Archive pour le 13 décembre, 2013

John the Baptist

13 décembre, 2013

John the Baptist dans images sacrée OL_JohnBaptist

http://www.olgachristine.com/icon_johnthebaptist.html

BENOÎT XVI: SAINT JEAN DE LA CROIX – 14 DÉCEMBRE

13 décembre, 2013

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2011/documents/hf_ben-xvi_aud_20110216_fr.html  

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

SALLE PAUL VI

MERCREDI 16 FÉVRIER 2011

SAINT JEAN DE LA CROIX – 14 DÉCEMBRE

Chers frères et sœurs,

Il y a deux semaines, j’ai présenté la figure de la grande mystique espagnole Thérèse de Jésus. Je voudrais aujourd’hui parler d’un autre saint important de ces territoires, ami spirituel de sainte Thérèse, réformateur, avec elle, de la famille religieuse carmélitaine: saint Jean de la Croix, proclamé Docteur de l’Eglise par le Pape Pie XI, en 1926, et surnommé dans la tradition Doctor mysticus, «Docteur mystique». Jean de la Croix naquit en 1542 dans le petit village de Fontiveros, proche d’Avila, en Vieille Castille, de Gonzalo de Yepes et Catalina Alvarez. Sa famille était très pauvre, car son père, issu d’une famille noble de Tolède, avait été chassé de chez lui et déshérité pour avoir épousé Catalina, une humble tisseuse de soie. Orphelin de père dans son jeune âge, Jean, à neuf ans, partit avec sa mère et son frère Francisco pour Medina del Campo, non loin de Valladolid, un pôle commercial et culturel. Il y fréquenta le Colegio de los Doctrinos, en assurant également d’humbles travaux pour les sœurs de l’église-couvent de la Madeleine. Par la suite, vues ses qualités humaines et ses résultats dans les études, il fut admis d’abord comme infirmier dans l’Hôpital de la Conception, puis au Collège des jésuites, qui venait d’être fondé à Medina del Campo: Jean y entra à dix-huit ans et étudia pendant trois ans les sciences humaines, la rhétorique et les langues classiques. A la fin de sa formation, sa vocation lui était très claire: la vie religieuse et, parmi tous les ordres présents à Medina, il se sentit appelé au carmel. Au cours de l’été 1563, il débuta le noviciat chez les carmes de la ville, en prenant le nom religieux de Mattia. L’année suivante, il fut destiné à la prestigieuse université de Salamanque, où il étudia pendant un triennat les arts et la philosophie. En 1567, il fut ordonné prêtre et retourna à Medina del Campo pour célébrer sa première Messe entouré de l’affection de sa famille. C’est là qu’eut lieu la première rencontre entre Jean et Thérèse de Jésus. La rencontre fut décisive pour tous les deux: Thérèse lui exposa son programme de réforme du carmel, l’appliquant également à la branche masculine de l’ordre et proposa à Jean d’y adhérer «pour la plus grande gloire de Dieu»; le jeune prêtre fut fasciné par les idées de Thérèse, au point de devenir un grand défenseur du projet. Ils travaillèrent ensemble quelques mois, partageant les idéaux et les propositions pour inaugurer le plus rapidement possible la première maison des carmes déchaux: l’ouverture eut lieu le 28 décembre 1568 à Duruelo, un lieu isolé de la province d’Avila. Avec Jean, trois autres compagnons formaient cette première communauté masculine réformée. En renouvelant leur profession de foi selon la Règle primitive, tous les quatre adoptèrent un nouveau nom: Jean s’appela dès lors «de la Croix», nom sous lequel il sera universellement connu. A la fin de 1572, à la demande de sainte Thérèse, il devint confesseur et vicaire du monastère de l’Incarnation d’Avila, où la sainte était prieure. Ce furent des années d’étroite collaboration et d’amitié spirituelle, qui les enrichit tous deux. C’est à cette période que remontent aussi les plus importantes œuvres de Thérèse et les premiers écrits de Jean. L’adhésion à la réforme du carmel ne fut pas facile et coûta également de graves souffrances à Jean. L’épisode le plus traumatisant fut, en 1577, son enlèvement et son incarcération dans le couvent des carmes de l’antique observance de Tolède, à la suite d’une accusation injuste. Le saint fut emprisonné pendant des mois, soumis à des privations et des contraintes physiques et morales. En ce lieu, il composa, avec d’autres poésies, le célèbre Cantique spirituel. Finalement, dans la nuit du 16 au 17 août 1578, il réussit à fuir de façon aventureuse, se