L’EXPANSION DU CHRISTIANISME DANS L’EMPIRE ROMAIN
L’EXPANSION DU CHRISTIANISME DANS L’EMPIRE ROMAIN
En moins d’un siècle d’histoire, la doctrine prêchée par le prophète galiléen, Jésus de Nazareth, s’est répandue, dans l’ensemble de l’empire romain, non sans connaître de nombreuses difficultés, comme en témoigne d’ailleurs le livre des Actes des apôtres, lequel, sans être uniquement un livre historique, présente, à la manière d’une grande fresque, les premières décennies de l’histoire du christianisme.
Conflits avec le judaïsme
C’est dans le contexte des événements de Pâques et de la Pentecôte que le christianisme trouve son acte de naissance ; et c’est en prenant conscience de l’importance particulière dans l’histoire du peuple de dieu que les premiers chrétiens ont découvert l’originalité radicale du message et de la révélation de Dieu apporté en Jésus, mort et ressuscité, reconnu comme Christ et Seigneur. En se regroupant autour de la personne de ce Jésus, identifié au Messie promis par les prophètes des siècles précédents, et sans se couper des autres juifs dont ils gardaient toutes les convictions et toutes les pratiques rituelles, les premiers chrétiens découvraient également que le message de Jésus, son Évangile, était une Bonne nouvelle de salut s’adressant à tous les hommes : ils n’inventaient pas une nouvelle religion, mais ils voulaient donner au judaïsme sa dimension prophétique définitive, puisque le Christ leur donnait la véritable révélation de dieu, celle qui était attendue et espérée par des générations de juifs. Pourtant, Jésus lui-même avait été rejeté par ceux à qui il avait d’abord apporté le message du dieu qu’il appelait son Père, au grand scandale des autorités religieuses qui l’avaient livré aux mains de la puissance d’occupation…
La renaissance de l’idéal qu’il avait prêché, aux jours de sa vie publique, quelque temps après sa mort, ne pouvait échapper à ces mêmes chefs religieux juifs qui entrèrent en conflit avec les disciples de ce Jésus, qu’ils considéraient comme le fondateur d’une nouvelle secte à l’intérieur du judaïsme. Car c’est bien dans le foisonnement des sectes messianiques au premier siècle dans le monde juif que le christianisme prenait naissance. Malgré l’exécution sanglante de Jésus, la nouvelle communauté des disciples fut d’abord relativement bien acceptée par les milieux traditionnels, qui se rangèrent à l’avis d’un pharisien nommé Gamaliel : Si c’est des hommes que vient leur résolution ou leur Dieu, vous ne pourrez pas les faire disparaître. N’allez pas risquer de vous trouver en guerre avec Dieu (Ac. 5, 38-39).
Malgré les contestations venus des membres du parti pharisien, malgré le rejet beaucoup plus net des sadducéens, la première communauté fut donc relativement bien acceptée dans les milieux juifs jusqu’aux environs de 65, date à laquelle elle fut définitivement rejetée du judaïsme. La biographie de Paul apprend qu’il persécutait avec une ferveur inégalable cette doctrine qui menaçait l’intégrité de la foi juive, signe que la foi chrétienne n’était pas toujours très bien acceptée et que les docteurs de la Loi découvraient les dangers réels qu’elle pouvait faire courir au judaïsme officiel, signe aussi vraisemblablement que les chefs du peuple craignaient de voir les occupants romains intervenir militairement pour régler un conflit typiquement religieux. Le milieu palestinien n’accueillit guère la prédication des apôtres. Pourtant, une communauté se forma à Jérusalem autour de Jacques, non pas l’apôtre de Jésus, mais un homme juste qui fut institué par quelques apôtres comme le chef de la communauté de Jérusalem : c’est de lui et non pas des apôtres que dépendait la direction de l’Eglise locale de Jérusalem et de la Palestine. Les apôtres sont considérés comme les témoins privilégiés de la résurrection du Christ, mais pour répandre dans le monde cette Bonne Nouvelle du salut, ils ont été amenée à déléguer leurs pouvoirs à des hommes qui seront leurs successeurs et présideront aux destinées de l’Eglise.
