Archive pour le 4 janvier, 2014

Lorenzo Monaco, Adorazione dei Magi

4 janvier, 2014

 Lorenzo Monaco, Adorazione dei Magi dans images sacrée Don_Lorenzo_Monaco_002.2
http://it.wikipedia.org/wiki/Lorenzo_Monaco

SUR LES TRACES DES MAGES D’ORIENT

4 janvier, 2014

http://bible.archeologie.free.fr/roismages.html

SUR LES TRACES DES MAGES D’ORIENT

(BIB-ARCH.ORG)

« Jésus étant né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son astre à son lever et nous sommes venus lui rendre hommage » (Mt. 2. 1-2).
Les mages qui avaient suivi l’étoile prophétique rendirent visite au roi de Judée Hérode le Grand. Ils le consultèrent au sujet du nouveau roi, et les prêtres leur indiquèrent la ville de Bethléem. Les mages se rendirent donc à Bethléem, où ils trouvèrent un enfant couché dans une crêche à qui ils offrirent des présents. A leur retour ils ne s’arrêtèrent pas chez Hérode, ce qui déplut fortement au roi. L’impitoyable monarque ordonna en représailles un infanticide général, destiné à éliminer le nouveau-né, mais celui-ci fut mis à l’abri en Egypte par ses parents et y demeura jusqu’à la mort d’Hérode (Mt. 2).
Le terrible forfait commis par le roi de Judée est conforme au caractère impitoyable du personnage tel qu’il apparaît dans l’Histoire. Quant aux mages, quelles motivations avaient poussé ces voyageurs de haut rang à se déplacer depuis un pays lointain pour s’incliner devant un enfant de Bethléem ? D’où venaient-ils ? Quel astre avaient-ils vu ? Aujourd’hui, leur identité et leur histoire se révèlent peu à peu.
L’évangile de Matthieu n’est pas le seul document d’époque à relater la visite de ces mages en Judée. Un témoignage moins connu nous vient de l’historien Flavius Josèphe (37-100), un prêtre juif qui tenta de promouvoir un rapprochement diplomatique entre les peuples juif et romain. Son oeuvre politique fut un échec, mais son travail d’historien constitue une source d’informations de première importance sur son époque. Elle est d’autant plus précieuse qu’il fait plusieurs fois référence au personnage de Jésus de Nazareth, et qu’il est le premier à le citer. Ainsi, dans son ouvrage « La guerre des Juifs », il parle des mages rendant visite à un enfant-roi dont la naissance est annoncé par une étoile, dans une version très proche de celle de Matthieu :
« Des sages venus de Perse visitent Hérode. « Nous venons de Perse, nos ancêtres ont recueilli des Chaldéens l’astronomie qui est notre science et notre art… » L’étoile leur est apparue et signifie la naissance d’un roi qui dominera sur l’Univers. L’étoile les conduit à Jérusalem mais disparaît. Hérode leur recommande de lui indiquer qui est la personne désignée par l’étoile, mais les Perses ne reviennent pas et Hérode fait massacrer 63 000 enfants de moins de trois ans. »
Si Josèphe semble confirmer la terrible réalité du massacre des enfants, avançant même un nombre possible de victimes, il précise également que le pays d’origine des mages était la Perse.
L’empire perse est le berceau d’une autre religion monothéiste, le zoroastrisme, qui avait été prêchée cinq cents ans plus tôt par son fondateur Zarathoustra. Cette croyance demeura la religion officielle de la Perse jusqu’à l’arrivée de l’islam au VIIème siècle. Elle partageait quelques points communs avec le christianisme. Son dieu appelé Ahura Mazda aurait créé l’Univers, et adopté le feu comme symbole. Le zoroastrisme était fondé sur un combat entre le bien et le mal, et annonçait la venue prochaine d’une sorte de messie, le « Saoshyant », qui devait naître d’une vierge et rétablir la justice en régénérant le monde. La démarche des mages de la crèche s’inscrit de manière cohérente dans la pensée zoroastrienne.
