Archive pour septembre, 2014
BENOÎT XVI – SAINT JÉRÔME (2007)- 30 SEPTEMBRE
30 septembre, 2014BENOÎT XVI – AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 14 novembre 2007
SAINT JÉRÔME
Chers frères et sœurs,
Nous poursuivons aujourd’hui la présentation de la figure de saint Jérôme. Comme nous l’avons dit mercredi dernier (1 lien), il consacra sa vie à l’étude de la Bible, au point d’être reconnu par l’un de mes prédécesseurs, le Pape Benoît XV, comme « docteur éminent dans l’interprétation des Saintes Ecritures ». Jérôme soulignait la joie et l’importance de se familiariser avec les textes bibliques: « Ne te semble-t-il pas habiter – déjà ici, sur terre – dans le royaume des cieux, lorsqu’on vit parmi ces textes, lorsqu’on les médite, lorsqu’on ne connaît ni ne recherche rien d’autre? » (Ep 53, 10). En réalité, dialoguer avec Dieu, avec sa Parole, est dans un certain sens une présence du Ciel, c’est-à-dire une présence de Dieu. S’approcher des textes bibliques, surtout du Nouveau Testament, est essentiel pour le croyant, car « ignorer l’Ecriture, c’est ignorer le Christ ». C’est à lui qu’appartient cette phrase célèbre, également citée par le Concile Vatican II dans la Constitution Dei Verbum (n. 25).
Réellement « amoureux » de la Parole de Dieu, il se demandait: « Comment pourrait-on vivre sans la science des Ecritures, à travers lesquelles on apprend à connaître le Christ lui-même, qui est la vie des croyants » (Ep 30, 7). La Bible, instrument « avec lequel Dieu parle chaque jour aux fidèles » (Ep 133, 13), devient ainsi un encouragement et la source de la vie chrétienne pour toutes les situations et pour chaque personne. Lire l’Ecriture signifie converser avec Dieu: « Si tu pries – écrit-il à une noble jeune fille de Rome -, tu parles avec l’Epoux; si tu lis, c’est Lui qui te parle » (Ep 22, 25). L’étude et la méditation de l’Ecriture rendent l’homme sage et serein (cf. In Eph., prol.). Assurément, pour pénétrer toujours plus profondément la Parole de Dieu, une application constante et progressive est nécessaire. Jérôme recommandait ainsi au prêtre Népotien: « Lis avec une grande fréquence les divines Ecritures; ou mieux, que le Livre Saint reste toujours entre tes mains. Apprends-là ce que tu dois enseigner » (Ep 52, 7). Il donnait les conseils suivants à la matrone romaine Leta pour l’éducation chrétienne de sa fille: « Assure-toi qu’elle étudie chaque jour un passage de l’Ecriture… Qu’à la prière elle fasse suivre la lecture, et à la lecture la prière… Au lieu des bijoux et des vêtements de soie, qu’elle aime les Livres divins » (Ep 107, 9.12). Avec la méditation et la science des Ecritures se « conserve l’équilibre de l’âme » (Ad Eph., prol.). Seul un profond esprit de prière et l’assistance de l’Esprit Saint peuvent nous introduire à la compréhension de la Bible: « Dans l’interprétation des Saintes Ecritures, nous avons toujours besoin de l’assistance de l’Esprit Saint » (In Mich. 1, 1, 10, 15).
Un amour passionné pour les Ecritures imprégna donc toute la vie de Jérôme, un amour qu’il chercha toujours à susciter également chez les fidèles. Il recommandait à l’une de ses filles spirituelles: « Aime l’Ecriture Sainte et la sagesse t’aimera; aime-la tendrement, et celle-ci te préservera; honore-la et tu recevras ses caresses. Qu’elle soit pour toi comme tes colliers et tes boucles d’oreille » (Ep 130, 20). Et encore: « Aime la science de l’Ecriture, et tu n’aimeras pas les vices de la chair » (Ep 125, 11).
Pour Jérôme, un critère de méthode fondamental dans l’interprétation des Ecritures était l’harmonie avec le magistère de l’Eglise. Nous ne pouvons jamais lire l’Ecriture seuls. Nous trouvons trop de portes fermées et nous glissons facilement dans l’erreur. La Bible a été écrite par le Peuple de Dieu et pour le Peuple de Dieu, sous l’inspiration de l’Esprit Saint. Ce n’est que dans cette communion avec le Peuple de Dieu que nous pouvons réellement entrer avec le « nous » au centre de la vérité que Dieu lui-même veut nous dire. Pour lui, une interprétation authentique de la Bible devait toujours être en harmonieuse concordance avec la foi de l’Eglise catholique. Il ne s’agit pas d’une exigence imposée à ce Livre de l’extérieur; le Livre est précisément la voix du Peuple de Dieu en pèlerinage et ce n’est que dans la foi de ce Peuple que nous sommes, pour ainsi dire, dans la juste tonalité pour comprendre l’Ecriture Sainte. Il admonestait donc: « Reste fermement attaché à la doctrine traditionnelle qui t’a été enseignée, afin que tu puisses exhorter selon la saine doctrine et réfuter ceux qui la contredisent » (Ep 52, 7). En particulier, étant donné que Jésus Christ a fondé son Eglise sur Pierre, chaque chrétien – concluait-il – doit être en communion « avec la Chaire de saint Pierre. Je sais que sur cette pierre l’Eglise est édifiée » (Ep 15, 2). Par conséquent, et de façon directe, il déclarait: « Je suis avec quiconque est uni à la Chaire de saint Pierre » (Ep 16).
Jérôme ne néglige pas, bien sûr, l’aspect éthique. Il rappelle au contraire souvent le devoir d’accorder sa propre vie avec la Parole divine et ce n’est qu’en la vivant que nous trouvons également la capacité de la comprendre. Cette cohérence est indispensable pour chaque chrétien, et en particulier pour le prédicateur, afin que ses actions, si elles étaient discordantes par rapport au discours, ne le mettent pas dans l’embarras. Ainsi exhorte-t-il le prêtre Népotien: « Que tes actions ne démentent pas tes paroles, afin que, lorsque tu prêches à l’église, il n’arrive pas que quelqu’un commente en son for intérieur: « Pourquoi n’agis-tu pas précisément ainsi? » Cela est vraiment plaisant de voir ce maître qui, le ventre plein, disserte sur le jeûne; même un voleur peut blâmer l’avarice; mais chez le prêtre du Christ, l’esprit et la parole doivent s’accorder » (Ep 52, 7). Dans une autre lettre, Jérôme réaffirme: « Même si elle possède une doctrine splendide, la personne qui se sent condamnée par sa propre conscience se sent honteuse » (Ep 127, 4). Toujours sur le thème de la cohérence, il observe: l’Evangile doit se traduire par des attitudes de charité véritable, car en chaque être humain, la Personne même du Christ est présente. En s’adressant, par exemple, au prêtre Paulin (qui devint ensuite Evêque de Nola et saint), Jérôme le conseillait ainsi: « Le véritable temple du Christ est l’âme du fidèle: orne-le, ce sanctuaire, embellis-le, dépose en lui tes offrandes et reçois le Christ. Dans quel but revêtir les murs de pierres précieuses, si le Christ meurt de faim dans la personne d’un pauvre? » (Ep 58, 7). Jérôme concrétise: il faut « vêtir le Christ chez les pauvres, lui rendre visite chez les personnes qui souffrent, le nourrir chez les affamés, le loger chez les sans-abris » (Ep 130, 14). L’amour pour le Christ, nourri par l’étude et la méditation, nous fait surmonter chaque difficulté: « Aimons nous aussi Jésus Christ, recherchons toujours l’union avec lui: alors, même ce qui est difficile nous semblera facile » (Ep 22, 40).