Très vite, Évangile de Jésus-Christ est annoncé en dehors des limites territoriales de la Palestine ; la persécution que Paul entreprenait contre la communauté de Damas suffit à prouver l’existence d’un centre chrétien dans cette ville. Un autre centre important était celui d’Antioche, dont l’évangélisation devait remonter aux environs de l’année 37. La prédication évangélique s’adressait d’abord aux juifs, mais elle s’étendit rapidement aux païens, et c’est dans cette ville que le nom de ‘chrétiens’ fut donné pour la première fois aux disciples de Jésus. Ce terme était, à l’origine, un sobriquet, plus ou moins insultant, à consonance politique, signifiant ‘les partisans de Christ’. Mais cette nouvelle désignation pour les disciples atteste que la communauté chrétienne se distingue déjà assez fortement de la communauté juive : à Antioche par ce sobriquet, l’Eglise trouvait son acte officiel de naissance dans le monde romain. La prédication à Antioche auprès d’hommes qui n’étaient pas issus du judaïsme ne devait pas tarder à poser la question qui fut l’enjeu du concile de Jérusalem : fallait-il se convertir au judaïsme pour devenir disciple du Christ ? La réponse négative, faite lors de l’assemblée de Jérusalem, devait marquer la rupture officielle du christianisme avec le judaïsme.
Mais la réglementation adoptée par ce concile en 49. n’apportait pas une solution très nette, malgré les termes des décisions prises, au problème du judéo-christianisme. Et Pierre lui-même se laisser prendre au piège par les membres judaïsants de l’Eglise d’Antioche : son attitude peut paraître ambiguë, quand en présence des envoyés de Jacques de Jérusalem, il ne partage plus ses repas avec les pagano-chrétiens, mais se cantonne uniquement dans la fréquentation des judéo-chrétiens, Paul lui reprochera cette attitude. Mais il se peut que Pierre n’ait jamais voulu montrer aux judéo-chrétiens qu’il était possible de continuer à observer la Loi juive tout en étant disciple du Christ, d’autant plus que le regain du nationalisme juif à l’époque aurait pu détourner ces chrétiens issus du judaïsme de la foi chrétienne pour retourner à leur religion d’origine. Si Paul estime qu’il importe pour l’Eglise naissante de se tourner résolument vers le monde païen, Pierre garde encore la nostalgie d’une communauté chrétienne gardant aussi fidèlement que possible les enseignements de la Loi mosaïque. La chute de Jérusalem, en 70, devait mettre fin à toute I’espérance messianique juive, et donner raison, mais à titre posthume à Paul qui avait voulu libérer le christianisme de la tutelle du judaïsme pour le tourner vers le monde païen, en le portant jusqu’au coeur de l’empire, à Rome même.
L’expansion de la foi chrétienne, au premier siècle, a bénéficié du droit d’exercice de la religion juive, considérée par l’empire romain comme une religion licite et autorisée’ dans toute l’étendue des territoires soumis à la puissance de Rome. Les très nombreuses sectes juives permettaient une intense activité du judaïsme, non seulement en Palestine, mais aussi dans toute la Diaspora, c’est-à-dire dans tous les pays où les juifs se trouvaient dispersés depuis des siècles. Malgré les conflits qui ont pu opposer le christianisme naissant au judaïsme, il faut reconnaître que la nouvelle foi a largement bénéficié de la tolérance de la religion juive à l’Intérieur de l’empire.
