Archive pour le 21 février, 2014

God creator – Adam and Eve

21 février, 2014

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BENOÎT XVI : LA SAINTETÉ

21 février, 2014

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2011/documents/hf_ben-xvi_aud_20110413_fr.html

BENOÎT XVI 

AUDIENCE GÉNÉRALE 

 PLACE SAINT-PIERRE

 MERCREDI 13 AVRIL 2011 

LA SAINTETÉ

Chers frères et sœurs,

Au cours des Audiences générales de ces deux dernières années nous ont accompagnés les figures d’un grand nombre de saints et de saintes: nous avons appris à les connaître de plus près et à comprendre que toute l’histoire de l’Eglise est marquée par ces hommes et femmes qui par leur foi, par leur charité, par leur vie ont été des phares pour de si nombreuses générations, et qu’ils le sont aussi pour nous. Les saints manifestent de différentes manières la présence puissante et transformatrice du Ressuscité; ils ont laissé le Christ se saisir si pleinement de leur vie qu’ils peuvent affirmer avec saint Paul: «Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi» (Ga 2, 20). Suivre leur exemple, recourir à leur intercession, entrer en communion avec eux, «nous unit au Christ de qui découlent, comme de leur source et de leur tête, toutes grâces et la vie du Peuple de Dieu lui-même» (Conc. Œc. Vat. ii, Const. dogm.  Lumen gentium, n. 50). Au terme de ce cycle de catéchèses, je voudrais alors offrir quelques pensées sur ce qu’est la sainteté. Que veut dire être saint? Qui est appelé à être saint? On est souvent porté encore à penser que la sainteté est une destination réservée à de rares élus. Saint Paul, en revanche, parle du grand dessein de Dieu et affirme: «C’est ainsi qu’Il (Dieu) nous a élus en lui (le Christ), dès avant la fondation du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans l’amour» (Ep 1, 4). Et il parle de nous tous. Au centre du dessein divin, il y a le Christ, dans lequel Dieu montre son Visage: le Mystère caché dans les siècles s’est révélé en plénitude dans le Verbe qui s’est fait chair. Et Paul dit ensuite: «Car Dieu s’est plu à faire habiter en lui toute la plénitude» (Col 1, 19). En Christ, le Dieu vivant s’est fait proche, visible, touchable, il s’est fait entendre afin que chacun puisse puiser de sa plénitude de grâce et de vérité (cf. Jn 1, 14-16). C’est pourquoi toute l’existence chrétienne connaît une unique loi suprême, celle que saint Paul exprime dans une formule qui revient dans tous ses écrits: en Jésus Christ. La sainteté, la plénitude de la vie chrétienne ne consiste pas à accomplir des entreprises extraordinaires, mais à s’unir au Christ, à vivre ses mystères, à faire nôtres ses attitudes, ses pensées, ses comportements. La mesure de la sainteté est donnée par la stature que le Christ atteint en nous, par la mesure dans laquelle, avec la force de l’Esprit Saint, nous modelons toute notre vie sur la sienne. C’est être conformes à Jésus, comme affirme saint Paul: «Car ceux que d’avance il a discernés, il les a aussi prédestinés à reproduire l’image de son Fils» (Rm 8, 29). Et saint Augustin s’exclame: «Ma vie sera vivante toute pleine de Toi» (Confessions, 10, 28). Le Concile Vatican ii, dans la Constitution sur l’Eglise, parle avec clarté de l’appel universel à la sainteté, en affirmant que personne n’en est exclu: «A travers les formes diverses de vie et les charges différentes, il n’y a qu’une seule sainteté cultivée par tous ceux que conduit l’Esprit de Dieu et qui… marchent à la suite du Christ pauvre, humble et chargé de sa croix, pour mériter de devenir participants de sa gloire» (n. 41). Mais la question demeure: comment pouvons-nous parcourir la voie de la sainteté, répondre à cet appel? Puis-je le faire avec mes propres forces? La réponse est claire: une vie sainte n’est pas principalement le fruit de notre effort, de nos actions, car c’est Dieu, le trois fois Saint (cf. Is 6, 3), qui nous