réfugiant dans le monastère des carmélites déchaussées de la ville. Sainte Thérèse et ses compagnons réformés célébrèrent avec une immense joie sa libération et, après une brève période pour retrouver ses forces, Jean fut destiné à l’Andalousie, où il passa dix ans dans divers couvents, en particulier à Grenade. Il assuma des charges toujours plus importantes dans l’ordre, jusqu’à devenir vicaire provincial, et il compléta la rédaction de ses traités spirituels. Il revint ensuite dans sa terre natale, comme membre du gouvernement général de la famille religieuse thérésienne, qui jouissait désormais d’une pleine autonomie juridique. Il habita au carmel de Ségovie, exerçant la charge de supérieur de cette communauté. En 1591, il fut relevé de toute responsabilité et destiné à la nouvelle province religieuse du Mexique. Alors qu’il se préparait pour ce long voyage avec dix autres compagnons, il se retira dans un couvent solitaire près de Jaén, où il tomba gravement malade. Jean affronta avec une sérénité et une patience exemplaires d’immenses souffrances. Il mourut dans la nuit du 13 au 14 décembre 1591, alors que ses confrères récitaient l’office de mâtines. Il les quitta en disant: «Aujourd’hui je vais chanter l’Office au ciel». Sa dépouille mortelle fut transférée à Ségovie. Il fut béatifié par Clément X en 1675 et canonisé par Benoît XIII en 1726. Jean est considéré comme l’un des plus importants poètes lyriques de la littérature espagnole. Ses plus grandes œuvres sont au nombre de quatre: «La montée du Mont Carmel», «La nuit obscure», «Les cantiques spirituels» et «La vive flamme d’amour». Dans les Cantiques spirituels, saint Jean présente le chemin de purification de l’âme, c’est-à-dire la possession progressive et joyeuse de Dieu, jusqu’à ce que l’âme parvienne à sentir qu’elle aime Dieu avec le même amour dont Il l’aime. La vive flamme d’amour poursuit dans cette perspective, en décrivant plus en détail l’état de l’union transformante avec Dieu. Le parallèle utilisé par Jean est toujours celui du feu: de même que le feu, plus il brûle et consume le bois, plus il devient incandescent jusqu’à devenir flamme, ainsi l’Esprit Saint, qui au cours de la nuit obscure purifie et «nettoie» l’âme, avec le temps l’illumine et la réchauffe comme si elle était une flamme. La vie de l’âme est une incessante fête de l’Esprit Saint, qui laisse entrevoir la gloire de l’union avec Dieu dans l’éternité. La montée du Mont Carmel présente l’itinéraire spirituel du point de vue de la purification progressive de l’âme, nécessaire pour gravir le sommet de la perfection chrétienne, symbolisée par le sommet du Mont Carmel. Cette purification est proposée comme un chemin que l’homme entreprend, en collaborant avec l’action divine, pour libérer l’âme de tout attachement ou lien d’affection contraire à la volonté de Dieu. La purification, qui pour parvenir à l’union d’amour avec Dieu doit être totale, commence par celle de la vie des sens et se poursuit par celle que l’on obtient au moyen des trois vertus théologales: foi, espérance et charité, qui purifient l’intention, la mémoire et la volonté. La nuit obscure décrit l’aspect «passif», c’est-à-dire l’intervention de Dieu dans ce processus de «purification» de l’âme. L’effort humain, en effet, est incapable tout seul d’arriver jusqu’aux racines profondes des inclinations et des mauvaises habitudes de la personne: il peut seulement les freiner, mais non les déraciner complètement. Pour cela, l’action spéciale de Dieu est nécessaire, qui purifie radicalement l’esprit et le dispose à l’union d’amour avec Lui. Saint Jean qualifie de «passive» cette purification, précisément parce que, bien qu’acceptée par l’âme, elle est réalisée par l’action mystérieuse de l’Esprit Saint qui, comme la flamme du feu, consume toute impureté. Dans cet état, l’âme est soumise à tous types d’épreuves, comme si elle se trouvait dans une nuit obscure. Ces indications sur les œuvres principales du saint nous aident à nous familiariser avec les points principaux de sa vaste et profonde doctrine mystique, dont l’objectif est de décrire un chemin sûr pour parvenir à la sainteté, l’état de perfection auquel Dieu nous appelle tous. Selon Jean de la Croix, tout ce qui existe, créé par Dieu, est bon. A travers les créatures, nous pouvons parvenir