LA MÉDITATION CHRÉTIENNE SILENCIEUSE SELON L’APPROCHE DE JOHN MAIN
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LA MÉDITATION CHRÉTIENNE SILENCIEUSE SELON L’APPROCHE DE JOHN MAIN
La méditation est le moyen le plus courant qu’ont employé, au cours de l’histoire, les gens à la recherche de Dieu dans leur quête pour dépasser les apparences superficielles et vraiment prendre contact avec l’Ultime Réalité. La méditation n’est pas un exercice intellectuel ayant pour but de maîtriser certains concepts à propos de Dieu. Son but n’est ni d’acquérir ni d’approfondir des connaissances spéculatives sur Dieu ou la Révélation. Plutôt que de chercher à connaître des choses à propos de Dieu par le moyen de mots, de pensées et d’images, le méditant ou la méditante cherche à vivre directement une expérience de Dieu à l’intérieur d’une foi aimante
La foi chrétienne en la présence de Dieu qui nous habite
Dans le Nouveau Testament, à l’Évangile de Jean, Jésus parle de la présence de Dieu qui nous habite : « Et je prierai le Père et il vous donnera un autre Paraclet pour être avec vous à jamais, l’Esprit de Vérité (…) Vous, vous le connaissez parce qu’il demeure avec vous et qu’il est en vous » (Jn 14,16-17). Et plus loin : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon père l’aimera et nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure. » (14,23) L’invitation que nous fait Jésus est d’habiter en lui, et la promesse qu’il nous fait est qu’il habitera en nous. (Jn 15,4) Les Épîtres de Paul aussi font référence au « mystère du Christ », « ce mystère resté caché depuis des siècles et des générations », qui est « le Christ en vous » (Col 1,26-27).
Accéder à la présence divine en nous
Le type de prière, que nous appelons ici méditation, vient de la conviction qu’en plus de l’intelligence et de l’imagination qui sont des moyens courants pour entrer en contact avec Dieu, nous avons ce que la tradition chrétienne appelle « le cœur mystique ». C’est par ce moyen qu’il est possible de se sensibiliser à la présence divine en nous, d’approcher l’être de Dieu, quoique de façon partielle, loin des images et des concepts qui naturellement déforment la réalité de Dieu. Pour la plupart d’entre nous, ce « cœur mystique » en nous est à l’état latent ou peu développé. Une fois éveillé, il nous attire constamment vers Dieu.
Discerner la révélation de Dieu en tout
La tradition monastique chrétienne a développé une approche progressive pour éveiller le cœur mystique en nous et en venir à une connaissance expérientielle ? de Dieu. Cette approche est la Lectio Divina, qui est l’expression latine pour désigner la lecture des Écritures Saintes. La Lectio Divina permet de discerner les diverses façons dont une parole de la Révélation divine peut nous toucher : par les Écritures, les paroles et exemples des autres, l’art et la nature. La « lecture » faite avec l’oeil intérieur nous remplit d’une nourriture solide (lectio). Il s’agit ensuite de « ruminer » cette parole, processus par lequel le mot va de l’esprit vers le cœur (meditatio). Une fois le cœur touché et ému par cette parole de la Révélation, il s’exhale en gratitude, amour et prière (oratio). Nous en arrivons alors à un état par lequel la réalité de ce mot, et sa source même, deviennent si profondément vécues que nous nous libérons de notre dépendance sur les pensées, les images ou les émotions qui se présentent. Nous nous abîmons simplement avec abandon dans l’étreinte du Dieu vivant en nous (contemplatio). Cette dernière étape de la Lectio aboutit donc à la contemplation.
La prière contemplative
Dans la contemplation, l’être dans sa totalité dit « oui » aux paroles de la Révélation et à Dieu. Il s’agit de la conscience que non seulement Dieu est proche ou présent, mais qu’il est infiniment présent en nous comme Source de notre être. Selon les mots de l’écrivain spirituel contemporain Thomas Merton : « La contemplation est une simple intuition de Dieu éveillée dans l’âme par Dieu et elle nous ouvre à une mystérieuse rencontre expérientielle avec Dieu, rencontre directe mais encore obscure. » Être éveillé à la perception de cette divine présence qui nous habite est le droit de tous les chrétiens et le développement naturel de la grâce du baptême. C’est après ce désir de communion intime avec le Divin, que soupirent nos cœurs.
La méthode de la méditation chrétienne
La méditation n’est pas de la contemplation dans son sens le plus strict, parce que la conscience contemplative est considérée comme un don de l’Esprit Saint. Plutôt, la méditation est une préparation à la contemplation. Elle est une façon de réduire l’hyperactivité de nos vies et elle conduit ainsi vers un état plus calme et plus réceptif dans lequel nous sommes plus disposés à recevoir le don de la contemplation. Aujourd’hui, la méditation chrétienne représente un retour ainsi qu’un renouvellement des enseignements de Jean Cassien (Ve siècle), de la pratique orientale de la « Prière de Jésus », de l’ouvrage classique Le nuage d’inconnaissance (XIVe siècle) ainsi que d’autres sources. Durant les années 70, le moine bénédictin John Main commença à regrouper les différents éléments dispersés de cette tradition, y mettant un certain ordre en vue d’une utilisation simple et pratique pour l’époque contemporaine. Voici les grandes lignes de la pratique de la méditation chrétienne selon la tradition et les enseignements de John Main.
