Archive pour le 17 septembre, 2014
PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE (10 septembre 2014)
17 septembre, 2014PAPE FRANÇOIS
AUDIENCE GÉNÉRALE
Place Saint-Pierre
Mercredi 10 septembre 2014
Chers frères et sœurs, bonjour.
Dans notre itinéraire de catéchèses sur l’Eglise, nous nous arrêtons sur la considération que l’Eglise est mère. La dernière fois, nous avons souligné que l’Eglise nous fait grandir et, avec la lumière et la force de la Parole de Dieu, elle nous indique la route du salut et nous défend du mal. Je voudrais aujourd’hui souligner un aspect particulier de cette question éducative de notre mère l’Eglise, c’est-à-dire la manière dont elle nous enseigne les œuvres de miséricorde.
Un bon éducateur vise à l’essentiel. Il ne se perd pas dans les détails, mais veut transmettre ce qui compte vraiment pour que le fils ou l’élève trouve le sens et la joie de vivre. C’est la vérité. Et l’essentiel, selon l’Evangile, c’est la miséricorde. L’essentiel de l’Evangile est la miséricorde. Dieu a envoyé son Fils, Dieu s’est fait homme pour nous sauver, c’est-à-dire pour nous donner sa miséricorde. Jésus le dit clairement, résumant son enseignement pour les disciples : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6, 36). Peut-il exister un chrétien qui ne soit pas miséricordieux ? Non. Le chrétien doit nécessairement être miséricordieux, car cela est le centre de l’Evangile. Et fidèle à cet enseignement, l’Eglise ne peut que répéter la même chose à ses enfants : « Soyez miséricordieux », comme l’est le Père, et l’a été Jésus. Miséricorde.
Et l’Eglise se comporte alors comme Jésus. Elle ne fait pas de leçons théoriques sur l’amour, sur la miséricorde. Elle ne diffuse pas dans le monde une philosophie, une voie de sagesse… Bien sûr, le christianisme est aussi tout cela, mais comme conséquence, en reflet. Notre mère l’Eglise, comme Jésus, enseigne à travers l’exemple, et les paroles servent à éclairer le sens de ses gestes.
Notre mère l’Eglise nous enseigne à donner à manger et à boire à qui a faim et soif, à vêtir celui qui est nu. Et comment le fait-elle ? Elle le fait à travers l’exemple de nombreux saints et saintes qui ont fait cela de façon exemplaire ; mais elle le fait également à travers l’exemple de très nombreux pères et mères, qui enseignent à leurs enfants que ce que nous avons en trop, doit aller à ceux qui manquent du nécessaire. Il est important de savoir cela. Dans les familles chrétiennes les plus simples, la loi de l’hospitalité a toujours été sacrée : une assiette et un lit pour ceux qui en ont besoin ne manquent jamais. Une fois, une mère me racontait — dans l’autre diocèse — qu’elle voulait enseigner cela à ses enfants et elle leur disait d’aider et de donner à manger à ceux qui ont faim ; elle en avait trois. Et un jour, pendant le déjeuner, — le papa était parti travailler, elle était avec ses trois enfants, petits, de plus ou moins 7, 5 et 4 ans — et on frappe à la porte : il y avait un homme qui demandait à manger. Et la maman lui a dit : « Attends un moment ». Et après être rentrée, elle a dit à ses enfants : « Il y a là un homme qui demande à manger, que faisons-nous ? ». « Nous lui donnons, maman, nous lui donnons ! ». Chacun avait dans son assiette un beefsteak avec des frites. « Très bien — a dit la maman —, prenons la moitié de chacun de vous, et nous lui donnerons la moitié du beefsteak de chacun de vous ». « Ah non, maman, comme ça cela ne va pas ! ». « C’est ainsi, tu dois donner ce qui est à toi ». De cette façon, la maman a enseigné à ses enfants à donner à manger ce qui était à eux. Cela est un bel exemple qui m’a beaucoup aidé. « Mais je n’ai rien en plus… ». « Donne ce qui est à toi ! ». C’est ce que nous enseigne notre mère l’Eglise. Et vous, les nombreuses mamans qui êtes ici, vous savez ce que vous devez faire pour enseigner à vos enfants qu’ils partagent ce qui est à eux avec ceux qui en ont besoin.
