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CALIXTE: ÉTYM. GRECQUE : DE KALLISTOS, LE PLUS BEAU.
13 octobre, 2014http://goyet.free.fr/StCalixte.htm
CALIXTE: ÉTYM. GRECQUE : DE KALLISTOS, LE PLUS BEAU.
Calixte Ier, Saint (155-222), Pape et Martyr (217-222)
Romain, né vers 155 dans les quartiers du Transtévère, ancien esclave d’un chrétien, Calixte (ou Calliste) gère la banque de son ancien maître, celui qui l’a affranchi, à Rome, mais ses procédés pour renflouer la caisse et éviter la faillite le conduisent au tribunal où il est condamné aux mines de Sardaigne.
Libéré avec d’autres chrétiens grâce à l’intervention de Marcia, la maîtresse de l’empereur Commode, il revint à Rome vers 190, étudie la théologie, lit la Bible et porte secours aux chrétiens nécessiteux. Ordonné diacre, il est ensuite nommé conseiller principal du pape Zéphirin et chargé de l’organisation des cimetières chrétiens romains : C’est à lui que l’on doit la construction sous la voie Appienne, des Catacombes Sainte-Calixte, premier cimetière chrétien officiel où reposent les martyrs et tous les papes (sauf lui) ayant vécu au IIIe siècle.
Elu pape pour succéder à Zéphirin en 217, Calixte a le souci d’adapter l’Eglise aux conditions de son époque. Bon et indulgent par-dessus tout, il fait prévaloir, contre les rigoristes, l’usage d’admettre au sacrement de réconciliation tous les pécheurs sans exception, quelle que soit la gravité de leurs fautes. Il permet à des adultères repentants ainsi qu’aux anciens apostats, les lapsi (qui avaient renié leur foi sous la torture ou la menace) de recevoir la sainte communion. Il est dès lors l’objet de très vives attaques d’un grand théologien traditionaliste, Hippolyte, qui n’hésite pas à se dresser en antipape en se faisant élire par des dissidents. Calixte définit l’unité divine et la distinction entre le Père et le Fils. Il facilite aussi, malgré la loi civile en vigueur, les mariages entre femmes libres et esclaves. Il est assassiné au Transtévère au cours d’une émeute antichrétienne en l’an 222. Sa tombe sera retrouvée au cimetière Calépode, via Aurelia, à Rome, en 1961. 235.
Le pontificat de Calixte est très important, surtout de par sa politique d’indulgence et de pardon, face à la ligne d’extrême rigueur et de dureté d’Hippolyte. Calixte resta fidèle à la tradition de l’Eglise ancienne, mais l’adapta à son époque et à la société dans laquelle il vivait.
Catacombes de Saint Calixte
Le complexe de St. Calixte, entre le second et le troisième mille de la via Appia Antique, est constitué d’espaces de cimetières en surface, avec des annexes que l’on peut dater de la fin du IIè siècle après Jésus–Christ, à l’origine indépendant les uns des autres il furent ensuite reliés entre eux pour former un unique et très vaste ensemble de catacombes communautaires. L’ensemble a pris le nom du pape St. Calixte, martyr (217 – 222), celui–ci, avant son pontificat, fut nommé par le pape Zéphirin (199 – 217 ) à l’administration du cimetière. Ce cimetière était celui de l’Eglise de Rome, lieu de sépulture de nombreux pontifes et martyrs. Des nombreuses structures qui occupaient l’espace sur terre, il ne reste de visible actuellement que deux édifices funéraires en forme d’abside : La tricora orientale et celle occidentale. Cette dernière accueillait probablement les sépultures du pape Zéphirin et du martyr Tartisius. Une des plus anciennes et importante zone de la catacombe est celle des Papes et de Ste Cécile : le long d’une galerie de cette zone s’ouvrent les cubiculum dits « des sacrements » (premières décennies, IIIé siècle après Jésus–Christ), là figurent des peintures parmi les plus anciennes des catacombes. Dans une crypte de la zone furent enterrés presque tous les papes du IIIè siècle : Pontien, Anthère, Fabien, Lucius, Etienne, Sixte II, Denis, Félix et Eutichien. Près de la crypte des Papes se trouve celle de Ste. Cécile, à laquelle on attribue un culte surtout à l’époque du haut Moyen âge. Les autres zones des catacombes importantes sont : celle du pape Corneille (215–253), mort en exil à Civitavecchia, celle du pape St. Miltiade (311–314), celle des papes St. Caïus (283–296) et St. Eusèbe (309) et celle dénommée « libérienne », à cause des nombreuses inscriptions qui datent de l’époque du pape St. Libère (352–366)