Jérôme, défini par Prospère d’Aquitaine comme un « modèle de conduite et maître du genre humain » (Carmen de ingratis, 57), nous a également laissé un enseignement riche et varié sur l’ascétisme chrétien. Il rappelle qu’un courageux engagement vers la perfection demande une vigilance constante, de fréquentes mortifications, toutefois avec modération et prudence, un travail intellectuel ou manuel assidu pour éviter l’oisiveté (cf. Epp 125, 11 et 130, 15), et surtout l’obéissance à Dieu: « Rien… ne plaît autant à Dieu que l’obéissance…, qui est la plus excellente et l’unique vertu » (Hom. de oboedientia: CCL 78,552). La pratique des pèlerinages peut également appartenir au chemin ascétique. Jérôme donna en particulier une impulsion à ceux en Terre Sainte, où les pèlerins étaient accueillis et logés dans des édifices élevés à côté du monastère de Bethléem, grâce à la générosité de la noble dame Paule, fille spirituelle de Jérôme (cf. Ep 108, 14).
Enfin, on ne peut pas oublier la contribution apportée par Jérôme dans le domaine de la pédagogie chrétienne (cf. Epp 107 et 128). Il se propose de former « une âme qui doit devenir le temple du Seigneur » (Ep 107, 4), une « pierre très précieuse » aux yeux de Dieu (Ep 107, 13). Avec une profonde intuition, il conseille de la préserver du mal et des occasions de pécher, d’exclure les amitiés équivoques ou débauchées (cf. Ep 107, 4 et 8-9; cf. également Ep 128, 3-4). Il exhorte surtout les parents pour qu’ils créent un environnement serein et joyeux autour des enfants, pour qu’ils les incitent à l’étude et au travail, également par la louange et l’émulation (cf. Epp 107, 4 et 128, 1), qu’ils les encouragent à surmonter les difficultés, qu’ils favorisent entre eux les bonnes habitudes et qu’ils les préservent d’en prendre de mauvaises car – et il cite là une phrase de Publilius Syrus entendue à l’école – « difficilement tu réussiras à te corriger de ces choses dont tu prends tranquillement l’habitude » (Ep 107, 8). Les parents sont les principaux éducateurs des enfants, les premiers maîtres de vie. Avec une grande clarté, Jérôme, s’adressant à la mère d’une jeune fille et mentionnant ensuite le père, admoneste, comme exprimant une exigence fondamentale de chaque créature humaine qui commence son existence: « Qu’elle trouve en toi sa maîtresse, et que sa jeunesse inexpérimentée regarde vers toi avec émerveillement. Que ni en toi, ni en son père elle ne voie jamais d’attitudes qui la conduisent au péché, si elles devaient être imitées. Rappelez-vous que… vous pouvez davantage l’éduquer par l’exemple que par la parole » (Ep 107, 9). Parmi les principales intuitions de Jérôme comme pédagogue, on doit souligner l’importance attribuée à une éducation saine et complète dès la prime enfance, la responsabilité particulière reconnue aux parents, l’urgence d’une sérieuse formation morale et religieuse, l’exigence de l’étude pour une formation humaine plus complète. En outre, un aspect assez négligé à l’époque antique, mais considéré comme vital par notre auteur, est la promotion de la femme, à laquelle il reconnaît le droit à une formation complète: humaine, scolaire, religieuse, professionnelle. Et nous voyons précisément aujourd’hui que l’éducation de la personnalité dans son intégralité, l’éducation à la responsabilité devant Dieu et devant l’homme, est la véritable condition de tout progrès, de toute paix, de toute réconciliation et d’exclusion de la violence. L’éducation devant Dieu et devant l’homme: c’est l’Ecriture Sainte qui nous indique la direction de l’éducation et ainsi, du véritable humanisme.
Nous ne pouvons pas conclure ces rapides annotations sur cet éminent Père de l’Eglise sans mentionner la contribution efficace qu’il apporta à la préservation d’éléments positifs et valables des antiques cultures juive, grecque et romaine au sein de la civilisation chrétienne naissante. Jérôme a reconnu et assimilé les valeurs artistiques, la richesse des sentiments et l’harmonie des images présentes chez les classiques, qui éduquent le cœur et l’imagination à de nobles sentiments. Il a en particulier placé au centre de sa vie et de son activité la Parole de Dieu, qui indique à l’homme les chemins de la vie, et lui révèle les secrets de la sainteté. Nous ne pouvons que lui être profondément reconnaissants pour tout cela, précisément dans le monde d’aujourd’hui.
PAPE BENOÎT XVI – FÊTE DES TROIS ARCHANGES (2007)- 29 septembre
30 septembre, 2014CHAPELLE PAPALE POUR L’ORDINATION ÉPISCOPALE DE
SIX NOUVEAUX ÉVÊQUES
HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – FÊTE DES TROIS ARCHANGES
Basilique Vaticane
Samedi 29 septembre 2007
Chers frères et sœurs,
Nous sommes rassemblés autour de l’autel du Seigneur en une circonstance dans le même temps solennelle et heureuse: l’ordination épiscopale de six nouveaux Evêques, appelés à exercer différentes tâches au service de l’unique Eglise du Christ. Il s’agit de Mgr Mieckzyslaw Mokrzycki, Mgr Francesco Brugnaro, Mgr Gianfranco Ravasi, Mgr Tommaso Caputo, Mgr Sergio Pagano, Mgr Vincenzo Di Mauro. J’adresse à tous mon salut cordial avec un baiser fraternel. Un salut particulier va à Mgr Mokrzycki qui, avec l’actuel Cardinal Stanislaw Dziwisz, a servi pendant de nombreuses années le Saint-Père Jean-Paul II comme secrétaire et qui ensuite, après mon élection comme Successeur de Pierre, a également été mon secrétaire avec une grande humilité, compétence et dévouement. Avec lui, je salue l’ami du Pape Jean-Paul II, le Cardinal Marian Jaworski, à qui Mgr Mokrzycki apportera son aide en tant que Coadjuteur. Je salue en outre les Evêques latins d’Ukraine, qui sont ici à Rome pour leur visite « ad limina Apostolorum ». Ma pensée va également aux Evêques grecs-catholiques – j’ai rencontré certains d’eux lundi dernier -, et à l’Eglise orthodoxe d’Ukraine. Je souhaite à tous les bénédictions du Ciel pour leurs efforts qui visent à garder active dans leur terre la force guérissante et corroborante de l’Evangile du Christ et à la transmettre aux futures générations.