D’autres sources documentaires liées à l’Orient semblent se faire l’écho de la mémoire de ces personnages. Au Moyen-âge, le marchand vénitien Marco Polo (1254-1323) se rendit en Chine par la route de la soie. En chemin il dit s’être arrêté dans une ville de Perse appelée Saba (ou Saveh), où étaient vénérées les tombes traditionnelles des trois mages.
Le carnet de voyages de Marco Polo, connu sous le titre de « Livre des merveilles du monde », précise que l’un des trois mages aurait été roi de Saveh, le second de Diaveh et le troisième de Chiz. Saveh aurait été leur point de départ pour la Terre sainte, mais aussi leur lieu de leur sépulture. Marco Polo affirme y avoir visité leurs tombeaux en explorant le pays : « En Perse est la ville de Saba (Saveh), de laquelle les trois rois mages sont partis [...] et dans cette ville ils sont enterrés, dans trois grands et beaux monuments. Et parmi ceux-là existe un bâtiment carré, magnifiquement conservé. Les corps sont toujours entiers, avec leurs cheveux et leurs barbes ».
Saveh est aujourd’hui une ville moderne, implantée à 130 km au sud-ouest de Téhéran. Ce fut dans l’Antiquité un centre urbain important à partir de l’empire mède (env. VIIIème siècle av. J.-C.). Les fouilles les plus récentes de ses ruines furent effectuées en 2009, à l’initiative d’une équipe du centre iranien de recherches archéologiques dirigée par Pouriya Khadish. Entre autres vestiges, on dégagea les ruines de longs aqueducs et de plusieurs forteresses et relais caravaniers datant des dynasties parthe et sassanide (IIIe siècle av. J.-C. – VIIIe s. ap. J.-C.). Saveh posséda en outre l’une des plus importantes bibliothèques de Perse, qui fut détruite par les Mongols au XIIIème siècle. A ce jour, personne n’a retrouvé la trace des sépultures décrites par Marco Polo. Mais nous savons par l’étude du terrain que la cité était prospère au tournant de l’ère chrétienne.
Le voyageur vénitien recueillit sur place une curieuse légende, qui circulait dans le pays et qui évoque inévitablement l’évangile de la Nativité. Trois rois partirent un jour de Saveh pour voir un prophète nouveau-né en Palestine, à qui ils offrirent des présents. Celui-ci leur donna en échange une boîte à ne pas ouvrir. Sur le chemin du retour cependant, les mages ouvrirent le coffre malgré l’interdiction, et trouvèrent à l’intérieur une simple pierre. Déçus, ils la jetèrent dans un puits, mais voilà qu’il en surgit miraculeusement une grande flamme. Ils en prélevèrent une partie qu’ils rapportèrent à Saveh pour la placer dans un sanctuaire appelé le « château des adorateurs du feu », et dès lors les habitants de Saba vénérèrent ce feu qui ne devait jamais s’éteindre.
Ce récit fabuleux qui existe en plusieurs variantes, semble étrangement illustrer certaines données de terrain. A 400 km au nord-ouest de Téhéran, un site étonnant pourrait correspondre à la forteresse que Marco Polo appelle le « château des adorateurs du feu » : le Takht e Suleiman. Au milieu d’une grande plaine fertile, une colline de faible hauteur est entourée par une enceinte fortifiée ayant un vaste lac en son centre. Ce lieu particulier et riche en vestiges fut fouillé dans les années 1970 par Rudolf Naumann et Dietrich Huff, de l’Institut allemand d’archéologie. Les chercheurs dégagèrent un vaste complexe architectural, comprenant plusieurs temples antiques, dont l’un était visiblement dédié à l’eau et l’autre au feu. Une « salle du feu » bâtie en forme de croix présente en son centre un foyer de forme carrée. Tout autour se trouvent d’autres constructions, dont une salle carrée avec un dôme et des salles à colonnes.