Les Catacombes, comme on l’a souligné à plusieurs reprises, présentent une grande importance en rapport avec le Jubilé de l’an deux mille. Le retour aux origines, par le moyen des plus anciens cimetières imaginés par les premiers chrétiens, s’insère parfaitement dans le projet de la » nouvelle évangélisation « , qui engage l’Eglise tout entière sur la route du troisième millénaire. Les Catacombes, tout en présentant le visage éloquent de la vie chrétienne des premiers siècles, constituent une permanente école de la foi, d’espérance et de charité. Elles parlent de la solidarité qui unissait les frères dans la foi : les offrandes de chacun permettaient la sépulture de tous les défunts, même des plus indigents qui ne pouvaient pas se permettre les frais d’acquisition et d’installation de leur tombe. Le terme même de coemeteria, » dortoirs « , dit que les Catacombes étaient considérées de véritables lieux de repos communautaire, où tous les frères chrétiens, indépendamment de leur titre et de leur profession, dormaient dans une proximité large et solidaire, dans l’attente de la résurrection finale. Ce n’étaient pourtant pas des lieux tristes ; ils étaient décorés de fresques, de mosaïques et de sculptures, comme pour égayer les méandres obscurs et anticiper pars des images de fleurs, d’oiseaux et d’arbres la vision du paradis attendu à la fin des temps. La formule significative : » in pace « , qui revient souvent sur les tombeaux des chrétiens, résume bien leur espérance. Beaucoup de tombeaux des martyrs sont encore gardés à l’intérieur des Catacombes et des générations de fidèles sont venus prier devant eux. Les pèlerins du Jubilé de l’an deux mille, eux aussi, se rendront au tombeaux des martyrs et, adressant leurs prières aux antique champions de la foi, ils tourneront leur pensée vers les » nouveaux martyrs « , vers les chrétiens qui dans un passé récent et de nos jours encore, ont été et sont encore victimes de violence, d’injustices, d’incompréhension parce qu’ils veulent rester fidèles au Christ et à son Evangile. Dans le silence des Catacombes, le pèlerin de l’an deux mille peut retrouver ou raffermir sa propre identité religieuse par une sorte d’itinéraire spirituel qui, partant des premiers témoins de la foi, le mène jusqu’aux raisons et aux exigences de la nouvelle évangélisation « . ( L’Osservatore Romano 17 janvier 1998 )
Saint Calixte, Le seizième de nos papes (Article de Christiane MALLARMÉ dans » Le Monde Chrétien » Octobre 2001)
Il s’appelait Calixte et c’était un esclave chrétien qui devint – destinée exceptionnelle – le pape de l’indulgente bonté. On pense qu’il est né vers 155 et mort en 222 à Rome. Doté d’une très grande intelligence, son maître Carpophore, qui reconnaissait son habileté naturelle, lui avait donné à gérer une banque qui s’occupait de son propre argent et de celui d’autres chrétiens. Malheureusement, l’argent fut perdu, on ne sait comment, puis ce fut la faillite et, pour cette raison, Calixte fut condamné aux travaux forcés dans les mines de Sardaigne. La maîtresse de l’empereur Commode, Marcia, chrétienne de cœur, le connaissait et obtint sa grâce. Calixte se retira alors loin de Rome et alla s’établir à Autium où il vécut une dizaine d’années grâce à la pension que lui versait le pape Victor Ier (189-199). Il secourait les chrétiens dans le besoin et s’adonnait à l’étude des saintes écritures. Affranchi, Calixte (que certain appellent Calliste) fonda le cimetière chrétien sis sur la voie Appienne (cimetière connu aujourd’hui sous le nom de Saint Calliste). Ce cimetière contenait, entre autres, les corps de la plupart des évêques de Rome du IIIe siècle. Calixte devint ensuite l’archidiacre du pape saint Zéphyrin (199-217).
