Archive pour février, 2014

Cima da Conegliano, Dieu le Père

28 février, 2014

Cima da Conegliano,  Dieu le Père dans images sacrée Cima_da_Conegliano,_God_the_Father

http://en.wikipedia.org/wiki/God_the_Father

PREMIERE LECTURE – ISAÏE 49, 14 – 15

28 février, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

PREMIERE LECTURE – ISAÏE 49, 14 – 15

14 Jérusalem disait :
Le SEIGNEUR m’a abandonnée,
le Seigneur m’a oubliée. »
15 Est-ce qu’une femme peut oublier son petit enfant,
ne pas chérir le fils de ses entrailles ?
Même si elle pouvait l’oublier,
moi, je ne t’oublierai pas.
– Parole du Seigneur tout-puissant.

Le chapitre 49 du livre d’Isaïe est un texte prodigieux. Il faut le lire intégralement pour découvrir comment un peuple au plus profond de la misère, retrouve l’espérance. Le peuple d’Israël est en Exil à Babylone et le moral est au plus bas : on se répète « Le SEIGNEUR m’a abandonnée, mon Dieu m’a oubliée. » Tout conduit à confirmer ce constat : Jérusalem est dévastée, des étrangers s’installent dans les décombres ; si un jour on rentrait, que retrouverait-on ? Du peuple, il ne reste presque personne ; la famille royale est éteinte ; et les années passant, tous ceux qui sont arrivés encore valides à Babylone après l’épreuve de la déportation meurent les uns après les autres. Un Exil de cinquante années, c’est très long, c’est plus que la durée d’une génération. Pire, comment garder la foi parmi ces étrangers idolâtres ? Dans ces conditions déplorables, peut-on encore parler d’Alliance avec Dieu ? La tentation est grande de croire que Dieu les a oubliés. Et, d’ailleurs, les succès des Babyloniens ne sont-ils pas la preuve que notre Dieu nous a laissé tomber ?
Alors le prophète Isaïe cherche par tous les moyens à convaincre ses compatriotes que rien ne pourra détruire l’Alliance proposée par Dieu à son peuple, tout simplement parce que, même si les hommes sont parfois infidèles, Dieu, lui, reste toujours fidèle.
Pour rendre son message encore plus percutant, Isaïe fait référence à notre expérience humaine, celle de la tendresse des mamans pour leurs bébés : « Est-ce qu’une femme peut oublier son petit enfant, ne pas chérir le fils de ses entrailles ? Même si elle pouvait l’oublier, moi, je ne t’oublierai pas. » Et Isaïe, dans ce chapitre 49 développe toute une série d’images : Pour Dieu, Israël est l’enfant bien-aimé, (« Le Seigneur m’a appelé dès le sein maternel, dès le ventre de ma mère il s’est répété mon nom. » Is 49, 1), la flèche la plus précieuse de son carquois (« Il m’a disposé comme une flèche acérée, dans son carquois il m’a tenu caché. » Is 49, 2), le serviteur qui réalise les oeuvres de Dieu (« Mon serviteur, c’est toi, Israël, toi par qui je manifesterai ma splendeur. » Is 49, 3), la marque d’amour gravée sur les mains de Dieu (« Voici que sur mes paumes je t’ai gravé » Is 49, 16). A la même époque, on peut lire chez Jérémie : « Oui, je suis un père pour Israël, Ephraïm est mon fils aîné. » (Jr 31, 9).
Tout cela prouve qu’au temps de l’Exil à Babylone, c’est-à-dire au sixième siècle av.J.C., les prophètes parlaient déjà de Dieu comme d’un Père. On n’a donc pas attendu le Nouveau Testament pour appeler Dieu « Père » ; mais pour être tout à fait honnête, on n’a pas attendu non plus l’Ancien Testament ni le peuple hébreu ; les autres peuples aussi invoquaient leur dieu comme leur père ; par exemple, au quatorzième siècle, à Ugarit (au Nord de la Palestine), le dieu suprême s’appelle « El, roi-père » ; mais le titre de père, chez les autres peuples, a deux significations : premièrement un sens d’autorité doublée de tendresse ; deuxièmement un sens de paternité charnelle ; la Bible a gardé le premier sens, mais a toujours refusé de considérer Dieu comme un père biologique à la manière humaine. Dieu est le Tout-Autre, sur ce plan-là aussi.
C’est pour cette raison, d’ailleurs, qu’on ne trouve que tardivement, dans l’Ancien Testament, des affirmations péremptoires du genre « Dieu est votre Père » ; pendant trop longtemps, on aurait risqué de se méprendre et de l’imaginer père à la manière humaine, comme les peuples voisins. Mais, à l’époque de l’Exil, la paternité de Dieu à l’égard de son peuple était acquise.
C’est sur cette conviction que le prophète Isaïe veut adosser l’espérance de ses compatriotes exilés : comme un Père vole au secours de ses enfants, Dieu tiendra les promesses de son Alliance et donc il libèrera son peuple de la captivité à Babylone. Le tout petit paragraphe du chapitre 49 d’Isaïe que nous lisons aujourd’hui est entouré de part et d’autre par des promesses de retour au pays : dans les versets qui précèdent notre lecture, on peut lire : « De bien loin ils arrivent, les uns du Nord et de l’Ouest, les autres, de la terre d’Assouan. » et encore « Le Seigneur réconforte son peuple, et à ces humiliés il montre sa tendresse. » (Is 49, 12-13). Et, dans les versets qui suivent : « Ils accourent tes bâtisseurs, et tes démolisseurs, tes dévastateurs loin de toi s’en vont. Porte tes regards sur les alentours et vois : tous ils se rassemblent, ils viennent vers toi. Par ma vie, oracle du SEIGNEUR, oui, tu les revêtiras tous comme une parure, telle une promise, tu te feras d’eux une ceinture. Oui, dévastation, désolation, terre de démolition que tu es, oui, désormais tu seras trop étroite pour l’habitant, tandis que prendront le large ceux qui t’engloutissaient. De nouveau, ils diront à tes oreilles, les fils dont tu ressentais la privation : L’espace est trop étroit pour moi. Place pour moi ! Tiens-toi serrée que je puisse habiter. » et encore « Tu diras dans ton coeur : ‘Moi, j’étais privée d’enfant, stérile, en déportation, éliminée ; ceux-là, qui les a fait grandir ? Voilà que je restais seule ; ceux-là, où donc étaient-ils ?… Ils ramèneront tes fils dans leurs bras, et tes filles seront hissées sur leurs épaules. » (Is 49, 17-22).
Il faut quand même de l’audace pour annoncer de telles promesses à un peuple en exil. C’est presque trop beau pour être vrai, dirait-on. Mais cette audace est celle même de Dieu. Pour bien préciser que cette parole n’est pas la sienne, Isaïe prend soin de parsemer ce chapitre de formules telles que « Oracle du Seigneur », ou « Parole du Seigneur » ou encore « Ainsi parle le Seigneur ». Généralement, quand les prophètes insistent sur ce point, c’est parce que les paroles qu’ils ont à dire de la part de Dieu sont particulièrement difficiles à entendre