Le Takht e Suleiman fut l’un des lieux les plus sacrés de l’ancienne Perse, car il passe pour avoir été le lieu de naissance de Zarathoustra. Il fut occupé dès le Ier millénaire av. J.-C. et jusqu’à sa destruction en 624 par l’empereur byzantin Héraclius. De vieux documents arabes ont permis d’établir que ce site n’était autre que l’ancienne ville de Chiz à laquelle Marco Polo fait référence. Par la suite son histoire s’est enrichie de diverses légendes, mettant en scène des personnages fameux comme Crésus et Salomon, avec des histoires de monstres lacustres et de trésors engloutis.
Si l’on se dirige davantage vers le nord-ouest de l’Iran, on atteint le lac d’Urmia près duquel est implanté un autre lieu associé aux rois mages. Au sein de la ville d’Urmia, l’église byzantine Sainte Marie (Mart Maryam) passe pour être très ancienne, et bâtie sur la tombe de l’un d’eux. Elle date du IVème siècle et serait la seconde plus ancienne église du monde après celle de Bethléem. Certaines sources disent même qu’elle fut érigée « juste après l’Ascension du Christ ». Ce petit bâtiment carré fait de pierres et de briques, détruit et reconstruit plusieurs fois de suite, abrite plusieurs galeries et tombes souterraines. La possibilité qu’elle cache celle de l’un des mages de la crêche n’est pas inconcevable, à moins qu’elle ne commémore plus vraisemblablement qu’une simple étape de leur voyage.
En 1987, le jeune historien britannique William Dalrymple fit un voyage en Asie sur les traces de Marco Polo, excursion qu’il compléta à son retour par une recherche documentaire sur le pays des mages. Dans son livre intitulé « In Xanadu », il relève quelques traits caractéristiques de la Perse que l’on retrouve de manière frappante dans l’évangile de la Nativité. Ainsi, les mages constituaient une classe de prêtres zoroastriens pratiquant l’astronomie et l’interprétation des rêves. Le terme de mage (magos) est d’origine perse, et il apparaît non traduit dans l’évangile en grec de Matthieu. Les trois présents offerts à l’enfant Jésus (or, myrrhe, encens) étaient des matières fréquemment apportées en offrandes dans les rites perses. Quant au site de Saveh, il fut l’un des plus importants observatoires astronomiques de l’Asie.
Les éléments précédents nous éclairent de manière significative sur la civilisation persane d’où les rois mages seraient issus. Cependant, le mystère de leur sépulture dans leur pays d’origine demeure. Pourtant cette absence peut partiellement s’expliquer par l’existence d’une autre piste, digne du plus grand intérêt.
La filière en question nous ramène en Occident, au cœur de la vieille Europe et plus précisément dans la cathédrale de Cologne, où les reliques supposées des trois mages sont conservées. Trois squelettes quasiment complets reposent en effet dans la cathédrale allemande et sont considérés le plus sérieusement du monde comme étant ceux des visiteurs orientaux de la crêche de Bethléem.
Comment ces corps seraient-ils parvenus jusque-là ? Dans son « Histoire des rois mages », le religieux Jean de Hildesheim (env. 1315-1375) a écrit que les corps des trois mages avaient été exhumés en Orient vers l’an 330 par l’impératrice sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin.
« La reine Hélène (…) commença à penser aux corps de ces trois rois. Elle s’équipa elle-même et, accompagnée de quelques gardes, partit pour le pays d’Ind(…). Après avoir trouvé les corps de Melchior, Balthasar et Gaspar, la reine Hélène les plaça dans un coffre, qu’elle décora richement et qu’elle transporta à Constantinople (…), où elle le déposa dans une église appelée Sainte Sophie ».
