divine étaient presque absorbés par la force de Dieu, dépassés, pardonnés. La vie commençait à nouveau.
Saint Paul évoque ce rite et dit: ce rite était l’expression du désir que l’on puisse réellement mettre toutes nos fautes dans l’abîme de la miséricorde divine et les faire ainsi disparaître. Mais avec le sang des animaux, ce processus ne se réalise pas. Un contact plus réel entre faute humaine et amour divin était nécessaire. Ce contact a eu lieu dans la croix du Christ. Le Christ, vrai Fils de Dieu, qui s’est fait vrai homme, a assumé en lui toute notre faute. Il est lui-même le lieu de contact entre la misère humaine et la miséricorde divine; dans son cœur se dilue la masse triste du mal accompli par l’humanité et la vie se renouvelle.

En révélant ce changement, saint Paul nous dit: Avec la croix du Christ – l’acte suprême de l’amour divin devenu amour humain – le vieux culte comprenant des sacrifices d’animaux dans le temple de Jérusalem est terminé. Ce culte symbolique, culte de désir, est à présent remplacé par le culte réel: l’amour de Dieu incarné en Christ et porté à sa plénitude dans la mort sur la croix. Ce n’est donc pas la spiritualisation d’un culte réel, mais au contraire le culte réel, le vrai amour divin-humain remplace le culte symbolique et provisoire. La croix du Christ, son amour à travers la chair et le sang est le culte réel, qui correspond à la réalité de Dieu et de l’homme. Déjà avant la destruction extérieure du temple, selon Paul, l’ère du temple et de son culte est terminée: Paul se trouve ici en parfaite harmonie avec les paroles de Jésus, qui avait annoncé la fin du temple et annoncé un autre temple « pas fait de mains d’homme » – le temple de son corps ressuscité (cf. Mc 14, 58; Jn 2, 19sq). Cela est le premier texte.

2. Le deuxième texte dont je voudrais aujourd’hui parler se trouve dans le premier verset du chapitre 12 de la Lettre aux Romains. Nous l’avons écouté et je le répète encore: « Je vous exhorte donc, frères, par la miséricorde de Dieu, à offrir vos personnes en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu: c’est là le culte spirituel que vous avez à rendre ». Dans ces paroles a lieu un paradoxe apparent: alors que le sacrifice exige généralement la mort de la victime, Paul en parle en revanche en relation avec la vie du chrétien. L’expression « offrir vos personnes », étant donné le concept qui suit de sacrifice, prend la nuance cultuelle de « donner en oblation, offrir ». L’exhortation à « offrir les corps » se réfère alors à la personne tout entière; en effet, dans Rm 6, 13, il invite à « s’offrir soi-même ». Du reste, la référence explicite à la dimension physique du chrétien coïncide avec l’invitation à « glorifier Dieu dans votre corps » (cf. 1 Co 6, 20): il s’agit d’honorer Dieu dans l’existence quotidienne la plus concrète, faite de visibilité relationnelle et perceptible.

Un comportement de ce genre est qualifié par Paul de « sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu ». C’est précisément ici que nous rencontrons le terme « sacrifice ». Dans l’usage courant, ce terme fait partie d’un contexte sacré et sert à désigner l’égorgement d’un animal, dont une partie peut être brûlée en l’honneur des dieux et une autre partie peut être consommée par ceux qui font l’offrande au cours d’un banquet. Paul l’applique en revanche à la vie du chrétien. En effet, il qualifie un tel sacrifice en se servant de trois adjectifs. Le premier – « vivant » – exprime la vitalité. Le deuxième – « saint » – rappelle l’idée paulinienne d’une sainteté liée non pas à des lieux ou à des objets, mais à la personne même des chrétiens. Le troisième – « agréable à Dieu » – rappelle peut-être la fréquente expression biblique du sacrifice « en parfum d’apaisement » (cf. Lv 1, 13.17; 23, 18; 26, 31; etc.).