rend saints, c’est l’action de l’Esprit Saint qui nous anime de l’intérieur, c’est la vie même du Christ ressuscité qui nous est communiquée et qui nous transforme. Pour le dire encore une fois avec le Concile Vatican ii: «Appelés par Dieu, non au titre de leurs œuvres mais au titre de son dessein gracieux, justifiés en Jésus notre Seigneur, les disciples du Christ sont véritablement devenus par le baptême de la foi, fils de Dieu, participants de la nature divine et, par là même, réellement saints. Cette sanctification qu’ils ont reçue, il leur faut donc, avec la grâce de Dieu, la conserver et l’achever par leur vie» (ibid., n. 40). La sainteté a donc sa racine ultime dans la grâce baptismale, dans le fait d’être greffés dans le Mystère pascal du Christ, avec lequel nous est communiqué son Esprit, sa vie de Ressuscité. Saint Paul souligne de manière très puissante la transformation que la grâce baptismale accomplit dans l’homme et il arrive à créer une terminologie nouvelle, forgée avec le préfixe «co»: co-morts, co-ensevelis, co-ressuscités, co-vivifiés avec le Christ: notre destin est indissolublement lié au sien. «Si par le baptême — écrit-il — dans sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, de même que le Christ, par la toute puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts» (Rm 6, 4). Mais Dieu respecte toujours notre liberté et demande que nous acceptions ce don et vivions les exigences qu’il comporte, il demande que nous nous laissions transformer par l’action de l’Esprit Saint, en conformant notre volonté à la volonté de Dieu. Comment notre façon de penser et nos actions peuvent-elles devenir la manière de penser et d’agir du Christ et avec le Christ? Quelle est l’âme de la sainteté? Le Concile Vatican ii précise à nouveau: «Dieu est charité et celui qui demeure dans la charité demeure en Dieu et Dieu en lui (cf. 1 Jn 4, 16). Sa charité, Dieu l’a répandue dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné (cf. Rm 5, 5). La charité qui nous fait aimer Dieu par-dessus tout et le prochain à cause de lui est par conséquent le don premier et le plus nécessaire. Mais pour que la charité, comme un bon grain, croisse dans l’âme et fructifie, chaque fidèle doit s’ouvrir à la Parole de Dieu et, avec l’aide de sa grâce, mettre en œuvre sa volonté, participer fréquemment aux sacrements, surtout à l’Eucharistie, et aux actions sacrées, s’appliquer avec persévérance à la prière, à l’abnégation de soi-même, au service actif de ses frères et à l’exercice de toutes les vertus. La charité en effet, étant le lien de la perfection et la plénitude de la loi (cf. Col 3, 14; Rm 13, 10), oriente tous les moyens de sanctification, leur donne leur âme et les conduit à leur fin» (Lumen gentium, n. 42). Peut-être ce langage du Concile Vatican ii est-il encore un peu trop solennel pour nous, peut-être devons-nous dire les choses de manière encore plus simple. Qu’est-ce qui est essentiel? Il est essentiel de ne jamais laisser passer un dimanche sans une rencontre avec le Christ Ressuscité dans l’Eucharistie; cela n’est pas un poids en plus, mais une lumière pour toute la semaine. Il ne faut pas commencer ni finir une journée sans avoir au moins un bref contact avec Dieu. Et, sur la route de notre vie, suivre les «panneaux routiers» que Dieu nous a communiqués dans le décalogue lu avec le Christ, qui est tout simplement l’explicitation de ce qu’est la charité dans des situations déterminées. Il me semble que cela est la véritable simplicité et la grandeur de la vie de sainteté: la rencontre avec le Ressuscité le dimanche; le contact avec Dieu au début et à la fin de la journée; suivre, dans les décisions, les «panneaux routiers» que Dieu nous a communiqués, qui sont seulement des formes de charité. «C’est donc la charité envers Dieu et envers le prochain qui marque le véritable disciple du Christ» (Lumen gentium, n. 42). Telle