Les archives historiques occidentales permettent de suivre à la trace le parcours de ces reliques depuis le IVème siècle. Au XIIème siècle, les précieux ossements furent déplacés de Constantinople à Milan, offerts à la ville par le souverain byzantin Manuel Ier Comnène. En 1162 l’empereur germanique Frédéric Barberousse assiégea et prit Milan, où il trouva les reliques des rois mages et les offrit à la ville de Cologne. Dans cette ville d’Allemagne fut alors construite pour les abriter une somptueuse cathédrale gothique, où elles se trouvent encore aujourd’hui.
Une châsse d’or exposée dans le choeur de la cathédrale contient les ossements de trois hommes, enveloppés dans une pièce de tissu. Le reliquaire fut ouvert une première fois en 1863 et révéla un ensemble d’ossements mélangés, qui permirent de reconstituer trois squelettes masculins. L’observation des sutures osseuses de leurs crânes conduisit à distinguer trois âges différents, conformément aux représentations traditionnelles des mages.
Des examens plus approfondis furent menés au siècle suivant, en 1981, lorsque l’évéché de Cologne s’adressa à un spécialiste des tissus antiques, le professeur Daniel de Jonghe, du musée royal d’art et d’histoire de Bruxelles, pour qu’il soit procédé à un examen détaillé de la toile entourant les reliques. Les conclusions des analyses qui furent effectuées s’avérèrent fort instructives.
L’étoffe est composée de fils de soie de Chine croisés avec des fils d’or. Elle est teinte avec de la pourpre, un colorant hautement précieux extrait de coquillages, et en l’occurence cette pourpre provient de la région de Tyr. Par analogie avec un autre tissu rigoureusement identique trouvé à Palmyre dans un édifice occupé entre 103 et 272, on a pu conclure qu’elle fut confectionnée entre le Ier et le IIIème siècles de notre ère.
Des lambeaux de vêtements trouvés sur les ossements furent également analysés. Ce sont des étoffes précieuses qui relèvent de trois fabrications différentes : deux sont en tissu damassé et un en taffetas. Toutes viennent du Proche-Orient et datent aussi de l’Antiquité tardive. Ces résultats sont cohérents avec ce que l’on sait de l’histoire de ces objets, s’il est exact qu’ils remontent à l’époque romaine.
L’histoire des rois mages occupe une grande place dans la tradition chrétienne occidentale. On peut retracer l’évolution des croyances qui leur sont attachées dès les premiers siècles de notre ère, à travers les écrits de plusieurs érudits. L’écrivain carthaginois Tertullien (160-225) leur a donné pour la première fois le titre de rois. Le théologien Origène d’Alexandrie (185-253) estima leur nombre à trois, pour qu’il corresponde aux trois présents offerts à l’Enfant Jésus (Mt. 2, 11). A partir du VIème siècle, apparaissent les noms propres qui leur furent attribués : Gaspar, Balthazar, Melchior.
La manière dont les premiers chrétiens se représentaient physiquement les rois mages se traduit également dans l’iconographie. L’une de leurs plus anciennes représentations se trouve sur la célèbre mosaïque de l’église Saint-Apollinaire de Ravenne (VIème siècle), où l’on peut voir trois hommes avançant à grands pas en apportant des plats à la Vierge et à l’Enfant. Détail révélateur, les vêtements qu’ils portent sont typiques des habits perses de l’époque antique : pantalon, tunique courte avec ceinture et bonnet phrygien caractéristique des prêtres du dieu Mithra.
D’autres images de ce type sont même antérieures à la mosaïque de Ravenne et lui ressemblent beaucoup. La plus ancienne, préservée depuis le IIIème siècle dans la catacombe Sainte Priscille de Rome, est une peinture murale ébauchée en hauteur sur l’arcade d’une voûte. Elle figure trois silhouettes humaines, toujours dans la même position et dans des tons différents. Ces images, sans doute des oeuvres clandestines réalisées au temps des persécutions contre les chrétiens, nous montrent comment la mémoire des rois mages se transmettait deux cents ans seulement après leur venue à Bethléem.