Nous célébrons cette ordination épiscopale en la fête des trois Archanges qui sont mentionnés par leur nom dans l’Ecriture: Michel, Gabriel et Raphaël. Cela nous rappelle à l’esprit que dans l’antique Eglise – déjà dans l’Apocalypse – les Evêques étaient qualifiés d’ »anges » de leur Eglise, exprimant de cette façon un lien intime entre le ministère de l’Evêque et la mission de l’Ange. A partir de la tâche de l’Ange, on peut comprendre le service de l’Evêque. Mais qu’est-ce qu’un Ange? L’Ecriture Sainte et la Tradition de l’Eglise nous laissent entrevoir deux aspects. D’une part, l’Ange est une créature qui se trouve devant Dieu, orientée de tout son être vers Dieu. Les trois noms des Archanges finissent par le mot « El », qui signifie Dieu. Dieu est inscrit dans leurs noms, dans leur nature. Leur véritable nature est l’existence en vue de Lui et pour Lui. C’est précisément ainsi que s’explique également le deuxième aspect qui caractérise les Anges: ils sont les messagers de Dieu. Ils apportent Dieu aux hommes, ils ouvrent le ciel et ouvrent ainsi la terre. C’est précisément parce qu’ils sont auprès de Dieu, qu’ils peuvent être également très près de l’homme. En effet, Dieu est plus intime à chacun de nous que nous ne le sommes à nous-mêmes. Les Anges parlent à l’homme de ce qui constitue son être véritable, de ce qui dans sa vie est si souvent couvert et enseveli. Ils l’appellent à rentrer en lui-même, en le touchant de la part de Dieu. Dans ce sens également, nous qui sommes des êtres humains devrions toujours à nouveau devenir des anges les uns pour les autres – des anges qui nous détournent des voies de l’erreur et qui nous orientent toujours à nouveau vers Dieu. Si l’Eglise antique appelle les Evêques « anges » de leur Eglise, elle entend dire précisément cela: les Evêques eux-mêmes doivent être des hommes de Dieu, ils doivent vivre orientés vers Dieu. « Multum orat pro populo » – « Prie beaucoup pour le peuple », dit le Bréviaire de l’Eglise à propos des saints Evêques. L’Evêque doit être un orant, quelqu’un qui intercède pour les hommes auprès de Dieu. Plus il le fait, plus il comprend également les personnes qui lui sont confiées et il peut devenir un ange pour eux – un messager de Dieu, qui les aide à trouver leur véritable nature, elles-mêmes, et à vivre l’idée que Dieu a d’elles.
Tout cela devient encore plus clair si nous regardons à présent les figures des trois Archanges dont l’Eglise célèbre la fête aujourd’hui. Il y a tout d’abord Michel. Nous le rencontrons dans l’Ecriture Sainte, en particulier dans le Livre de Daniel, dans la Lettre de l’Apôtre saint Jude Thaddée et dans l’Apocalypse. Dans ces textes, on souligne deux fonctions de cet Archange. Il défend la cause de l’unicité de Dieu contre la présomption du dragon, du « serpent antique », comme le dit Jean. C’est la tentative incessante du serpent de faire croire aux hommes que Dieu doit disparaître, afin qu’ils puissent devenir grands; que Dieu fait obstacle à notre liberté et que nous devons donc nous débarrasser de Lui. Mais le dragon n’accuse pas seulement Dieu. L’Apocalypse l’appelle également « l’accusateur de nos frères, lui qui les accusait jour et nuit devant notre Dieu » (12, 10). Celui qui met Dieu de côté, ne rend pas l’homme plus grand, mais lui ôte sa dignité. L’homme devient alors un produit mal réussi de l’évolution. Celui qui accuse Dieu, accuse également l’homme. La foi en Dieu défend l’homme dans toutes ses faiblesses et ses manquements: la splendeur de Dieu resplendit sur chaque individu. La tâche de l’Evêque, en tant qu’homme de Dieu, est de faire place à Dieu dans le monde contre les négations et de défendre ainsi la grandeur de l’homme. Et que pourrait-on dire et penser de plus grand sur l’homme que le fait que Dieu lui-même s’est fait homme? L’autre fonction de Michel, selon l’Ecriture, est celle de protecteur du Peuple de Dieu (cf. Dn 10, 21; 12, 1). Chers amis, vous êtes vraiment les « anges gardiens » des Eglises qui vous seront confiées! Aidez le Peuple de Dieu, que vous devez précéder dans son pèlerinage, à trouver la joie dans la foi et à apprendre le discernement des esprits: à accueillir le bien et à refuser le mal, à rester et à devenir toujours plus, en vertu de l’espérance de la foi, des personnes qui aiment en communion avec le Dieu-Amour.
Nous rencontrons l’Archange Gabriel, en particulier dans le précieux récit de l’annonce à Marie de l’incarnation de Dieu, comme nous le rapporte saint Luc (1, 26-39). Gabriel est le messager de l’incarnation de Dieu. Il frappe à la porte de Marie et, par son intermédiaire, Dieu demande à Marie son « oui » à la proposition de devenir la Mère du Rédempteur: de donner sa chair humaine au Verbe éternel de Dieu, au Fils de Dieu. Le Seigneur frappe à plusieurs reprises à la porte du cœur humain. Dans l’Apocalypse, il dit à l’ »ange » de l’Eglise de Laodicée et, à travers lui, aux hommes de tous les temps: « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi » (3, 20). Le Seigneur se trouve à la porte – à la porte du monde et à la porte de chaque cœur en particulier. Il frappe pour qu’on le laisse entrer: l’incarnation de Dieu, son devenir chair doit continuer jusqu’à la fin des temps. Tous doivent être réunis dans le Christ en un seul corps: c’est ce que nous disent les grands hymnes sur le Christ dans la Lettre aux Ephésiens et dans celle aux Colossiens. Le Christ frappe. Aujourd’hui aussi, Il a besoin de personnes qui, pour ainsi dire, mettent à sa disposition leur propre chair, qui lui donnent la matière du monde et de leur vie, servant ainsi à l’unification entre Dieu et le monde, à la réconciliation de l’univers. Chers amis, votre tâche est de frapper au nom du Christ aux cœurs des hommes. En entrant vous-mêmes en union avec le Christ, vous pourrez également assumer la fonction de Gabriel: apporter l’appel du Christ aux hommes.