à la découverte de Celui qui a laissé en elles une trace de lui. La foi, quoi qu’il en soit, est l’unique source donnée à l’homme pour connaître Dieu tel qu’il est en soi, comme Dieu Un et Trine. Tout ce que Dieu voulait communiquer à l’homme, il l’a dit en Jésus Christ, sa Parole faite chair. Jésus Christ est le chemin unique et définitif vers le Père (cf. Jn 14, 6). Toute chose créée n’est rien par rapport à Dieu et ne vaut rien en dehors de Lui: par conséquent, pour atteindre l’amour parfait de Dieu, tout autre amour doit se conformer dans le Christ à l’amour divin. C’est de là que découle l’insistance de saint Jean de la Croix sur la nécessité de la purification et de la libération intérieure pour se transformer en Dieu, qui est l’objectif unique de la perfection. Cette «purification» ne consiste pas dans la simple absence physique des choses ou de leur utilisation; ce qui rend l’âme pure et libre, en revanche, est d’éliminer toute dépendance désordonnée aux choses. Tout doit être placé en Dieu comme centre et fin de la vie. Le processus long et fatigant de purification exige certainement un effort personnel, mais le véritable protagoniste est Dieu: tout ce que l’homme peut faire est d’«être disposé», être ouvert à l’action divine et ne pas lui opposer d’obstacle. En vivant les vertus théologales, l’homme s’élève et donne une valeur à son engagement. Le rythme de croissance de la foi, de l’espérance et de la charité va de pair avec l’œuvre de purification et avec l’union progressive avec Dieu jusqu’à se transformer en Lui. Lorsque l’on parvient à cet objectif, l’âme est plongée dans la vie trinitaire elle-même, de sorte que saint Jean affirme qu’elle parvient à aimer Dieu avec le même amour que celui avec lequel il l’aime, car il l’aime dans l’Esprit Saint. Voilà pourquoi le Docteur mystique soutient qu’il n’existe pas de véritable union d’amour avec Dieu si elle ne culmine pas dans l’union trinitaire. Dans cet état suprême, l’âme sainte connaît tout en Dieu et ne doit plus passer à travers les créatures pour arriver à Lui. L’âme se sent désormais inondée par l’amour divin et se réjouit entièrement en lui. Chers frères et sœurs, à la fin demeure la question: ce saint, avec sa mystique élevée, avec ce chemin difficile vers le sommet de la perfection, a-t-il quelque chose à nous dire à nous également, au chrétien normal qui vit dans les circonstances de cette vie actuelle, ou est-il un exemple, un modèle uniquement pour quelques âmes élues, qui peuvent réellement entreprendre ce chemin de la purification, de l’ascèse mystique? Pour trouver la réponse, nous devons avant tout tenir compte du fait que la vie de saint Jean de la Croix n’a pas été un «envol sur les nuages mystiques», mais a été une vie très dure, très pratique et concrète, tant comme réformateur de l’ordre, où il rencontra de nombreuses oppositions, que comme supérieur provincial, ou dans les prisons de ses confrères, où il était exposé à des insultes incroyables et à de mauvais traitements physiques. Cela a été une vie dure, mais précisément au cours des mois passés en prison, il a écrit l’une de ses œuvres les plus belles. Et ainsi, nous pouvons comprendre que le chemin avec le Christ, aller avec le Christ, «le Chemin», n’est pas un poids ajouté au fardeau déjà assez difficile de notre vie, ce n’est pas quelque chose qui rendrait encore plus lourd ce fardeau, mais il s’agit d’une chose totalement différente, c’est une lumière, une force, qui nous aide à porter ce fardeau. Si un homme porte en lui un grand amour, cet amour lui donne presque des ailes, et il supporte plus facilement toutes les épreuves de la vie, car il porte en lui cette grande lumière; telle est la foi: être aimé par Dieu et se laisser aimer par Dieu en Jésus Christ. Se laisser aimer est la lumière qui nous aide à porter le fardeau de chaque jour. Et la sainteté n’est pas notre œuvre, très difficile, mais elle est précisément cette «ouverture»: ouvrir les fenêtres de notre âme pour que la lumière de Dieu puisse entrer, ne pas oublier Dieu car c’est précisément dans l’ouverture à sa lumière que se trouve la force, la joie des rachetés. Prions le Seigneur afin qu’il nous aide à trouver cette sainteté, à nous laisser aimer par Dieu, qui est notre vocation à tous et la véritable rédemption. Merci.