Celui-ci apprécia les talents de son protégé, se prit d’une grande amitié pour lui et même l’employa comme conseiller.
A la mort de Zéphyrin en 217, il ne fallait pas, pour gouverner l’Église, à une époque si tourmentée, un pasteur moins sage ni moins vaillant. Calixte fut élu pape et autorisa, à l’encontre de la loi civile, les mariages entre esclaves et personnes libres, et rendit le jeûne des Quatre-Temps, qui remontait aux apôtres, obligatoire dans toute l’Église. L’oraison disait : » Chaque année, nous faisons pénitence à l’arrivée de chaque saison. Que les sacrifices de nos corps et de nos âmes vous soient agréables, Seigneur Jésus. »
Hippolyte, talentueux Grec alexandrin érudit, un autre candidat, l’accusa d’être un mauvais pape parce qu’il accordait trop facilement le pardon aux pécheurs. En effet, la politique de Calixte était si indulgente qu’elle irritait les rigoristes : il admettait à la communion des meurtriers et les adultères repentants, conservait des évêques qui regrettaient sincèrement des péchés mortels, et assouplissait les normes d’entrée au catéchuménat. La controverse conduisit au schisme. Hippolyte, se déclara antipape.
De nombreuse conversions s’opérèrent sous le pontificat de saint Calixte. La persécution ayant éclaté, il se réfugia avec dix de ses prêtres dans la maison de Pontien. La maison fut bientôt envahie par des soldats qui reçurent des ordres leur défendant de laisser entrer des vivres. Pendant quatre jours, Calixte fut privé de toute nourriture mais le jeûne et la prière lui donnèrent des forces nouvelles. Le préfet, redoublant de cruauté, donna l’ordre de le frapper chaque matin à coups de bâton et de tuer quiconque essayerait de l’aider. Mais parmi les soldats qui veillaient à la garde de Calixte, il y avait un certain Privatus, qui soufrait beaucoup d’un ulcère. Il demanda sa guérison au saint qui lui dit : » Si vous croyez de tout cœur en Jésus-Christ et recevez le baptême au nom de la sainte Trinité, vous serez guéri » Aussitôt apres l’administration du baptême, le soldat fut guéri. Le préfet eut connaissance de cette conversion et fit fouetter à mort Privatus.
De la mort de Calixte, on ne connaît pas exactement les circonstances. Il semble avoir été tué dans une émeute, soit décapité, soit défenestré par des excités. Enterré sur la voie Aurélienne, il fut vénéré comme martyr à partir du IVe siècle. La plupart des informations le concernant viennent de son ennemi Hippolyte et d’un autre opposant, Tertullien, dont voici un texte ou il expose sa thèse avant de la réfuter : » Mais, disent-ils, Dieu est bon, très bon. Il est compatissant, il aime à pardonner. Il faut donc que les enfants de Dieu soient, eux aussi, miséricordieux et pacifiques, qu’ils se pardonnent réciproquement, comme le Christ nous a pardonné, et que nous ne jugions pas de peur d’être jugés. » D’une extrême habileté, d’une grande humanité, d’une foi ardente en Dieu, Calixte se heurta aux opinions de l’époque. Il est fêté le 14 octobre.
Saint Calixte Ier Pape et Martyr (+ 222) (Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année, Tours, Mame, 1950.)