Notre mère l’Eglise enseigne à être proche de ceux qui sont malades. Combien de saints et de saintes ont-ils servi Jésus de cette façon ! Et combien d’hommes et de femmes communs, chaque jour, mettent en pratique cette œuvre de miséricorde dans une chambre d’hôpital, ou d’une maison de repos, ou dans leur propre maison, en assistant une personne malade.
Notre mère l’Eglise enseigne à être proche de ceux qui sont en prison. « Mais père non, cela est dangereux, ce sont des personnes mauvaises ». Mais chacun de nous est capable… Ecoutez bien cela: chacun de nous est capable de faire la même chose qu’a fait cet homme ou cette femme qui est en prison. Nous avons tous la capacité de pécher et de faire la même chose, de faire des erreurs dans la vie. Il n’est pas plus mauvais que toi ou moi ! La miséricorde franchit chaque mur, chaque barrière, et te conduit toujours à chercher le visage de l’homme, de la personne. Et c’est la miséricorde qui change le cœur et la vie, qui peut régénérer une personne et lui permettre de s’insérer de manière nouvelle dans la société.
Notre mère l’Eglise enseigne à être proche de celui qui est abandonné et meurt seul. C’est ce qu’a fait la bienheureuse Teresa dans les rues de Calcutta ; c’est ce qu’a fait et font tant de chrétiens qui n’ont pas peur de serrer la main de celui qui va quitter ce monde. Et ici aussi, la miséricorde apporte la paix à celui qui part et à celui qui reste, en nous faisant sentir que Dieu est plus grand que la mort, et qu’en restant en Lui, même la dernière séparation est un « au revoir »… La bienheureuse Teresa avait bien compris cela ! On lui disait : « Mère, vous perdez votre temps ! ». Elle trouvait des personnes mourantes dans la rue, des personnes auxquelles les rats des rues commençaient à dévorer le corps, et elle les conduisait chez elle afin qu’ils meurent dans la propreté, tranquilles, entourés de caresses, en paix. Elle donnait l’« au revoir » à toutes ces personnes… Et tant d’hommes et de femmes comme elle ont fait cela. Et ils les attendent, là [il indique le ciel], à la porte, pour leur ouvrir la porte du Ciel. Aider les personnes à bien mourir, en paix.
Chers frères et sœurs, c’est ainsi que l’Eglise est mère, en enseignant à ses enfants les œuvres de miséricorde. Elle a appris cette voie de Jésus, elle a appris que cela est l’essentiel pour le salut. Il ne suffit pas d’aimer qui nous aime. Jésus dit que ce sont les païens qui le font. Il ne suffit pas de faire du bien à qui nous fait du bien. Pour changer le monde en mieux, il faut faire du bien à qui n’est pas en mesure de nous donner quelque chose en retour, comme le Père l’a fait avec nous, en nous donnant Jésus. Combien avons-nous payé pour notre rédemption ? Rien, tout a été gratuit ! Faire le bien sans attendre quelque chose en retour. C’est ainsi qu’a fait le père avec nous et nous devons faire la même chose. Fais le bien et va de l’avant !
Qu’il est beau de vivre dans l’Eglise, dans notre mère l’Eglise qui nous enseigne ces choses que nous a enseignées Jésus. Rendons grâce au Seigneur, qui nous a donné la grâce d’avoir l’Eglise comme mère, elle qui nous enseigne la voie de la miséricorde, qui est la voie de la vie. Rendons grâce au Seigneur.
LES CHÉRUBINS BIBLIQUES
17 septembre, 2014http://mieville.chez-alice.fr/cherubins/memoire_ch5.html
LES CHÉRUBINS BIBLIQUES
CHAPITRE V – SYNTHESE ET CONCLUSION
1. Synthèse : que sont les chérubins ?
Au terme de notre étude il est temps de faire une synthèse de tous les éléments que nous avons recueilli, en particulier dans notre chapitre sur les textes bibliques. Cette synthèse nous permettra de répondre à la question qui fait l’objet de notre travail : que sont les chérubins ? Nous reprendrons les trois mêmes caractéristiques qui ont présidé à notre étude des textes bibliques : l’apparence, la fonction et la nature des chérubins.
a. l’apparence des chérubins
Les textes bibliques nous montrent que l’apparence des chérubins est variable. Il s’agit soit de quadrupèdes (p.ex. dans le temple) soit de bipèdes (p.ex. dans le tabernacle), avec pour ces derniers une variante complexe dans les visions d’Ezéchiel. Le chérubin biblique ne peut donc pas être assimilé au seul sphinx ailé.