Immédiatement après, Paul définit ainsi cette nouvelle façon de vivre: tel est « votre culte spirituel ». Les commentateurs du texte savent bien que l’expression grecque (ten logiken latreían) n’est pas facile à traduire. La Bible latine traduit: « rationabile obsequium ». Le même mot « rationabile » apparaît dans la première prière eucharistique, le Canon romain: dans celui-ci, on prie pour que Dieu accepte cette offrande comme « rationabile ». La traduction française habituelle « culte spirituel » ne reflète pas toutes les nuances du texte grec (ni du texte latin). Quoi qu’il en soit, il ne s’agit pas d’un culte moins réel, ou même uniquement métaphorique, mais d’un culte plus concret et réaliste – un culte dans lequel l’homme lui-même, dans sa totalité d’être doté de raison, devient adoration, glorification du Dieu vivant.

Cette formule paulinienne, qui revient ensuite dans la Prière eucharistique romaine, est le fruit d’un long développement de l’expérience religieuse au cours des siècles précédant le Christ. Dans cette expérience, on rencontre des développements théologiques de l’Ancien Testament et des courants de la pensée grecque. Je voudrais au moins montrer quelques éléments de ce développement. Les Prophètes et de nombreux Psaumes critiquent avec force les sacrifices sanglants du temple. Le Psaume 50 (49), dans lequel c’est Dieu qui parle, dit par exemple: « Si j’ai faim, je n’irai pas te le dire, car le monde est à moi et son contenu. Vais-je manger la chair des taureaux, le sang des boucs, vais-je le boire? Offre à Dieu un sacrifice d’action de grâces… » (vv. 12-14). Dans le même sens, le Psaume suivant, 51 (50) dit: « … Car tu ne prends aucun plaisir au sacrifice: un holocauste tu n’en veux pas. Le sacrifice à Dieu c’est un esprit brisé; d’un cœur brisé, broyé, Dieu n’a point de mépris » (vv. 18sq). Dans le Livre de Daniel, à l’époque de la nouvelle destruction du temple par le régime hellénistique (ii siècle av. j.c.), nous trouvons un nouveau pas dans la même direction. Au milieu du feu, – c’est-à-dire de la persécution, de la souffrance – Azarias prie ainsi: « Il n’est plus, en ce temps, chef, prophète ni prince, holocauste, sacrifice, oblation ni encens, lieu où te faire des offrandes et trouver grâce auprès de toi. Mais qu’une âme brisée et un esprit humilié soient agréés de toi, comme des holocaustes de béliers et de taureaux… que tel soit notre sacrifice aujourd’hui devant toi et qu’il te plaise » (Dn 3, 38sq). Dans la destruction du sanctuaire et du culte, dans cette situation de manque de tout signe de la présence de Dieu, le croyant offre comme véritable holocauste, le cœur plein de contrition – son désir de Dieu.

Nous voyons un développement important, beau, mais avec un danger. Il y a une spiritualisation, une moralisation du culte: le culte devient uniquement une chose du cœur, de l’esprit. Mais il manque le corps, il manque la communauté. On comprend par exemple que le Psaume 51 et également le Livre de Daniel, malgré la critique du culte, souhaitent le retour au temps des sacrifices. Mais il s’agit d’un temps renouvelé, d’un sacrifice renouvelé, dans une synthèse qui n’était pas encore prévisible, ou ne pouvait pas encore être pensée.