Saint Raphaël nous est présenté, en particulier dans le livre de Tobie, comme l’Ange auquel est confiée la tâche de guérir. Lorsque Jésus envoie ses disciples en mission, la tâche de l’annonce de l’Evangile s’accompagne également toujours de celle de guérir. Le Bon Samaritain, en accueillant et en guérissant la personne blessée qui gît au bord de la route, devient sans paroles un témoin de l’amour de Dieu. Cet homme blessé, qui a besoin d’être guéri, c’est chacun de nous. Annoncer l’Evangile signifie déjà en soi guérir, car l’homme a surtout besoin de la vérité et de l’amour. Dans le Livre de Tobie, on rapporte deux tâches emblématiques de guérison de l’Archange Raphaël. Il guérit la communion perturbée entre l’homme et la femme. Il guérit leur amour. Il chasse les démons qui, toujours à nouveau, déchirent et détruisent leur amour. Il purifie l’atmosphère entre les deux et leur donne la capacité de s’accueillir mutuellement pour toujours. Dans le récit de Tobie, cette guérison est rapportée à travers des images légendaires. Dans le Nouveau Testament, l’ordre du mariage, établi dans la création et menacé de multiples manières par le péché, est guéri par le fait que le Christ l’accueille dans son amour rédempteur. Il fait du mariage un sacrement: son amour, qui est monté pour nous sur la croix, est la force qui guérit et qui, au sein de toutes les confusions, donne la capacité de la réconciliation, purifie l’atmosphère et guérit les blessures. La tâche de conduire les hommes toujours à nouveau vers la force réconciliatrice de l’amour du Christ est confiée au prêtre. Il doit être « l’ange » qui guérit et qui les aide à ancrer leur amour au sacrement et à le vivre avec un engagement toujours renouvelé à partir de celui-ci. En deuxième lieu, le Livre de Tobie parle de la guérison des yeux aveugles. Nous savons tous combien nous sommes aujourd’hui menacés par la cécité à l’égard de Dieu. Comme le danger est grand que, face à tout ce que nous savons sur les choses matérielles et que nous sommes en mesure de faire avec celles-ci, nous devenions aveugles à la lumière de Dieu! Guérir cette cécité à travers le message de la foi et le témoignage de l’amour, est le service de Raphaël confié jour après jour au prêtre et, de manière particulière, à l’Evêque. Ainsi, nous sommes spontanément portés à penser également au sacrement de la Réconciliation, au Sacrement de la Pénitence qui, au sens le plus profond du terme, est un sacrement de guérison. En effet, la véritable blessure de l’âme, le motif de toutes nos autres blessures, est le péché. Et ce n’est que s’il existe un pardon en vertu de la puissance de Dieu, en vertu de la puissance de l’amour du Christ, que nous pouvons être guéris, que nous pouvons être rachetés.
« Demeurez dans mon amour », nous dit aujourd’hui le Seigneur dans l’Evangile (Jn 15, 9). A l’heure de l’ordination épiscopale, il vous le dit à vous de manière particulière, chers amis! Demeurez dans cette amitié avec Lui, pleine de l’amour qu’en cette heure, Il vous donne à nouveau! Alors, votre vie portera du fruit – un fruit qui demeure (Jn 15, 16). Chers frères, afin que cela vous soit donné, prions tous pour vous en cette heure. Amen.
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26 septembre, 2014COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT, 28 SEPTEMBRE – Ezéchiel 18, 25 – 28
26 septembre, 2014http://www.eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/commentaires-de-marie-noelle-thabut/
COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT, 28 SEPTEMBRE
PREMIERE LECTURE – Ezéchiel 18, 25 – 28
Parole du SEIGNEUR tout-puissant
Je ne désire pas la mort du méchant,
25 et pourtant vous dites :
« La conduite du SEIGNEUR est étrange. »
Ecoutez donc, fils d’Israël :
est-ce ma conduite qui est étrange ?
N’est-ce pas plutôt la vôtre ?
26 Si le juste se détourne de sa justice,
se pervertit, et meurt dans cet état,
c’est à cause de sa perversité qu’il mourra.
27 Mais si le méchant se détourne de sa méchanceté
pour pratiquer le droit et la justice,
il sauvera sa vie.
28 Parce qu’il a ouvert les yeux,
parce qu’il s’est détourné de ses fautes,
il ne mourra pas, il vivra.
Pour comprendre cette prédication d’Ezéchiel, il faut se rappeler le contexte : Ezéchiel fait partie des habitants de Jérusalem déportés à Babylone par les armées de Nabuchodonosor, en 597 av.J.C. C’est la catastrophe : on a vécu toutes les atrocités d’une guerre, et maintenant, à Babylone, loin du pays, la fameuse Terre Promise, qui devait ruisseler de lait et de miel, disait-on… loin de Jérusalem détruite, loin du Temple saccagé, la population décimée, on a tout perdu.
La tentation est grande de se révolter contre Dieu ; les exilés se plaignent et disent « La conduite du SEIGNEUR est étrange », ce qui signifie en clair : « Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu pour mériter une telle punition ? »
Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?
Car, à l’époque, on est convaincu qu’il y a un lien entre notre comportement bon ou mauvais et les événements de notre vie, heureux ou malheureux. Les bons sont toujours récompensés, les méchants sont toujours punis. Donc, s’il nous arrive un malheur, c’est parce que nous avons commis une faute.
Or cette génération dans la tourmente n’est pas pire que les précédentes. Et elle a quand même bien l’impression qu’elle paie tout le poids du passé, les fautes accumulées des générations précédentes, comme si le vase de la colère de Dieu avait tout d’un coup débordé. Et on se met à répandre le dicton : « Les pères ont mangé du raisin vert et les dents des fils en ont été agacées » (Ez 18, 2). Traduisez : notre génération paie pour toutes celles qui l’ont précédée.
Voilà dans quel contexte Ezéchiel prend la parole. Et il nous offre ici toute une méditation sur la justice de Dieu.
Qu’est-ce que la justice de Dieu ?
Cette question de la justice de Dieu a habité la réflexion du peuple d’Israël tout au long de son histoire. Et la réponse a varié au cours du temps. La prédication d’Ezéchiel que nous lisons aujourd’hui se situe donc à un moment précis de ce long cheminement. Et elle va constituer une étape importante dans ce déroulement.