HOMÉLIE 8E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

28 février, 2014

http://www.homelies.fr/homelie,,3758.html

8E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

DIMANCHE 2 MARS 2014

FAMILLE DE SAINT JOSEPH

HOMÉLIE – MESSE

« Le Seigneur est mon appui : il m’a dégagé, m’a donné du large, il m’a libéré, car il m’aime ». L’antienne d’ouverture de la liturgie de ce jour nous en donne le fil rouge et la clé d’interprétation : la Parole de Dieu veut nous libérer de nos asservissements, afin que nous connaissions « la joie de le servir sans inquiétude », et que « les événements de ce monde se déroulent dans la paix, selon le dessein » du Père (cf. Or. d’ouv.).
D’où viennent nos divisions, nos oppositions, nos conflits ? De nos divisions, nos oppositions, nos conflits intérieurs, que nous projetons – individuellement et collectivement – sur notre entourage ! « Aucun homme ne peut servir deux maîtres », nous dit Jésus ; et pourtant, combien de faux maîtres n’avons-nous pas ? Tantôt nous aimons l’un et détestons l’autre, tantôt nous nous attachons à ce dernier et méprisons le premier. Nous sommes sans cesse en contradiction intérieure, divisés entre nos multiples appartenances contradictoires.
Jésus choisit pour exemple l’argent, qui constitue le paradigme de nos convoitises, puisqu’il donne accès à l’avoir, au pouvoir et à la gloire selon ce monde. Ce n’est pas l’argent en tant que tel qui est mis en cause : s’il n’existait pas, il faudrait réinstaurer le troc – ce qui ne serait probablement guère mieux. Mais c’est notre relation à l’argent que Jésus critique : de serviteur, ou plutôt de moyen d’échange de biens et de services, il est devenu une fin en soi, un absolu, c’est-à-dire une idole. Lorsque Jésus met en accusation « l’argent trompeur » (Lc 16, 9), il dénonce le mensonge qu’il représente : ces quelques pièces de métal éveillent en nous des désirs inavouables, qui sont à mettre en lien avec le péché des origines. Coupés de Dieu, nous sommes enfermés dans nos peurs : peur de l’avenir, peur de l’autre, peur de la maladie, peur des imprévus, peur des revers de fortune ; aussi sommes-nous en quête de sécurité, d’assurances en tous genres, que nous espérons trouver dans l’argent, supposé nous prémunir de tous les aléas de la vie.
Illusoire le repos qui prétend se fonder sur l’abondance matérielle ! Souvenons-nous du propriétaire dont les terres avaient beaucoup rapporté et qui se disait : « Te voilà avec des réserves en abondance pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. Mais Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l’aura ?” ». Et Jésus de conclure : « Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu » (Lc 12, 16-21). Heureux celui qui peut dire avec le Psalmiste : « Je n’ai de repos qu’en Dieu seul, mon salut vient de lui : lui seul est mon salut, la citadelle qui me rend inébranlable » (Ps 61) ; il ne sera pas déçu, car il a mis dans le Très-Haut son espérance. Cela ne signifie pas qu’il sera à l’abri des épreuves, mais celles-ci vérifieront la qualité de sa foi, de sa confiance en Dieu : « Mes frères, quand vous butez sur toute sorte d’épreuves, pensez que c’est une grande joie. Car l’épreuve, qui vérifie la qualité de votre foi, produit en vous la persévérance, et la persévérance doit vous amener à une conduite parfaite ; ainsi vous serez vraiment parfaits, il ne vous manquera rien » (Jc 1, 2-4).
Mais pour faire confiance au Seigneur, il nous faut d’abord nous laisser guérir de notre défiance envers le Dieu rival, jaloux de notre bonheur, cette idole monstrueuse qui tyrannise notre cœur depuis que le Serpent a perverti en nous l’image du Dieu Père. Les quelques versets du prophète Isaïe que la liturgie nous propose en première lecture sont un véritable antidote contre ce venin : « Jérusalem disait : “Le Seigneur m’a abandonnée, le Seigneur m’a oubliée”. Est-ce qu’une femme peut oublier son petit enfant, ne pas chérir le fils de ses entrailles ? Même si elle pouvait t’oublier, moi, je ne t’oublierai pas. Parole du Seigneur tout-puissant ». Où est-il le paternel tyrannique qui nous enferme dans la peur ? Cette idole n’a jamais existé que dans notre cœur blessé par le mensonge de l’Ennemi ; la peur de Dieu est l’ivraie la plus redoutable que le malin ait semée dans le champ de nos vies. Elle pousse avec le blé et menace de l’étouffer ; mais le seul moyen de l’empêcher de nuire, ce n’est pas de l’arracher au risque d’arracher aussi les épis, mais c’est de promouvoir la croissance du bon grain, en fortifiant notre foi par l’écoute de la Parole et l’accueil de l’Esprit d’amour dans la prière et les sacrements (cf. Mt 13, 24-30).
Notre-Seigneur ne nous demande pas de nous retirer du monde (sauf vocation particulière) pour bannir tout usage de « l’argent trompeur » (Lc 16, 9). Ce que Jésus récuse, c’est de servir l’argent et de lui être asservi, au lieu de nous servir de l’argent pour faire le bien. Notre relation à l’argent – comme toutes nos relations d’ailleurs – doit être ajustée à la Révélation du vrai visage de Dieu : « Votre Père céleste sait ce dont vous avez besoin ». Notre-Seigneur veut nous conduire de l’état d’esclave de l’argent trompeur, à celui de fils dans la maison de son Père.
C’est donc une double idolâtrie que Jésus dénonce, l’une entraînant probablement l’autre : l’idolâtrie d’un Dieu lointain, exigeant, indifférent aux besoins de l’homme ; et l’idolâtrie de l’Argent. Il n’est pas impossible que la seconde ne soit qu’une compensation pour l’insatisfaction engendrée par la première. Telle est l’attitude des « païens » qui ignorent le vrai visage de Dieu, et continuent de s’inquiéter quotidiennement quant au boire et au manger. Celui qui se sait fils du Père, travaille certes pour subvenir aux besoins des siens, et participe au bien commun de la société à laquelle il appartient ; mais il le fait dans la liberté filiale, c’est-à-dire dans la certitude que Dieu est avec lui dans son effort comme dans son repos, dans ses succès comme dans ses échecs professionnels. De maître, l’argent peut devenir serviteur parce que dans son rapport à Dieu, le croyant est passé de la servitude au service, de la peur à la confiance filiale. Son souci n’est plus de sauvegarder sa vie – il sait maintenant qu’il la reçoit à chaque instant de son Père comme un don d’amour – mais de travailler pour établir la justice du Royaume, c’est-à-dire de rendre à chacun ce dont il a besoin afin qu’il puisse vivre dans la dignité de fils de Dieu ; à commencer par ceux qui lui sont les plus proches : ceux qui lui sont confiés et qu’il est chargé de servir.
« “Tu es vraiment saint, Dieu de l’univers, et toute la création – les oiseaux du ciel et les lys de la terre – proclament ta louange ; car c’est toi qui donnes la vie, c’est toi qui sanctifies toutes choses, par ton Fils, Jésus-Christ Notre-Seigneur, avec la puissance de l’Esprit Saint” (Pr. Euchar. n° 3). Donne-moi assez de confiance pour te confier demain, et ne chercher jour après jour que ton Royaume et sa justice, en assumant la peine quotidienne de son enfantement. »
Père Joseph-Marie

St Paul on the Holy Crown of Hungary

27 février, 2014

 St Paul on the Holy Crown of Hungary dans images sacrée 407px-St_Paul_on_the_Holy_Crown_of_Hungary-2

http://commons.wikimedia.org/wiki/File:St_Paul_on_the_Holy_Crown_of_Hungary-2.jpg?uselang=it