Les premières persécutions
Le procurateur romain Ponce-Pilate, qui avait finalement condamné Jésus à mort, ne devait pas être mécontent, à l’époque même de Jésus, de voir les chefs religieux juifs se quereller pour des motifs strictement religieux : il trouvait dans ces querelles intestines une occasion favorable de pouvoir asseoir encore plus fortement la puissance romaine sur cette région de Palestine où différents mouvements de sédition narguaient le pouvoir en place. Mis en demeure par les chefs du peuple de condamner Jésus, et par crainte de perdre son poste, Pilate avait ordonné la crucifixion de Jésus, qui s’était prétendu roi des Juifs et qui s’était ainsi constitué dans l’opposition officielle au pouvoir de l’empereur. Dans les premiers temps de l’Eglise, les communautés chrétiennes ne constituaient pas un groupe suffisamment important pour inquiéter le pouvoir romain. Mais la question juive, avec ses mouvements de sédition en Palestine, amenèrent les gouverneurs romains à s’intéresser au phénomène chrétien à l’intérieur même du judaïsme, officiellement toléré.
La désignation de ‘chrétiens’ faite à Antioche, en 42, porte naturellement la marque du fait que la communauté s’est séparée de la foi juive traditionnelle et qu’elle est donc suspecte en raison de ses coutumes propres. Les chrétiens furent alors accusés non plus de sédition contre le pouvoir en place, mais plutôt de misanthropie, de crime contre le genre humain, car ils se situaient manifestement en opposition par rapport à la civilisation gréco-romaine : les chrétiens étaient accusés de pratiquer l’inceste et de commettre des meurtres rituels dans leur adoration d’un âne. C’est le premier jugement émis en monde païen sur l’attitude des chrétiens. Sous le règne de Néron, en 64, les premières mesures contre les chrétiens sont prises par l’empereur : Tacite, l’historien romain, rapporte que c’est pour faire taire les rumeurs relatives au grand incendie de Rome que Néron livra les chrétiens aux supplices :
Pour faire taire les rumeurs relatives è l’incendie de Rome, Néron désigna comme accusés des individus détestés par leurs abominations, et que le vulgaire appelle chrétiens. Ce nom leur vient de Chrestos qui, sous Tibère, avait été livré au supplice par le procurateur Ponce-Pilate. Réprimée un instant, cette exécrable superstition débordait à nouveau, non seulement en Judée, berceau du fléau, mais aussi à Rome, où tout ce qu’on connaît d’atroce et d’infâme afflue de toutes parts. On arrêta d’abord ceux qui confessaient leur foi puis, sur leurs indications, une multitude d’autres, accusés non tant d’avoir mis le feu à la ville que de haine contre le genre humain (Annales XV, 44)
Après Néron, les empereurs, trop occupés par la guerre juive, cessent les persécutions contre les chrétiens. Sous Domitien, une nouvelle persécution se fait jour, en 81, s’inscrivant directement dans la ligne de la répression du messianisme juif, qui voulait rétablir sur le trône d’Israël un descendant de la maison de David. Mais à Rome, cet empereur s’en prend également è l’aristocratie et à la classe intellectuelle : des chrétiens, nouveaux convertis, se trouvèrent donc soumis à cette persécution, parce qu’ils étaient convaincus d’athéisme, c’est-à-dire de refus des dieux. Cette même persécution, sous Domitien, fut plus violente dans les provinces de l’Asie Mineure : elle permit à l’auteur de l’Apocalypse d’adresser un message d’espérance à tous les chrétiens soumis aux supplices en raison de leur foi. Malgré l’observation des consignes pratiques d’un Paul, qui recommandait à ses chrétiens la soumission à l’empereur, il semble que le pouvoir romain ait facilement confondu le christianisme avec le messianisme juif et le zélotisme, qui constituaient des menaces permanentes pour l’empire.