DIMANCHE 5 JANVIER : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT : ISAÏE 60, 1 – 6

4 janvier, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

DIMANCHE 5 JANVIER : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT

PREMIERE LECTURE – ISAÏE 60, 1 – 6

1 Debout, Jérusalem !
Resplendis :
elle est venue ta lumière,
et la gloire du SEIGNEUR s’est levée sur toi.
2 Regarde : l’obscurité recouvre la terre,
les ténèbres couvrent les peuples ;
mais sur toi se lève le SEIGNEUR,
et sa gloire brille sur toi.
3 Les nations marcheront vers ta lumière,
et les rois, vers la clarté de ton aurore.
4 Lève les yeux, regarde autour de toi :
tous, ils se rassemblent, ils arrivent ;
tes fils reviennent de loin,
et tes filles sont portées sur les bras.
5 Alors tu verras, tu seras radieuse,
ton coeur frémira et se dilatera.
Les trésors d’au-delà des mers afflueront vers toi
avec les richesses des nations.
6 Des foules de chameaux t’envahiront,
des dromadaires de Madiane et d’Epha.
Tous les gens de Saba viendront,
apportant l’or et l’encens
et proclamant les louanges du SEIGNEUR.

Vous avez remarqué toutes les expressions de lumière, tout au long de ce passage : « Resplendis, elle est venue ta lumière… la gloire (le rayonnement) du SEIGNEUR s’est levée sur toi (comme le soleil se lève)… sur toi se lève le SEIGNEUR, sa gloire brille sur toi…ta lumière, la clarté de ton aurore…tu seras radieuse ».
On peut en déduire tout de suite que l’humeur générale était plutôt sombre ! Je ne dis pas que les prophètes cultivent le paradoxe ! Non ! Ils cultivent l’espérance.
Alors, pourquoi l’humeur générale était-elle sombre, pour commencer. Ensuite, quel argument le prophète avance-t-il pour inviter son peuple à l’espérance ?
Pour ce qui est de l’humeur, je vous rappelle le contexte : ce texte fait partie des derniers chapitres du livre d’Isaïe ; nous sommes dans les années 525-520 av.J.C., c’est-à-dire une quinzaine ou une vingtaine d’années après le retour de l’exil à Babylone. Les déportés sont rentrés au pays, et on a cru que le bonheur allait s’installer. En réalité, ce fameux retour tant espéré n’a pas répondu à toutes les attentes.
D’abord, il y avait ceux qui étaient restés au pays et qui avaient vécu la période de guerre et d’occupation. Ensuite, il y avait ceux qui revenaient d’Exil et qui comptaient retrouver leur place et leurs biens. Or si l’Exil a duré cinquante ans, cela veut dire que ceux qui sont partis sont morts là-bas… et ceux qui revenaient étaient leurs enfants ou leurs petits-enfants … Cela ne devait pas simplifier les retrouvailles. D’autant plus que ceux qui rentraient ne pouvaient certainement pas prétendre récupérer l’héritage de leurs parents : les biens des absents, des exilés ont été occupés, c’est inévitable, puisque, encore une fois, l’Exil a duré cinquante ans !
Enfin, il y avait tous les étrangers qui s’étaient installés dans la ville de Jérusalem et dans tout le pays à la faveur de ce bouleversement et qui y avaient introduit d’autres coutumes, d’autres religions…
Tout ce monde n’était pas fait pour vivre ensemble…
La pomme de discorde, ce fut la reconstruction du Temple : car, dès le retour de l’exil, autorisé en 538 par le roi Cyrus, les premiers rentrés au pays (nous les appellerons la communauté du retour) avaient rétabli l’ancien autel du Temple de Jérusalem, et avaient recommencé à célébrer le culte comme par le passé ; et en même temps, ils entreprirent la reconstruction du Temple lui-même.