est la véritable simplicité, grandeur et profondeur de la vie chrétienne, du fait d’être saints. Voilà pourquoi saint Augustin, en commentant le quatrième chapitre de la  Première Lettre de saint Jean, peut affirmer une chose courageuse: «Dilige et fac quod vis», «Aime et fais ce que tu veux». Et il poursuit: «Si tu te tais, tais-toi par amour; si tu parles, parle par amour; si tu corriges, corrige par amour; si tu pardonnes, pardonne par amour; qu’en toi se trouve la racine de l’amour, car de cette racine ne peut rien procéder d’autre que le bien» (7, 8: PL 35). Celui qui est guidé par l’amour, qui vit la charité pleinement est guidé par Dieu, car Dieu est amour. C’est ce qui donne sa valeur à cette grande parole: «Dilige et fac quod vis», «Aime et fais ce que tu veux». Sans doute pourrions-nous nous demander: pouvons-nous, avec nos limites, avec notre faiblesse, tendre à des sommets si élevés? Au cours de l’Année liturgique, l’Eglise nous invite à faire mémoire d’une foule de saints, c’est-à-dire de ceux qui ont vécu pleinement la charité, qui ont su aimer et suivre le Christ dans leur vie quotidienne. Ils nous disent qu’il est possible pour tous de parcourir cette voie. A toute époque de l’histoire de l’Eglise, à toute latitude de la géographie du monde, les saints appartiennent à tous les âges et à tous les états de vie, ils ont le visage concret de chaque peuple, langue et nation. Et ils sont de types très divers. En réalité, je dois dire qu’en ce qui concerne ma foi personnelle également, de nombreux saints, pas tous, sont de véritables étoiles dans le firmament de l’histoire. Et je voudrais ajouter que pour moi, ce sont non seulement certains grands saints que j’aime et que je connais bien qui «indiquent la voie», mais précisément les saints simples également, c’est-à-dire les personnes bonnes que je vois dans ma vie, qui ne seront jamais canonisées. Ce sont des personnes normales, pour ainsi dire, sans héroïsme visible, mais dans leur bonté quotidienne, je vois la vérité de la foi. Cette bonté, qu’elles ont mûrie dans la foi de l’Eglise, est pour moi la plus sûre apologie du christianisme et le signe qui indique où se trouve la vérité. Dans la communion des saints, canonisés et non canonisés, que l’Eglise vit grâce au Christ dans tous ses membres, nous jouissons de leur présence et de leur compagnie et nous cultivons la ferme espérance de pouvoir imiter leur chemin et partager un jour la même vie bienheureuse, la vie éternelle. Chers amis, comme la vocation chrétienne est grande et belle, et également simple, vue sous cette lumière! Nous sommes tous appelés à la sainteté: elle est la mesure même de la vie chrétienne. Encore une fois, saint Paul l’exprime avec une grande intensité, lorsqu’il écrit: «Chacun de nous a reçu sa part de la faveur divine selon que le Christ a mesuré ses dons… C’est lui encore qui “a donné” aux uns d’être apôtres, à d’autres d’être prophètes, ou encore évangélistes, ou bien pasteurs et docteurs, organisant ainsi les saints pour l’œuvre du ministère, en vue de la construction du Corps du Christ, au terme de laquelle nous devons parvenir, tous ensemble, à ne faire plus qu’un dans la foi et la connaissance du Fils de Dieu, et à constituer cet Homme parfait, dans la force de l’âge, qui réalise la plénitude du Christ» (Ep 4, 7. 11-13). Je voudrais inviter chacun à s’ouvrir à l’action de l’Esprit Saint, qui transforme notre vie, pour être nous aussi comme des pièces de la grande mosaïque de sainteté que Dieu crée dans l’histoire, afin que le visage du Christ resplendisse dans tout son éclat. N’ayons pas peur de tendre vers le haut, vers les sommets de Dieu; n’ayons pas peur que Dieu nous demande trop, mais laissons-nous guider dans chacune de nos actions quotidiennes par sa Parole, même si nous nous sentons pauvres, inadéquats, pêcheurs: c’est Lui qui nous transformera selon son amour. Merci.