LA SIMPLICITÉ

27 février, 2014

http://www.cairn.info/revue-etudes-2010-9-page-235.htm

LA SIMPLICITÉ

1
Dans un monde soumis au règne de la complexité, rien ne paraît plus difficile que la simplicité. On prendrait presque la simplicité pour de la naïveté, quand ce n’est pas de la bêtise. De fait, la simplicité n’est pas au programme des vertus cardinales ou théologales. Il est vrai que toute seule, la simplicité semble bien légère. On peut être simplement égoïste, volage ou brutal. Se donner tel que l’on est, sans ruse ou détour encombrant, ne manque sans doute pas de charme, mais ne suffit pas à rendre vertueux. Si la simplicité s’oppose à la pensée calculatrice, à la duplicité et à la prétention, elle ne peut devenir une vertu intellectuelle, morale et spirituelle que dans la mesure où elle s’allie à d’autres forces de l’esprit qu’elle oriente alors vers l’essentiel. Alliée à l’intelligence, la simplicité devient un art de dégager d’une réalité problématique des idées claires et compréhensibles par tous. Alliée à la justice, elle dénoue des situations conflictuelles dans lesquelles un esprit trop raide se laisse facilement embourber. Alliée à l’amour, elle tranche avec les nœuds gordiens inhérents à l’ambivalence et à la confusion des sentiments. Alors la simplicité s’apparente à cette « faculté d’attention » chère à Simone Weil, cette qualité du regard et de l’écoute, cette présence au monde suffisamment détachée de soi pour opérer l’air de rien de véritables petites révolutions dans le domaine de la pensée, de l’art ou dans la vie quotidienne, en rappelant à la vie des êtres pétrifiés dans l’angoisse. La simplicité comme vertu est le fait d’« une âme qui s’ouvre » dirait Bergson, d’une âme qui ne se cramponne pas à ses blessures, à ses possessions, à sa réputation, parce qu’elle ne se sent plus obligée de tout résoudre ou supporter par elle-même et qu’elle consent à s’en remettre à un autre.

2. De l’idée simple à la simplicité du cœur
3. Marguerite Léna [*] Philosophe, membre de la Communauté Saint-François…[*]

4
Dans le vaste champ sémantique de la langue française, un petit mot tient tête, à lui tout seul, à toute une batterie de substantifs : le mot de simplicité. Car la simplicité s’oppose à la fois à la duplicité, à la complexité, à la complication, à l’artifice et à la prétention. Elle se plaît dans ce qui va sans dire, ou se dit sans trop y songer. Ne dit-on pas « simple comme bonjour » ? Aussi n’est-il guère aisé d’en parler. Les savants nous apprennent que le mot vient d’une racine indo-européenne qui signifie « plié une fois ». Une fois, pas deux : l’unique pli que fait l’intériorité de l’âme sur la surface bruyante des choses du monde, l’unique pli que fait la spontanéité sur les conformismes, et l’esprit d’enfance sur l’esprit de sérieux.
5
Pourquoi un pli ? Peut-être pour nous rappeler que la véritable unité, l’entière spontanéité ou la pure transparence ne sont pas de ce monde, et qu’à y prétendre on risque plutôt de les caricaturer. La merveille de la simplicité est justement de faire de l’un avec du multiple, du spontané avec du réfléchi, du visible avec de l’invisible, de la lumière avec du clair-obscur. Comme ces objets techniques très sophistiqués dont le maniement est si simple qu’un enfant nous y devance, les idées vraiment simples sont l’apanage du génie, et une âme vraiment simple est le privilège du saint.
6
« Philosopher est un acte simple », écrivait Bergson [1] Bergson, La Pensée et le Mouvant, « L’intuition philosophique »,…[1]. L’idée simple n’est pas l’idée simpliste, raide et sommaire, l’idée toute faite des dogmatiques et des idéologues. Elle se laisse déplier, « expliquer », ce qui signifie étymologiquement déployer les voiles pour partir au large. Mais ce travail d’explication a son origine et son terme dans « quelque chose de simple, d’infiniment simple, de si extraordinairement simple que le philosophe n’a jamais réussi à le dire. Et c’est pourquoi il a parlé toute sa vie. [2] Id. p. 137.[2] » L’idée vraiment simple est toujours une idée neuve, et qui redevient neuve, fût-elle née il y a des siècles, chaque fois qu’une intelligence s’en saisit. L’idée simple de justice, dans les mots d’Antigone ou dans ceux de Socrate, est plus neuve que les subtiles analyses de nos politologues. Et c’est elle, bien plus qu’eux, qui ouvre inlassablement des possibles inédits devant notre liberté en nous appelant à lui donner corps dans l’histoire : « En temps ordinaire les idées simples rôdent comme des fantômes de rêve. Quand une idée simple prend corps, il y a une révolution [3] Charles Péguy, Note sur M. Bergson et la philosophie…[3] », écrivait Péguy.
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Il n’en va pas autrement dans l’ordre des choses de Dieu. La simplicité évangélique est une vertu du regard : « Si ton œil est simple, ap??u?, ton corps tout entier est dans la lumière », lisons-nous en Mt 6,22 et Lc 11,34. Pour saint Paul, elle est une vertu de la main : « Que celui qui donne le fasse avec simplicité » (Rm 12,8). Ainsi la simplicité selon Dieu prend corps de notre corps, regard limpide et mains ouvertes. Telle est la leçon des saints. « “Ma petite fille, dit à Thérèse de l’Enfant Jésus une vieille carmélite, il me semble que vous ne devez pas avoir grand-chose à dire à vos supérieures” – “Pourquoi, ma mère, dites-vous cela ?” – “Parce que votre âme est extrêmement simple, mais quand vous serez parfaite, vous serez encore plus simple, plus on s’approche du Bon Dieu, plus on se simplifie.” [4] Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte Face, Manuscrits…[4] » Dieu est simple, et nous ne le devenons qu’à son contact. Dans la prière de l’Eglise, le Veni Sancte ne demande-t-il pas à l’Esprit Saint d’« assouplir ce qui est raide » et de « redresser ce qui est tordu » : de nous donner sa divine simplicité ? Car l’esprit de raideur est incapable d’accueillir simplement, sans le surcharger de préjugés ou de principes, l’encombrer de regrets ou d’anticipations, la grâce fugace du moment présent, fraîcheur d’aube et de fleur des champs. Et ce qui nous sépare de la simplicité n’est pas la complexité du monde et des situations, mais bien plutôt ces complicités secrètes qui gauchissent le regard et faussent le cœur.
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Quand le cœur devient simple sous la douce motion de l’Esprit, il n’y a plus de différence entre les plus difficiles et les plus aisées de nos tâches, entre ramasser une épingle par amour et partir en caravelle à l’autre bout du monde. « Prendre un tablier comme Jésus, cela peut être aussi grave et solennel que le don de la vie… et vice versa, donner sa vie peut être aussi simple que prendre un tablier [5] Christian de Chergé, L’invincible Espérance, Bayard/Centurion,…[5] », écrivait Christian de Chergé.
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L’amour fait de ces choses.
Simplicité et calcul, un équilibre difficile à tenir