Mais voilà que des gens qu’ils considéraient comme hérétiques ont voulu s’en mêler ; c’étaient ceux qui avaient habité Jérusalem pendant l’Exil : mélange de juifs restés au pays et de populations étrangères, donc païennes, installées là par l’occupant ; il y avait eu inévitablement des mélanges entre ces deux types de population, et même des mariages, et tout ce monde avait pris des habitudes jugées hérétiques par les Juifs qui rentraient de l’Exil.
Alors la communauté du retour s’est resserrée et a refusé cette aide dangereuse pour la foi : le Temple du Dieu unique ne peut pas être construit par des gens qui, ensuite, voudront y célébrer d’autres cultes ! Comme on peut s’en douter, ce refus a été très mal pris et désormais ceux qui avaient été éconduits firent obstruction par tous les moyens. Finis les travaux, finis aussi les rêves de rebâtir le Temple !
Les années ont passé et on s’est installés dans le découragement. Mais la morosité, l’abattement ne sont pas dignes du peuple porteur des promesses de Dieu. Alors, Isaïe et un autre prophète, Aggée, décident de réveiller leurs compatriotes : sur le thème : fini de se lamenter, mettons-nous au travail pour reconstruire le Temple de Jérusalem. Et cela nous vaut le texte d’aujourd’hui :
Connaissant le contexte difficile, ce langage presque triomphant nous surprend peut-être ; mais c’est un langage assez habituel chez les prophètes ; et nous savons bien que s’ils promettent tant la lumière, c’est parce qu’elle est encore loin d’être aveuglante… et que, moralement, on est dans la nuit. C’est pendant la nuit qu’on guette les signes du lever du jour ; et justement le rôle du prophète est de redonner courage, de rappeler la venue du jour. Un tel langage ne traduit donc pas l’euphorie du peuple, mais au contraire une grande morosité : c’est pour cela qu’il parle tant de lumière !
Pour relever le moral des troupes, nos deux prophètes n’ont qu’un argument, mais il est de taille : Jérusalem est la Ville Sainte, la ville choisie par Dieu, pour y faire demeurer le signe de sa Présence ; c’est parce que Dieu lui-même s’est engagé envers le roi Salomon en décidant « Ici sera Mon Nom », que le prophète Isaïe, des siècles plus tard, peut oser dire à ses compatriotes « Debout, Jérusalem ! Resplendis… »
Le message d’Isaïe aujourd’hui, c’est donc : « vous avez l’impression d’être dans le tunnel, mais au bout, il y a la lumière. Rappelez-vous la Promesse : le JOUR vient où tout le monde reconnaîtra en Jérusalem la Ville Sainte. » Conclusion : ne vous laissez pas abattre, mettez-vous au travail, consacrez toutes vos forces à reconstruire le Temple comme vous l’avez promis.
J’ajouterai trois remarques pour terminer : premièrement, une fois de plus, le prophète nous donne l’exemple : quand on est croyants, la lucidité ne parvient jamais à étouffer l’espérance.
Deuxièmement, la promesse ne vise pas un triomphe politique… Le triomphe qui est entrevu ici est celui de Dieu et de l’humanité qui sera un jour enfin réunie dans une harmonie parfaite dans la Cité Sainte ; reprenons les premiers versets : si Jérusalem resplendit, c’est de la lumière et de la gloire du SEIGNEUR : « Debout, Jérusalem ! Resplendis : elle est venue ta lumière, et la gloire du SEIGNEUR s’est levée sur toi… sur toi se lève le SEIGNEUR, et sa gloire brille sur toi… »
Troisièmement, quand Isaïe parlait de Jérusalem, déjà à son époque, ce nom désignait plus le peuple que la ville elle-même ; et l’on savait déjà que le projet de Dieu déborde toute ville, si grande ou belle soit-elle, et tout peuple, il concerne toute l’humanité.
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Complément
Certains d’entre nous reconnaissent au passage un chant que les assemblées chrétiennes aiment bien chanter : « Jérusalem, Jérusalem, quitte ta robe de tristesse… Debout, resplendis car voici ta lumière… »