Revenons à saint Paul. Il est l’héritier de ces développements, du désir du vrai culte, dans lequel l’homme lui-même devient gloire de Dieu, adoration vivante avec tout son être. Dans ce sens, il dit aux Romains: « Offrez vos personnes en hosties vivantes… c’est là le culte spirituel » (Rm 12, 1). Paul répète ainsi ce qu’il avait déjà indiqué dans le chapitre 3: le temps des sacrifices d’animaux, des sacrifices de remplacement, est terminé. Le temps est venu du culte véritable. Mais il y a là aussi le risque d’un malentendu: on peut facilement interpréter ce nouveau culte dans un sens moralisant: en offrant notre vie, c’est nous qui faisons le vrai culte. De cette manière, le culte avec les animaux serait remplacé par le moralisme: l’homme lui-même accomplirait tout à lui seul, avec son effort moral. Et cela n’était certainement pas l’intention de saint Paul. Mais la question demeure: Comment devons-nous donc interpréter ce « culte spirituel, raisonnable »? Paul suppose toujours que nous sommes devenus « un dans le Christ Jésus » (Ga 3, 28), que nous sommes morts dans le baptême (cf. Rm 1) et que nous vivons à présent avec le Christ, pour le Christ, en Christ. Dans cette union – et seulement ainsi – nous pouvons devenir en Lui et avec Lui « hostie vivante », offrir le « culte vrai ». Les animaux sacrifiés auraient dû remplacer l’homme, le don de soi de l’homme, et ils ne pouvaient pas le faire. Jésus Christ, dans son don au Père et à nous, n’est pas un remplacement, mais il porte réellement en lui l’être humain, nos fautes et notre désir; il nous représente réellement, il nous assume en lui. Dans la communion avec le Christ, réalisée dans la foi et dans les sacrements, nous devenons, malgré tous nos manquements, un sacrifice vivant: le « culte vrai » s’accomplit.

Cette synthèse se trouve à la fin du Canon romain, dans lequel on prie afin que cette offrande devienne « rationabile » – que se réalise le culte spirituel. L’Eglise sait que, dans la Très Sainte Eucharistie, le don de soi du Christ, son sacrifice véritable devient présent. Mais l’Eglise prie pour que la communauté célébrante soit vraiment unie au Christ, soit transformée; elle prie, afin que nous-mêmes devenions ce que nous ne pouvons pas être avec nos forces: une offrande « rationabile » qui plaît à Dieu. Ainsi, la prière eucharistique interprète les paroles de saint Paul de manière juste. Saint Augustin a éclairci tout cela de façon merveilleuse dans le 10 livre de sa Cité de Dieu. Je ne cite que deux phrases: « Tel est le sacrifice des chrétiens: Bien qu’étant nombreux, nous ne sommes qu’un seul corps dans le Christ »… « Toute la communauté (civitas) rachetée, c’est-à-dire la congrégation et la société des saints, est offerte à Dieu à travers le Prêtre suprême qui s’est donné lui-même » (10, 6: ccl 47, 27sq).
3. Pour finir, encore une très brève parole sur le troisième texte de la Lettre aux Romains concernant le nouveau culte. Saint Paul s’exprime ainsi dans le chapitre 15: « En vertu de la grâce que Dieu m’a faite d’être un officiant (hierourgein) du Christ Jésus auprès des païens, ministre de l’Evangile de Dieu, afin que les païens deviennent une offrande agréable, sanctifiée dans l’Esprit Saint » (15, 15sq). Je ne voudrais souligner que deux aspects de ce texte merveilleux à propos de la terminologie unique dans les lettres pauliniennes. Tout d’abord, saint Paul interprète son action missionnaire parmi les peuples du monde pour construire l’Eglise universelle comme action sacerdotale. Annoncer l’Evangile pour unir les peuples dans la communion du Christ ressuscité est une action « sacerdotale ». L’apôtre de l’Evangile est un véritable prêtre, il accomplit ce qui est le centre du sacerdoce: il prépare le vrai sacrifice. Et le deuxième aspect: l’objectif de l’action missionnaire est – ainsi pouvons-nous dire – la liturgie cosmique: que les peuples unis dans le Christ, le monde, devienne comme tel gloire de Dieu, « offrande agréable, sanctifiée dans l’Esprit Saint ». Ici apparaît l’aspect dynamique, l’aspect de l’espérance dans le concept paulinien du culte: le don de soi du Christ implique la tendance à attirer chacun à la communion de son corps, d’unir le monde. Ce n’est qu’en communion avec le Christ, l’Homme-modèle, un avec Dieu, que le monde devient tel que nous le désirons tous: miroir de l’amour divin. Ce dynamisme est toujours présent dans l’Eucharistie – ce dynamisme doit inspirer et former notre vie. Et avec ce dynamisme, nous commençons la nouvelle année. Merci de votre patience.