L’arrivée de la dynastie des Antonins au pouvoir à Rome, en 96, inaugure une période de détente pour les chrétiens. Mais cette détente n’empêche pas le fait d’une précarité de la situation des chrétiens pendant tout le deuxième siècle : le nom même de chrétien constituait déjà un chef d’accusation et les dénonciations pouvaient être nombreuses, sans être orchestrées par le pouvoir central. Quand ils étaient arrêtés et qu’ils refusaient d’abjurer, il fallait les condamner, simplement du fait qu’ils appartenaient à une secte qui pratiquait, disait-on, des usages contraires à la morale et qui refusait de rendre un culte aux dieux. Les empereurs pouvaient être tolérants, les masses populaires païennes reportaient sur un bouc émissaire, facile à trouver, toutes les difficultés qui pouvaient être les leurs. Les chrétiens sont considérés comme des êtres singuliers, qui vivent en marge de la société établie… Pour faire face à cette situation, les chrétiens ont essayé de dissiper tous les malentendus qui les concernaient : des intellectuels participèrent à cette campagne d’information pour laver le nom de ‘chrétien’ de toutes les accusations injustifiées portées contre ceux qui avaient placé leur foi en Jésus-Christ.
Le but des écrivains apologistes était de montrer que l’Idéal du christianisme s’inspirait bien de l’idéal de l’hellénisme et qu’il le menait même à son parfait achèvement, le réalisant véritablement. S’adressant aux empereurs, Justin fait appel aux sentiments philosophiques de vertu et de piété des romains pour montrer que les chrétiens observent une doctrine et une morale qui se situent dans la droite ligne des plus grands penseurs grecs. Au milieu du deuxième siècle, cet auteur affirme qu’il existe une convergence entre la pensée grecque la meilleure et le christianisme : après avoir fréquenté toutes les écoles philosophiques qui existaient alors, Justin comprend que la véritable philosophie ne puisse pas venir des forces humaines, mais qu’elle est l’objet d’une révélation même de Dieu. Et il tentera, jusqu’au martyre, de prouver que le christianisme est l’accomplissement et le couronnement de toute la réflexion philosophique sur l’homme et sur Dieu : Je fus pris d’amour pour les prophètes et pour ces hommes amis du Christ… Je reconnus que c’était là la seule philosophie sure et profitable (Dialogue avec Tryphon).
Le but de tous les apologistes n’était pas seulement de réclamer aux empereurs un statut légal pour les chrétiens ; leur ambition était nettement plus vaste, puisqu’ils présentaient ces chrétiens comme les héritiers de la plus pure tradition philosophique de la Grèce antique dont le prestige régnait encore dans la civilisation romaine. Dans la deuxième partie de ce deuxième siècle, la situation juridique des chrétiens reste précaire, car les calomnies populaires ne cessent de les poursuivre ; mais l’oeuvre des apologistes leur a permis de se faire connaître : Ils sont sortis du ghetto dans lequel on voulait les enfermer. L’administration de l’empire ne peut même pas s’empêcher d’employer des hommes compétents, du simple fait qu’ils sont chrétiens. Mais, à la fin de la dynastie des Antonins, après l’assassinat de Commode, en 193, l’empire se trouve dans un état d’anarchie redoutable : le temps des empereurs philosophes est révolu. Toutefois, la situation des chrétiens s’améliore quelque peu, puisque l’empereur Septime Sévère a dans son entourage des chrétiens, estimant que le christianisme est une force avec laquelle il faut désormais compter. Pourtant, en 203, ce même empereur signe un édit interdisant tout prosélytisme aux chrétiens : c’est la première mesure juridique portée contre l’ensemble des chrétiens. Cette mesure imposait aux fonctionnaires de l’empire de limiter l’expansion du christianisme et cet édit devait déterminer une nouvelle persécution plus ou moins violente selon les empereurs de cette nouvelle dynastie. L’édit de Sévère était tel que seuls ceux qui acceptaient de suivre la nouvelle doctrine pouvaient être inquiétés : la mesure prise ne frappait pas les anciens chrétiens, mais simplement les nouveaux convertis et aussi ceux qui se chargeaient de leur formation, les catéchistes, dont le rôle constituait, en lui-même, une violation de la loi. Les martyrs sont alors principalement des néophytes et des catéchumènes…
