Archive pour le 22 juillet, 2014

Jésus et les enfants, pour les enfants

22 juillet, 2014

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DE L’ESPACE POUR LES PIEDS

22 juillet, 2014

http://www.bertrandouellet.com/index/DossierSignes/Signes06.html

Chronique « Signes de foi », no 6

Revue Vivre en Église, février 2003

DE L’ESPACE POUR LES PIEDS

Non, je ne parlerai pas aujourd’hui de la publicité d’un nouveau modèle de voiture promettant plus d’espace pour les jambes. Mais plutôt d’un de mes psaumes préférés, celui qui dans la liturgie porte le numéro 30.
C’est à la fois un psaume de confiance et un cri de détresse: « En toi, Seigneur, j’ai mon refuge… Ma forteresse et mon roc, c’est toi…Tu m’arraches au filet qu’ils m’ont tendu, oui c’est toi mon abri… Entre tes mains, je remets mon esprit…  » Mais aussi: « Ma vie s’achève dans les larmes… Je suis la risée de mes adversaires… On m’ignore comme un mort oublié… De tous côtés c’est l’épouvante… »
À la fois supplication dans la détresse et confiance inébranlable en Dieu. On peut autant y deviner toute la souffrance du monde qu’y entendre l’acte de foi qui empêche de sombrer dans le désespoir.
Mais quel lien y a-t-il, me direz-vous, avec l’espace pour les pieds?
Eh bien! ces mots se trouvent bel et bien dans le texte original mais sont apparemment disparus de notre version liturgique. Alors quand je m’en suis rendu compte, j’ai décidé de faire enquête.
Le texte en question est la deuxième partie du verset 9. Dans l’original, en hébreu, il y a trois « mots ». Le premier peut se traduire: « tu as fait se tenir debout »; le deuxième, « dans un vaste lieu »; le troisième, « mes pieds » ou « mes pas ».
J’ai comparé 25 traductions (*). La plus littérale que j’ai lue est: « tu as fait que mes pieds se tiennent en un vaste lieu ». Mais j’ai trouvé aussi des choses comme « sur un large chemin, tu affermis mes pas » et « tu daignes, mes pas, voir à leur liberté ». Une version nous envoie même en orbite avec « tu diriges mes pas dans l’espace »! La TOB, elle, a opté pour « tu m’as remis sur pied, tu m’as donné du large ».
Quant à la version liturgique, on y sent un effort particulier pour tenir compte de l’ensemble du psaume. En effet, quand le psalmiste parle de grand espace pour les pieds ou les pas, c’est en réponse à l’appel au secours du juste persécuté, poursuivi, cerné par ses ennemis. Si le Seigneur lui donne de l’espace « pour les pieds », ce n’est pas pour son confort ou pour le mettre à l’aise, c’est pour lui permettre de marcher vers son salut, pour le sauver en lui ouvrant la voie vers la liberté!
Or, en français, il y a un mot pour dire « espace pour les pas », « espace pour passer »: c’est tout simplement « passage ». Donner de l’espace pour les pas, c’est ouvrir un passage. D’où la belle traduction liturgique: Devant moi, tu as ouvert un passage.
Dieu dégage et ouvre la voie pour qu’on puisse se mettre en marche, en toute liberté. On pressent, déjà, l’appel de Jésus, le Sauveur qui dit: « Viens et suis-moi. »
Qui prie avec ce psaume ainsi traduit n’attendra pas une intervention de Dieu qui ferait disparaître comme par enchantement les obstacles, les tentations, les adversaires ou les croix. Devant moi, tu as ouvert un passage est déjà, d’une certaine façon, une profession de foi pascale.