Malgré ces différences notables, nous pouvons relever deux constantes dans l’apparence des chérubins bibliques. Tout d’abord, il s’agit toujours d’êtres hybrides, mêlant des traits humains à des traits animaux. De plus, les chérubins ont toujours des ailes. Les ailes peuvent d’ailleurs être le seul attribut animal du chérubins (c’est probablement le cas des chérubins du tabernacle).
Il est à noter que ces deux caractéristiques distinguent les chérubins des anges. En effet, dans la Bible les anges apparaissent sous une forme humaine (cf. p. ex. Gn 18:2) et n’ont jamais d’ailes. Daniel 9:21 semble toutefois attribuer à l’ange Gabriel la capacité de voler. L’expression mou’aph bî’aph est habituellement traduite « d’un vol rapide » (Colombe, TOB, Français courant…). Mais on peut aussi analyser cette expression en faisant dériver les deux termes du verbe ya’aph, « être fatigué ». Le sens de l’expression serait donc « fatigué de fatigue » ou « tout essoufflé » (Rabbinat français). La fatigue peut être la conséquence d’un vol ou d’une course. L’expression n’implique pas nécessairement la présence d’ailes sur l’ange Gabriel.
Voici donc tout ce que l’on peut dire de l’apparence des chérubins bibliques : ce sont des êtres hybrides mêlant des traits humains à des traits animaux, et toujours munis d’ailes.
b. la fonction des chérubins
Il apparaît que les chérubins bibliques ne remplissent pas toujours la même fonction. On en distingue deux principales : (1) une fonction protectrice, de gardien (les chérubins en Eden et au-dessus de l’arche, dans le tabernacle et le temple) ; (2) une fonction de porteurs de Dieu, de son trône (le chérubin que Dieu chevauche et ceux des visions du trône d’Ezéchiel). Il est à noter que ces deux fonctions ne dépendent pas de l’apparence des chérubins. En effet, la même fonction de gardien est remplie par des chérubins anthropomorphes (dans le tabernacle) et par des chérubins quadrupèdes (dans le temple). De même pour la fonction de porteurs de Dieu (anthropomorphes dans les visions d’Ezéchiel et quadrupèdes dans le Psaume 18).
A ces deux fonction vient s’ajouter une fonction plus générale, celle de manifester la présence de Dieu : là où sont les chérubins, là aussi se trouve l’Eternel. C’est ce que nous avons appelé la fonction « théophanique ». Elle est liée en particulier à l’expression yoshev hakerouvîm, mais aussi aux chérubins brodés et gravées dans le tabernacle et le temple. On pourrait même, de manière plus indirecte, appliquer cette dernière fonction à tous les cas de figure. De cette façon, les fonctions de gardiens et de porteurs de Dieu sont deux aspects de la fonction « théophanique » générale. Ainsi, les chérubins gardiens de l’arche protègent l’endroit où Dieu se manifeste de manière toute particulière. Il en va de même pour les gardiens du jardin d’Eden. Quant aux chérubins porteurs du trône de Dieu, par leur fonction ils manifestent la présence de celui qui est assis sur le trône.
En résumé, les chérubins ont tous une fonction « théophanique » générale, ils manifestent la présence de Dieu. De plus, deux fonctions plus précises leur sont attribuées parfois : celle de gardiens et celle de porteurs de Dieu ou de son trône.
c. la nature des chérubins
Le problème de la nature des chérubins est plus indécis. Dans aucun des textes bibliques nous n’avons trouvé d’indication claire sur cette question. Les chérubins bibliques pourraient être de réelles créatures célestes ou de simples êtres symboliques. S’il existe vraiment des êtres célestes qui répondent au nom de chérubins, les images du tabernacle et du temple, ou celles des visions d’Ezéchiel, ne sont certainement pas l’exacte représentation des chérubins célestes. Il y a sans doute des éléments symboliques dans ces descriptions.