 

EPIPHANIE – DIMANCHE 5 JANVIER 2014 – HOMÉLIE

4 janvier, 2014

http://www.homelies.fr/homelie,,3702.html

EPIPHANIE

DIMANCHE 5 JANVIER 2014

FAMILLE DE SAINT JOSEPH

HOMÉLIE-MESSE

Les récits de l’enfance sont bien plus qu’une introduction aux évangiles de Luc ou de Matthieu, destinés à satisfaire notre curiosité sur ce que Jésus a vécu avant d’entrer dans sa vie publique. Ces quelques chapitres du premier et du troisième évangile nous parlent certes des ultimes préparatifs de l’incarnation du Verbe, de sa naissance et des premières années de sa vie parmi nous, mais leur but n’est pas anecdotique : Matthieu et Luc relisent la petite enfance du Sauveur à la lumière de Pâques, et nous font découvrir comment l’incarnation du Fils de Dieu est dès les origines orientée vers le mystère de notre Rédemption. Les titres de « Sauveur, Messie, Seigneur » que lui attribuent les Anges lors de l’annonciation aux bergers, sont des titres christologiques que la jeune Eglise attribuera au Ressuscité du matin de Pâques. C’est en relisant la vie de leur maître exalté à la droite du Père, à partir du témoignage de « ceux qui, dès le début, furent témoins oculaires et sont devenus les serviteurs de la Parole » (Lc 1, 2), que Luc et Matthieu ont composé leur évangile de l’enfance, dans lequel ils nous révèlent que celui qui sera un jour humilié sur la croix, avant d’être glorifié à la droite du Père, s’est fait d’abord petit enfant, afin d’épouser intégralement notre condition humaine. « Tout cela s’est fait ainsi, nous explique saint Athanase, pour que le Verbe, en assumant notre nature et en l’offrant en sacrifice, la fasse totalement sienne. Il a voulu nous revêtir ensuite de sa propre nature, ce qui permet à saint Paul de dire : “Il faut que cet être corruptible revête l’incorruptibilité, que cet être mortel revête l’immortalité”».
L’annonce des Anges aux bergers dans la nuit de Noël préfigure l’annonce de la Résurrection aux saintes femmes à l’aube de Pâques ; la fuite en Égypte – symbole biblique de la mort – et le meurtre des saints Innocents préfigurent la Passion et la mort de Jésus ; le retour d’Égypte, qui suit le parcours de l’Exode, annonce le retour à la vie du vainqueur de la mort. Quant à l’adoration des rois mages, elle anticipe la fin des temps, si merveilleusement décrite dans les derniers chapitres du prophète Isaïe dont nous avons entendu un extrait en première lecture. Les mages ne s’y sont pas trompés : le petit enfant qu’ils adorent est bien le Roi de gloire, le mystérieux personnage triomphant attendu pour la Parousie, et qui viendra établir pour toujours le règne de Dieu parmi les hommes. Ce jour-là, « la gloire du Seigneur brillera » sur toutes les nations, qui sortiront de « l’obscurité qui recouvre la terre » et s’avanceront vers « la clarté de son aurore » (1ère lect.).
« Les nations marcheront à la lumière de la Cité sainte, et les rois de la terre viendront lui porter leurs trésors. La cité n’a pas besoin de la lumière du soleil ni de la lune, car la gloire de Dieu l’illumine, et sa source de lumière, c’est l’Agneau » (Ap 21, 24.23). Lorsqu’on se souvient que le terme araméen « talja » signifie à la fois « enfant » ou « agneau », la page d’évangile de ce jour prend un relief tout particulier. L’étoile que ces princes « venus d’Orient ont vu se lever » est l’étoile radieuse du matin, le Christ ressuscité, qui illumine tout homme venant en ce monde, afin de le conduire aux sources vives du salut. Il est le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs ; à lui seul revient l’or, symbole de la royauté suprême ; il est le grand prêtre, symbolisé par l’encens ; lui seul est digne d’offrir le sacrifice qui nous réconcilie avec Dieu son Père – le sacrifice de sa propre vie offerte par amour, et symbolisé par la myrrhe, baume de grand prix réservé à la sépulture des rois.
Le « mystère du Christ » dont parle Saint Paul dans la seconde lecture, est le mystère de l’amour triomphant de toutes nos divisions, nos antagonismes ; de l’amour vainqueur de la haine faisant tomber tous nos murs de séparation ; de l’amour qui rassemble tous les enfants de Dieu dispersés : « Ce mystère, c’est que les païens sont associés au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile » (Ibid.).