Comme tous ses contemporains, Ezéchiel raisonne dans une logique de récompense / punition, ce que l’on appelle « la logique de rétribution ». Et sur ce point précis, il n’apporte rien de neuf. Toute faute reçoit un châtiment : telle est, croit-on, la justice de Dieu.
En revanche, il apporte du nouveau au sujet de ce fameux dicton sur les raisins verts. « Les pères ont mangé du raisin vert et les dents des fils en ont été agacées » (Ez 18, 2). C’est-à-dire que notre génération paie pour toutes celles qui l’ont précédée.
Personne n’est jamais puni pour la faute d’un autre
La nouveauté apportée par Ezéchiel consiste à dire : le dicton sur les raisins verts est faux. On ne paie pas les fautes de ceux qui nous ont précédés. Au contraire, chacun est rétribué pour sa propre conduite. Quelques lignes avant le texte d’aujourd’hui, Dieu a fait dire par son prophète : « Par ma vie, dit Dieu, vous ne répéterez plus ce dicton en Israël ». Et Ezéchiel développe tout un raisonnement pour bien préciser que la justice est individuelle et non pas collective.
« Si le méchant se détourne de sa méchanceté, s’il se met à pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. Parce qu’il a ouvert les yeux, parce qu’il s’est détourné de ses fautes, il ne mourra pas, il vivra ». Donc personne n’est jamais puni pour la faute d’un autre.
Une étape mais seulement une étape
C’est évidemment une étape très importante dans la découverte de la justice de Dieu, mais ce n’est qu’une étape. Plus tard, en particulier avec le livre de Job (dans la partie centrale du livre), on reconnaîtra que la justice de Dieu n’est pas une affaire de rétribution : qu’il n’y a pas de mesure automatique entre nos actions, bonnes ou mauvaises, et ce qui nous arrive de bon ou de mauvais… que les bons ne sont pas forcément récompensés et les méchants punis. On découvrira qu’on ne paie jamais rien, ni pour d’autres, ni pour soi-même… parce que Dieu ne punit jamais.
Plus tard encore, on découvrira que Dieu n’est pas la cause directe de tout ce qui nous arrive. Pour l’instant, avec Ezéchiel, on cesse d’accuser Dieu de nous faire payer les fautes de nos parents. C’est déjà un grand pas.
Un avenir est toujours possible
Ce texte d’Ezéchiel nous apporte une autre bonne nouvelle : un avenir est toujours possible ; rien n’est jamais définitivement joué. Cette leçon-là est capitale !… Pour nous encore aujourd’hui, d’ailleurs. Car effectivement, tant qu’on croit que tout est joué d’avance, on est tenté de s’abandonner au désespoir ; or Ezéchiel, comme tout bon prophète, n’a pas de pire ennemi que le découragement. C’est pourquoi il faut prendre au sérieux cette phrase : « Si le méchant se détourne de sa méchanceté, s’il se met à pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. Parce qu’il a ouvert les yeux, parce qu’il s’est détourné de ses fautes, il ne mourra pas, il vivra ». Il est toujours temps de changer de conduite ou de chemin, pour reprendre une image biblique. Se convertir, étymologiquement, en hébreu, cela veut dire « faire demi-tour ».
Il est toujours temps de se convertir
Au passage, Ezéchiel lance donc un vibrant appel à la conversion. Et, tout compte fait, c’est bien simple, puisque le prophète juge notre conversion à notre conduite à l’égard des autres : d’après lui, pour le méchant, se détourner de sa méchanceté, c’est se mettre à pratiquer le droit et la justice.
Et le sort des justes ?
« Si le juste se détourne de sa justice… il mourra à cause de sa perversité. » Mais cela ne doit pas nous inquiéter, aucun de nous n’est concerné, car aucun de nous n’oserait se prétendre juste !
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Compléments au texte d’Ezéchiel
- Entre nous, il faut bien reconnaître que, même aujourd’hui, au vingt-et-unième siècle, cette phrase « Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu pour mériter une telle punition ? » nous vient spontanément à la bouche quand le malheur nous arrive. On se rappelle l’histoire de l’aveugle-né chez Saint Jean : en le voyant, les disciples de Jésus lui ont posé la question classique : « Qui a péché pour qu’il soit né aveugle, lui ou ses parents ? » (Jn 9), en d’autres termes « A qui la faute ? ».
- Vie et mort en langage biblique : le texte d’Ezéchiel peut se lire à un deuxième niveau, si on se souvient que, pour les prophètes, quand ils parlent de vie ou de mort, ils parlent de vie spirituelle et de mort spirituelle.
Dans ce chapitre 18, Ezéchiel parle beaucoup de vie et de mort. Mais il vise autre chose que la vie et la mort physiques. Les exilés, d’ailleurs, parlaient de leur exil comme d’une situation de mort ; ils disaient : « Nos révoltes et nos péchés sont sur nous, nous pourrissons à cause d’eux, comment pourrons-nous vivre ? » (Ez 33, 11). A leurs yeux, privés de tout ce qui faisait leur vie et en particulier la pratique de leur foi, l’exil était une situation de non-vie, une espèce de mort larvée… Ezéchiel ne leur promet pas tout de suite le retour, mais il leur dit : « La vraie vie, c’est l’intimité avec Dieu » et cela, c’est possible partout. « Convertissez-vous et vivez ! » Cela veut dire que, même dans le malheur, vivre au plein sens du terme, c’est-à-dire en union avec Dieu, est toujours possible.
HOMÉLIE 26E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
26 septembre, 2014http://www.homelies.fr/homelie,,3969.html
26E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
DIMANCHE 28 SEPTEMBRE 2014
FAMILLE DE SAINT JOSEPH
HOMÉLIE – MESSE
La liturgie de ce jour est un appel à l’espérance. Aucun malheur n’est assez grand pour empêcher le Bon Dieu de nous rejoindre.
Certes, nous dit Ézéchiel, le juste peut chuter, emporté par sa propre perversité, et devenir méchant. Mais ce n’est jamais irrémédiable, car Dieu ne veut pas la mort du méchant mais qu’il vive ! Cette première lecture contient d’ailleurs, à mon sens, la clé de lecture de l’évangile de ce jour. Par la bouche de son prophète, Dieu déploie en effet un plaidoyer, il présente sa propre défense. Dénoncé comme responsable de nos propres turpitudes, le Seigneur réagit : « est-ce ma conduite qui est étrange ? N’est-ce pas plutôt la vôtre ? ». Voilà qui est bien étrange en effet, et qui nous invite à adopter un autre point de vue. Pour comprendre la parabole de Jésus, fallait-il seulement nous concentrer sur l’attitude contrastée des deux frères ? Comment la lirions-nous si nous nous attachions à regarder le visage du Père ?
