Archive pour le 2 avril, 2014

Eastern Orthodox icon of the Myrrhbearing Women at the Tomb of Christ (Kizhi, Russia, 18th century).

2 avril, 2014

Eastern Orthodox icon of the Myrrhbearing Women at the Tomb of Christ (Kizhi, Russia, 18th century). dans images sacrée Wifes_grave_kizhi

http://en.wikipedia.org/wiki/Myrrhbearers

EMMANUEL LÉVINAS… – PHILISOPHE JUIF DU XXIÈME SIÈCLE (1905-1995), NÉ À VILNIUS.

2 avril, 2014

http://chemins.eklesia.fr/cdh/levinas.php

EMMANUEL LÉVINAS…

RÉSUMÉ DE SA VIE :

PHILISOPHE JUIF DU XXIÈME SIÈCLE (1905-1995), NÉ À VILNIUS.

Marqué par l’acceuil de sa femme et de son fils pendant la guerre dans un couvent de religieuses, Emmanuel Lévinas est resté fidèle à sa religion, mais représente pour les chrétiens, la plus grande avancée d’un juif vers le christianisme.
Lira Maritain et Bergson lors de son arrivée à Paris dans les années 30.
Il a notamment été un interlocuteur privilégié de Jean Paul II pendant plus de 20 ans.
Avec Hans Jonas, il développe le thème de la résponsabilité, un appel déchirant après ce qu’ils nomment » le retrait de Dieu » dans ces pages déchirantes de l’histoire que sont des drames comme la Schoah…. Ses écrits, et en particulier « Autrement qu’être ou au delà de l’essence » évoque l’exposition du visage et la kénose (se vider en grec) qui reprenne pour le chrétien les thèmes développés par Saint Paul dans l’Epitre aux Philippiens…(Chap 2).
Sa mort à la veille de Noêl 1995, forme comme un signe écrivait P. Ricoeur dans le Monde, Lévinas s’éteint à la veille d’une naissance. On ne peut reprocher sa fidélité au judaïsme, on peut par contre se réjouir de ce pont tracé entre deux peuples, ces fils spirituels du même Dieu…
Biographie : Emmanuel Lévinas : la vie et la trace, par Salomon Malka, J.C. Lattès 324p., 20 Euros

COMMENTAIRES …

A) LE THÈME DE LA PASSIVITÉ…

Lévinas, dans « Autrement qu’être et au-delà de l’essence » parle d’une passivité plus que passive, d’une exposition totale à la loi de l’autre, d’une dénudation, d’un sacrifice. Il ne parle pas de changer de joue, mais se contente d’exposer cette exposition qui fait signe, qui cristallise le Dire dans le Dit.
Entre les deux, et sous les réserves de l’acte sacrificiel ultime du Christ (Romains 5,17, cf plus loin ), je resterais dans le « plan humain » pour noter l’importance du visage. Lorsque le sujet s’expose en tournant l’autre joue, il présente son visage et dans son visage l’autre est assigné à une responsabilité.
Le visage qui s’expose c’est le début, la trace de la relation. C’est une exposition à la fois passive et active de l’homme blessé à l’autre. C’est le seul moyen d’introduire la parole.
Dans le monde animal, le face à face n’existe pas, le visage n’est pas exposé dans la relation, en particulier dans la sexualité. Chez l’homme, le visage s’expose. Il est toujours nu devant l’autre. Sans visage, l’homme retombe à l’état d’animal. Ne dit-on pas que la pornographie c’est l’exposition du corps sans visage.
Toute relation qui ne passe pas par le visage conduit à la possession de l’autre. Ce principe s’applique à l’ensemble des rapports interpersonnels (violence muette, viol, meurtre, adultère, convoitise). Si l’on rétablit le visage, l’autre peut advenir.
Lorsque le visage s’expose, ne serait-ce que l’instant nécessaire à l’homme blessé pour exposer l’autre joue, la relation commence et la responsabilité de l’autre est engagée. Si le visage est masqué, il ne peut y avoir de relation.
Si l’autre, ou plutôt quand l’autre prend conscience de sa responsabilité, il peut s’ouvrir à la relation.
Pari audacieux de l’exposition du visage. Espérance d’une relation. L’homme ne peut aller plus loin sans l’Autre. Mais c’est un autre sujet, que nous aborderons plus loin.