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Dennis Gira [**] Spécialiste du bouddhisme japonais, actuellement enseignant…[**]
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Si nous parlons souvent de l’importance de la simplicité, n’est-ce pas parce que nous savons à quel point notre discours sur la foi est devenu complexe et donc quasiment incompréhensible, pour nous-mêmes et pour les gens à qui nous voulons annoncer la bonne nouvelle de Jésus-Christ ? De toute évidence, il faut remédier à cette situation, sans pourtant tomber dans un simplisme qui serait aussi dommageable pour la foi et pour les croyants que le sont certains discours de l’Eglise et des théologiens qui passent au-dessus de la tête de ceux auxquels ils sont destinés. Pourtant, aussi importante soit-elle, cette simplicité-là est secondaire par rapport à une autre dont l’ennemi n’est pas d’abord la complexité, mais le calcul.
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Quelle est donc cette « autre » simplicité et pourquoi le calcul en serait-il ennemi ? Avant de répondre directement à cette question, il faut préciser qu’il y a bien une place pour le calcul dans la vie chrétienne. Jésus-Christ explique à ses disciples qu’ils doivent être « prudents comme des serpents » (Mt 10, 16). Il leur dit aussi qu’ils doivent bien réfléchir avant d’agir pour ne pas être comme l’homme irréfléchi qui veut bâtir sa maison sur le sable (cf. Mt 7, 24-27), ou comme celui qui décide de construire un tour sans « calculer les dépenses » (Lc 14, 28). Il parle aussi du roi qui part à la guerre sans examiner s’il est capable de la gagner (cf. Lc 14). Le calcul semble donc bien faire partie de la vie d’un chrétien. Comment pourrait-il être l’ennemi de la simplicité quelle qu’elle soit ?
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Dans le cadre de la foi chrétienne, la simplicité la plus fondamentale consiste à reconnaître que nous ne sommes pas les initiateurs de notre propre salut. Nous oublions trop que les paroles de Jésus sur l’importance du « calcul » concernent la manière d’accomplir la mission que Dieu nous a confiée. Nous ne sommes pas invités à calculer ce qu’il faut faire pour être sauvé, pour plaire à Dieu, pour mériter l’amour de Dieu. Tout calcul dans ce sens va totalement à l’inverse de ce qui est au cœur de la foi et de l’expérience chrétiennes, si bien exprimées dans la première lettre de saint Jean : « En ceci consiste l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils. […] Bien-aimés, si Dieu nous a ainsi aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres » (1 Jn 4, 10-11). Celui qui calcule risque donc de se mettre au centre du déroulement de son propre salut, ce qui est inévitablement catastrophique pour lui, pour les images de Dieu qu’il façonne, pour ceux à qui il va annoncer une « bonne nouvelle » qui au fond n’en est plus une. Voici en quoi le calcul, mal placé, peut être l’ennemi de la simplicité qui, elle, place Dieu au cœur de tout, y compris de notre salut, et de notre annonce de l’Evangile.
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Il est intéressant de noter que l’idée que le calcul qui est l’ennemi numéro un dans la vie spirituelle se trouve dans bien d’autres traditions, ce qui est sans doute une bonne illustration de ce que peuvent être les « semences du Verbe » et l’activité de l’Esprit Saint au sein des autres religions du monde (voir Redemptoris missio 28). Pour le bouddhisme de la Terre pure par exemple (peu connu en France mais beaucoup plus important que le Zen, au Japon), les actes que l’homme pose, et dont l’efficacité est bien calculée afin d’arriver à l’Eveil suprême, ne réussissent qu’à l’empêcher d’y arriver. Celui-là seul qui est conscient de ne rien pouvoir faire pour s’éveiller, est « capable » de se fier totalement au bouddha Amida (le bouddha vénéré dans cette tradition), lequel conduit à l’Eveil ceux qui peuvent reconnaître que tout vient de lui. Dans cette tradition, même la foi est un don total.
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Le calcul est l’ennemi de la simplicité de qui sait que tout vient de Dieu, même s’il peut être très utile dans l’effort que chacun fait pour vivre par le Christ et pour « aimer les autres comme Dieu nous a aimés », pour employer les mots de saint Jean. Mais il peut aussi devenir source d’erreur pour celui qui s’attache trop à cet effort. Il est vrai que nous sommes appelés à accomplir des œuvres encore plus grandes que celles du Christ lui-même : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que je fais ; et il en fera même de plus grandes, parce que je vais vers le Père » (Jn 14, 12). L’audace devrait donc caractériser la vie d’un chrétien. Mais il ne faut pas imaginer que la grandeur de nos œuvres dépende d’abord de nous, car c’est ainsi que l’audace se transforme en orgueil. Il faut toujours avoir la lucidité de reconnaître que cette grandeur vient de l’activité de l’Esprit Saint qui œuvre en nous. Cette lucidité-là, toujours enracinée dans la simplicité fondamentale mentionnée plus haut, nous empêchera toujours de figer la dynamique de l’Esprit, de la réduire à nos calculs, de confondre notre volonté avec la volonté de Dieu. Celui qui peut intégrer tout cela à sa vie pourra maintenir un juste équilibre entre la simplicité et le calcul, ce qui lui permettra de travailler avec beaucoup de souplesse et d’audace pour que le nom de Dieu soit sanctifié, que son règne vienne et que la volonté de Dieu (et non la sienne) soit faite.
Insaisissable simplicité spirituelle
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Annie Wellens [***] Longtemps libraire à La Rochelle, écrivain ; dernier…[***]
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Les allitérations sifflantes, donc quelque peu serpentines mais sans connotation maligne, de ce titre, entendent faire écho à la difficulté de mettre la main sur la simplicité dans les répertoires de vertus, fussent-elles théologales ou cardinales. Elle n’y figure pas, tout en participant de ces « bonnes qualités » données par Dieu afin de bien vivre, selon Thomas d’Aquin. La simplicité serpente ainsi à travers de nombreux textes chrétiens d’époques différentes, perçue comme un don, mais sans davantage appartenir à la liste des dons de l’Esprit, ou comme le fruit d’une orientation intérieure fondée en vérité ou comme une vertu « mineure ». Quant à celui qui se qualifierait lui-même de « simple », il démériterait immédiatement de l’appellation, révélant par cette autoproclamation une « duplicité d’âme » qui trouble le regard jusqu’à le faire loucher vers autrui afin de mesurer les effets d’une telle déclaration. « Duplicité d’âme » ou « fille du diable », comme l’appellent les premiers écrits des Pères, ceux que l’on nomme Apostoliques, particulièrement dans le rafraîchissant récit d’initiation chrétienne qu’est Le Pasteur d’Hermas, où les images parlent aussi fort que les préceptes, à une époque où les grandes élaborations doctrinales ne sont pas davantage en chantier que l’arrêté des listes vertueuses. Hermas, considéré comme « plein de parfaite simplicité et de grande innocence », donc mûr pour entrer en résonance avec la pédagogie divine, pourra vivre joyeusement et sans se troubler (alors que les commentateurs ont rivalisé d’explications embarrassées) une douce nuit parmi la ronde de douze vierges, dont celle ayant pour nom « Simplicité », qui l’invitent à se coucher au milieu d’elles. « Et elles ne firent rien du tout, que prier », précise le récit [6] Hermas, Le Pasteur, Sources Chrétiennes 53, Cerf.[6].