A la mort de saint Zéphirin, Calixte, Romain, fut élevé au Siège apostolique. Il ne fallait point, pour gouverner l’Église, à une époque si tourmentée, un pasteur moins sage ni moins vaillant. Il rendit le jeûne des Quatre-Temps, qui remontait aux Apôtres, obligatoire dans toute l’Église.
C’est sous son règne que l’on commença à bâtir des temples chrétiens, qui furent détruits dans les persécutions suivantes. Il fit creuser le cimetière souterrain de la voie Appienne, qui porte encore aujourd’hui son nom et qui renferme tant de précieux souvenirs, entre autres le tombeau de sainte Cécile, la crypte de plusieurs Papes, des peintures qui attestent la conformité de la foi primitive de l’Église avec sa foi actuelle.
De nombreuses conversions s’opérèrent sous le pontificat de saint Calixte. La persécution ayant éclaté, il se réfugia, avec dix de ses prêtres, dans la maison de Pontien. La maison fut bientôt enveloppée par des soldats qui reçurent la défense d’y laisser rentrer aucune espèce de vivres. Pendant quatre jours, le Pape Calixte fut privé de toute nourriture; mais le jeûne et la prière lui donnaient des forces nouvelles. Le préfet, redoublant de cruauté, donna l’ordre de frapper chaque matin le prisonnier à coups de bâton, et de tuer quiconque essayerait de pénétrer pendant la nuit dans sa maison.
Une nuit, le prêtre martyr Calépode, auquel Calixte avait fait donner une sépulture honorable, apparut au Pontife et lui dit: « Père, prenez courage, l’heure de la récompense approche; votre couronne sera proportionnée à vos souffrances. »
Parmi les soldats qui veillaient à la garde du prisonnier, il y avait un certain Privatus, qui souffrait beaucoup d’un ulcère; il demanda sa guérison à Calixte, qui lui dit: « Si vous croyez de tout coeur en Jésus-Christ et recevez le baptême au nom de la Sainte Trinité, vous serez guéri. – Je crois, reprit le soldat, je veux être baptisé, et je suis sûr que Dieu me guérira. » Aussitôt après l’administration du baptême, l’ulcère disparut sans laisser de trace. « Oui, s’écrie le nouveau chrétien, le Dieu de Calixte est le seul vrai Dieu; les idoles seront jetées aux flammes, et le Christ régnera éternellement! » Le préfet eut connaissance de cette conversion et fit fouetter Privatus jusqu’à la mort. Par son ordre, Calixte, une grosse pierre au cou, fut jeté de la fenêtre d’une maison dans un puits.
LA CONVERSION DE LÉON TOLSTOÏ.
13 octobre, 2014http://www.samizdat.qc.ca/arts/lit/tolstoi_em.htm
LA CONVERSION DE LÉON TOLSTOÏ.
Vers la fin des années 1870, le comte Léon Tolstoï (1828-1910), auteur de grands romans Guerre et Paix et Anna Karénine, a traversé une crise intérieure grave. Sa vie, l’existence de toute l’humanité et l’univers, lui semblait totalement futile. Il surmonta son découragement en développant une religion où “l’infini” joue le rôle de Dieu, et comportant une morale exigeant une vie quotidienne simple, la non-violence et l’abolition de gouvernement, l’Église, la science et l’industrie. Il discutait de cette évolution dans sa pensée comme sa conversion. Cependant, son journal très riche rédigé entre 1847 et sa mort, ainsi que son livre Ma Confession, documentant sa crise jusqu’à la conversion, démontrent qu’avant et après cette crise sa préoccupation presque exclusive et obsessionnelle demeurait sa propre personne.
Examinons en détail la crise de Tolstoï et sa « conversion » à travers son essai, Ma Confession. Il a grandi dans la foi orthodoxe russe, mais l’avait perdue au moment de fréquenter l’université. Il dit que cela était chose habituelle chez les gens instruits, pour qui “la doctrine religieuse [était seulement] un phénomène extérieur, déconnecté de la vie[1]. » Il a cru vaguement en un Dieu non défini et se consacra à l’autoperfection physique, mentale et sociale, Dans son cercle, les ambitions mondaines et les désirs étaient prisés et la bonté morale était la cible de dédain.