Parabole des Talents

14 novembre, 2014

Parabole des Talents dans images sacrée parabola_dei_talenti

http://www.abbaziadipulsano.org/home/lectio-divina-anno-a/viewcategory/29-archivio-delle-registrazioni-della-lectio-divina-anno-a-20102011

COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT, DIMANCHE 16 NOVEMBRE : PROVERBES 31, 10-31

14 novembre, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/le-dimanche-jour-du-seigneur/commentaires-de-marie-noelle-thabut/386215-commentaires-du-dimanche-16-novembre/

COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT, DIMANCHE 16 NOVEMBRE

PREMIERE LECTURE – LIVRE DES PROVERBES 31, 10-31

10 La femme vaillante, qui donc peut la trouver ?
Elle est infiniment plus précieuse que les perles.
11 Son mari peut avoir confiance en elle :
au lieu de lui coûter, elle l’enrichira.
12 Tous les jours de sa vie,
elle lui épargne le malheur
et lui donne le bonheur.
13 Elle a fait provision de laine et de lin,
et ses mains travaillent avec entrain.
19 Sa main saisit la quenouille,
ses doigts dirigent le fuseau.
20 Ses doigts s’ouvrent en faveur du pauvre,
elle tend la main aux malheureux.
30 Décevante est la grâce, et vaine la beauté ;
la femme qui craint le SEIGNEUR
est seule digne de louange.
31 Reconnaissez les fruits de son travail :
sur la place publique, on fera l’éloge de son activité.

LE PORTRAIT DE LA FEMME IDEALE
Chose étonnante, ce que nous venons d’entendre, ce sont les derniers mots du livre des Proverbes : or c’est un éloge de la femme. Voilà qui prouve que les auteurs bibliques ne sont pas misogynes ! Et pourtant, nous n’avons eu qu’un extrait de ce long poème qui termine le livre ; si vous avez la curiosité de lire le texte en entier, c’est-à-dire l’intégralité des versets 10 à 31 du dernier chapitre des Proverbes, vous verrez que c’est en quelque sorte le portrait de la femme idéale ; l’expression « femme vaillante » du premier verset veut dire « femme de valeur » : celle qu’un homme doit épouser s’il veut être heureux. Or qu’a-t-elle d’extraordinaire ? Rien justement : elle est travailleuse, elle est fidèle et consacrée à son mari et à sa maison, sans oublier de tendre la main aux pauvres et aux malheureux ; c’est tout, mais voilà des valeurs sûres, nous dit l’auteur, le secret du bonheur. Il n’emploie pas l’expression « secret du bonheur », il appelle cela sagesse, mais c’est la même chose.
Et vous savez qu’en Israël, on est bien convaincu d’une chose : le secret du bonheur, Dieu seul peut nous l’enseigner, mais c’est fait de choses humbles et modestes de notre vie de tous les jours. Vous connaissez la célèbre phrase qui est dans ce même livre des Proverbes : « La crainte du SEIGNEUR est le commencement de la sagesse. » (Pr 9, 10). (La crainte au sens d’amour et de fidélité, tout simplement).
Il est intéressant de voir que le livre des Proverbes commence par neuf chapitres qui sont une invitation à cultiver cette vertu de la sagesse qui est l’art de diriger sa vie ; et, à l’autre extrémité de ce livre, se trouve ce poème à la gloire de la femme idéale : celle qui dirige bien sa vie, précisément. La leçon, c’est qu’une telle femme donne à son entourage la seule chose dont Dieu rêve pour l’humanité, à savoir le bonheur.
Alors, ce n’est pas un hasard, bien sûr, si ce poème se présente de manière particulière : car si vous vous reportez à ce passage dans votre Bible, vous verrez que ce poème est alphabétique ; nous avons déjà rencontré des psaumes alphabétiques ; c’est un procédé habituel : chaque verset commence par une lettre de l’alphabet dans l’ordre ; (en littérature, on appelle cela un acrostiche) ; mais il ne s’agit pas de technique, pas plus que dans les psaumes, il s’agit d’une affirmation de la foi ; la femme idéale, c’est celle qui s’est laissé imprégner par la sagesse de Dieu, elle est un reflet de la sagesse de Dieu ; et donc elle a tout compris, de A à Z.