L’exercice est déroutant car ce visage se fait discret.
Il y a d’abord le dialogue avec le fils aîné. Il dit « non ». Pas question d’aller à la vigne ! Pas question d’obéir comme un valet de pied. Le père doit apprendre qu’il y a quelqu’un en face de lui. C’est tout ce que nous savons de cet entretien, et de ce qui a suivi. Nous ne savons rien de la réaction du père, nous ne savons pas ce qui s’est passé en chemin, quand le fils est parti, quand il a finalement décidé d’aller à la vigne.
Justement, n’est-ce pas le silence du père qui a touché son fils ? Le père n’a pas réagit pas. Sans doute qu’après l’avoir quitté, le fils s’est-il rappelé la conversation, et a-t-il revu le visage étonné de son père. Son regard sans reproche, sans rancœur. Un regard qui s’étonne simplement de ce que le fils choisisse d’agir ainsi. « Est-ce ma conduite qui est étrange ? N’est-ce pas plutôt la vôtre ? » En un mot, le père n’a pas répondu à la violence par la violence. Il n’a pas monté le ton, il n’a pas manifesté son autorité pour obliger son fils à lui obéir. Le fils aîné a fait un bras de fer… mais seul. Le père, lui, l’a laissé partir, comme jadis le père du fils prodigue…
Cette attitude fait tout basculer. Celui que Jésus appelait « un homme », « un homme avait deux fils », maintenant que son aîné entre dans l’obéissance, est désormais appelé un « père ». La filiation ne peut exister qu’une fois la relation d’obéissance vécue. Ainsi quand nous nous rebellons contre Dieu, nous courrons stupidement vers notre mort et nous empêchons le Bon Dieu d’être père…
Voilà pourquoi nous pouvons dire, avec les grands prêtres à qui ce cas est soumis, que ce fils a fait la volonté du père. Il est entré en relation filiale, il ne va pas à la vigne par intérêt mais pour respecter de la parole de son père. L’amour de son père lui a donc fait faire les premiers pas d’un chemin de croissance, d’une sincère conversion.
L’autre fils en revanche dit « oui » d’emblée, mais il n’agit pas en conséquence. Cela porte à considérer qu’il n’a d’autre souci que de présenter une façade correcte. Ce qui prime pour lui, c’est de montrer à son père qu’il est conforme à l’image d’un bon fils. Il pousse d’ailleurs le zèle un peu trop loin. Appeler « Seigneur » celui qu’on peut appeler « père » n’est pas très naturel.
Ce fils construit une image de lui-même, mais il ne se construit pas lui-même. Peu à peu, avec le temps, il est même devenu calculateur. Il sait dire à son père les paroles qui conviennent, qui vont lui plaire. Pire, il n’est pas exclu qu’il s’appuie sur la certitude d’être aimé pour l’image qu’il donne. C’est pourquoi il pense pouvoir se permettre de ne pas aller à la vigne. Son père lui pardonnera bien puisqu’il l’aime. Bref, comme l’autre frère, il n’a pas appris à regarder son père, il n’a pas cherché à le connaître, à le rencontrer, si bien qu’il ne peut plus connaître la vérité ni le bonheur d’être aimé.
S’il l’avait fait, il n’aurait pas pris l’ordre d’aller à la vigne pour lui-même, par rapport à ce que cela réclame de lui. Il aurait essayé de comprendre pourquoi le père l’envoie à la vigne, il se serait demandé ce qu’est cette vigne aux yeux de son père pour qu’il ait choisi d’y envoyer ses fils et non des ouvriers journaliers. Il a donc un projet particulier, il considère donc que la tâche est d’importance, qu’elle est un honneur dont seuls ses fils sont dignes.
C’est à ce point que la parabole nous rejoint. La vigne, nous le savons, est le Royaume inauguré par Jésus. C’est à nous que le Père confie l’honneur de la faire fructifier. Pourtant nous sommes comme les deux fils : notre obéissance filiale est loin d’être parfaite, nous le reconnaissons sans peine. Pour le moins, tirons la leçon que Jésus donne aux grands prêtres et ne laissons pas un endurcissement semblable au leur tenir notre relation à Dieu. Ils incarnent en effet le scandale latent à cette parabole. En voyant son frère travailler à la vigne, celui qui refuse d’y aller ne se laisse pas remettre en question par le choix de son aîné. On peut ne pas comprendre le Bon Dieu, on peut ne pas mesurer la grandeur de son appel sur nous, mais qu’il est triste de ne pas comprendre l’exemple que les saints nous donnent. Le salut est pourtant à portée de nos mains. Jésus ne parle pas d’une récompense future, d’un bonheur lointain. Il dit : « aujourd’hui, ils vous précèdent ».
Alors vite en route ! Mettons-nous sur les chemins du Seigneur que nous indique clairement saint Paul. Pour que notre vie filiale prenne visage, pour que notre vie fraternelle fasse de nous des ouvriers dignes de la mission qui nous est confiée, centrons nos regards sur le Christ. Il est l’image parfaite, celui qui a compris l’intimité de l’amour du Père, celui dont l’obéissance infaillible vient au secours de la nôtre. Cessons d’être préoccupés de nous-mêmes et gardons fidèlement les dispositions que l’on a dans le Christ Jésus, il, lui, est le chemin qui nous conduit au Père, et proclamons, dans l’Eglise des frères qu’il a réconciliés : « Jésus Christ est Seigneur, pour la gloire de Dieu le Père, Amen ».
Frère Dominique
Jésus et les enfants
25 septembre, 2014LA MÉDITATION CHRÉTIENNE SILENCIEUSE SELON L’APPROCHE DE JOHN MAIN
25 septembre, 2014http://www.saintlouisenlile.catholique.fr/spip.php?article405#.VCRK45R_umU
LA MÉDITATION CHRÉTIENNE SILENCIEUSE SELON L’APPROCHE DE JOHN MAIN
La méditation est le moyen le plus courant qu’ont employé, au cours de l’histoire, les gens à la recherche de Dieu dans leur quête pour dépasser les apparences superficielles et vraiment prendre contact avec l’Ultime Réalité. La méditation n’est pas un exercice intellectuel ayant pour but de maîtriser certains concepts à propos de Dieu. Son but n’est ni d’acquérir ni d’approfondir des connaissances spéculatives sur Dieu ou la Révélation. Plutôt que de chercher à connaître des choses à propos de Dieu par le moyen de mots, de pensées et d’images, le méditant ou la méditante cherche à vivre directement une expérience de Dieu à l’intérieur d’une foi aimante
La foi chrétienne en la présence de Dieu qui nous habite
Dans le Nouveau Testament, à l’Évangile de Jean, Jésus parle de la présence de Dieu qui nous habite : « Et je prierai le Père et il vous donnera un autre Paraclet pour être avec vous à jamais, l’Esprit de Vérité (…) Vous, vous le connaissez parce qu’il demeure avec vous et qu’il est en vous » (Jn 14,16-17). Et plus loin : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon père l’aimera et nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure. » (14,23) L’invitation que nous fait Jésus est d’habiter en lui, et la promesse qu’il nous fait est qu’il habitera en nous. (Jn 15,4) Les Épîtres de Paul aussi font référence au « mystère du Christ », « ce mystère resté caché depuis des siècles et des générations », qui est « le Christ en vous » (Col 1,26-27).