L’épiphanie est la fête de l’espérance, parce qu’elle annonce le grand rassemblement de tous les enfants de Dieu sous la bannière de son Christ. Le jour viendra où le combat de la lumière et des ténèbres, de la vérité et du mensonge, de la vie et de la mort cessera. Ce jour-là « la gloire du Seigneur brillera » sur toutes les nations qui sortiront de « l’obscurité qui recouvre la terre » et s’avanceront vers « la clarté de son aurore » (1ère lect.).
Encore faut-il que la flamme de l’espérance ne vacille pas au grand vent de la culture de la mort qui étend de plus en plus ses tentacules, cherchant à étouffer les aspirations à la vie, à la paix qui animent les hommes de bonne volonté. A nous chrétiens, incombe la responsabilité de ranimer cette flamme en nos cœurs, afin qu’elle devienne communicative et relance la quête de ceux qui cherchent Dieu sincèrement. Le parcours des mages trace en effet celui de tout pèlerin de l’Absolu. Au départ de toute conversion, il y a toujours un événement, joyeux ou douloureux, qui nous arrache à notre torpeur spirituelle et réveille en nous la nostalgie d’un monde réconcilié ; d’une humanité vivant en harmonie et en paix sous le regard d’un Dieu bienveillant qui désire le bonheur de ses enfants. Mais qui nous sauvera de notre malice, de notre égoïsme, de notre impuissance à aimer ? Où le trouver ?
« En entrant dans la maison, les mages virent l’Enfant avec Marie sa mère ». Cette « maison » représente l’Église. C’est vers elle que nous pousse l’Esprit, car c’est là que nous attend celui que nous cherchons ; c’est là que nous pouvons enfin rencontrer, dans sa Parole et dans ses sacrements, celui dont nous pressentions la présence, celui qui est la source et le terme de notre espérance. « Et tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui » : « tel est le sommet de tout l’itinéraire : la rencontre se fait adoration, s’épanouit en un acte de foi et d’amour qui reconnaît en Jésus, né de Marie, le Fils de Dieu fait homme » (Benoît XVI, Cologne 2005).
La démarche n’a pas dû être facile pour les mages – comme pour chacun de nous d’ailleurs. Car ce n’est pas devant un roi glorieux selon notre conception mondaine qu’ils sont invités à se prosterner, mais devant un petit enfant de condition modeste. Ici commence pour eux comme pour nous, un cheminement intérieur qui est sans cesse à reprendre : il nous faut découvrir au fil de l’Évangile que la puissance de ce Roi n’est pas de ce monde ; qu’elle ne se manifeste pas dans un déploiement de force, mais dans la vulnérabilité de sa vie livrée par amour. Sa gloire se révèlera dans l’humiliation d’une mort honteuse, librement consentie ; son pouvoir, dans sa miséricorde qui nous réconcilie avec le Père et nous donne part à sa propre vie dans l’Esprit. L’Évangile opère une véritable révolution de notre manière spontanée de nous représenter Dieu. Avant de nous prosterner devant l’Enfant divin, il nous faut consentir à une profonde conversion, disons : à un chamboulement de nos valeurs. Ce n’est qu’au prix d’un changement radical de notre regard sur les situations, les événements, les personnes, que nous pourrons reconnaître en cet Enfant le don de Dieu qui surpasse toutes nos espérances, l’Agneau doux et humble de cœur qui nous ouvre le chemin de la vraie vie.
« Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin » : ils étaient venus en suivant l’étoile des prophéties de la première Alliance qui les a conduits jusqu’à l’Enfant. Mais au retour, ils n’ont plus besoin de cette étoile : désormais la Parole vivante, le Christ, était en eux, la lumière de son Esprit était leur flambeau, « la gloire du Seigneur s’est levée sur eux » (1ère lect.). Ou pour le dire avec les paroles de Saint Paul (dans la seconde lecture) : la « grâce que Dieu leur a donnée, c’est de leur faire connaître, par la révélation de l’Esprit, le mystère du Christ ».
Souvenons-nous frères et sœurs, que tous nous avons reçu cette connaissance, c’est-à-dire cette configuration au Christ qui nous le fait connaître en participant à sa vie dans l’Esprit. Demandons au Seigneur de nous renouveler dans ce don ineffable, et offrons-lui en retour « l’or de notre liberté, l’encens de notre prière ardente, et la myrrhe de notre affection la plus profonde » (Jean-Paul II).

« Aujourd’hui Seigneur, tu as révélé ton Fils unique aux nations, grâce à l’étoile qui les guidait ; daigne nous accorder, à nous qui te connaissons déjà par la foi, d’être conduits jusqu’à la claire vision de ta splendeur. Par Jésus le Christ notre Seigneur » (Or. d’ouv.).
Père Joseph-Marie