Mais lorsque le dernier des Sévères, Alexandre, est assassiné, en 235, le pouvoir passant entre les mains de chefs militaires qui voient dans les chrétiens un facteur de désunion dans l’empire, la persécution va se généraliser : Maximin s’en prend à toute l’élite romaine, et en particulier aux évêques de l’empire, l’évêque de Rome Pontien étant exilé… Plus tard, en 250, sous Dèce, une recrudescence de la persécution se fait jour : Dèce, pour affermir l’unité romaine, veut rassembler tous ses sujets autour de la religion d’empire, et pour ce faire, il ordonne à tous les citoyens de participer à un sacrifice général : beaucoup de chrétiens connaîtront alors le martyre, mais certains feront défection, en sacrifiant aux idoles ou en se procurant un certificat attestant qu’ils ont sacrifié… En 257, un édit interdit le culte chrétien et les réunions dans les cimetières, il oblige également les chefs religieux à sacrifier. L’année suivante, une nouvelle mesure ordonne l’exécution immédiate des prêtres qui n’ont pas sacrifié aux idoles de la religion romaine et la confiscation des biens des chrétiens les plus riches. En 260, pourtant, l’empereur Gallien recommande la tolérance pour les chrétiens, en vue de maintenir davantage l’unité intérieure devant la pression des peuples barbares qui menaçait la puissance romaine livrée à des querelles intestines : il autorise le culte dans les églises qui sont restituées aux chrétiens et les rassemblements dans les cimetières.
Un nouveau statut du christianisme était alors en voie de constitution : le christianisme n’était pas encore une religion officiellement reconnue, mais il était toléré. Pendant quarante années, les communautés chrétiennes seront présentes dans la vie quotidienne de l’empire, sans être jamais inquiétées par le pouvoir. Pendant cette période de calme et de paix le christianisme pouvait s’implanter, s’enraciner dans les sociétés, mais aussi s’étendre dans des régions de plus en plus vastes. Aux alentours de l’année 300, le pourtour de la Méditerranée est conquis au mode de vie proposé par la foi chrétienne, et même les limites les plus éloignées de l’empire sont gagnées par la foi. Toutes les classes sociales de l’empire ont connu l’infiltration, et non plus seulement les classes méprisées et les esclaves. Mais le paganisme n’était pas encore disparu : l’arrivée au pouvoir de Dioclétien, en 284, allait souligner l’attachement impérial aux traditions antiques romaines ; pendant près de vingt ans, pourtant, les chrétiens ne sont pas plus persécutés qu’auparavant : seuls, quelques cas de martyre peuvent être signalés, notamment dans le domaine des armées, certains militaires récemment convertis refusant de porter les armes et de pratiquer la violence, ou refusant de participer au culte impérial. Il semble que les chrétiens aient d’abord été expulsés de l’armée, avant que ne commence la grande persécution. En 303, un premier édit impérial interdit le culte chrétien, ordonne la confiscation des livres sacrés et la destruction des églises ; un second édit ordonne l’arrestation du clergé chrétien ; le troisième édit nuançait cette généralisation de la persécution, en permettant aux prisonniers qui acceptaient de sacrifier aux idoles de recouvrer leur liberté ; enfin, un quatrième édit reprenait l’édit de Dèce, ordonnant à tous les citoyens de l’empire de participer aux sacrifices romains, sous peine des pires supplices. Ces différents édits sont suivis avec plus ou moins de rigueur selon les provinces de l’empire : il y eut toujours des païens accommodants qui délivrèrent de faux certificats de sacrifices, des chrétiens apostats, d’autres qui s’évadèrent de leurs prisons, mais aussi un grand nombre d’authentiques martyrs qui payèrent de leur vie ces édits de Dioclétien. Il fallut aux chrétiens attendre 3l1 pour qu’ils retrouvent la tolérance qu’ils avaient connue à la fin du troisième siècle. Mais, avant cette date de 311, qui est celle de l’édit de tolérance de Galère, un autre événement de l’histoire romaine allait marquer l’avenir de l’Eglise : c’était la proclamation de Constantin empereur.