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Ces images pourraient sembler, à première vue, trop polies pour être honnêtes, trop simples pour ne pas verser dans le simplisme. Un lecteur méfiant les classerait d’emblée dans les discours pieux ou, pire encore pour les défiants chroniques, dans les légendes, oubliant que la légende réclame étymologiquement d’être lue, et non survolée ou parcourue d’un œil qui sait déjà « ce qu’il faut » en penser. Et si l’une des premières tâches du lecteur était de lire en toute simplicité ce qui se donne à lire ? De laisser le texte prendre son essor et rencontrer en vol la mémoire d’autres écrits que tout bon lecteur porte en lui ? Comme cette tranquille affirmation concernant l’un des Pères du Jura qui, à la suite de Jean Cassien, ont acclimaté en Gaule les cépages orientaux des Pères du désert : « Le nouvel hôte, cherchant une demeure répondant à ses vœux, trouva du côté de l’orient, au pied d’une montagne rocheuse, un sapin très épais, écartant en cercle sa ramure et qui, déployant sa large chevelure, [le] couvrit. […] Il était largement dans l’abondance, puisqu’il n’avait besoin de rien […]. [7] Vie de saint Romain, 5-10, dans Vie des Pères du Jura,…[7] »
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L’authentification de l’attitude simple nécessite le regard d’autrui, mais un regard non sollicité, laissant le champ libre à la reconnaissance gracieuse. Chez les Pères du désert, le cultivateur Paul, d’une disposition naturelle « totalement simple et sans malice » deviendra spirituellement « Paul le Simple » à l’école du bienheureux Antoine. Après les premiers mois de discipline, « Antoine en fut convaincu : Paul avait une âme accomplie car, étant d’une totale simplicité, la grâce collaborait avec lui. [8] Histoire Lausiaque, Spiritualité Orientale 75, Bel…[8] » Plus complexes à discerner : les cas de ceux qui miment la simplicité d’esprit jusqu’à la folie. Tantôt il s’agira de reconnaître une vocation particulière d’union au Christ souffrant, comme pour cette moniale devenue volontairement « l’éponge du monastère », méprisée, battue par ses sœurs, jusqu’au jour où Abba Pitéroum vint révéler sa sainteté. Tantôt il conviendra de dévoiler, à travers les mêmes conduites excentriques, celles qui relèvent de charlatans y trouvant leur profit, et celles qui révèlent des ascètes sincères mais pris au piège de l’orgueil spirituel. Philon d’Alexandrie, expert en perturbations et oscillations menaçant la stabilité des amis de Dieu, conseillait de « se tenir debout en face de [Lui] regardant et regardé [9] Philon d’Alexandrie, De somnis II, Les Œuvres de Philon,…[9] ». Ce simple regard croisé entre Dieu et l’homme replante chacun à sa juste place. Des siècles plus tard, H.-U. von Balthasar pose un point d’orgue à la musique philonienne : la simplicité chrétienne opère « comme un mystère : le chrétien ne saurait y prétendre de lui-même et l’ériger en “vertu” par son effort propre, comme si elle pouvait être produite et qu’il en fût le maître, car elle est, en lui, le reflet d’une lumière divine qui se donne à lui. [10] Hans-Urs von Balthasar, Simplicité chrétienne, Desclée,…[10] »
La nostalgie de l’immédiateté
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Laurent Wolf [****] Journaliste, critique d’art.[****]
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Pablo Picasso a dit un jour qu’il lui avait fallu beaucoup de temps pour peindre enfin comme un enfant. A dix-sept ans, il réalisait des toiles que de vieux peintres expérimentés lui enviaient. Ses dessins et ses gravures témoignent d’une virtuosité inouïe. Si Picasso peint comme un enfant, un enfant ne peut pas peindre comme lui, parce que Picasso sait qu’il n’est pas un enfant, et qu’un enfant ne sait pas qu’il en est un ou, du moins, il ne sait pas ce que cela signifie quand il peint. Le rêve de simplicité est le nœud des relations avec l’art. Il faudrait que l’œuvre parle directement à l’esprit, à l’âme, au corps : que l’émotion surgisse, que la lumière se fasse.
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A la fin du xixe siècle, les artistes ont voulu rompre avec la tradition académique, avec ses codes et ses conventions. Ils se sont tournés vers l’ailleurs, comme Gauguin qui s’en est allé dans les îles ; comme les préraphaélites anglais qui ont prêté les vertus de l’innocence à l’art d’avant la Renaissance. Ailleurs, en Afrique, en Océanie. Ou dans un Moyen Age imaginaire qui était devenu à la mode après avoir été méprisé. Il fallait que ce soit primitif. Il y eut ensuite l’art des fous qu’aimaient les surréalistes, l’art des « outsiders » comme les Américains appellent les artistes sans formation, sans références autres que leurs propres pulsions actives ; plus tard l’art brut que défendait Jean Dubuffet, et toujours l’art naïf, avec son exotisme répétitif, ses petites taches de couleur et ses dessins précis.
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Le rêve de simplicité en art prend sa source dans la nostalgie de l’universel, d’une humanité partout capable de comprendre l’humanité, de pareils qui sont nos pareils. Et dans la nostalgie de l’immédiateté, d’un lien naturel avec l’autre, d’une connivence originelle qu’il suffirait de retrouver en abandonnant au passage tout ce qui lui fait obstacle. Nous serions tous égaux face à l’art, pour le voir et pour le faire. En même temps, les rêveurs égalitaires visitent les expositions avec un audioguide. Ils veulent savoir. Ce que c’est, comment c’est fait et pourquoi. Ils ont peur d’un rendez-vous manqué. Ils se soumettent à l’autorité du savoir. Qui a vraiment confiance dans la simplicité ?
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La simplicité est un objet de représentation, pas un moyen. Les personnages de Jan Vermeer (1632-1675) semblent dépourvus de complication. Derrière sa fameuse Laitière, il est possible d’apercevoir un clou planté dans le mur et son ombre, un détail matériel qui accompagne le geste de la servante et le réalisme de l’ensemble. Vermeer n’évoque pas les conflits et les guerres qui ont traversé le Siècle de d’or de la Hollande. Son monde réaliste est retranché des réalités de l’histoire. Chez Chardin (1699-1779), un siècle plus tard, même retrait dans un espace dépourvu de conflits. Il y a des fruits, des légumes, du poisson. Les cuisinières tranquilles s’affairent. Qui sait même si quelqu’un a mangé ce qu’elles préparent sous nos yeux ?
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L’humilité des personnages de Chardin et de Vermeer, l’humilité de leurs actes est très éloignée des grandes machines allégoriques et de la peinture d’histoire. Mais le savoir-faire est le même. Il n’est pas simple. C’est seulement à la fin du xixe et surtout dans les premières décennies du xxe siècle que les artistes ont commencé à vouloir associer la simplicité des moyens à la simplicité des fins.
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Vers 1915, Marcel Duchamp (1887-1968) réalise ses premiers ready-made, des « objets tout faits » dont on dit qu’ils ont changé la définition de l’art. A cette époque, il vient de terminer le Nu descendant un escalier ; il commence à préparer l’une de ses œuvres les plus complexes, Le Grand verre. Avec le ready-made, il élimine toute médiation. Il dépouille l’opération visuelle de l’artifice ; il la dégage du préconçu qui la rend, faussement, évidente. Il retranche tout de l’intervention artistique, sauf la décision (prendre un objet, le signer).
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En 1931, Mondrian (1872-1944) peint un tableau qui est la synthèse ultime des expériences menées depuis une dizaine d’années, une toile carrée sur la pointe, avec une ligne noire verticale tout à gauche qui croise à angle droit une ligne noire horizontale un peu plus large (Composition avec deux lignes). Mondrian a dit qu’il fallait que la peinture se libère de la chose vue, du témoignage, pour devenir une chose en soi. Il a aussi décrit cette peinture en évoquant un paysage marin nocturne avec la ligne d’horizon et le reflet de la lune sur la mer, dont il ne reste en négatif que ces deux lignes qui se croisent.
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Le ready-made et la peinture non-figurative (y compris quand elle est monochrome) renversent l’ordre de la perception et de la réception. Avant eux, il fallait lire les images, les décrypter, les vider progressivement de ce qu’elles recèlent et en dérouler l’histoire (l’historia dont parle déjà Alberti au xve siècle). A partir du xxe siècle, certains artistes conçoivent leur art comme une ascèse, une retraite, un dénuement. Leur art ne laisse qu’un presque rien, et il confie aux autres la tâche heureuse de le remplir.