b) L’exposition
L’exposition est le thème principal de Lévinas dans « Autrement qu’être ou au-delà de l’essence » :
« L’un s’expose à l’autre comme une peau s’expose à ce qui la blesse, comme une joue offerte à celui qui frappe » (Autrement qu’être ou au delà de l’essence, Poche p. 83).
Pour moi, l’exposition rejoint ce que j’appele le « sacrifice-actif » ou le « suivre-actif » en opposition au « sacrifice-aliéné » ou au « suivre-passif ». Il y a dans l’exposition la trace d’un verbe qui se contente du silence pour exposer et assigner l’autre à l’attention. C’est le thème central pour moi de l’arbre du jardin d’Eden dans la parole du « Tu ne mangeras pas » (à l’inaccompli) et qui prend sa pleine dimension dans « l’exposition » sur la croix (voir aussi sur ce thème, chez Paul Beauchamp, dans L’un et l’Autre Testament)…
Pour comprendre, dans une acception chrétienne et donc réductrice le texte de Lévinas, il faut traduire le « Dire » comme le Dieu indicible et le « Dit », comme le Verbe qui s’expose, comme la trace, la parabole vivante du Christ qui s’expose sur la Croix :
« Mais le Dire est dénudation de la dénudation, donnant signe de sa signifiance même, expression de l’exposition  » hyperbole de la passivité qui dérange l’eau qui dort, où, sans Dire, la passivité grouillerait de secret desseins.
Passivité de l’exposition en réponse à une assignation qui m’identifie comme l’unique, non point en me ramenant à moi-même, mais en me dépouillant de toute quiddité identique et, par conséquent, de toute forme, de toute investiture, qui se glisserait encore dans l’assignation . »
Dans ce texte, Lévinas présente sous la métaphore du Dire et du Dit ce qui peut être pour nous Dieu et Christ, le mystère du Christ qui s’expose sur la Croix . On retrouve les textes de la tradition judéo-chretienne et surtout de l’Ecriture :
Isaïe 53,12 : « Il s’est dépouillé lui même jusqu’à la mort », le « Il s’annéantit lui-même, obéissant jusqu’à la mort ». (Phil 2, 6 -11), le « Tu n’as pas voulu de sacrifices ni d’offrandes, mais tu m’as fait un corps (He 10, 5) ou encore le : « Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : « Voici je viens. Dans le livre est écrit ce que tu veux que je fasse » Ps 39, 7.
Plus loin dans son livre, Lévinas a un passage très beau sur le sens de ce que je qualifierais « l’incarnation » :
« La responsabilité pour Autrui » dans son antériorité par rapport à ma liberté (…) est une passivité plus passive que la passivité » exposition à l’autre sans assomption de cette exposition même, exposition sans retenue, exposition de l’exposition, expression, Dire. Franchise, sincérité, véracité du Dire. Non pas Dire se dissimulant et se protégeant dans le Dit, se payant de mots en face de l’autre » mais dire en se découvrant » c’est-à-dire se dénudant de sa peau  » sensibilité à fleur de peau, à fleur de nerfs, s’offrant jusqu’à la souffrance  » ainsi, tout signe, se signifiant. La substitution à bout d’être aboutit au Dire  » à la donation de signe, donnant signe de cette donation de signe, s’exprimant . »
Pour moi c’est une des plus belles expressions de la passion du Christ, qui donne le sens de cette passion sans toutefois le nommer. Ecoutons la suite :
« Dans la sincérité, dans la franchise, dans la véracité de ce Dire  » dans le découvert de la souffrance « l’être s’altère. Mais ce dire demeure, dans son activité, passivité ; plus passif que toute passivité, car sacrifice sans réserve, sans retenue . »
« C’est à partir de la proximité qu’il prend son sens. (…) Dans la provocation anarchique qui m’ordonne à l’autre, s’impose la voie qui mène à la thématisation et à une prise de conscience : La prise de conscience est motivée par la présence du tiers à coté du prochain approché; le tiers aussi est approché; la relation entre le prochain et le tiers ne peut être indifférente à moi qui approche « 
C’est pour moi le thème central. Dans ce tiers, ce Christ exposé sur la croix, il y a une assignation à laquelle on ne peut se dérober, à laquelle l’homme, dans l’exercice de ses relations avec autrui se sent responsable, en vérité. Comment être faux face à soi-même et donc face à l’autre, si dans l’attention qui caractérise nos décisions nous mettons en perspective cette exposition du Christ en croix. Quel frein, quelle démarche de mêmeté ou d’avoir résiste à cette kénose, à cet abaissement d’un Christ qui se présente à nous dans sa nudité exposée, dans ce sacrifice non voulu. Sacrifice actif par son silence qui expose et assigne sans contraindre. La Croix n’est pas une aliénation, une loi que l’on doit craindre. Il est le tout de l’amour divin. Suprême étant sans l’être, car infini inatteignable, non-rattrapable, in-imitable.
« Le surgissement d’une subjectivité [foi ?], d’une âme, d’un qui, demeure corrélatif de l’être [Savoir ?], c’est-à-dire simultané et un avec lui. (…) Mais la manifestation de l’être à lui-même impliquerait une séparation dans l’être. » Pour cela, il faut le temps, le temps de la découverte de l’être et des retrouvailles de la vérité, réunion sous l’unité de l’aperception, recommencement [Naître de nouveau ?] du présent . »
La prise de conscience, l’éclairage de la croix, la chute du voile est renaissance. « L’essence de l’être est dispersion de l’opacité . »
Le texte suivant donne une très belle image de la mission du Christ. Mais cette version non confessionnelle et qui reste philosophique grâce à la métaphore du Dire et du Dit parle beaucoup plus pour un Chrétien :
« Le Dire tendu vers le Dit et s’absorbant en lui, corrélatif du Dit, nomme un étant, dans la lumière ou la résonance du temps vécu qui laisse apparaître le phénomène, lumière et résonance qui peuvent à leur tour, s’identifier dans un autre Dit. Désignation et résonance qui ne viennent s’ajouter du dehors au phénomène par l’effet d’un code conventionnel réglementant l’usage d’un système de signes. C’est dans le déjà-dit que les mots – éléments d’un vocabulaire historiquement constitué  » trouveront leur fonction de signe et un emploi et feront pulluler toutes les possibilités du vocabulaire. (Note de Lévinas : Mais cela atteste une passivité extrême du Dire de derrière le Dire se faisait simplement corrélatif du Dit; passivité de l’exposition à la souffrance et au traumatisme, que le présent ouvrage essaye de thématiser.)  » (65)
Je traduirais ainsi ce même paragraphe : « Dieu tout tendu vers le Christ-Verbe et s’absorbant en lui, corrélatif du Verbe, nomme un étant, Jésus [Dieu Sauve], dans la lumière [Transfiguration] ou la résonance du temps vécu [Ancien testament] qui laisse apparaître le phénomène [Sens caché du visible, Déchirement du voile], lumière et résonance qui peuvent à leur tour, s’identifier dans un autre Dit [Esprit-Saint]. Désignation et résonance qui ne viennent s’ajouter du dehors au phénomène [sens caché d'une réalité visible] par l’effet d’un code conventionnel réglementant l’usage d’un système de signes [loi juive]. C’est dans le déjà-dit [Ancien Testament] que les mots [paraboles du Christ]- éléments d’un vocabulaire historiquement constitué  » trouveront leur fonction de signe [Nouvelle alliance] et un emploi et feront pulluler toutes les possibilités du vocabulaire [Nouvelle évangélisation]. (Note de Lévinas : Mais cela atteste une passivité extrême Dieu de derrière Dieu le fils, se faisait simplement proche du Christ; passivité de l’exposition à la souffrance [sur la Croix] et au traumatisme, que le présent ouvrage essaie de thématiser.
Que dire après un texte d’une si grande portée ? Je rajouterais une clarification, sur cette vision du Christ pour montrer, que loin d’être une image, elle est icône, c’est à dire qu’il faut percevoir le Christ non comme un étant suprême auquel on peut parvenir mais comme un infini dans l’abaissement, un jusqu’au bout de la kénose auquel on est appelé à tendre, sans en pouvoir saisir l’essence .