Ce Constantin était un païen tolérant qui s’est converti très progressivement au christianisme et qui reçut le baptême peu de temps avant sa mort. Revenant des provinces bretonnes, où il avait été proclamé empereur, sa victoire sur le successeur de Galère, Maximin Daïa, lui ouvre la route de l’empire oriental. Mais, dès sa victoire au pont Milvius, en octobre 312, il manifeste une grande sympathie pour le christianisme, en leur accordant la liberté de culte et la restitution immédiate de tous les biens qui leur avaient été confisqués, allant même jusqu’à distribuer de l’argent à l’Eglise et à l’exempter d’impôts.
Le règne de Constantin allait amener la paix pour l’Eglise dans le monde romain : l’Eglise reçoit un statut juridique officiel, puisque les sentences de ses tribunaux sont reconnues comme valides par les instances civiles. Les symboles chrétiens apparaissent sur les monnaies, première forme d’une propagande pour la foi chrétienne. Les lieux de culte se multiplient pour répondre au nombre croissant de convertis qui viennent regagner les rangs des communautés chrétiennes réparties dans tout l’empire Des chrétiens sont même admis à des postes officiels. Et Constantin fait élever ses enfants dans le christianisme. Cela permet de le considérer comme le premier empereur chrétien. Il interviendra même lors du premier concile oecuménique à Nicée… Pour l’Eglise, c’est la paix extérieure : tous les adversaires politiques qui pouvaient se dresser contre elle disparaissent, et elle peut désormais évangéliser le monde sans craindre de représailles de la part du pouvoir romain. En moins d’un siècle, le christianisme allait devenir la religion officielle, le paganisme étant interdit et les temples fermés ou détruits en 391.
Les Pères de l’Eglise
Un Père de l’Eglise est un savant, un écrivain ou un enseignant, souvent reconnu comme saint dans la tradition de l’Eglise, dont la doctrine est parfaitement orthodoxe. Mais c’est surtout un homme d’action, profondément engagé dans la vie de l’Eglise locale dont il est le pasteur, l’évêque, ou l’un des prêtres ; en tout cas, c’est lui qui exprime la théologie chrétienne en des termes qui le mettent d’emblée sur le même plan que les lettrés du monde païen. Comme les conversions, dans les premiers siècles de l’Eglise, s’effectuaient parmi les adultes, on comprend que ces chefs de communauté étaient des hommes d’action, et, de plus, comme ils étaient souvent issus de la classe dominante, ils pouvaient toujours assumer la défense des chrétiens auprès des autorités civiles. Mais le concept de ‘Père de l’Eglise’ comme savant, théologien à la doctrine orthodoxe, est beaucoup trop vaste : il peut désigner des hommes des origines du christianisme jusqu’à la fin des siècles. Ce concept s’est restreint aux auteurs chrétiens des premiers siècles, dont l’oeuvre a été exemplaire, en ce sens qu’elle a permis de traduire la pensée apostolique dans les termes de la pensée contemporaine et qu’elle est devenue en quelque sorte normative pour toutes les générations chrétiennes ultérieures.
Ces écrivains, reconnus officiellement par l’Eglise, vécurent de la fin du premier siècle (qui marque la fin de l’âge apostolique) au début du septième siècle pour l’Occident ou au milieu du huitième pour l’Orient. Jusqu’à la fin du deuxième siècle, la langue où Ils s’exprimaient était le grec : après, le latin devient beaucoup plus courant en Occident, alors que l’Orient continue d’utiliser la langue grecque, avant de permettre l’usage de langues orientales, comme le syriaque. De la fin du premier siècle jusqu’au milieu du deuxième, les auteurs ecclésiastiques sont appelés les ‘Pères apostoliques’, parce que la plupart d’entre eux ont eu des contacts directs avec les apôtres, et que leurs écrits se présentent comme l’exposé de la foi chrétienne selon le genre qui était celui du Nouveau Testament. La Didaché, ou doctrine des douze apôtres, est le plus ancien témoin de l’organisation des communautés chrétiennes et de leur liturgie. La foi chrétienne y affirme son originalité et pose ses règles de la vie communautaire, cultuelle et charismatique. Cette foi ne repose pas uniquement sur les textes évangéliques et apostoliques, mais aussi sur des paroles de Jésus qui continuaient de circuler par la tradition catéchétique orale. C’est une semblable tradition orale qui se trouve également dans la lettre que l’évêque de Rome, Clément, adresse à la communauté chrétienne de Corinthe dans laquelle des prêtres avaient été déposés par des laïcs. Fait important que cette lettre de Clément : elle souligne l’autorité que pouvait exercer déjà à l’époque l’Eglise de Rome sur les autres Églises locales.