 

DIMANCHE 23 FÉVRIER : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – PREMIERE LECTURE ET PSAUME

21 février, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

DIMANCHE 23 FÉVRIER : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – PREMIER ELECTURE ET PSAUME

PREMIERE LECTURE – LÉVITIQUE 19, 1-2 , 17-18

1.Le SEIGNEUR adressa la parole à Moïse : 2 « Parle à toute l’assemblée des fils d’Israël ;  tu leur diras :  Soyez saints,  car moi, le SEIGNEUR votre Dieu,  je suis saint. 17 Tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère.  Mais tu n’hésiteras pas à réprimander ton compagnon,  et ainsi tu ne partageras pas son péché. 18 Tu ne te vengeras pas.  Tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple.  Tu aimeras ton prochain comme toi-même.  Je suis le SEIGNEUR ! »

Etre « comme des dieux » : on en a tous rêvé un jour ou l’autre… et le livre de la Genèse, racontant la faute d’Adam et Eve, dit que c’est bien là notre problème ! « Vous serez comme des dieux » avait promis le serpent, avait menti le serpent, devrait-on dire, et cette perspective les a perdus.  Mais voilà que c’est Dieu lui-même qui nous dit : « Soyez saints COMME moi »… « Soyez saints, car moi, le SEIGNEUR votre Dieu, je suis saint ». C’est un ordre, mieux, c’est un appel, c’est notre vocation. Donc, nous ne nous trompons pas quand nous rêvons d’être comme des dieux ! C’est le psaume 8 qui dit : « Tu as voulu l’homme à peine moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur ». Seulement voilà : pour ressembler vraiment à Dieu, encore faudrait-il avoir une juste idée de Dieu.  Les premiers chapitres de la Bible disaient déjà que l’homme est fait pour ressembler à Dieu. Encore faut-il savoir en quoi consiste la ressemblance : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il soumette les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toute la terre et toutes les petites bêtes qui remuent sur la terre ! » (Gn 1, 26). La formule « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il soumette… » donne à penser que cette ressemblance serait de l’ordre de la royauté, de la soumission… Réellement, l’homme est créé pour être le roi de la création. Mais, le vocabulaire employé par l’auteur suggère que la royauté à laquelle l’homme est appelé est une autorité d’amour et non une domination.  Un peu plus loin, le même livre de la Genèse emploie de nouveau deux fois la même formule : une fois à l’identique : « Le jour où Dieu créa l’homme, il le fit à la ressemblance de Dieu », mais la seconde fois il s’agit des enfants d’Adam : « Adam engendra un fils à sa ressemblance et à son image » : cette fois on a bien l’impression que les mots image et ressemblance ont le sens qu’on leur donne d’habitude quand on dit qu’un fils ressemble à son père. « Tel père tel fils », dit-on.  Enfin, cette phrase que nous connaissons bien, « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa ; mâle et femelle il les créa » (Gn 1, 27), nous dit que le couple créé pour l’amour et pour le dialogue est l’image du Dieu d’amour.  