LA BIBLE ET LES FEMMES
Le livre des Proverbes n’est pas le seul à tenir ce genre de discours très positif sur la gent féminine ; on pourrait citer des quantités d’autres phrases de la Bible qui font l’éloge des femmes, du moins de certaines. Il ne faut pas oublier que la Bible a, dès le début, une conception de la femme tout à fait originale ; à Babylone, par exemple, on pensait que la femme a été créée après l’homme (sous-entendu l’homme a pu fort bien se passer de femme) ; au contraire, le poème de la création (le premier chapitre de la Genèse) qui a été rédigé par les prêtres pendant l’Exil à Babylone, justement, affirme clairement : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, mâle et femelle il les créa » (Gn 1, 27). (C’est-à-dire dès le début).
Et le deuxième récit de la création dans la Genèse, et qui est plus ancien, raconte de manière très imagée la création de la femme aussitôt après l’homme ; il la décrit soigneusement comme une égale, puisqu’elle est de la même nature que lui « os de ses os, chair de sa chair » (Gn 2, 18-24). Ils sont tellement égaux d’ailleurs, qu’ils portent le même nom : homme et femme, en français, ne sont pas de la même racine : mais, en hébreu, ils se disent ish au masculin, ishshah au féminin ; ce qui dit bien à la fois la similitude des deux et la particularité de chacun.
Et le texte va plus loin, puisqu’il précise bien que la femme est un cadeau fait à l’homme pour son bonheur : « Le SEIGNEUR Dieu dit : Il n’est pas bon pour l’homme d’être seul (entendez il n’est pas heureux pour l’homme d’être seul), je veux lui faire une aide qui lui soit accordée » ; et le texte hébreu précise « qui soit pour lui comme son vis-à-vis » (Gn 2, 18) ; un vis-à-vis, c’est-à-dire un égal avec lequel on puisse dialoguer, dans un véritable face-à-face avec tout ce que cela comporte de révélation mutuelle, et de découverte de chacun dans le regard de l’autre.
La suite du texte biblique raconte la déchirure qui s’est introduite peu à peu dans des relations qui auraient dû être faites de confiance et de dialogue : le soupçon s’est installé entre l’humanité et son créateur ; et des relations faussées se sont peu à peu elles aussi instaurées entre l’homme et la femme : désormais tout repose non sur le dialogue, mais sur le pouvoir : qui se fait séduction d’un côté, domination de l’autre ; « Ton désir te poussera vers l’homme, dit Dieu, et lui te dominera » (Gn 3,16). Et quand le théologien biblique écrit ce texte vers l’an 1000 av.J.C., il y a des milliers d’années que l’expérience quotidienne vérifie cette analyse.

