YVES RAGUIN, CHEMINS DE LA CONTEMPLATION - »PARTIR ».
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YVES RAGUIN, CHEMINS DE LA CONTEMPLATION - »PARTIR ».
« Quand on a décidé de partir à la recherche de Dieu, il faut faire ses bagages, seller son âne et se mettre en route. La montagne de Dieu est à peine visible dans le lointain… A l’aube, il faut partir. C’est un grand départ. Il faut dire adieu. A quoi ? A tout et à rien.
A rien, car ce monde que l’on quitte sera là près de nous, en nous, jusqu’à notre dernier souffle, toujours aussi près de nous. Etant chassé et repoussé, il a bien des chances de surgir avec plus de véhémence à l’intérieur de nous-mêmes.
A tout, car, en partant à la recherche de l’absolu, nous coupons les ponts avec tout ce qui pourrait nous en détourner, avec ce qui, en nous et dans les êtres, tend à former un corps d’opposition à l’action divine. Finalement ce qui est le plus dur à laisser, c’est ce nous-même, qui dans son besoin fondamental d’autonomie, s’oppose à Dieu. La séparation finalement, n’est pas dans l’éloignement, mais dans le détachement. Il faut à tout prix empêcher notre personnalité de se replier sur elle-même, de se construire en face de Dieu une citadelle, où Dieu ne sera admis que comme hôte. Oui, quand tu veux prier, il faut ouvrir ta maison et dénouer ton âme en Dieu.
Chaque genre de vie demande un détachement. Il faut que se détache d’elle-même et se dénoue l’âme des époux, l’âme des fiancés. Autrement il n’y a pas d’amour possible, mais un égoïsme cherché dans l’autre. A l’extrême pointe de l’amour se trouve l’amour de Dieu, don total et réciproque de l’un à l’autre.
Mais pour l’homme, Dieu est l’Autre, l’autre qui finalement se révélera, dans l’amour, comme l’être de notre être.
Avant de partir, il y a quelques coups de hache et de serpe à donner. En tranchant autour de soi, on voit immédiatement que l’on tranche en soi… Mais il ne faut pas attendre d’être détaché de tout et de soi pour partir. Il faut partir et, peu à peu, à mesure que nous avancerons, les choses qui nous sont les plus chères prendront de la distance. Beaucoup s’attacheront à nos pas. C’est normal. Si notre coeur y tient encore, il suffit de dire à Dieu: « Mon Dieu, je tiens encore à ceci, à cela, mais je compte sur toi pour me libérer, tandis que je marche vers toi. »
Qu’emporter avec soi ? Tout soi-même et rien de moins. Etrange réponse après avoir dit qu’il faut tout laisser et surtout se laisser soi-même. Et pourtant c’est vrai, il faut s’emporter tout entier. Beaucoup ne partent qu’en apparence. Ils n’emportent avec eux qu’un fantôme d’eux-mêmes. Ils se mettent eux-mêmes en sécurité avant de se mettre en route… Ils se font une personnalité superficielle, ce robot, cette ombre d’eux-mêmes qu’ils envoient à la recherche de Dieu. Ils n’entrent jamais vraiment de tout leur être dans I’expérience. C’est déjà une sorte de saint qui s’embarque pour l’expédition, un personnage modelé d’après les traités de la perfection. Ils envoient un double d’eux-mêmes tenter l’aventure et s’étonnent ensuite de ne retirer de tout cela que déception.
En partant il faut mettre sur son âne tout ce qu’on possède et partir avec tout ce qu’on est, sa carcasse, son esprit, son âme, il faut tout prendre, les grandeurs et les faiblesses, le passé de péché, les grandes espérances, les tendances les plus basses et les plus violentes… tout, tout, car tout doit passer par le feu. Tout doit être finalement intégré pour faire un être humain capable d’entrer corps et âme dans la connaissance de Dieu.
Quand la décision de partir est prise et qu’on est présent, tout présent, tout soi-même pour le départ, il faut se mettre en accord total de corps et d’âme avec ce grand corps du Christ qu’est l’Eglise, vivre avec elle, ressentir en elle les pulsations gigantesques que scande sa vie liturgique, dans ses enseignements, dans les sacrements, dans son attention constante… Là, vivant au rythme de l’Eglise, il est facile d’orienter tout son être vers le Seigneur et de vivre l’espoir de sentir bientôt la main de Dieu se poser sur son âme.
Comme le bout du chemin se perd en Dieu et que personne ne connaît le chemin sinon celui qui vient de Dieu, Jésus-Christ, il faut, tout en écoutant les maîtres que nous rencontrons, fixer les yeux sur Lui seul. Il est la voie, la vérité et la vie. Lui seul d’ailleurs a parcouru le chemin dans les deux sens. Il faut mettre notre main dans la sienne et partir … «
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