c) La faille de la mêmeté…
La recherche sur l’être ne cesse de progresser. Des multiples voies ouvertes par Aristote on est parvenu à l’être-là Heidegerien, à l’être-en-acte Husserlien. Mais le chemin de l’être-idôle à l’être-agape n’est pas terminé tant que le Moi reste présent dans ce Palais de sable . Il faut parvenir à un autrement-qu’être lévinassien, dépasser l’être en acte où le Moi garde sa maîtrise; dans un au-delà de l’être, dans une passivité plus que passive où le désir d’un autre vient supplanter son désir. Le désir ne peut devenir Désir que lorsqu’il a été mis à l’épreuve du désir de l’autre. Lorsque l’autre n’est pas, l’étant ne peut être.
Ce message est-il une nouvelle synchronie. Il ne semble pas. Au contraire, la porte étroite de l’Agape est diachronie, incarnation et révélation d’un au-delà. La totalité est fermeture autour du Moi et de l’image du Moi dans le Même. L’ouverture à l’autre, son assignation, la responsabilité qui m’engage est rupture, dépossession et kénose. Elle est chemin d’infini.
Le voile déchiré par la Passion a été lentement recousu par la systématisation totalitaire d’une raison omnisciente. Il convient de retrouver dans la Trace du divin sa responsabilité originelle pour autrui. L’Esprit de Vérité n’est pas dans la cristallisation du dit mais dans une dialectique entre voile et dévoilement . L’écriture, la Loi, trace du Dire, de la Parole vivante reste chemin de conversion.
Celui qui crée le vent, qui révèle à l’homme quel est son dessein, qui des ténèbres produit l’aurore, qui marche sur les hauteurs de la terre, il se nomme le Seigneur, Dieu de l’univers (Am 4,13)
Peut-être faut-il que les ténèbres soit , que la totalité d’un cogito tout puissant soit détruite, pour que le cÏur humain retrouve une dynamique réflexive et une difficile liberté.