L’ALLIANCE DU COUPLE, IMAGE DE L’ALLIANCE DE DIEU
Et voilà que notre livre des Proverbes se prend de nouveau à rêver du couple idéal : ici l’homme peut se reposer entièrement sur sa compagne « son mari a confiance en elle… Elle lui épargne le malheur et lui donne le bonheur »… (v. 11… 12). L’auteur a même eu l’idée, l’audace devrais-je dire, de penser que le couple humain était lié par une véritable Alliance semblable à celle qui unit Dieu à Israël. Dans un autre passage du livre des Proverbes, on peut lire que rompre l’union conjugale c’est rompre du même coup l’Alliance avec Dieu (2, 17).
Je reviens à notre texte d’aujourd’hui : dans la conclusion de son livre, en somme, l’auteur veut mettre en valeur deux choses qui sont un peu les deux béatitudes de la femme : première béatitude « Heureuse es-tu, toi qui crains le SEIGNEUR » (traduisez « toi qui aimes le SEIGNEUR ») ; deuxième béatitude « Heureuse es-tu : avec tout ce travail humble, apparemment inutile, tu crées du bonheur ».
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Compléments
- Encore une remarque sur ce texte, mais cette fois, de vocabulaire : dans notre traduction liturgique, l’avant-dernier verset dit : « Décevante est la grâce, et vaine la beauté ; la femme qui craint le SEIGNEUR est seule digne de louange. » Nous retrouvons ce mot de « crainte » du SEIGNEUR que nous avons appris à lire de manière positive comme un amour filial. Mais ce que notre traduction ne rend pas très bien, c’est la première phrase : « Décevante est la grâce, et vaine la beauté » : le mot « vain » est exactement le même qui commence le livre de Qohélet : « Vanité des vanités, tout est vanité » ; en hébreu, cela se dit « buée » (« buée de buées… »). On ne sait pas trop dater ni le livre des Proverbes ni celui de Qohélet ; mais généralement, on émet l’hypothèse que ce passage précis des Proverbes serait du début du cinquième siècle av.J.C., donc dans les années 400 et Qohélet cent ou deux cents ans plus tard (quatrième ou troisième siècle). Il n’y a peut-être pas eu filiation entre les deux, mais à tout le moins parenté.
- Ce qui est étonnant, finalement, c’est que cette femme, présentée par le livre des Proverbes, ne fait rien d’extraordinaire ! Ses activités, telles qu’elles nous sont décrites ici, ressemblent à l’idée que nous nous faisons de la femme au foyer ; et on sait bien que ce n’est pas ce qui attire le plus en ce moment ; mais replaçons-nous dans le contexte historique : l’auteur ne prend pas parti pour ou contre la femme au foyer ; et d’ailleurs, qui dit « femme au foyer » ne dit pas femme cloîtrée, privée de toute vie sociale : dans d’autres versets de ce poème, il montre le rôle social qu’elle tient dans sa ville en participant entre autres à des activités commerciales et à des oeuvres de charité. Grâce à sa liberté de mouvement et à sa disponibilité, elle est un maillon très important du tissu social.
- Voici quelques autres phrases de la Bible sur la femme : toujours dans le livre des Proverbes, par exemple : « Une femme de valeur est une couronne pour son mari. » (Pr 12) ; ou encore dans le livre de Ben Sirac : « Heureux celui qui vit avec une femme intelligente. » (Si 25, 8) … « Femme bonne fait un mari heureux et double le nombre de ses jours. Femme vaillante fait la joie de son mari qui passera dans la paix toutes ses années. » (Si 26,1). « Comme une lampe qui brille sur le chandelier sacré, tel apparaît un beau visage sur un corps bien planté. » (Si 26, 17). Et enfin, toujours dans le livre de Ben Sirac : « Celui qui acquiert une femme a le commencement de la fortune, une aide semblable à lui et une colonne d’appui. Là où il n’y a pas de clôture, le domaine est au pillage, là où il n’y a pas de femme, l’homme erre en se lamentant » (Si 36, 29-30 ). Et que dire du Cantique des Cantiques !