Bertrand Ouellet

Février 2003

LE DIEU ÉTERNEL REMPLIT TOUT L’ESPACE ET SE SUFFIT À LUI-MÊME

22 juillet, 2014

http://oratoiredulouvre.fr/predications/dieu-remplit-tout-l-espace.php

LE DIEU ÉTERNEL REMPLIT TOUT L’ESPACE ET SE SUFFIT À LUI-MÊME

Culte à l’Oratoire du Louvre,

par le pasteur Florence Taubmann

J’ai eu, il n’y a pas très longtemps, une longue conversation avec une personne .
qui me parla de problèmes au sein de sa famille. Elle essayait d’apaiser des conflits difficiles mais elle avait le sentiment d’être impuissante.
Je lui fis remarquer qu’en fait elle jouait un rôle bien plus important et positif qu’elle ne le pensait ….et qu’il fallait sans doute du temps. Du temps pour que son travail porte ses fruits.
Et je lui dis alors :  » J’ai l’impression que ce que vous faîtes est comme un travail de réparation ; vous êtes au milieu de la réparation et pour l’instant cela ne peut encore rien donner …mais c’est certainement la seule chose que vous puissiez faire. « 
Et je lui racontai que cela me faisait penser à une notion importante de la pensée juive et qui est le  » tikun « , la réparation du monde. Et je lui expliquais ce qu’est le  » tikun « 
Cette notion vient d’Isaac Louria un cabaliste du 16ème siècle et elle est liée à la vision cabaliste de la création du monde.
Au commencement le monde ne peut pas exister, car il n’y a pas de place pour lui. Le Dieu éternel remplit tout l’espace et se suffit à lui-même.
Quand il décide de créer quelque chose en dehors de lui-même, il lui faut faire de la place pour cette création, et donc se rétracter en lui-même.
Cette rétractation pour créer le monde, on l’appelle le tsimtsum. Dieu ne remplit plus le tout, il s’exile en lui-même pour laisser place à la création. (Analogie de l’ascenseur.)
Ensuite, de ce Dieu qui s’est retiré émane une lumière qui, dans l’espace laissé vide, est destiné à prendre forme d’émanations divines ou  » sefirot « . Mais un accident a lieu, l’accident originel qui fait que les choses ne se passent pas comme elle le devraient.
Une des explications de cet accident est que la lumière divine est si forte et si intense que les vases divins destinés à la recevoir se brisent. C’est ce qu’on appelle la chevirah,  » la brisure des vases  » et la lumière divine revient donc à son point de départ, laissant derrière elle une création imparfaite, et donc habitée par le mal.
Ce qui me semble important dans cette vision allégorique, c’est que cette chevirah, cette part d’échec dans la création, n’incombe pas à Adam et Eve, Il leur est antérieur, il fait partie du processus de création lui-même.
Et à partir de là, l’homme, et donc Adam et Eve en premier lieu, reçoivent vocation de réparer les dommages causés par la chevirah. Ils reçoivent vocation de réparer le monde, et cette réparation du monde participe prépare l’œuvre de rédemption. Elle est tournée vers l’avenir et donne à l’humain une immense responsabilité en même temps qu’une responsabilité à sa mesure.
Il ne s’agit pas de changer le monde, ou de changer de monde, mais d’habiter celui-ci et de le corriger dans ce qu’il a d’injuste et de cruel, de réparer ses blessures, ses infirmités, ses maladies.
Quand j’eus fini d’expliquer cela à mon interlocutrice, elle eut un grand sourire et me dit :
 » C’est drôle que vous me parliez de cela, de la réparation, car moi-même je suis réparatrice « 
Et comme je la regardai étonnée elle ajouta :
-  » Oui c’est mon métier. Je ne répare pas des vases brisés, mais des tissus anciens. Je retisse les fils rompus ou abimés. Et pour tout dire encore plus qu’un métier, c’est pour moi un mode de vie. Cela correspond vraiment à ce que je suis, à ma nature profonde. « 
Et comme j’étais émerveillée de la coïncidence, elle me parla de son travail qui, me dit-elle, consiste à faire passer, à transmettre, des œuvres du passé vers l’avenir.  » Et si je travaille bien me dit-elle, mon ouvrage ne doit pas se voir. C’est pourquoi je travaille souvent sur l’envers…J’ai ma méthode …
Ce travail de réparation, attentif, soigné, rigoureux, humble, invisible …vous imaginez toutes les pensées qu’il a pu suscitées en moi.
Et si je vous raconté tout cela, c’est pour vous monter combien les rencontres de la vie nous donnent souvent un nouveau regard sur les choses, et peut-être une nouvelle manière d’entendre l’Evangile.
Et cela va donc éclairer ma lecture de me permettre de l’Evangile que j’ai retenu pour aujourd’hui.
1) l’homme est né aveugle.