 

LA SIMPLICITÉ (LE PARADIS DE L’ÂME) – PAR SAINT ALBERT LE GRAND

27 février, 2014

http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/albert/albert/30simplicite.htm

LE PARADIS DE L’ÂME

PAR SAINT ALBERT LE GRAND

CHAPITRE XXX

LA SIMPLICITÉ

1. La simplicité véritable et parfaite consiste à ne nuire à personne, mais à être utile à tous, comme le dit la Glose sur les paraboles (1). C’est la première vertu que l’on fait valoir chez Job. « Il y avait, dans le pays de Hus, un homme du nom de Job, et cet homme était simple et droit » (ch. 1, v. 1). Apparemment, cette vertu l’emportait, en lui, sur toutes les autres.
C’est elle aussi que le Seigneur a ordonnée, lorsqu’il envoya ses apôtres dans le monde pour appeler les incrédules à l’unité de la foi catholique : « Soyez prudents comme les serpents et simples comme les colombes » (Matt., ch. 10, v. 16). Dans son commandement, il joint la prudence à la simplicité ; car la prudence sans la simplicité, c’est de la ruse ; la simplicité sans la prudence, c’est de la sottise. La colombe ne blesse ni du bec ni des ongles ; de même, l’âme vraiment simple ne fait du mal ni en parole ni par action.
2. Il aime vraiment la simplicité, celui qui ne s’occupe pas, comme Marthe, à une multitude d’affaires, – car le grand nombre entraîne la complication– mais qui n’en cherche qu’une seule, celle dont Notre-Seigneur disait : « Une seule chose est nécessaire » (Luc, ch. 10, v. 42) ; et il en félicitait Marie-Madeleine : « Elle a choisi la meilleure part qui ne lui sera pas enlevée. » Il s’agit du seul Bien, où se trouvent tous les biens, immenses et éternels.
3. Les avantages de la simplicité doivent nous exciter à l’amour de cette vertu. Il est écrit que Dieu aime à s’entretenir avec les âmes simples » (Prov., ch. 3, v. 32). Le Seigneur est familier avec elles et il ne dédaigne pas de leur révéler ses secrets. Ainsi, aux apôtres qui empêchaient les petits enfants d’aller jusqu’à lui, Notre-Seigneur disait : « Laissez-les, ne les empêchez pas de venir à moi, car le royaume des cieux appartient à ceux qui leur ressemblent » (Matt., ch. 19, v. 14). Sans cette vertu, le salut est impossible : « Si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux » (ch. 18, v. 3). Le Seigneur Jésus ne dit pas : Si vous ne devenez petits enfants, mais « comme les enfants », ce qui signifie simples et innocents.
Voici une autre utilité de cette vertu. « Celui qui marche dans la simplicité marche en confiance » (Prov., ch. 10, v. 9). La voie de la simplicité, c’est le chemin le plus sûr dans le royaume des cieux. « Dieu protégera ceux qui marchent dans la simplicité » (ch. 2, v. 7).
4. Les preuves de la simplicité véritable sont de bien présumer de tous, loin de tourner en mauvaise part les actions du prochain ; de ne dénaturer le bien de personne ni de le diminuer ; de ne souhaiter le mal à aucun et de désirer le salut de tous, de faire de bonnes actions et de les bien faire, d’avoir des idées justes sur Dieu et de le chercher dans la simplicité du cœur, de se soumettre aussi à sa volonté et de garder ses commandements.
5. Il est convaincu de duplicité, celui dont les paroles diffèrent des pensées et des actions. Ainsi Joab s’apprête à baiser Amasa en lui disant : Salut, mon frère ; mais en même temps il tire en secret son épée et le frappe mortellement (IIe livre des Rois, ch. 20, v. 9-10).
Le Seigneur Jésus s’oppose à cette duplicité : « Que votre langage soit : Cela est, cela n’est pas » (Matt., ch. 5, v. 37) ; autrement dit : Ce que vous avez dans le cœur, proférez-le de vive voix et montrez-le par vos œuvres. « L’homme à deux âmes est inconstant dans toutes ses voies » (Jacq., ch. 1, v. 8). Notre-Seigneur maudit les hommes de duplicité qui veulent servir en même temps Dieu et le diable, ou s’exercer au péché et aux bonnes œuvres. Et il disait à leur adresse : « Personne ne peut servir deux maîtres » (Matt., ch. 6, v. 24) ; il s’agit de deux maîtres qui s’opposent : le bien et le mal, la vertu et le vice sont absolument contraires. Et pour ceux qui voudraient plaire à Dieu et au monde, voici la pensée de saint Jacques : « Quiconque veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu » (ch. 4, v. 4).
Se montrer simple, à l’extérieur, dans la manière de se conduire, et porter la fourberie dans son mur, c’est une marque de fausse simplicité. Jérémie s’en plaignait de la sorte : « Que chacun de vous se garde de son ami ; et ne vous fiez à aucun frère, car les frères se supplanteront les uns les autres, et les amis sont des trompeurs » (ch. 9, v. 5).

(1) On n’a pas trouvé cette glose.

création de l’homme et de la femme

26 février, 2014

 création de l'homme et de la femme dans images sacrée Icona2

http://www.paoline.org/pls/paoline/v3_s2ew_consultazione.mostra_pagina?id_pagina=13360

 

MESSAGE DE SA SAINTETÉ FRANÇOIS POUR LE CARÊME 2014

26 février, 2014

http://www.vatican.va/holy_father/francesco/messages/lent/documents/papa-francesco_20131226_messaggio-quaresima2014_fr.html

MESSAGE DE SA SAINTETÉ FRANÇOIS POUR LE CARÊME 2014

Il s’est fait pauvre pour nous enrichir par sa pauvreté (cf 2 Cor 8,9)

Chers frères et sœurs,

Je voudrais vous offrir, à l’occasion du Carême, quelques réflexions qui puissent vous aider dans un chemin personnel et communautaire de conversion. Je m’inspirerai de la formule de Saint Paul : « Vous connaissez en effet la générosité de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Co 8, 9). L’Apôtre s’adresse aux chrétiens de Corinthe pour les encourager à être généreux vis-à-vis des fidèles de Jérusalem qui étaient dans le besoin. Que nous disent-elles, ces paroles de saint Paul, à nous chrétiens d’aujourd’hui ? Que signifie, pour nous aujourd’hui, cette exhortation à la pauvreté, à une vie pauvre dans un sens évangélique ?