 

TDC 087 – LE MARIAGE COMME SACREMENT, SELON SAINT PAUL AUX EPHÉSIENS

2 avril, 2014

http://www.theologieducorps.fr/tdc/tdc-087-mariage-comme-sacrement-selon-saint-paul-aux-ephesiens

TDC 087 – LE MARIAGE COMME SACREMENT, SELON SAINT PAUL AUX EPHÉSIENS

Par Incarnare, le lundi 07/09/2009

1. Nous entamons aujourd’hui un nouveau chapitre sur le thème du mariage, en lisant ce que dit saint Paul aux Ephésiens: « Que les femmes soient soumises à leur mari, comme au Seigneur Jésus; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Eglise, le Christ est à la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien! si l’Eglise se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari. Vous, les hommes, aimez votre femme, à l’exemple du Christ: il a aimé l’Eglise, il s’est livré pour elle; il voulait la rendre sainte en la purifiant par l’eau du baptême et la parole de vie; il voulait se la présenter à lui-même, cette Eglise, resplendissante, sans tache ni ride, ni aucun défaut; il la voulait sainte et immaculée. C’est comme cela que le mari doit aimer sa femme: comme son propre corps. Celui qui aime sa femme s’aime lui- même. Jamais personne n’a méprisé son propre corps: au contraire, on le nourrit, on en prend soin. C’est ce que fait le Christ pour l’Eglise, parce que nous sommes les membres de son corps A cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’unira à sa femme et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand; je le dis en pensant au Christ et à l’Eglise! Bref, en ce qui vous concerne, que chacun aime sa femme comme lui-même, et que la femme respecte son mari » Ep 5,22-33.
2. Il nous faut soumettre à une analyse approfondie ce texte de Ep 5, comme auparavant nous avons analysé toutes les paroles du Christ qui semblaient avoir une signification capitale pour la théologie du corps. Il s’agissait des paroles dans lesquelles le Christ se réfère au « commencement » Mt 19,4 Mc 10,6, au « coeur » humain, dans le Sermon sur la Montagne Mt 5,28 et à la résurrection future Mt 22,30 Mc 12,25 Lc 20,35 Ce qui est dit dans ce passage de l’épître aux Ephésiens constitue pour ainsi dire le couronnement de ces autres mots clés. Si, à partir de ceux-là on a pu dégager une théologie du corps dans ses grandes lignes évangéliques, à la fois simples et fondamentales, il faut, d’une certaine manière, présupposer cette théologie pour interpréter ce passage de l’épître aux Ephésiens. Par conséquent, si l’on veut interpréter ce passage, il faut le faire à la lumière de ce que le Christ nous a dit sur le corps humain. Il a parlé de la concupiscence (du coeur) à l’homme historique, et par conséquent à l’homme tout court. Et il a aussi fait ressortir, d’un côté, les perspectives du commencement, c’est-à-dire de l’innocence originelle et de la justice et, de l’autre, les perspectives eschatologiques de la résurrection des corps quand « on ne prendra plus femme ni mari » Lc 20,35. Tout cela fait partie de l’optique théologique de la « Rédemption de notre corps » Rm 8,23.
3. Ce que dit l’auteur de la lettre aux Ephésiens (*) est également centré sur le corps; et cela aussi bien dans son sens métaphorique, c’est-à-dire à propos du corps du Christ qui est l’Eglise, que dans son sens propre, c’est-à-dire à propos du corps humain dans sa masculinité et sa féminité, dans son destin de s’unir dans le mariage, comme le dit Gn 2,24 « L’homme quittera son père et sa mère, il s’unira à sa femme et tous deux ne feront plus qu’un ».
De quelle manière ces deux significations du corps apparaissent-elles et convergent-elles dans ce passage de l’épître aux Ephésiens. Et pourquoi y apparaissent-elles et convergent-elles? Voilà des questions qu’il faut se poser, et il ne faut pas l’attendre à avoir des réponses immédiates et directes, mais plutôt, autant que possible, il faut approfondir à longue échéance, ces réponses auxquelles nous ont préparés nos analyses précédentes. En effet, ce passage de l’épître aux Ephésiens ne peut être compris correctement que dans son large contexte biblique; il faut le voir comme le couronnement des thèmes et des vérités qui ponctuent la Parole de Dieu révélée dans l’Ecriture sainte, tels le flux et le reflux de larges vagues. Ce sont des thèmes centraux et des vérités essentielles. C’est pour cela que ce texte de l’épître aux Ephésiens est également un texte clé classique.