DIMANCHE 15 DÉCEMBRE – COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT : Isaïe 35, 1…10

13 décembre, 2013

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

DIMANCHE 15 DÉCEMBRE : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT

PREMIERE LECTURE – Isaïe 35, 1…10

1 Le désert et la terre de la soif, qu’ils se réjouissent ! 2 Le pays aride, qu’il exulte et fleurisse,  qu’il se couvre de fleurs des champs,  qu’il exulte et crie de joie !  La gloire du Liban lui est donnée,  la splendeur du Carmel et de Sarône.  On verra la gloire du SEIGNEUR,  la splendeur de notre Dieu.  3 Fortifiez les mains défaillantes,  affermissez les genoux qui fléchissent. 4 Dites aux gens qui s’affolent :  « Prenez courage, ne craignez pas.  Voici votre Dieu :  c’est la vengeance qui vient,  la revanche de Dieu.  Il vient lui-même  et va vous sauver. »  5 Alors s’ouvriront les yeux des aveugles  et les oreilles des sourds. 6 Alors le boiteux bondira comme un cerf  et la bouche du muet criera de joie. 10 Ils reviendront, les captifs rachetés par le SEIGNEUR,   ils arriveront à Jérusalem dans une clameur de joie,  un bonheur sans fin illuminera leur visage ;  allégresse et joie les rejoindront,  douleur et plainte s’enfuiront.