Il a fallu des siècles pour que le peuple comprenne que les mots « Sainteté « et « Amour » sont synonymes. « Saint », on s’en souvient, c’est le mot de la vocation d’Isaïe : au chapitre 6, il nous raconte la vision dont il a bénéficié ; comment, alors qu’il était dans le temple de Jérusalem, ébloui, il entendait les chérubins répéter « Saint, Saint, Saint est le SEIGNEUR de l’univers ». Ce mot « Saint » signifie que Dieu est le Tout-Autre, qu’un abîme nous sépare de lui. En même temps Isaïe a eu une révélation : cet abîme, c’est Dieu lui-même qui le franchit : et donc, quand il nous invite à lui ressembler, c’est que nous en sommes capables… grâce à lui, bien sûr, ou dans sa grâce, si vous préférez.  Les deux derniers versets du passage d’aujourd’hui ne sont que l’application de cette phrase « Soyez saints comme je suis saint, moi le SEIGNEUR votre Dieu ». Concrètement, cela veut dire « Tu n’auras aucune pensée de haine… Tu ne te vengeras pas. Tu ne garderas pas de rancune. Tu aimeras… » C’est cela être à la ressemblance de Dieu : Lui ne connaît ni haine, ni vengeance, ni rancune. C’est justement parce qu’il n’est qu’amour qu’il est le Tout-Autre. Et c’est seulement petit à petit que les prophètes comprendront eux-mêmes et feront comprendre au peuple que ressembler au Dieu saint, c’est tout simplement développer ses capacités d’amour.  Cela ne veut pas dire qu’on perd toute capacité de jugement sur ce qui est bon ou mauvais : « Tu n’auras aucune pensée de haine, mais tu n’hésiteras pas à faire des réprimandes… » : réprimander à bon escient, voilà un art bien difficile ! Et pourtant cela aussi, c’est de l’amour. Parmi nous, les parents ou les éducateurs le savent bien : c’est vouloir le bien de l’autre, c’est parfois arrêter l’autre au bord du gouffre. La critique positive par amour fait grandir.  Mais Dieu est patient envers nous : ce n’est pas en un jour que notre attitude peut devenir semblable à la sienne ! Si j’en crois les nouvelles qui nous parviennent tous les jours, il faudra encore beaucoup de temps ! Et Dieu déploie avec son peuple une pédagogie très progressive : quand ce texte est écrit, il ne parle pas encore d’amour universel, il se contente de dire : « Tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère », « Tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple »… « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »  C’est déjà une première étape dans la pédagogie biblique… Des siècles plus tard, Jésus, dans la parabole du Bon Samaritain (Lc 10, 29-37), élargira à l’infini le cercle du prochain.  Voilà donc la royauté à laquelle nous sommes invités : quand nous rêvons d’être comme des dieux, nous pensons spontanément domination, puissance, et surtout la puissance nécessaire pour vaincre la maladie et la mort. Tandis que quand Dieu nous invite à lui ressembler, il nous appelle à la sainteté, à sa sainteté qui n’a rien à voir avec une quelconque domination ! Une sainteté qui n’est qu’amour et douceur. Cela nous paraît bien difficile ; mais là encore, peut-être sommes nous trop souvent des « hommes de peu de foi ».  