Accéder à la présence divine en nous
Le type de prière, que nous appelons ici méditation, vient de la conviction qu’en plus de l’intelligence et de l’imagination qui sont des moyens courants pour entrer en contact avec Dieu, nous avons ce que la tradition chrétienne appelle « le cœur mystique ». C’est par ce moyen qu’il est possible de se sensibiliser à la présence divine en nous, d’approcher l’être de Dieu, quoique de façon partielle, loin des images et des concepts qui naturellement déforment la réalité de Dieu. Pour la plupart d’entre nous, ce « cœur mystique » en nous est à l’état latent ou peu développé. Une fois éveillé, il nous attire constamment vers Dieu.
Discerner la révélation de Dieu en tout
La tradition monastique chrétienne a développé une approche progressive pour éveiller le cœur mystique en nous et en venir à une connaissance expérientielle ? de Dieu. Cette approche est la Lectio Divina, qui est l’expression latine pour désigner la lecture des Écritures Saintes. La Lectio Divina permet de discerner les diverses façons dont une parole de la Révélation divine peut nous toucher : par les Écritures, les paroles et exemples des autres, l’art et la nature. La « lecture » faite avec l’oeil intérieur nous remplit d’une nourriture solide (lectio). Il s’agit ensuite de « ruminer » cette parole, processus par lequel le mot va de l’esprit vers le cœur (meditatio). Une fois le cœur touché et ému par cette parole de la Révélation, il s’exhale en gratitude, amour et prière (oratio). Nous en arrivons alors à un état par lequel la réalité de ce mot, et sa source même, deviennent si profondément vécues que nous nous libérons de notre dépendance sur les pensées, les images ou les émotions qui se présentent. Nous nous abîmons simplement avec abandon dans l’étreinte du Dieu vivant en nous (contemplatio). Cette dernière étape de la Lectio aboutit donc à la contemplation.
La prière contemplative
Dans la contemplation, l’être dans sa totalité dit « oui » aux paroles de la Révélation et à Dieu. Il s’agit de la conscience que non seulement Dieu est proche ou présent, mais qu’il est infiniment présent en nous comme Source de notre être. Selon les mots de l’écrivain spirituel contemporain Thomas Merton : « La contemplation est une simple intuition de Dieu éveillée dans l’âme par Dieu et elle nous ouvre à une mystérieuse rencontre expérientielle avec Dieu, rencontre directe mais encore obscure. » Être éveillé à la perception de cette divine présence qui nous habite est le droit de tous les chrétiens et le développement naturel de la grâce du baptême. C’est après ce désir de communion intime avec le Divin, que soupirent nos cœurs.
La méthode de la méditation chrétienne
La méditation n’est pas de la contemplation dans son sens le plus strict, parce que la conscience contemplative est considérée comme un don de l’Esprit Saint. Plutôt, la méditation est une préparation à la contemplation. Elle est une façon de réduire l’hyperactivité de nos vies et elle conduit ainsi vers un état plus calme et plus réceptif dans lequel nous sommes plus disposés à recevoir le don de la contemplation. Aujourd’hui, la méditation chrétienne représente un retour ainsi qu’un renouvellement des enseignements de Jean Cassien (Ve siècle), de la pratique orientale de la « Prière de Jésus », de l’ouvrage classique Le nuage d’inconnaissance (XIVe siècle) ainsi que d’autres sources. Durant les années 70, le moine bénédictin John Main commença à regrouper les différents éléments dispersés de cette tradition, y mettant un certain ordre en vue d’une utilisation simple et pratique pour l’époque contemporaine. Voici les grandes lignes de la pratique de la méditation chrétienne selon la tradition et les enseignements de John Main.
Les enseignements essentiels
- 1. Trouver un endroit calme
- 2. S’asseoir dans une position confortable, droite, détendue mais en restant alerte. Garder les yeux légèrement clos. Restez aussi immobile que possible. Silencieusement, intérieurement, commencer à dire un simple mot. Nous vous recommandons le mot sacré « Maranatha ». Répétez-le comme ceci : MA-RA-NA-THA, en quatre syllabes égales. Pour certains, il est plus facile de répéter le mot au rythme de leur respiration calme et régulière.
- 3. Ne penser ou n’imaginer rien que ce soit, d’ordre spirituel ou autrement. Lorsque des pensées ou des images viennent et retiennent l’attention, retourner doucement au mot sacré.
- 4. Méditer chaque matin et chaque soir pendant 20 à 30 minutes.
Observations sur les éléments essentiels
- 1. Un endroit calme. Choisissez un coin tranquille dans une pièce. Un espace qui ne serait utilisé que pour la méditation et dans lequel aucune autre association d’idées ne pourrait être faite serait idéal. Décorez-le avec une icône, une chandelle ou une bible ouverte. S’il n’y a pas d’endroit calme dans votre maison, cherchez-en un sur le chemin de retour à la maison (par exemple un lieu de culte).
- 2. La posture. Trouver une posture dans laquelle vous serez bien assis, immobile mais alerte. Installez-vous confortablement pour que pendant la durée de la période de méditation, l’activité mentale n’influe pas sur le physique. Un corps calme incite le mental à être calme. Une colonne vertébrale droite mais non rigide facilite la respiration et est propice à l’éveil. Par exemple, asseyez-vous sur une chaise au dossier très droit ; si vous préférez, vous pouvez également vous asseoir sur un banc de prière ou vous asseoir par terre, les jambes croisées avec le fessier légèrement élevé sur l’extrémité d’un coussin.