Sa cécité a une double force symbolique.
Par rapport au thème de la lumière, très présent dans la Bible, et central dans l’Evangile de Jean.
Au chapitre précédent Jésus s’est adressé à la foule par ces mots :
 » Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit aura la lumière de la vie et ne marchera plus jamais dans les ténèbres.  »
Les guérisons d’aveugles ont par conséquent un sens très fort dans les Evangiles, et a fortiori dans l’Evangile de Jean. Et elles se présentent comme l’accomplissement de paroles prophétiques annonçant les temps messianiques.
Ceux qui étaient dans les ténèbres sont désormais dans la lumière.
Et donc ces guérisons correspondent à des pièces à conviction. Les temps sont venus, puisque cet homme Jésus guérit les aveugles ….comme ailleurs il fait marcher les boiteux, il relève les morts.
Il est bien celui qui devait venir.
Mais ce n’est pas tout. Il se trouve que cet aveugle de l’Evangile de Jean nous est présenté comme aveugle de naissance.
Et la précision est d’importance.
Elle renvoie à la question de l’origine, elle renvoie à la question d’un mal avant la vie.
C’est à la fois la question de Job et plus que la question de Job.
Job s’interrogeait sur le malheur qui lui arrivait. Il avait été heureux, béni, comblé. Et il perdait tout.
Mais cet homme, lui, a toujours été aveugle. Il est né ainsi. Pourquoi ?
Qu’est-ce que cela veut dire ?
2) Les disciples de Jésus posent la même question que les amis de Job.
A notre échelle humaine, le mal, la souffrance, l’infirmité semblent toujours nous renvoyer à la question de l’innocence ou de la culpabilité.
Les amis de Job lui disaient :  » Si un tel malheur t’atteint, c’est que tu as fait du mal, c’est que tu as péché, toi ou tes enfants. « 
Les disciples de Jésus lui demandent :  » Pourquoi cet homme est-il né aveugle ? Est-ce à cause de son propre péché ou du péché de ses parents ?  » Autrement dit est-il puni du péché de ses parents ou sa cécité est-elle le signe qu’il était pécheur dès l’origine ?
Aujourd’hui nous ne voulons plus entrer dans cette logique rétributive qui explique le mal et la souffrance par le péché, qu’il s’agisse du péché personnel ou du péché originel.
Elle nous semble absurde et nous révolte.
Mais nous sommes également révoltés par la gratuité et l’absurdité de la souffrance.
Nos questions ne sont peut-être plus les mêmes. Car nous bénéficions aujourd’hui de beaucoup d’explications scientifiques.
Mais au-delà, ne sommes-nous pas toujours à la recherche d’une autre réponse ? D’une réponse métaphysique ? D’une réponse théologique ? En tant que pasteurs nous sommes toujours autant interrogés sur ces questions :
Pourquoi le mal ?
Pourquoi cet homme est-il né aveugle ?
C’est là que la vision cabaliste, que j’expliquais tout à l’heure, peut nous éclairer et nous libérer.
Car elle ne fait pas peser la responsabilité du mal sur l’homme, elle n’évoque pas la  » chute  » d’Adam et Eve pour expliquer la souffrance du monde.
Mais elle propose de lire le mal, la souffrance, l’imperfection des êtres et des choses de ce monde comme inhérents à la création elle-même.
Avec l’image des vases brisés par la trop forte lumière divine, le secret du mal est enfoui dans l’origine. Il ne nous est pas accessible. Nous ne pouvons pas y porter nos regards.
Cette explication est particulièrement éloquente dans le cas qui nous occupe. Car s’il ne s’agit pas d’un vase brisé par l’intensité de la lumière divine, il s’agit d’un homme aveugle …peut-être aveuglé pour la même raison.
Cette interprétation est bien sûr symbolique, mais elle nous fait sortir de la question de la culpabilité. Elle nous en libère.
Et de ce fait elle nous oriente vers une nouvelle responsabilité. Cette responsabilité, je vous propose de l’appeler la réparation du monde.
3) Que fait Jésus sinon réparer le monde ?
D’abord dans la manière dont il répond à ses disciples, Jésus corrige, répare leur vision de l’homme et de Dieu. Non cet homme aveugle n’a pas péché, ni ses parents…non Dieu n’est pas un Dieu qui punirait l’homme dans son corps ou dans sa vie.
Quand les disciples interrogent Jésus sur la cause du mal, sur son origine, il leur répond par un objectif. Il leur répond par une proposition d’avenir.
 » Tout cela c’est pour que les oeuvres de Dieu soient manifestées en lui.  » Et il les invite à accomplir les œuvres de Dieu tant qu’il fait jour.
Accomplir les œuvres de Dieu ? Quel programme ! En sommes-nous capables ? Voilà qui a de quoi nous effrayer…