Je commence tout de suite par le mot difficile de ce texte : au milieu de promesses magnifiques, Isaïe parle de la vengeance de Dieu. Voilà pour nous l’occasion de découvrir une fois pour toutes ce que veut dire ce mot dans la Bible ! Car Isaïe lui-même l’explique très clairement. Il prêche au sixième siècle, au moment de l’Exil à Babylone : à cette époque-là, visiblement, il y a des gens qui s’affolent, puisque le prophète dit : « Fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genoux qui fléchissent. Dites aux gens qui s’affolent… » Et c’est pour les rassurer qu’il annonce la vengeance de Dieu : « Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. » Et il en donne aussitôt la définition : « Votre Dieu vient lui-même et va vous sauver. » Il continue : « Alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds, alors le boiteux bondira comme un cerf et la bouche du muet criera de joie. »  Cela veut dire qu’au moment où ce texte a été écrit, l’expression « vengeance de Dieu » est non un épouvantail mais une promesse de salut. C’est donc un sens extrêmement positif du mot « vengeance » ; dans ce texte, il est bien clair que Dieu ne se venge pas des hommes, il ne prend pas sa revanche contre les hommes, mais contre le mal qui atteint l’homme, qui abîme l’homme ; sa revanche c’est la suppression du mal, c’est comme dit Isaïe « les aveugles qui voient et les sourds qui entendent, les boiteux qui bondissent et les muets qui crient de joie, les captifs qui sont libérés ». Quelle que soit l’humiliation physique ou morale que nous ayons subie, il veut nous libérer, nous relever.  Mais il faut bien dire qu’on n’a pas toujours pensé comme cela ! Le texte d’Isaïe est assez tardif dans l’histoire biblique (sixième siècle av.J.C.) ; il a fallu tout un long chemin de révélation pour en arriver là. Au début de son histoire, le peuple de la Bible imaginait un Dieu à l’image de l’homme, un Dieu qui se venge comme les humains.  Puis, au fur et à mesure de la Révélation, grâce à la prédication des prophètes, on a commencé à découvrir Dieu tel qu’il est, et non pas tel qu’on l’imaginait ; alors le mot « vengeance » est resté dans le vocabulaire mais son sens a complètement changé ; nous avons déjà vu plusieurs fois dans la Bible ce phénomène de retournement complet du sens d’un mot : c’est le cas pour le sacrifice, par exemple, et aussi pour la crainte de Dieu.  Très concrètement, quand Isaïe écrit le texte de ce dimanche, le salut auquel aspirent ses contemporains, c’est le retour au pays de tous ceux qui sont exilés à Babylone ; ils ont vécu les atrocités du siège de Jérusalem par les armées de Nabuchodonosor ; et maintenant, l’exil n’en finit pas ! Cinquante années, de quoi perdre courage. Ce n’est pas par hasard qu’Isaïe leur dit « Fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent : Prenez courage, ne craignez pas ». Pendant ces cinquante années, on a rêvé de ce retour, sans oser y croire. Et voilà que le prophète dit « c’est pour bientôt » : « Ils reviendront les captifs rachetés par le SEIGNEUR, ils arriveront à Jérusalem dans une clameur de joie » (verset 10).  Pour rentrer au pays, le chemin le plus direct entre Babylone et Jérusalem traverse le désert d’Arabie ; mais cette traversée du désert, Isaïe la décrit comme une véritable marche triomphale… mieux, une procession grandiose : le désert se réjouira, le pays aride exultera et criera de joie, il « jubilera » dit même le texte hébreu… Le désert sera beau… et alors là on pense à ce qui est le plus beau au monde pour un habitant de la Terre Sainte à l’époque : ce qui est le plus beau au monde, ce sont les montagnes du Liban, les collines du Carmel, la plaine côtière de Sarône ! Alors on dit : le désert sera aussi beau et luxuriant que ces trois paysages réputés pour leur beauté ! Beau comme les montagnes du Liban, beau comme les collines du Carmel, beau comme la plaine côtière de Sarône… 1  Et tout cela sera l’oeuvre de Dieu : « Il vient lui-même et va vous sauver… » ; c’est cette œuvre de salut que le prophète appelle « la gloire de Dieu ». Il dit : « On verra la gloire du SEIGNEUR, la splendeur de notre Dieu. » Et Isaïe continue : « Ils reviendront les captifs rachetés par le SEIGNEUR » ; et l’on sait que le mot « rachetés », dans la Bible, veut dire « libérés » ; tout comme le mot « rédemption » signifie « libération ».  La Loi juive prévoyait une règle qu’on appelait le « rachat » 2 : lorsqu’un débiteur était obligé de vendre sa maison ou son champ pour payer ses dettes, son plus proche parent payait le créancier à sa place et le débiteur gardait donc sa propriété (Lv 25, 25) ; si le débiteur avait été obligé de se vendre lui-même comme esclave à son créancier parce qu’il ne possédait plus rien, de la même manière son plus proche parent intervenait auprès du créancier pour libérer le débiteur, on disait qu’il le « revendiquait ». Il y avait bien un aspect financier, mais il était secondaire : ce qui comptait avant tout, c’était la libération du débiteur.  Le génie d’Isaïe a été d’appliquer ces mots à Dieu lui-même pour nous faire comprendre deux choses : premièrement, Dieu est notre plus proche parent ; deuxièmement, il veut nous libérer de tout ce qui nous emprisonne. Et c’est pourquoi nous chantons si volontiers « Alleluia » qui veut dire « Dieu nous a amenés de la servitude à la libération ».  ——————–