Une autre personnalité romaine est connue par un de ses écrits : Hermas, l’auteur du Pasteur qui a été considéré un certain temps comme un texte canonique du Nouveau Testament, avant d’être écarté en raison de son rigorisme pénitentiel, et de son ascétisme qui le rapprochait de la secte des Esséniens. L’influence du judaïsme se faisait encore ressentir dans les communautés chrétiennes que visite Ignace d’Antioche lorsqu’il traverse l’Asie, afin de se rendre à Rome où il subira le martyre : selon lui, il est absurde de croire en Jésus-Christ et de continuer à judaïser, car, souligne-t-il, pour la plupart des judaïsants, le Christ ne serait pas mort, ce qui est en contradiction formelle avec la prédication des apôtres ; pour lutter contre toutes les tendances qui menace la foi chrétienne, Ignace recommande l’unité des chrétiens autour de l’évêque, de ses prêtres et diacres, affirmant ainsi l’existence d’une hiérarchie répartie selon trois ordres autour de l’évêque, qui unit en sa personne l’élément charismatique, hérité des apôtres, et l’autorité hiérarchique.
Papias, qui fut évêque d’Hiérapolis, en Asie Mineure, est un autre témoin de l’âge apostolique : il a sans doute pu écouter la prédication de saint Jean, et il rapporte dans ses écrits des échos de l’enseignement oral de ceux qui furent les premiers disciples des apôtres. Toutefois, il apparaît très vite comme une intelligence médiocre qui manque d’un jugement sûr ; Eusèbe de Césarée, au début du quatrième siècle, lui reprochera d’avoir contaminé plusieurs générations chrétiennes en proposant des affirmations qui ne se situent pas. Jusqu’au milieu du deuxième siècle, les Pères de l’Eglise gardent vivante la tradition venue des apôtres, empruntant les genres littéraires du Nouveau Testament, au point que parfois certains de leurs écrits ont pu être incorporés à ce dernier. Il en va tout autrement dans les générations suivantes : les Pères apologistes vont s’attacher à démontrer la vérité de la doctrine chrétienne en la situant dans le contexte du développement de la pensée philosophique gréco-romaine, en démontrant que cette foi nouvelle est l’accomplissement de tout l’effort philosophique des anciens, en défendant aussi la théorie et la pratique morales des disciples du Christ, si les Pères apostoliques s’adressaient presque exclusivement à des convertis au christianisme, les Pères apologistes s’adressent aux juifs et aux païens, pour démontrer aux uns que Jésus-Christ apporte la réalisation des prophéties de l’Ancien Testament, aux autres qu’il n’y a pas de motifs sérieux de persécuter les chrétiens.
Le témoin le plus important de cette forme de pensée est Justin de Naplouse : il était né dans une famille grecque et païenne, installée en Samarie, et il raconte lui-même, dans son dialogue avec Tryphon, comme il s’est mis en quête d’une sagesse qui aurait pu guider son existence : après avoir fréquenté les écoles philosophiques de son temps, il finit par se convertir au christianisme, et, en venant à Rome, il fonde une école sur le type même des écoles de philosophie païenne, vers le milieu du deuxième siècle. Entre 150 et 165, date de son martyre, il écrit deux suppliques aux empereurs romains pour leur montrer la discipline de vie que suivent les chrétiens et pour souligner que c’est à tort, sans connaître l’enseignement chrétien, que l’on attribue aux disciples du Christ une immoralité qu’ils essayent de combattre en eux-mêmes et dans le monde qu’ils fréquentent. Tatien, qui fut le successeur de Justin avant de se séparer de l’Eglise, poursuit l’oeuvre de son prédécesseur, mais en s’attachant surtout à montrer toutes les erreurs de la pensée païenne : il s’attaque avec violence à toutes les philosophies et aux cultes païens d’origine hellénique.