HOMÉLIE 33E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – 16 NOVEMBRE 2014

14 novembre, 2014

http://www.homelies.fr/homelie,,4018.html

HOMÉLIE 33E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – 16 NOVEMBRE 2014

La liturgie de ces dernières semaines de l’année liturgique nous oriente résolument vers l’attente du retour du Christ Roi, que nous célébrerons dimanche prochain. Une chose est certaine : le Seigneur vient ; où ? quand ? Il ne nous appartient pas de le savoir : « Le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. Quand les gens diront : “Quelle paix ! Quelle tranquillité !” c’est alors que, tout à coup, la catastrophe s’abattra sur eux, comme les douleurs sur la femme enceinte : ils ne pourront pas y échapper » (2nd lect.). Dès lors l’attitude qui s’impose est la vigilance : « ne restons pas endormis comme les autres » insiste saint Paul, c’est-à-dire comme les jeunes filles insensées de la parabole que nous avons méditée dimanche passé, « mais soyons vigilants et restons sobres » comme les vierges sages qui gardent leur lampe allumée dans l’attente de la venue de l’Epoux.
Reste à savoir comment nous comporter durant cette période qui s’étale entre l’exaltation de Notre Seigneur à la droite de son Père, et son intronisation définitive comme Juge des vivants et des morts, Roi des siècles à venir, Seigneur de l’univers. C’est précisément à cette question que veut nous faire réfléchir la parabole que nous venons d’entendre. Première surprise : le seul personnage vraiment préoccupé du retour de son Maître, n’est pas celui qui est cité en exemple. La parabole fait même une large place aux réflexions intérieures du troisième serviteur – à vrai dire très inquiet à la pensée de la confrontation avec cet homme dur dont il redoute le retour. Les deux premiers, eux, ne se posent pas de question : à peine leur Maître est-il parti, qu’ils reprennent « aussitôt » le travail, sans se faire d’état d’âme, continuant leur activité comme si le Maître était toujours là. Pour eux rien ne semble avoir changé, tant le souvenir de leur Maître demeure vivant dans leur mémoire. De fait : le Maître n’a jamais quitté la maison de leur cœur. Pourtant, c’est bien les deux premiers serviteurs, qui ne se préoccupent ni du départ ni du retour de leur Maître, que la suite du récit désigne comme modèles de l’attitude juste ; alors que le troisième s’entendra reprocher son manque d’initiative, lui qui était tellement préoccupé de ne rien perdre de ce que le Maître lui avait confié.
Il apparaît donc clairement que l’appel à la vigilance lancé par Jésus n’est pas l’invitation à une réflexion stérile sur l’insécurité du temps présent, ou sur les menaces des temps à venir, mais plutôt une vigoureuse exhortation à l’action, afin de ne pas nous laisser entraîner dans la morosité générale. La pire des pandémies, est celle qui affecte l’âme de nos contemporains depuis qu’ils ont cru pouvoir se passer du Dieu de Jésus-Christ. Il n’y a qu’un seul vaccin contre le virus de la désespérance : c’est « une foi agissant par la charité » (Ga 5, 6). Chacun des serviteurs a agi conformément à l’image de Dieu qu’il portait en son cœur : les deux premiers ont accueilli la révélation du « Dieu de tendresse et de miséricorde » (Ex 34, 6), du Dieu « bon et fidèle » qui se met en peine pour ses enfants ; s’inspirant de ce modèle, eux-mêmes ont agi ainsi, et se faisant ils se sont laissés façonner à son image. Aussi, à son retour, le Maître ne les traite-t-il pas comme des serviteurs, mais comme des fils : il est frappant qu’il ne récupère ni son bien, ni la plus-value ; il se contente de constater la fécondité des efforts de ces « bons et fidèles serviteurs », et de leur promettre de plus grandes responsabilités puisqu’ils se sont montrés dignes de sa confiance. Bien plus : il les invite à entrer dans sa joie. Il est clair que ce n’est pas une attitude de « Maître » : on voit mal en quoi le succès de ses serviteurs serait pour lui un motif de réjouissance s’il se trouve dépouillé de son bien. A moins bien sûr que ce soit au profit de ses héritiers, c’est-à-dire de ses propres fils.