Mais Jésus joint le geste à la parole. En le regardant agir on apprend en quoi consistent les œuvres de Dieu.
Et là il s’agit justement d’une œuvre de réparation.
En regardant Jésus agir, on a un enseignement à la fois très simple et très fort.
D’abord de quoi se sert-il ?
De sa propre salive et de la terre qui est à ses pieds.
La salive provient du même lieu que la parole, c’est-à-dire la bouche. Elle représente l’intimité vivante. Dans le monde animal elle peut avoir des effets thérapeutiques. On voit parfois des animaux lécher leurs plaies.
Et la terre représente la poussière du sol, l’humus, c’est-à-dire ce dont nous sommes faits, notre origine, et ce vers quoi nous retournerons.  » Poussière tu redeviendras poussière.
Mais les psaumes de création associent toujours l’infiniment petit à l’infiniment grand … les étoiles sont évoquées en même temps que l’herbe des champs… et le début de la vie comme la fin de la vie.
Dans la boue que fait Jésus à partir de sa salive et de la poussière, on peut donc voir le symbole du principe de vie de la naissance à la mort, et même le principe de la création:
La salive de Jésus anime la poussière du sol en se mélangeant à elle. Il en fait ressortir les principes actifs.
Le geste de Jésus qui est de frotter les yeux de l’aveugle avec cette boue consiste à communiquer ce principe de vie à ces yeux qui sont morts. Mais dans un premier temps la boue enténèbre davantage le regard.
Il faut l’ordre de Jésus et que l’aveugle se lave lui-même le visage pour qu’il retrouve la vue et naisse à la lumière.
Cette guérison accomplie par Jésus peut être comprise comme une véritable réparation. Elle en a le côté matériel et physique. Contrairement à ce qui se passe pour d’autres signes, d’autres miracles, ici Jésus agit concrètement.
Cette réparation peut donc devenir très parlante pour nous, en nous renvoyant concrètement à nos expériences de vie, à nos rencontres, à notre responsabilité dans le tikun, dans la réparation du monde.
Tout à l’heure j’évoquais cette personne qui répare les tissus anciens, en leur redonnant vie et leur permettant de passer à la postérité. Cette personne qui, au sein de sa propre famille, essaie finalement d’exercer le même office : retisser les fils cassés, usés ou abîmés, des relations entre les êtres.
Je crois que chacun d’entre nous a, au sens propre comme au figuré, sinon un champ de ruines à restaurer, du moins un vase brisé à recoller, ou des fils à renouer, des situations à refaçonner pour les rendre plus vivables …
Je crois que chacun d’entre nous, s’il accepte de mettre ses lunettes de réparateur, peut trouver des chantiers à la mesure de ses possibilités, et des occasions qui se présentent à lui.
Et nous pouvons garder comme exemple pour nous inspirer aussi bien cette femme avec ses tissus que Jésus avec la boue réparatrice qu’il crée à partir de sa salive et de la poussière du sol.
Dans un cas comme dans l’autre cela veut dire qu’il n’y a pas de réparation sans un don venu de notre intimité, sans une implication profondément personnelle. Et cela veut dire aussi qu’en même temps la réalité la plus proche
nous offre la matière nécessaire au travail de réparation.
Car cette réparation n’est pas d’une ambition démesurée , comme serait l’ambition de changer le monde, ou de changer de monde…
Cette réparation ne relève pas du rêve ou de l’illusion.
C’est le travail, c’est la responsabilité de tout ouvrier du royaume qui d’abord rend grâce pour cette vie, trouve ce monde beau et bon à vivre, tout en voyant avec lucidité ce qui est juste et ce qui est injuste, ce qui est beau et ce qui est laid, ce qui doit être encouragé, ce qui doit remplacé.
Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, la modestie apparente de ce projet ne signifie pas qu’il ne soit pas enthousiasmant.
Elle signifie simplement que rien n’est dérisoire dans ce que nous faisons pour notre prochain et pour le monde.
Toute action, tout geste, toute parole qui procède de la justice et de la miséricorde participe à la réparation de ce monde.
C’est par nos efforts quotidiens, efforts personnels et efforts communs,
que nous répondons de la grâce de Dieu, que nous en témoignons, et que nous luttons le mieux contre le fatalisme.
Dieu a besoin de nous. Il nous confie la responsabilité d’entretenir, de réparer et de transmettre sa création à ceux qui nous suivront.
Rendons lui grâce pour ce qu’il nous donne la force de faire.
Car un travail extrêmement joyeux.
Amen