- 3. Le mot sacré ou mantra. « Maranatha » est un mot araméen (la langue que Jésus parlait) qui signifie « viens, Seigneur Jésus ». C’est probablement la prière chrétienne la plus ancienne. Saint Paul termine sa première Lettre aux Corinthiens avec ce mot et saint Jean l’emploie pour clore le Livre de l’Apocalypse. Parce que le mot est étranger, les gens n’y associent généralement pas beaucoup de pensées et d’images. D’autres phrases ou mots sacrés peuvent être utilisés et notre tradition en possède beaucoup. Quel que soit le mot sacré employé, de sa répétition faite avec foi et amour, il résultera un flot de foi et d’amour provenant de l’intérieur de notre cœur. La répétition fidèle de ce mot prend toute son essence dans l’attention et l’intention. Le rôle du mental est de produire des pensées. On ne peut s’attendre tout à coup à ce que le mental s’arrête subitement de fonctionner pour la simple raison qu’il est temps pour nous de méditer. Nous lui donnons donc quelque chose pour l’occuper : le mot sacré, ce qui nous permet de centrer notre attention sur cette Présence divine en nous. Ce mot porte également notre intention qui est le travail de Dieu en nous. Certains prononceront MA-RA durant l’inspiration et NA-THA durant l’expiration. D’autres préféreront dire MA-RA-NA-THA durant l’inspiration et rien durant l’expiration. Quoiqu’il est utile de bien synchroniser le mot avec la cadence naturelle du corps, si cela s’avère trop compliqué, on peut répéter le mot sans y prêter d’attention. Le corps possédant sa propre sagesse régularisera ce rythme de façon naturelle.
- 4. Pensées, images, émotions, souvenirs et perceptions des sens qui stimulent le mental. Tout ceci constitue une expérience normale pendant la méditation. Attendez-vous à leur intervention régulière. Essayer de réprimer toutes pensées ou émotions est aussi impossible que malsain. Il suffit de ne pas entretenir ces pensées ou ces émotions, de ne pas y investir d’énergie en réagissant, en résistant ou en les retenant. Lâcher prise tout simplement. Leur émergence vers la surface fait partie du processus d’évacuation, de purification, de guérison et de libération qui fait de la méditation une divine thérapie. Chaque fois que vous devenez conscient d’être « traqué », revenez doucement à votre mantra qui exprime fidèlement votre intention d’être devant Celui qui Est, dans une attention complète d’amour.
- 5. L’horaire et la fréquence. Les périodes traditionnelles de méditation dans toutes les religions du monde se situent aux premières heures du matin et vers la fin de l’après-midi ou tôt en soirée, avant les repas dans la mesure du possible. La recommandation de 20 à 30 minutes est proposée en tenant compte de deux considérations : 1) le minimum de temps généralement considéré nécessaire pour établir le silence intérieur et 2) le maximum de temps que la plupart des gens d’aujourd’hui peuvent investir de façon réaliste. La fin de cette période de prière peut se terminer par le son d’une cloche à condition que le tintement en soit très délicat. Pour terminer cette méditation, certains font une transition graduelle vers l’activité cognitive en récitant intérieurement une prière qui exprime une attitude d’ouverture et d’abandon, à l’image de ce qui a été vécu durant la période de méditation.
Trouver du soutien dans votre pratique
L’explication de la méthode de la méditation chrétienne est très simple. Ce qui est plus difficile à réaliser est d’en maintenir la régularité avec discipline et de respecter cette priorité en interrompant ce que vous êtes en train de faire pour aller prier. Votre participation à un groupe de soutien, avec qui prier et partager une fois par semaine, contribuera à vous aider à respecter votre engagement à la prière. En plus, ce groupe vous donnera, sur une base régulière, l’occasion d’obtenir de l’enseignement supplémentaire, grâce à l’écoute de conférences, cassettes et discussions.
Texte par Thomas Ryan, c.s.p. traduction de Robert Prud’homme et illustrations de Marielle Tardif
LES HOMMES SONT DES CADEAUX
25 septembre, 2014http://www.spiritualite-chretienne.com/moderne/XXsiecle.html#Dream
LES HOMMES SONT DES CADEAUX
Du moins ainsi pensait Jésus : » Père, je veux que ceux que tu m’as donnés soient là où je serai… «
Je partage l’avis de Jésus et je veux que ceux que le Père m’a donnés soient là où je serai.
Les gens sont des cadeaux que le Père a enveloppés pour nous les envoyer.
Certains sont magnifiquement enveloppés.
Ils sont très attrayants dès le premier abord.
D’autres sont enveloppés de papier très ordinaire.
D’autres ont été malmenés par la poste.
Il arrive parfois qu’il y ait une « distribution spéciale ».
Certains sont des cadeaux dont l’emballage laisse à désirer ;
d’autres dont l’emballage est bien fait.
Mais l’emballage n’est pas le cadeau !
C’est si facile de faire une erreur et nous rions quand les enfants prennent l’un pour l’autre.
Parfois le cadeau est difficile à ouvrir. Il faut se faire aider.
Peut-être parce que les autres ont peur ?
Parce que ça fait mal ?
Ils ont peut-être déjà été ouverts et rejetés !
Ou se pourrait-il que le cadeau ne me soit pas destiné ?
Je suis une personne et donc, moi aussi, je suis un cadeau !
Un cadeau pour moi-même d’abord.
Le Père m’a donné à moi-même.
Ai-je été regarder à l’intérieur de l’emballage ?
Ai-je peur de le faire ?
Peut-être ai-je jamais accepté le cadeau que je suis…
Pourrait- il se faire qu’il y ait à l’intérieur quelque chose de différent de ce que j’imagine ?
Je n’ai peut-être jamais vu le cadeau merveilleux que je suis.
Les cadeaux du Père pourraient-ils être autre chose que magnifiques ?
J’aime les cadeaux que je reçois de ceux qui m’aiment,
pourquoi pas les cadeaux du Père ?
Je suis un cadeau pour les autres.
Est-ce que j’accepte d’être donné par le Père aux autres ?
Un homme pour les autres ?
Les autres doivent-ils se contenter de l’emballage ?
Sans jamais pouvoir apprécier le cadeau ?
Toutes les rencontres sont des échanges de cadeaux.
Mais un cadeau sans quelqu’un qui le donne n’est pas un cadeau ;
c’est une chose privée des liens avec celui qui le donne ou celui qui le reçoit.
L’amitié est une relation entre les personnes qui se voient comme elles en vérité…
Les cadeaux du Père les uns envers les autres, pour les autres, pour des frères !
Un ami est un cadeau pas seulement pour moi, mais aussi pour les autres à travers moi.
Quand je regarde mon ami, quand je me l’approprie, je détruis sa nature de cadeau.
Si je le mets de côté pour moi, c’est alors que je le perds ;
si je le donne aux autres, je le garde.
Les gens sont des cadeaux reçus ou donnés…
comme le Fils.
L’amitié est une réponse de personnes – cadeaux au Père qui donne.
L’amitié est Eucharistie, action de grâce !
Georges B. Wintemann
Document du MEJ (mouvement eucharistique des jeunes)
Transmis par Aude Bernhart