 Notes  1 – Le Liban est le pays voisin au Nord d’Israël, il est réputé pour ses forêts de cèdres. En Israël même, le Carmel, au Nord-Ouest, est la petite chaîne montagneuse la plus boisée du pays. Le Sharône est la plaine fertile qui borde la Méditerranée entre le Carmel et Jaffa.  2 – Le racheteur s’appelait le « Go’el » ; ce mot ne se trouve pas dans les versets lus ce dimanche, mais il apparaît au verset 9 ; (au verset 10, c’est un synonyme). Nous sommes donc bien dans ce cadre-là.

3E DIMANCHE DE L’AVENT, A – HOMÉLIE DU 3E DIMANCHE DE L’AVENT, A

13 décembre, 2013

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

3E DIMANCHE DE L’AVENT, A – HOMÉLIE DU 3E DIMANCHE DE L’AVENT, A

IS 35, 1-6A. 10 ; JC 5, 7-10 ; MT 11, 2-11

Tout d’abord, une petite question, mais dont la réponse ne sera pas récompensée par des cadeaux, comme à la télévision. Dans l’évangile, combien y a-t-il de béatitudes ? On peut répondre très justement : une litanie de neuf chez Matthieu, une litanie de quatre chez Luc. Chacune à leur manière et pour des publics différents, elles présentent la quintessence de l’enseignement de Jésus… Il y en a d’autres, dispersées dans le texte. Par exemple : « Heureux ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui la gardent », ou « Heureux ceux qui ont cru sans avoir vu ». Cependant, la plus troublante, sinon la plus choquante, est celle que nous avons entendue aujourd’hui : « Heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi ». Autrement dit, « Heureux celui qui ne sera pas heurté jusqu’à en trébucher par le caractère ambigu et déconcertant de la personne du Christ, de son œuvre, et du monde nouveau qu’il est venu inaugurer ». Ce qui veut dire que l’on peut croire en Dieu et même en Jésus Christ, être un homme ou une femme de bonne volonté et de devoir, être pratiquant et nourrir sa vie de prière, être religieux ou religieuse, et se faire une idée du Christ, de son message et de son Royaume, qui ne correspond pas à la réalité de l’Evangile. Il n’est d’ailleurs pas inutile de rappeler que ceux qui se sont opposés à Jésus, qui l’ont considéré comme blasphémateur, suppôt de Satan, fossoyeur de la Loi et des traditions, étaient des croyants. Et ces croyants l’ont fait mettre à mort. Cela ne doit pas trop nous étonner. Jean Baptiste lui-même a été, comme beaucoup d’autres et comme nous pouvons l’être, complètement désorienté par Jésus, dont il avait annoncé la venue comme Messie. Il l’avait imaginé tel un homme énergique et puissant, maniant la cognée, utilisant les grands moyens pour opérer un vaste nettoyage, tout purifier par le feu et remettre de l’ordre. L’arrivée du Messie libérateur devait être un « jour de colère et de ruine pour les persécuteurs d’Israël ». Et voilà que, tout au contraire, il enseigne paisiblement, fréquente des pécheurs, guérit des malades, prêche des béatitudes, critique l’élite religieuse, ses pratiques, sa façon d’observer la Loi et sa manière de prier. Le géant de l’ascèse est envahi par le doute et l’inquiétude, à tel point qu’il envoie ses propres disciples interroger son cousin : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? » Une question qui en dit long sur l’état d’esprit de Jean Baptiste. Et Jésus ne va pas le rassurer, mais bien l’inviter à corriger sa vision du Messie et de son Royaume. Il va acculer le grand prédicateur de la conversion à se mettre lui-même en question et à se laisser convertir, parce que le Royaume de