Plus tard, il dit qu’il a acquis, de ses confrères écrivains, « une fierté anormalement développée et une assurance folle que c’était ma vocation d’enseigner aux hommes, sans savoir quoi les enseigner »[2]. Il retrouvait cette même croyance ainsi que la foi dans le “progrès” exprimé en termes évolutionnistes chez les chefs de fil et les savants de l’Europe occidentale: « Tout évolue et j’évolue avec elle: et pourquoi (c’est ainsi) sera connu un jour. »[3] Ce n’est que lorsque Tolstoï a essayé d’enseigner aux enfants des paysans sur sa propriété de campagne qu’il se rendit compte qu’il ne pouvait le faire sans savoir ce qu’il fallait enseigner. Cette impasse, dit-il, aurait pu le conduire “à cette l’état de désespoir que j’ai atteint quinze ans plus tard, »[4] si ce n’eut été de son mariage heureux, de la vie familiale et que ses publications lui permettant d’obtenir les richesses et les applaudissements. Sa “seule vérité” d’alors était “qu’il faut vivre de manière à avoir le meilleur pour soi et sa famille. »[5]
C’est alors que commença sa crise intérieure. D’abord graduellement, puis de plus en plus, il se trouvait perplexe et déprimé par les questions du sens de son existence et le but de sa vie. Il les chassaient de son esprit, mais comprit par la suite que ces questions étaient importantes et devaient être résolues. Au milieu de ses travaux quotidiens, il se demandait tout à coup ce que tout cela pouvait signifier, et
Ma vie s’est arrêtée. La vérité est que la vie n’a aucun sens. Et c’est alors que moi, un homme favorisé par la fortune, je me cachait la corde de moi-même de peur que je ne me pende… et j’ai cessé d’aller à la chasse avec un fusil de peur d’être tenté par un moyen aussi facile de mettre fin à ma vie.[6]
Il en est venu à voir la vie comme une plaisanterie stupide et méchante jouée sur lui par « quelqu’un », même si « je ne reconnais pas un “ quelqu’un ” qui m’aurait créé. » Maladie et mort, la puanteur et les vers » ‘viendront; « mes oeuvres … seront oubliées, et je n’existerai plus. Alors, à quoi bon tous ces efforts? »[7] Toutes les joies de la vie, y compris la famille et l’art, pouvaient le calmer seulement “lorsque, au fond de mon âme, je croyais que ma vie avait un sens. »[8]
Tolstoï rechercha une réponse dans les sciences naturelles. Celles-ci ne parlaient que de changements globaux et de l’évolution d’une infinité de petites particules dans l’espace infini, le temps et la complexité, ce qui ne réglait rien. Pour ce qui est des sciences sociales, et la philosophie, elles devaient admettre qu’elles n’avaient pas de réponse. Compte tenu de cette impasse touchant la quête humaine pour découvrir le but ultime de la vie, Tolstoï, citant Socrate, Schopenhauer, le livre de l’Ecclésiaste et Bouddha, a réaffirmé que la vie est mauvaise et absurde et que la mort et le néant lui sont préférables.
À ce stade critique, bien que Tolstoï s’accrochait toujours à sa foi dans la raison, il a pris conscience que les masses de gens simples et sans instruction étaient plus sages que lui:
C’est ainsi que la chose se présentait: moi, ma raison, a reconnu que la vie est insensée. S’il n’y a rien de supérieur à la raison (et il n’y en a pas: car rien ne peut prouver qu’une telle chose puisse exister), alors à mon avis la raison est le créateur de la vie… Comment la raison peut rejeter la vie tandis qu’elle est la créatrice de la vie?