Sans pouvoir trancher d’une manière absolue, il nous semble tout de même qu’une compréhension toute symbolique des chérubins s’accorde mieux aux données bibliques. La grande variété des apparences des chérubins, l’étroite association aux nuages d’orage (peut- être même est-ce la trace de leur origine comme personnification de ces nuages), l’utilisation fortement symbolique d’Ezéchiel, reprise en partie et remaniée dans l’Apocalypse, tous ces éléments font plutôt pencher la balance en faveur d’une compréhension symbolique des chérubins. A notre avis, seule une interprétation assez littérale de Genèse 3 permettrait d’inverser la tendance. En effet, si l’on considère le récit de la chute comme un écrit historique stricte, où tous les éléments doivent être compris dans son sens premier, littéral, alors il doit en être de même pour les chérubins qui doivent être des êtres réels. Mais pour notre part, nous considérons que le langage utilisé dans ce récit emprunte au langage mythologique et use du symbolique pour relater le fait historique de la chute de l’homme. Selon cette interprétation, les chérubins gardiens de l’arbre de la vie peuvent très bien être des symboles.
Si les chérubins sont des êtres symboliques, il faut en comprendre le sens. La signification du symbole est lié à la fonction qui est attribuée aux chérubins, celle de manifester la présence de Dieu. Ainsi, par les chérubins, c’est Dieu qui interdit à l’homme le retour à l’arbre de la vie. Les chérubins du tabernacle et du temple manifestent la présence particulière de Dieu en ces lieux. L’expression yoshev hakerouvîm désigne le lieu de résidence céleste de Dieu. Et c’est dans le cadre d’une théophanie que les chérubins portent Dieu ou son trône. Nous proposons donc de voir dans les chérubins des symboles de la présence de Dieu.
Pour terminer cette synthèse nous proposons une définition des chérubins bibliques : il s’agit d’êtres symboliques, représentés sous la forme de créatures hybrides ailées et dont la fonction est de manifester la présence de Dieu, en étant porteurs de Dieu ou gardiens.
2. Conclusion
En guise de conclusion, nous suggérerons quelques idées de prolongements possibles à notre travail. Il va de soi que nous ne développerons pas ces idées qui, chacune, mériterait une étude approfondie.
Une réflexion sur l’art pourrait être menée à partir des chérubins. Y a-t-il un art « religieux », opposé à un art « profane » ? Les chérubins gravés ou sculptés qui ornaient le tabernacle et le temple de Salomon étaient des oeuvres d’art. C’est un art que l’on pourrait qualifier de « religieux » puisqu’il est lié au domaine cultuel. Or, en particulier pour le temple, Salomon fit appel aux talents d’artistes tyriens. Comme nous l’avons vu, nul doute que la forme des chérubins fut fortement influencée par le style habituel de ces artistes. Et plus globalement, nous avons vu combien l’apparence des créatures mythologiques du Proche- Orient ancien eut une forte influence sur celle des chérubins bibliques.
Sans entrer dans le débat, il nous semble que ces quelques remarques permettent de mettre en doute une distinction religieux/profane trop radicale dans l’art. A l’instar de Salomon avec Hiram de Tyr, il est tout à fait concevable que les chrétiens fassent appel à des artistes non-chrétiens (musiciens, architectes, peintres…) pour enrichir leur culte à Dieu. Sans doute à cause de la grâce commune, des artistes incroyants sont également capables de créer des oeuvres qui puissent glorifier le Seigneur.
Les prophètes sont-ils des artistes ? Cette question un peu lapidaire concerne en fait le processus d’élaboration des visions prophétiques. Le prophète est-il aussi actif dans ce processus, son imagination est-elle mise en oeuvre, est-il une sorte de poète dirigé par l’Esprit de Dieu ? Les visions d’Ezéchiel, en particulier ses chérubins, avaient pour origine des objets (les statues du temple) ou des phénomènes réels (nuage d’orage). La touche personnelle du prophète est sensible. Et nous avons sans doute là la marque de la composante humaine dans le processus de révélation de la Parole de Dieu.
Notre étude sur les chérubins permet donc de percevoir que l’expression artistique est un moyen particulièrement adéquat pour l’homme de parler du divin, et pour Dieu de se révéler à l’homme.