Note (*) – La question de savoir si l’épître aux Ephésiens est de saint Paul ou pas, paternité reconnue par certains exégètes et refusée par d’autres, peut trouver une solution dans une supposition qui se place entre les deux opinions et que nous ferons nôtre comme hypothèse de travail, à savoir que saint Paul confia à son secrétaire quelques idées et que celui-ci, par la suite, les développa et les rédigea. – C’est à cette solution provisoire de la question que nous pensons quand nous parlons de l’auteur de l’épître aux Ephésiens, de l’apôtre et de saint Paul.
4. C’est un texte bien connu dans la liturgie qui l’utilise toujours en rapport avec le sacrement de mariage. La lex orandi de l’Eglise voit dans ce texte une référence explicite à ce sacrement: et la lex orandi annonce et en même temps exprime la lex credendi. Ceci étant admis, il nous faut tout de suite nous demander comment on voit, dans ce texte classique de l’épître aux Ephésiens, la vérité sur la sacramentalité du mariage. De quelle façon s’y exprime-t- elle, y est-elle confirmée? On va voir que la réponse à ces questions ne peut être immédiate et directe, mais progressive, et n’être donnée qu’à longue échéance. Cela se vérifie dès le premier coup d’oeil sur ce texte qui nous renvoie au livre de la Genèse, et donc au commencement, et qui, dans sa description des rapports entre le Christ et l’Eglise, reprend chez les prophètes de l’Ancien Testament leur analogie bien connue avec l’amour nuptial entre Dieu et le peuple élu. Il serait difficile de dire comment l’épître aux Ephésiens traite de la sacramentalité du mariage sans étudier ces rapports. On verra aussi comment cette réponse doit passer par toutes les dimensions des problèmes qu’on a déjà analysés, c’est-à-dire par la théologie du corps.
5. Le sacrement ou la sacramentalité – au sens le plus général de ce terme – concerne les corps et présuppose une théologie du corps. Le sacrement, en effet, dans son sens généralement reçu, est un signe visible. Le corps signifie aussi ce qui est visible, le caractère visible du monde et de l’homme. Par conséquent, d’une certaine manière – bien qu’en un sens plus général -, le corps entre dans la définition du sacrement puisqu’il est le signe visible d’une réalité invisible, c’est-à-dire de la réalité spirituelle, transcendante, divine. C’est dans ce signe – et à travers ce signe – que Dieu se donne à l’homme dans sa vérité transcendante et dans son amour. Le sacrement est un signe de la grâce, et c’est un signe efficace. Non seulement il l’indique et l’exprime de façon visible, il en est le signe, mais il la produit et contribue efficacement à faire en sorte que la grâce fasse partie de l’homme et qu’en lui se réalise et s’accomplisse l’oeuvre du salut, l’oeuvre établie d’avance par Dieu de toute éternité et qui a été pleinement révélée en Jésus-Christ.
6. Je dirais que déjà, dans ce premier coup d’oeil jeté sur ce texte classique de l’épître aux Ephésiens, nous voyons dans quelle direction devront se poursuivre nos analyses suivantes. Il est indispensable que ces analyses commencent par une compréhension préliminaire du texte en lui-même; cependant, elles doivent nous conduire ensuite, si l’on peut dire, par-delà les limites du texte, à comprendre, si possible jusqu’au fond, quelle richesse de vérité révélée par Dieu est contenue dans le cadre de cette merveilleuse page. En empruntant la célèbre expression de GS 22, on peut dire que ce passage que nous avons choisi dans l’épître aux Ephésiens « manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation »: en tant qu’il partage l’expérience de l’incarnation. En effet Dieu, en le créant à son image, dès le commencement le créa « homme et femme » Gn 1,27
Au cours de nos analyses suivantes nous chercherons – surtout à la lumière de ce texte de l’épître aux Ephésiens – à comprendre plus profondément le sacrement, en particulier le mariage en tant que sacrement: en premier lieu dans sa dimension de l’Alliance et de la grâce, et ensuite dans sa dimension de signe sacramentel.

- 28 juillet 1982