Le raisonnement démontrant la vanité de la vie… est depuis longtemps connu des gens très simples, et pourtant ils ont vécu et vivent encore. Comment se fait-il qu’ils vivent tous sans jamais penser mettre en doute le caractère raisonnable de la vie?[9]
S’étant humilié en puisant chez les gens simples et sans instruction, Tolstoï a affirmé qu’ils avaient découvert la signification de la vie dans la “connaissance irrationnelle”, et
que cette connaissance irrationnelle, c’est la foi, justement la chose que je ne pouvais que rejeter. C’est Dieu, la Trinité, la création en six jours; les diables et les anges et tout le reste que je ne peux pas accepter aussi longtemps que je conserve ma raison. Il y avait là, dans la foi un rejet de la raison, qui m’est encore plus impossible que le rejet de la vie.[10]
Ce rejet catégorique du Dieu trinitaire ainsi que le Créateur de la Bible est en soi déraisonnable, car c’est un rejet de tout test rationnel possible. Tolstoï n’aurait-il pu raisonner de la manière suivante : “Peut-être ces simples croyants ne sont pas aussi irrationnelles que je le pense et que le Dieu auquel ils croient et prient existe réellement? Comment puis-je tester cette hypothèse? Il aurait pu faire alors ce qu’a fait un professeur de psychologie chinois incrédule invité par un ami chrétien à prier « O Dieu, si Dieu n’existe pas, alors ma prière est inutile et j’ai prié en vain, mais s’il y a un Dieu , alors trouve quelque moyen pour me le faire savoir. » Le professeur se demanda ensuite:
Suis-je prêt à admettre [à mes étudiants], que j’ai eu tort tout ce temps? J’ai réfléchi longuement à la question, néanmoins j’ai senti que je devais être honnête. Car si, après tout, il y avait vraiment un Dieu, je serais fou de ne pas croire en Lui.
Alors, je me suis agenouillé et j’ai prié, et tandis que je priai j’ai eu la certitude qu’il y avait un Dieu. Puis je me suis souvenu de l’Évangile de Jean que j’avais lu, et comment il semblait être écrit par un témoin oculaire et je savais que si c’était le cas, alors Jésus était bien le Fils de Dieu et j’ai été sauvé![11]
Toutefois, Tolstoï n’a pas testé la croyance des chrétiens ni sa propre incrédulité. Il a raisonné plutôt que la solution résidait dans “une relation entre le fini et l’infini », qui était le centre de la foi.[12] Et Tolstoï définissait la foi comme “une connaissance de la signification de la vie humaine à la suite de laquelle l’homme ne se détruit pas lui-même, mais vit. »[13] Il sentait les gens de son entourage, menaient des vies inutiles parasites, tandis que les pauvres, les simples et les personnes sans instruction a vécu comme il le fallait, même si des superstitions se trouvaient mélangés à leurs vérités. Selon cette norme, il sentait qu’il était mauvais, “ et de me sentir convaincu de ma bonté était pour moi plus important et nécessaire que deux et deux font quatre. »[14] Dans la tentative de définir ses rapports avec Dieu, il a de nouveau nié que Dieu est « le créateur et sauveur ”. car ce concept le déprimait et lui ôtait ce qu’il fallait pour vivre. Puis il “ est devenu effrayé et se mit à prier à Celui que je cherchais. Mais plus je priais, plus il est devenu évident pour moi qu’il ne m’entendait pas… ”[15]. Cette expérience s’est répétée à maintes reprises. Après avoir d’abord rejeté le Dieu des Écritures, Tolstoï n’a reçu aucune réponse de “Celui que je cherchais », c’est-à-dire, non pas du Dieu transcendant, souverain, personnel qu’il détestait, mais une divinité vague de sa propre invention. Son expérience est inévitablement celle des prêtres de Baal au mont Carmel (I Rois 18:26-29).