PSAUME 102 (103 ) – 1-2, 3-4, 8-10, 12-13

1 Bénis le SEIGNEUR, ô mon âme,  bénis son nom très saint, tout mon être ! 2 Bénis le SEIGNEUR, ô mon âme,  n’oublie aucun de ses bienfaits ! 3 Car il pardonne toutes tes offenses  et te guérit de toute maladie ; 4 il réclame ta vie à la tombe  et te couronne d’amour et de tendresse ; 8 Le SEIGNEUR est tendresse et pitié,  lent à la colère et plein d’amour ; 10 il n’agit pas envers nous selon nos fautes,  ne nous rend pas selon nos offenses. 12 aussi loin qu’est l’orient de l’occident,  il met loin de nous nos péchés ; 13 comme la tendresse du père pour ses fils,  la tendresse du SEIGNEUR pour qui le craint !

La liturgie de ce dimanche ne nous propose que huit versets d’un psaume qui en comporte vingt-deux ! Or l’alphabet hébreu comporte vingt-deux lettres donc on dit de ce psaume qu’il est « alphabétisant » ; et quand un psaume est alphabétisant, on sait d’avance qu’il s’agit d’un psaume d’action de grâce pour l’Alliance. Et effectivement, André Chouraqui disait que ce psaume est le « Te Deum » de la Bible, un chant de reconnaissance pour toutes les bénédictions dont le compositeur (entendez le peuple d’Israël) a été comblé par Dieu.  Deuxième caractéristique de ce psaume, le « parallélisme » : chaque verset se compose de deux lignes qui se répondent comme en écho ; l’idéal pour le chanter serait d’alterner ligne par ligne ; il a peut-être, d’ailleurs, été composé pour être chanté par deux choeurs alternés. Ce parallélisme, ce « balancement » est très fréquent dans la Bible, dans les textes poétiques, mais aussi dans de nombreux passages en prose ; procédé de répétition utile à la mémoire, bien sûr, dans une civilisation orale, mais surtout très suggestif ; si on soigne la lecture en faisant ressortir le face à face des deux lignes à l’intérieur de chaque verset, la poésie prend un relief extraordinaire.  D’autre part, cette répétition d’une même idée, successivement sous deux formes différentes, permet évidemment de préciser la pensée, et donc pour nous de mieux comprendre certains termes bibliques. Par exemple, le premier verset nous propose deux parallèles intéressants : « Bénis le SEIGNEUR, ô mon âme, Bénis son Nom très saint, tout mon être » :   Premier parallèle : « Bénis le SEIGNEUR »… « Bénis son Nom très saint » : la deuxième fois, au lieu de dire « le SEIGNEUR », on dit « le NOM » : une fois de plus, nous voyons que le NOM, dans la Bible, c’est la personne. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les juifs ne s’autorisent jamais à prononcer le NOM de Dieu.1  Deuxième parallèle dans ce premier verset : « Ô mon âme… tout mon être » : on voit bien que le mot âme n’a pas ici le sens que nous lui donnons spontanément. A la suite des penseurs grecs, nous avons tendance à nous représenter l’homme comme l’addition de deux composants différents, étrangers l’un à l’autre, l’âme et le corps. Mais les progrès des sciences humaines, au cours des siècles, ont confirmé que ce dualisme ne rendait pas compte de la réalité. Or, déjà, la mentalité biblique, avait une conception beaucoup plus unifiée et, dans l’Ancien Testament, quand on dit « l’âme », il s’agit de l’être tout entier. « Bénis le Seigneur, ô mon âme, Bénis son Nom très saint, tout mon être ».  Un autre exemple de parallélisme, un peu plus loin dans ce psaume nous permet de mieux comprendre une expression un peu difficile pour nous, la « crainte de Dieu » : nous rencontrons assez souvent ce mot de « crainte » dans la Bible et il ne nous est pas forcément très sympathique a priori. Or nous le trouvons ici dans un parallèle très intéressant : « Comme la tendresse du père pour ses fils, ainsi est la tendresse du SEIGNEUR pour qui le craint » : ce qui veut bien dire que la crainte de Dieu est tout sauf de la peur, elle est une attitude filiale.  