Dieu était déjà là, bien visible et portant du fruit, et il ne les avait pas reconnus. Remarquez que Jésus ne répond pas par des doctrines, ni des principes, mais par des faits très concrets, qui ne sont rien d’autre que les signes annoncés par les prophètes, notamment par Isaïe et par les psaumes. « Le Seigneur Dieu, chantait déjà le psaume 145, c’est l’espoir des malheureux. Et il précise : « Il fait droit aux opprimés, donne du pain aux affamés, relâche les captifs, rend la vue aux aveugles, redresse ceux qui sont courbés. Il aime les justes, protège les étrangers, soutient l’orphelin et la veuve ». Ce sont ces preuves-là que Jésus apporte : « Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez ». Et ce que l’on voit, c’est l’amour à l’œuvre, le combat pour la justice et la paix, la délivrance de tous ceux et celles qui sont écrasés, blessés, meurtris, rejetés. Jésus renvoie Jean à la Parole de Dieu dans les Ecritures, pour qu’il ouvre ses yeux et ses oreilles et qu’il se fasse une autre idée du Christ et de son Royaume. Manifestement, Jean s’est remis en question, mais pas tous ses disciples. Il en est qui n’ont pas voulu rallier Jésus et sont restés fidèles au Jean Baptiste d’avant sa conversion. Ce sont les Johannites. Nous pouvons, nous aussi, être des Johannites sans le savoir, nous tromper de Christ et nous tromper sur les signes et les preuves de la présence ou de la croissance du Royaume de Dieu. Pour beaucoup de chrétiens, les signes de la bonne santé du Royaume sont peut-être des églises remplies, des séminaires trop petits, un renouveau de la prière et des statistiques réconfortantes. Beaucoup reconnaissent le Christ à la fraction du pain et l’adorent dans le Saint Sacrement. Tout cela est bon et nécessaire, mais largement insuffisant. Ce ne sont pas encore des signes du Royaume de Dieu. Cela peut même constituer un mirage, un alibi ou une vaine sécurité et une illusion, si l’on voit d’un mauvais œil un Christ anonyme, solidaire des pauvres et des affamés, des exclus et des opprimés. Ou encore, si on reste aveugle aux signes de croissance du Royaume de Dieu, qui se manifestent un peu partout, grâce aux artisans de justice et de paix, aux promoteurs de la non-violence, du pardon et de la réconciliation. Un Christ, présent et à l’œuvre dans toutes les solidarités, dans le sang versé par tant d’hommes et de femmes, parce qu’ils réclamaient respect et justice pour les exploités, et manifestaient un amour préférentiel pour les plus nécessiteux. « L’amour des autres apparaît », témoignait une vedette lors d’une émission de solidarité à la télévision. C’est là un signe indiscutable du Royaume de Dieu. Vous avez entendu les paroles du Christ, celles d’Isaïe et du psaume, qui expriment cette vision du Royaume. Jean Paul II avait repris le même message pour les hommes et les femmes de notre temps. C’était le 13 mai 1981, le jour où il fut victime d’une tentative d’assassinat. A l’heure même où il se préparait à faire un discours sur la place Saint-Pierre : « Par vocation, l’Eglise est la mère des opprimés et des laissés-pour-compte, la mère des faibles, ce qui justifie son intervention dans les questions sociales, qui sont l’engagement pour la justice. Ce type d’intervention, ajoutait Jean Paul II, fait partie de son rôle prophétique et a des liens directs (et non pas indirects) avec sa fin religieuse et surnaturelle ».

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)  1925 – 2008