Les enseignements essentiels
- 1. Trouver un endroit calme
- 2. S’asseoir dans une position confortable, droite, détendue mais en restant alerte. Garder les yeux légèrement clos. Restez aussi immobile que possible. Silencieusement, intérieurement, commencer à dire un simple mot. Nous vous recommandons le mot sacré « Maranatha ». Répétez-le comme ceci : MA-RA-NA-THA, en quatre syllabes égales. Pour certains, il est plus facile de répéter le mot au rythme de leur respiration calme et régulière.
- 3. Ne penser ou n’imaginer rien que ce soit, d’ordre spirituel ou autrement. Lorsque des pensées ou des images viennent et retiennent l’attention, retourner doucement au mot sacré.
- 4. Méditer chaque matin et chaque soir pendant 20 à 30 minutes.
Observations sur les éléments essentiels
- 1. Un endroit calme. Choisissez un coin tranquille dans une pièce. Un espace qui ne serait utilisé que pour la méditation et dans lequel aucune autre association d’idées ne pourrait être faite serait idéal. Décorez-le avec une icône, une chandelle ou une bible ouverte. S’il n’y a pas d’endroit calme dans votre maison, cherchez-en un sur le chemin de retour à la maison (par exemple un lieu de culte).
- 2. La posture. Trouver une posture dans laquelle vous serez bien assis, immobile mais alerte. Installez-vous confortablement pour que pendant la durée de la période de méditation, l’activité mentale n’influe pas sur le physique. Un corps calme incite le mental à être calme. Une colonne vertébrale droite mais non rigide facilite la respiration et est propice à l’éveil. Par exemple, asseyez-vous sur une chaise au dossier très droit ; si vous préférez, vous pouvez également vous asseoir sur un banc de prière ou vous asseoir par terre, les jambes croisées avec le fessier légèrement élevé sur l’extrémité d’un coussin.
- 3. Le mot sacré ou mantra. « Maranatha » est un mot araméen (la langue que Jésus parlait) qui signifie « viens, Seigneur Jésus ». C’est probablement la prière chrétienne la plus ancienne. Saint Paul termine sa première Lettre aux Corinthiens avec ce mot et saint Jean l’emploie pour clore le Livre de l’Apocalypse. Parce que le mot est étranger, les gens n’y associent généralement pas beaucoup de pensées et d’images. D’autres phrases ou mots sacrés peuvent être utilisés et notre tradition en possède beaucoup. Quel que soit le mot sacré employé, de sa répétition faite avec foi et amour, il résultera un flot de foi et d’amour provenant de l’intérieur de notre cœur. La répétition fidèle de ce mot prend toute son essence dans l’attention et l’intention. Le rôle du mental est de produire des pensées. On ne peut s’attendre tout à coup à ce que le mental s’arrête subitement de fonctionner pour la simple raison qu’il est temps pour nous de méditer. Nous lui donnons donc quelque chose pour l’occuper : le mot sacré, ce qui nous permet de centrer notre attention sur cette Présence divine en nous. Ce mot porte également notre intention qui est le travail de Dieu en nous. Certains prononceront MA-RA durant l’inspiration et NA-THA durant l’expiration. D’autres préféreront dire MA-RA-NA-THA durant l’inspiration et rien durant l’expiration. Quoiqu’il est utile de bien synchroniser le mot avec la cadence naturelle du corps, si cela s’avère trop compliqué, on peut répéter le mot sans y prêter d’attention. Le corps possédant sa propre sagesse régularisera ce rythme de façon naturelle.
- 4. Pensées, images, émotions, souvenirs et perceptions des sens qui stimulent le mental. Tout ceci constitue une expérience normale pendant la méditation. Attendez-vous à leur intervention régulière. Essayer de réprimer toutes pensées ou émotions est aussi impossible que malsain. Il suffit de ne pas entretenir ces pensées ou ces émotions, de ne pas y investir d’énergie en réagissant, en résistant ou en les retenant. Lâcher prise tout simplement. Leur émergence vers la surface fait partie du processus d’évacuation, de purification, de guérison et de libération qui fait de la méditation une divine thérapie. Chaque fois que vous devenez conscient d’être « traqué », revenez doucement à votre mantra qui exprime fidèlement votre intention d’être devant Celui qui Est, dans une attention complète d’amour.
- 5. L’horaire et la fréquence. Les périodes traditionnelles de méditation dans toutes les religions du monde se situent aux premières heures du matin et vers la fin de l’après-midi ou tôt en soirée, avant les repas dans la mesure du possible. La recommandation de 20 à 30 minutes est proposée en tenant compte de deux considérations : 1) le minimum de temps généralement considéré nécessaire pour établir le silence intérieur et 2) le maximum de temps que la plupart des gens d’aujourd’hui peuvent investir de façon réaliste. La fin de cette période de prière peut se terminer par le son d’une cloche à condition que le tintement en soit très délicat. Pour terminer cette méditation, certains font une transition graduelle vers l’activité cognitive en récitant intérieurement une prière qui exprime une attitude d’ouverture et d’abandon, à l’image de ce qui a été vécu durant la période de méditation.
Trouver du soutien dans votre pratique
L’explication de la méthode de la méditation chrétienne est très simple. Ce qui est plus difficile à réaliser est d’en maintenir la régularité avec discipline et de respecter cette priorité en interrompant ce que vous êtes en train de faire pour aller prier. Votre participation à un groupe de soutien, avec qui prier et partager une fois par semaine, contribuera à vous aider à respecter votre engagement à la prière. En plus, ce groupe vous donnera, sur une base régulière, l’occasion d’obtenir de l’enseignement supplémentaire, grâce à l’écoute de conférences, cassettes et discussions.
Texte par Thomas Ryan, c.s.p. traduction de Robert Prud’homme et illustrations de Marielle Tardif
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