Je parle souvent de la pédagogie de Dieu à l’égard de son peuple : eh bien, là aussi, la pédagogie de Dieu s’est déployée lentement, patiemment, pour convertir la peur spontanée de l’homme envers Dieu en esprit filial ; je veux dire par là que, mis en présence de Dieu, du sacré, l’homme éprouve spontanément de la peur ; et il faut toute une conversion des croyants pour que, sans rien perdre de notre respect pour Celui qui est le Tout-Autre, nous apprenions à son égard une attitude filiale. La crainte de Dieu, au sens biblique, c’est vraiment la peur convertie en esprit filial : cette pédagogie n’est pas encore terminée, bien sûr ; notre attitude devant Dieu, notre relation à lui a sans cesse encore besoin d’être convertie. C’est peut-être cela « redevenir comme des petits enfants »… des petits enfants qui savent que leur père n’est que tendresse. Cette « crainte » comporte donc à la fois tendresse en retour, reconnaissance et souci d’obéir au père parce que le fils sait bien que les commandements du père ne sont guidés que par l’amour : comme un petit s’éloigne du feu parce que son père le prévient qu’il risque de se brûler.  Ce n’est donc pas un hasard si ce psaume qui parle de crainte de Dieu cite justement la fameuse phrase du livre de l’Exode (Ex 34, 6) : « Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour » ; cette phrase est très célèbre dans la Bible, car c’est la définition que Dieu a donnée de lui-même à Moïse au Sinaï. Elle est très souvent citée, en particulier dans les psaumes ; elle est à la fois la définition de Dieu et, inséparablement, un rappel de l’Alliance. Tous les psaumes, et plus particulièrement les psaumes d’action de grâce sont, avant tout, émerveillement devant l’Alliance.  Les versets retenus aujourd’hui insistent sur une des manifestations de cette tendresse de Dieu, le pardon. Un Dieu lent à la colère, Israël l’a expérimenté tout au long de son histoire : depuis la traversée du Sinaï, dont Moïse a pu dire au peuple « Depuis que je vous connais, vous n’avez jamais cessé de vous révolter contre Dieu » (Dt 9, 7), la longue histoire de l’Alliance a été le théâtre du pardon de Dieu accordé à chaque régression de son peuple. « Dieu pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ; il n’agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses. Aussi loin qu’est l’Orient de l’Occident, il met loin de nous nos péchés… »  La vraie tendresse, celle dont nous avons besoin pour repartir, c’est celle justement qui oublie nos péchés, nos abandons ; Jésus ne fera que la mettre en images dans la parabole du père et de l’enfant prodigue. ——————-  Note  1 – Le NOM : les fameuses quatre lettres, YHVH, (le « tétragramme »). Le prononcer, ce serait prétendre connaître Dieu. Seul, le grand-prêtre, une fois par an, au jour du Kippour, prononçait le NOM très saint, dans le Temple de Jérusalem. Encore aujourd’hui, les Bibles écrites en hébreu ne transcrivent pas les voyelles qui permettraient de prononcer le NOM. Il est donc transcrit uniquement avec les quatre consonnes YHVH. Et quand le lecteur voit ce mot, aussitôt il le remplace par un autre (Adonaï) qui signifie « le Seigneur » mais qui ne prétend pas définir Dieu.  Depuis le Synode des Evêques sur la Parole de Dieu, en octobre 2008, il est demandé à tous les catholiques de ne plus prononcer le NOM de Dieu (que nous disions Yahvé), et de le remplacer systématiquement par « SEIGNEUR » et ce pour plusieurs raisons :  - Tout d’abord, personne ne sait dire quelles voyelles portaient les consonnes du NOM de Dieu, YHVH. La forme « Yahvé » est certainement erronée.  - Ensuite, c’est une marque de respect pour nos frères juifs qui s’interdisent, eux, de prononcer le Nom divin.  - Enfin, et surtout, il nous est bon d’apprendre à respecter la transcendance de Dieu.  - Une quatrième raison nous vient de notre propre tradition chrétienne : les premiers traducteurs de l’Ancien Testament en latin, et, en particulier Saint Jérôme, ont traduit le Tétragramme par « Dominus », c’est-à-dire « SEIGNEUR »