La grâce du Christ
Ces paroles nous disent avant tout quel est le style de Dieu. Dieu ne se révèle pas par les moyens de la puissance et de la richesse du monde, mais par ceux de la faiblesse et la pauvreté : « Lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous … ». Le Christ, le Fils éternel de Dieu, qui est l’égal du Père en puissance et en gloire, s’est fait pauvre ; il est descendu parmi nous, il s’est fait proche de chacun de nous, il s’est dépouillé, « vidé », pour nous devenir semblable en tout (cf. Ph 2, 7 ; He 4, 15). Quel grand mystère que celui de l’Incarnation de Dieu ! C’est l’amour divin qui en est la cause, un amour qui est grâce, générosité, désir d’être proche et qui n’hésite pas à se donner, à se sacrifier pour ses créatures bien-aimées. La charité, l’amour, signifient partager en tout le sort du bien-aimé. L’amour rend semblable, il crée une égalité, il abat les murs et les distances. C’est ce qu’a fait Dieu pour nous. Jésus en effet, « a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché » (Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et Spes, n. 22 § 2).
La raison qui a poussé Jésus à se faire pauvre n’est pas la pauvreté en soi, mais, – dit saint Paul – [pour que] « … vous deveniez riches par sa pauvreté ». Il ne s’agit pas d’un jeu de mots, ni d’une figure de style ! Il s’agit au contraire d’une synthèse de la logique de Dieu, de la logique de l’amour, de la logique de l’Incarnation et de la Croix. Dieu n’a pas fait tomber sur nous le salut depuis le haut, comme le ferait celui qui donne en aumône de son superflu avec un piétisme philanthropique. Ce n’est pas cela l’amour du Christ ! Lorsque Jésus descend dans les eaux du Jourdain et se fait baptiser par Jean Baptiste, il ne le fait pas par pénitence, ou parce qu’il a besoin de conversion ; il le fait pour être au milieu des gens, de ceux qui ont besoin du pardon, pour être au milieu de nous, qui sommes pécheurs, et pour se charger du poids de nos péchés. Voilà la voie qu’il a choisie pour nous consoler, pour nous sauver, pour nous libérer de notre misère. Nous sommes frappés par le fait que l’Apôtre nous dise que nous avons été libérés, non pas grâce à la richesse du Christ, mais par sa pauvreté. Pourtant saint Paul connaît bien « la richesse insondable du Christ » (Ep 3, 8) « établi héritier de toutes choses » (He 1, 2).
Alors quelle est-elle cette pauvreté, grâce à laquelle Jésus nous délivre et nous rend riches ? C’est justement sa manière de nous aimer, de se faire proche de nous, tel le Bon Samaritain qui s’approche de l’homme laissé à moitié mort sur le bord de la route (cf. Lc 10, 25ss). Ce qui nous donne la vraie liberté, le vrai salut, le vrai bonheur, c’est son amour de compassion, de tendresse et de partage. La pauvreté du Christ qui nous enrichit, c’est le fait qu’il ait pris chair, qu’il ait assumé nos faiblesses, nos péchés, en nous communiquant la miséricorde infinie de Dieu. La pauvreté du Christ est la plus grande richesse : Jésus est riche de sa confiance sans limite envers le Père, de pouvoir compter sur Lui à tout moment, en cherchant toujours et seulement la volonté et la gloire du Père. Il est riche comme est riche un enfant qui se sent aimé et qui aime ses parents et ne doute pas un seul instant de leur amour et de leur tendresse. La richesse de Jésus, c’est d’être le Fils ; sa relation unique avec le Père est la prérogative souveraine de ce Messie pauvre. Lorsque Jésus nous invite à porter son « joug qui est doux », il nous invite à nous enrichir de cette « riche pauvreté » et de cette « pauvre richesse » qui sont les siennes, à partager avec lui son Esprit filial et fraternel, à devenir des fils dans le Fils, des frères dans le Frère Premier-né (cf. Rm 8, 29).
On a dit qu’il n’y a qu’une seule tristesse, c’est celle de ne pas être des saints (L. Bloy) ; nous pourrions également dire qu’il n’y a qu’une seule vraie misère, c’est celle de ne pas vivre en enfants de Dieu et en frères du Christ.

Notre témoignage
Nous pourrions penser que cette « voie » de la pauvreté s’est limitée à Jésus, et que nous, qui venons après Lui, pouvons sauver le monde avec des moyens humains plus adéquats. Il n’en est rien. À chaque époque et dans chaque lieu, Dieu continue à sauver les hommes et le monde grâce à la pauvreté du Christ, qui s’est fait pauvre dans les sacrements, dans la Parole, et dans son Église, qui est un peuple de pauvres. La richesse de Dieu ne peut nous rejoindre à travers notre richesse, mais toujours et seulement à travers notre pauvreté personnelle et communautaire, vivifiée par l’Esprit du Christ.
À l’exemple de notre Maître, nous les chrétiens, nous sommes appelés à regarder la misère de nos frères, à la toucher, à la prendre sur nous et à œuvrer concrètement pour la soulager. La misère ne coïncide pas avec la pauvreté ; la misère est la pauvreté sans confiance, sans solidarité, sans espérance. Nous pouvons distinguer trois types de misère : la misère matérielle, la misère morale et la misère spirituelle. La misère matérielle est celle qui est appelée communément pauvreté et qui frappe tous ceux qui vivent dans une situation contraire à la dignité de la personne humaine : ceux qui sont privés des droits fondamentaux et des biens de première nécessité comme la nourriture, l’eau et les conditions d’hygiène, le travail, la possibilité de se développer et de croître culturellement. Face à cette misère, l’Église offre son service, sa diakonia, pour répondre aux besoins et soigner ces plaies qui enlaidissent le visage de l’humanité. Nous voyons dans les pauvres et les laissés-pour-compte le visage du Christ ; en aimant et en aidant les pauvres nous aimons et nous servons le Christ. Notre engagement nous pousse aussi à faire en sorte que, dans le monde, cessent les atteintes à la dignité humaine, les discriminations et les abus qui sont si souvent à l’origine de la misère. Lorsque le pouvoir, le luxe et l’argent deviennent des idoles, ils prennent le pas sur l’exigence d’une distribution équitable des richesses. C’est pourquoi il est nécessaire que les consciences se convertissent à la justice, à l’égalité, à la sobriété et au partage.
La misère morale n’est pas moins préoccupante. Elle consiste à se rendre esclave du vice et du péché. Combien de familles sont dans l’angoisse parce que quelques-uns de leurs membres – souvent des jeunes – sont dépendants de l’alcool, de la drogue, du jeu, de la pornographie ! Combien de personnes ont perdu le sens de la vie, sont sans perspectives pour l’avenir et ont perdu toute espérance ! Et combien de personnes sont obligées de vivre dans cette misère à cause de conditions sociales injustes, du manque de travail qui les prive de la dignité de ramener le pain à la maison, de l’absence d’égalité dans les droits à l’éducation et à la santé. Dans ces cas, la misère morale peut bien s’appeler début de suicide. Cette forme de misère qui est aussi cause de ruine économique, se rattache toujours à la misère spirituelle qui nous frappe, lorsque nous nous éloignons de Dieu et refusons son amour. Si nous estimons ne pas avoir besoin de Dieu, qui nous tend la main à travers le Christ, car nous pensons nous suffire à nous-mêmes, nous nous engageons sur la voie de l’échec. Seul Dieu nous sauve et nous libère vraiment.
L’Évangile est l’antidote véritable contre la misère spirituelle : le chrétien est appelé à porter en tout lieu cette annonce libératrice selon laquelle le pardon pour le mal commis existe, selon laquelle Dieu est plus grand que notre péché et qu’il nous aime gratuitement, toujours, et selon laquelle nous sommes faits pour la communion et pour la vie éternelle. Le Seigneur nous invite à être des hérauts joyeux de ce message de miséricorde et d’espérance ! Il est beau d’expérimenter la joie de répandre cette bonne nouvelle, de partager ce trésor qui nous a été confié pour consoler les cœurs brisés et donner l’espérance à tant de frères et de sœurs qui sont entourés de ténèbres. Il s’agit de suivre et d’imiter Jésus qui est allé vers les pauvres et les pécheurs comme le berger est allé à la recherche de la brebis perdue, et il y est allé avec tout son amour. Unis à Lui, nous pouvons ouvrir courageusement de nouveaux chemins d’évangélisation et de promotion humaine.
Chers frères et sœurs, que ce temps de Carême trouve toute l’Église disposée et prête à témoigner du message évangélique à tous ceux qui sont dans la misère matérielle, morale et spirituelle ; message qui se résume dans l’annonce de l’amour du Père miséricordieux, prêt à embrasser toute personne, dans le Christ. Nous ne pourrons le faire que dans la mesure où nous serons conformés au Christ, Lui qui s’est fait pauvre et qui nous a enrichi par sa pauvreté. Le Carême est un temps propice pour se dépouiller ; et il serait bon de nous demander de quoi nous pouvons nous priver, afin d’aider et d’enrichir les autres avec notre pauvreté. N’oublions pas que la vraie pauvreté fait mal : un dépouillement sans cette dimension pénitentielle ne vaudrait pas grand chose. Je me méfie de l’aumône qui ne coûte rien et qui ne fait pas mal.
Que l’Esprit Saint, grâce auquel nous « [sommes] pauvres, et nous faisons tant de riches ; démunis de tout, et nous possédons tout » (2 Co 6, 10), nous soutienne dans nos bonnes intentions et renforce en nous l’attention et la responsabilité vis-à-vis de la misère humaine, pour que nous devenions miséricordieux et artisans de miséricorde. Avec ce souhait je vous assure de ma prière, afin que tout croyant et toute communauté ecclésiale puisse parcourir avec profit ce chemin de Carême. Je vous demande également de prier pour moi. Que le Seigneur vous bénisse et que la Vierge Marie vous garde.