Enfin, Tolstoï élabora sa solution: « Vivre en cherchant Dieu, et vous ne vivrez pas sans Dieu. » Il a estimé que cette formulation, dont il n’a jamais discerné l’illogisme, était la même que sa croyance d’enfance qu’il devait vivre en accord avec “la volonté qui m’a produit… je peux trouver l’expression de cette volonté dans ce que l’humanité… a produit pour se diriger »[16]. Le sens de la vie était de “sauver [son] âme, et pour sauver son âme, il faut vivre de manière sainte ” et pour vivre de manière sainte , il doit renoncer à tous les plaisirs de la vie, doit travailler de ses mains, s’humilier, souffrir et être miséricordieux . « [17]
Avec cette conclusion que Tolstoï aboutit à l’essence de la religion qu’il allait pratiquer et prêcher le reste de sa vie. Il l’appellera “le christianisme”, mais l’a conçu comme une combinaison de tout ce qu’il a considéré comme raisonnable dans toutes les religions et philosophies. Il rejetait la divinité de Christ ainsi que sa résurrection, tous les miracles et le surnaturel et il a réécrit les Évangiles en conséquence. Il insistait que l’homme doit se perfectionner par ses propres efforts, sans aide et à son avis la prière comme « évoquant de soi-même l’élément divin… tout en renonçant à tout ce qui peut distraire ses sentiments, [et] s’éprouver soi-même, ses actes, ses désirs … selon les exigences les plus élevées de l’âme. « [18] Les disciples de Tolstoï étaient, pour la plupart, des gens instruits comme lui. Et la plupart étaient malheureux, tout comme c’était son cas. Son journal intime démontre abondamment sa misère intérieure après sa “ conversion ”. Perçu de l’extérieur sa misère était dû au refus de sa famille à partager son nouveau moralisme ascétique, mais vu de l’intérieure, il était dû à l’échec quotidien et sans espoir de se perfectionner en dépit d’efforts continus, sincères et scrupuleux. Au début, il a brièvement rejoint l’Église orthodoxe et observait avec diligence ses rituels comme le faisaient les croyants paysans. Toutefois, lorsqu’il a reçu la communion pour la première fois après de nombreuses années, il a “ressenti une douleur dans mon cœur”; seulement son « sentiment déterminé d’abaissement et l’humilité” l’a aidé à le supporter, mais il “ne pouvait pas y aller une seconde fois. »[19] Tolstoï fut excommunié en 1901 par l’Église orthodoxe, une reconnaissance tardive de son apostasie.
La Confession de Tolstoï démontre qu’il n’était en aucune manière converti de son propre ego, certainement pas au Créateur et Rédempteur souverain, transcendant (“autre-que-moi ”) de la Bible qu’il a rejeté tout son cœur, âme, esprit et force. Plutôt il a été “converti” d’une dévotion périodique, à une dévotion à temps plein et tenace à sa propre personne et à sa perfection morale par ses propres efforts. Et cette « bonté » humaine, sans la grâce de Dieu, il ne pouvait qu’échouer, ce qui n’a pas manqué. Si on devait paraphraser Romains 8:28 « Toutes choses concourent au mal de ceux qui détestent Dieu”, cela a été corroboré par la suite de la vie inconvertie de Tolstoï.
Léon Tolstoï
« Ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Plusieurs me diront en ce jour-là: Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé par ton nom? n’avons-nous pas chassé des démons par ton nom? et n’avons-nous pas fait beaucoup de miracles par ton nom? Alors je leur dirai ouvertement: Je ne vous ai jamais connus, retirez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité. » (Matt 7: 21-23)
« Sache que, dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles. Car les hommes seront égoïstes, (…) ayant l’apparence de la piété, mais reniant ce qui en fait la force. Éloigne-toi de ces hommes-là. Il en est parmi eux qui s’introduisent dans les maisons, et qui captivent des femmes d’un esprit faible et borné, chargées de péchés, agitées par des passions de toute espèce, apprenant toujours et ne pouvant jamais arriver à la connaissance de la vérité. » (2Tim 3: 1,5-7)
(Article traduit par Paul Gosselin 2010)
NdT: Pour accélérer le processus de traduction nous avons simplement traduit les citations anglaise de Tolstoï. Ceci dit, la majorité de l’oeuvre de Tolstoï a été traduite en français.
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