 Complément  « Aussi loin qu’est l’Orient de l’Occident, il met loin de nous nos péchés » : dans la liturgie du Baptême des premiers siècles, les baptisés se tournaient vers l’Occident pour renoncer au mal, puis faisaient demi-tour sur place et se tournaient vers l’Orient pour prononcer leur profession de foi avant d’entrer dans le baptistère.

HOMÉLIE DU 7E DIMANCHE ORDINAIRE A

21 février, 2014

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 7E DIMANCHE ORDINAIRE A

Lv 19, 1-2, 17-18 ; 1 Co 3, 16-23 ; Mt 5, 38-48

Etre traité de fou ou de folle ne plaît à personne. Ce terme de mépris impressionne. N’est-il pas dénonciation d’excès manifestes, d’attitudes non conformes aux critères habituels des gens raisonnables ? Cette injure isole. Elle exclut du cercle privilégié des sages. Le fou n’est pas « comme tout le monde ». Le saint non plus. Il est vrai qu’il y a sagesse et sagesse. « La sagesse de ce monde est folie devant Dieu », nous rappelle Paul. Nous admirons la formule, l’opposition des termes, mais nous ne croyons guère à sa vérité. « Si quelqu’un parmi vous pense être sage à la manière d’ici-bas, qu’il devienne fou, pour devenir sage ». Un vrai défi que nous aurons peine à relever ! L’Evangile nous donne cependant l’occasion de tester nos critères de sagesse et de mesurer la sainte folie de nos comportements. Jésus ne s’adresse pas à des adorateurs ni à des esclaves du « monde ». Ses interlocuteurs ne sont pas possédés par l’esprit du « Malin ». Croyants fidèles, ouverts aux nouveautés du jeune prophète, les disciples vivent une sagesse qui dépasse celle des païens. C’est la loi de Moïse qui leur sert de fil conducteur. Et Moïse s’est fait l’écho du Dieu tout puissant… Echo faible et fragile, constamment perturbé par les aménagements des commentaires, les résistances d’un peuple « à la nuque raide », la séduction des idoles prometteuses de bonheur sans peine. Jésus va réinterpréter la Loi en remontant à la source. « Soyez saints comme moi le Seigneur votre Dieu je suis saint ». Avant même de se concrétiser en piste, en exemple, en type d’applications multiples, la Loi est essentiellement « loi de sainteté ». « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ». La conduite du Père est modèle pour celle des enfants. La Loi n’est pas une ordonnance pesante comme un carcan et assortie de menaces. Elle est appel cordial à réussir sa vocation de fils et de filles. Pour être vraiment ce à quoi ils sont appelés, ils doivent être ressemblants à celui qui les a créés par amour et pour l’amour. Il ne suffit pas cependant de chanter l’amour pour en vivre, ni d’en rêver pour le partager et le communiquer. Comment dès lors exprimer dans la multiplicité et la diversité des relations humaines ce quelque chose d’insaisissable mais d’ineffable qui est tendresse de Dieu et infini respect des êtres ? Pour découvrir les secrets et les exigences de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain, la Loi (Lv) sème sur la route des croyants des balises éclairantes. Mais jusqu’où doit aller l’amour de Dieu et du prochain ? Dépassant la loi de vengeance aveugle, Moïse avait introduit le progrès d’une certaine justice envers les membres du peuple, les compatriotes. Jésus va dépasser largement cette sagesse religieuse légale et traditionnelle. Pour accomplir la Loi, il va abolir des lois telle celle du talion. Une véritable folie ! En quelques mots, Jésus casse l’engrenage de la violence qu’entretient la « vengeance » institutionnalisée. Le prophète de Nazareth introduit dans les relations humaines l’étonnante miséricorde divine qui engendre le pardon. La rigoureuse justice elle-même sera métamorphosée et singulièrement adoucie par la générosité et la délicatesse de la charité même de Dieu. Nous voici invités à rompre avec la sagesse et la logique du monde, à prendre ses raisonnements pour du vent ! Nous voici embarqués dans la folle aventure de l’amour des ennemis, du bien rendu pour le mal, du service gratuit, de la générosité sans calcul. Ce n’est pas pour autant un impossible amour. Il ne s’agit pas ici d’émotions passagères, d’instinct ou d’attirance, mais bien de noblesse d’âme, d’attitude de constante bienveillance et de cette volonté évangélique qui respecte l’être humain tout entier. C’est l’amour qui reconnaît aux autres tous les droits que je possède moi-même et à moi-même tous les devoirs qui incombent aux autres. Dans chaque eucharistie, Jésus nous invite à « devenir fou pour devenir sage ». Le repas de la Parole et du Pain partagés nous pousse à briser les carcans de la sagesse du monde. Il est invitation à communier à celui qui est saint pour être saint à notre tour. N’oublions pas que l’histoire continue. Les paroles de Jésus sont toujours actuelles. Nous cherchons trop souvent à les minimiser, à les adoucir. Aujourd’hui encore ce qu’il dit nous perturbe et nous fait peur. Nous n’avons pas envie de devenir fous, même pour devenir sages… Et nous ne prenons pas volontiers pour nous le résumé du sermon sur la montagne, qui nous donne le vertige : Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. C’est cependant ce qu’il nous demande.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T) – 1925 – 2008