Du Vatican, le 26 décembre 2013

Fête de Saint Étienne, diacre et protomartyr

LE CARÊME

26 février, 2014

http://www.steinbach68.org/careme07.htm

LE CARÊME

Le Carême qui s’est ouvert avec le mercredi des Cendres est un temps privilégié de pèlerinage intérieur et de conversion pour se préparer à la joie de Pâques. Le jeûne, la prière et le partage sont les moyens concrets proposés par l’Église pour accéder à une plus grande disponibilité et se mettre à l’écoute du Christ

Que signifie le mot Carême ?
Le mot Carême est une contraction du mot latin quadragesima qui signifie quarantième. Quarante est, dans la Bible, un chiffre symbolique qui désigne un temps d’attente, de maturation, de dépouillement, de solitude, qui prépare à la rencontre de Dieu, un temps de préparation à de nouveaux commencements. Les quarante jours de Carême sont à l’image des quarante ans que le peuple hébreu, libéré par Dieu de l’esclavage en Égypte a passés au désert avant d’entrer en Terre promise (livre de l’Exode), à l’image surtout des quarante jours que Jésus a vécu dans le désert, entre son baptême et le début de sa vie publique (Matthieu 4, 1-11).
Ces quarante jours sont un temps de conversion pour se préparer à la fête de Pâques, cœur de la foi chrétienne, qui célèbre la résurrection du Christ. C’est en cela que le Carême se distingue de tout autre temps de jeûne et de purification vécu dans d’autres confessions religieuses ou dans les pratiques des sagesses orientales. Le jeûne, la prière, le partage sont les moyens concrets proposés par le Christ, et l’Église à sa suite, pour convertir son rapport à soi-même, à Dieu et aux autres.

Quelle est l’origine et l’histoire du Carême dans l’Église ?
La pratique du Carême a subi beaucoup de fluctuations. Dans l’Église primitive, le Carême est le temps ultime de préparation au baptême des catéchumènes célébré la nuit de Pâques. Une lettre de saint Irénée au pape Victor, à la fin du IIe siècle, indique que le jeûne durait alors d’un jour avant Pâques à toute la Semaine sainte. Au IVe siècle, le Carême est devenu un temps liturgique spécifique, orienté vers la fête de la Résurrection, et empreint d’austérité (la couleur liturgique devient le violet, et les acclamations joyeuses sont supprimées dans les célébrations).
Le jeûne, qui a pour but de donner soif et faim de Dieu et de sa parole, est alors porté à quarante jours. On en trouve trace dans un canon du concile de Nicée en 325. Le calcul de ces quarante jours va varier dans le temps avant d’être harmonisé. Au départ, le jeûne consistait à ne prendre qu’un repas quotidien composé de pain, de légumes, et d’eau, et à s’abstenir de toute nourriture les Vendredi et Samedi saints.
Peu à peu, il va perdre de sa rigueur. Aujourd’hui, l’Église catholique ne prescrit plus le jeûne que le mercredi des Cendres et le Vendredi saint. Elle invite néanmoins les fidèles à réduire leur consommation dans le domaine de leur choix (alcool, tabac, télévision…) et à partager, notamment sous forme de don. Chaque année, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) anime une campagne de Carême au profit de la solidarité internationale

Comment protestants et orthodoxes vivent-ils le Carême ?
La Réforme s’est opposée au jeûne obligatoire du Carême. Les protestants n’ont en revanche en rien contesté l’importance du Carême pour la spiritualité. Les Églises de la Réforme marquent ce temps de Carême par l’organisation d’actions de solidarité.
Dans l’orthodoxie, il existe plusieurs carêmes: le grand Carême, le Carême de Noël du 15 novembre au 24 décembre, la période de jeûne avant la fête des saints Pierre et Paul, le jeûne de la Dormition du 1 er au 14 août.
Le grand Carême, également appelé Sainte quarantaine, prépare la fête de Pâques. Pendant ce grand Carême, les orthodoxes s’abstiennent de tout produit animal, de graisse et de vin, tous les jours sauf le samedi et le dimanche. Il n’y a pas de célébration de la Divine Liturgie les jours de jeûne, du lundi au vendredi.
En effet, pour l’orthodoxie, la célébration de l’Eucharistie est incompatible avec le jeûne, car elle célèbre la joie de la résurrection du Christ et anticipe la joie éternelle du Royaume de Dieu. Cependant les mercredis et vendredis soir de Carême il y a un office de communion qu’on appelle «liturgie des présanctifiés». On communie avec le Corps et le Sang du Christ consacrés à la liturgie eucharistique du dimanche précédant et gardés sur l’autel.
Dans le rite catholique romain, la liturgie des présanctifiés n’a lieu que le Vendredi saint (on communie aux espèces consacrées la veille ).

Le concile Vatican II a remis en valeur le catéchuménat des adultes des premiers siècles.
Le grand Carême orthodoxe est précédé d’une entrée en Carême qui se déroule sur cinq dimanches consécutifs, chacun d’entre eux étant consacré, avec un évangile particulier, à un aspect fondamental du repentir. Le 1er dimanche de Carême, les orthodoxes fêtent le triomphe de l’orthodoxie contre la répression iconoclaste. Les 3e ,4e et 5e dimanches sont dédiés à la commémoraison de grands maîtres spirituels: saint Grégoire Palamas, saint Jean Climaque et sainte Marie l’Égyptienne.

En quoi le Carême est-il un temps important pour les catéchumènes ?
Le concile Vatican II a remis en valeur dans l’Eglise catholique le catéchuménat des adultes des premiers siècles. Durant le Carême, les catéchumènes franchissent les toutes dernières étapes de leur chemin vers le baptême qu’ils reçoivent lors de la Vigile pascale (lire La Croix du 10-11 février). Le rite de l’appel décisif et de l’inscription du nom est célébré le 1er dimanche de Carême. Le rituel prévoit ensuite trois « scrutins », célébrés les 3e ,4e ,5e dimanches de Carême. Il s’agit de scruter les cœurs de ceux qui s’avancent vers le Dieu vivant qui seul sonde et connaît les cœurs (Psaume 138). Au cours de ces étapes, les catéchumènes reçoivent le «Notre Père» et le « Je crois en Dieu ».

MARTINE DE SAUTO

SAINT ALEXANDRE ÉVÊQUE D’ALEXANDRIE

25 février, 2014

SAINT ALEXANDRE ÉVÊQUE D'ALEXANDRIE dans images sacrée St.-Alexander-of-Alexandria

http://classicalchristianity.com/category/bysaint/st-alexander-of-alexandria-died-ca-326/

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