Rien dans la parabole ne nous permet de dire que le Maître avait moins de sympathie pour le troisième serviteur. Le fait qu’il ne se voit confier qu’un seul talent n’est pas un argument : chacun a reçu « selon ses capacités », et le serviteur qui a fait fructifier deux talents reçoit la même récompense que celui qui a doublé les cinq talents. Il est clair que les serviteurs ne sont pas jugés sur leur efficacité, mais sur leur fidélité. Or le dernier serviteur n’a pas du tout la même attitude intérieure que ses collègues par rapport à son Maître. Loin de lui faire confiance, il se défie de lui, en a peur et ne voulant courir aucun risque, il n’entreprend rien pour faire fructifier le talent qui lui a été confié. Lui aussi agit envers le Maître conformément à l’image qu’il s’en fait : il refuse de travailler pour un Maître « paresseux », qui fait travailler les autres pour lui ; aussi se verra-t-il reprocher sa paresse. Il s’imagine son Maître « mauvais », « moissonnant là où il n’a pas semé, et ramassant là où il n’a pas répandu le grain » ; et le Maître lui reprochera sa malice. Le « mauvais serviteur » s’est lui-aussi inspiré de l’idée qu’il se faisait de son Maître, et s’est laissé façonner à son image. Aussi se voit-il renvoyer à son lieu propre : dans les ténèbres, exclu de la joie des fils, et loin de la présence de celui qu’il n’a pas voulu reconnaître comme Père.
« Celui qui a recevra encore, et il sera dans l’abondance. Mais celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a. » Saint Grégoire commente : « On donnera en effet à celui qui a, et il sera dans l’abondance, parce que celui qui a la charité reçoit aussi les autres dons. Mais celui qui n’a pas la charité perd même les dons qu’il paraissait avoir reçus. Aussi est-il nécessaire, mes frères, que vous veilliez à garder la charité en tout ce que vous faites. Et la vraie charité, c’est d’aimer son ami en Dieu, et son ennemi à cause de Dieu. Pensons donc tous chaque jour avec crainte à ce que nous avons reçu du Seigneur, pour pouvoir lui rendre avec sécurité, lors de son retour, le compte de notre talent. Voici qu’il est déjà proche, le retour de notre Rédempteur, qui s’en alla au Ciel dans la chair qu’il avait assumée. C’est en quelque sorte à l’étranger qu’il s’en est allé, lorsqu’il s’est éloigné à une grande distance de cette terre où il était né. Mais il va sans nul doute revenir nous demander compte de nos talents, et si nous sommeillons sans faire le bien, il nous jugera très sévèrement, précisément à cause des dons qu’il nous a accordés. Considérons donc ce que nous avons reçu, et soyons vigilants à bien le dépenser. Que nul souci terrestre ne nous détourne de l’œuvre spirituelle, de peur de provoquer la colère du Maître, propriétaire du talent, en cachant son talent dans la terre » (Homélie, 31.XII.590).

« Seigneur Jésus, c’est un appel à la confiance que tu nous adresses aujourd’hui par cette parabole. Contrairement à ce qu’enseigne le monde, c’est en donnant sans compter tout ce que nous avons et tout ce que nous sommes, que nous serons dans l’abondance. Telle est l’attitude filiale dont tu nous donnes l’exemple, et qui fait de nous tes cohéritiers, si du moins nous avons l’audace de l’adopter et d’y persévérer jusqu’au bout. Puissions-nous, comme la “femme vaillante” de la première lecture, mettre tous nos talents et chaque instant de notre vie à profit pour te servir en accomplissant généreusement notre devoir d’état. Nous connaîtrons alors la joie de nous entendre dire, lorsque tu viendras : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître” ».

Père Joseph-Marie

Saint François d’Assise

13 novembre, 2014

Saint François d’Assise  dans images sacrée

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