Avec Irénée de Lyon, né à Smyrne, vers 115, apparaît un nouveau genre de docteur de la foi. Dans sa jeunesse, il a connu Polycarpe, qui lui-même avait connu saint Jean ; ainsi, Irénée se trouve héritier de la tradition johannique. En 177, il est prêtre de l’Eglise de Lyon et il est amené à défendre la foi chrétienne authentique contre certaines perversions internes, venues des différentes écoles qui se prétendent chrétiennes, mais dans lesquelles les maîtres n’annoncent plus la vérité de Évangile, mais bien leur propre doctrine. A ces maîtres, Irénée oppose les chefs, à la fois charismatiques et hiérarchiques, que sont les évêques : leur autorité ne vient pas de leur valeur personnelle, mais de la mission qu’ils ont reçue par la tradition qui vient des apôtres et de la charge dont ils ont été investis qui est de transmettre dans la vérité la doctrine antérieure. Irénée entreprend de montrer que la succession des évêques remonte aux apôtres qui ont établi leurs successeurs dans l’autorité qu’ils avaient eux-mêmes reçue du Christ Jésus. C’est pourquoi l’enseignement que transmettent les évêques est le seul qui puisse avoir une valeur authentique pour la foi chrétienne. Et il exprime cet enseignement dans une oeuvre catéchétique qui se présente comme la réfutation de toutes les hérésies : Adversus haereses, oeuvre dans laquelle il exerce, le premier, un rôle véritable de théologien, en soulignant que le Christ a rétabli et restauré l’oeuvre de Dieu qui avait été détruite par le péché des hommes, que le message du Christ s’est transmis par les apôtres, lesquels ont prêché Évangile à toutes les nations, en commençant par Rome, ville dont l’évêque jouit d’un prestige particulier parmi ses pairs, puisqu’il est le successeur, en ligne directe de Pierre. Au troisième siècle, la lignée des Apologistes se poursuit, mais elle s’oriente plus explicitement vers l’étude théologique, telle qu’Irénée de Lyon l’avait perçue.
Des écoles théologiques apparaissent dans toutes les grandes communautés chrétiennes, et particulièrement à Alexandrie, où un échange va se faire entre le christianisme et l’hellénisme. Clément d’Alexandrie, païen converti, va montrer les rapports qui existent entre la philosophie grecque et la doctrine chrétienne : toute l’oeuvre philosophique antique n’a fait que mener les hommes vers le Christ et elle peut aider alors le chrétien à approfondir sa foi et à parfaire sa vertu. La persécution, sous Septime Sévère, en 202, contraint Clément à l’exil. Son successeur à la tête de l’Eglise d’Alexandrie, Démétrius, choisit Origène pour le placer à la tête de l’école de catéchèse. Placer quelqu’un à la tête d’une école catéchétique était un choix difficile en cette époque de persécution, qui interdisait tout prosélytisme… Entre 205 et 211, Origène transforme cette école en confrérie religieuse, vivant dans l’ascèse, sans se distinguer des autres chrétiens : c’est la première forme de vie religieuse. En 213, il divise les cours de catéchèse en deux cycles : un premier cycle réservé aux illettrés présente les premiers éléments de la foi et de la doctrine chrétiennes, et un second cycle de genre universitaire, où tous les systèmes de connaissance sont présentés. Il enseigne lui-même dans cette école, la Didascalée, de 212 à 231. Il fait alors un séjour en Palestine où son ami, l’évêque Alexandre de Jérusalem, lui demande d’expliquer l’Écriture dans l’assemblée chrétienne et où un autre de ses amis, Théoctiste de Césarée, l’ordonne prêtre, contre l’avis de Démétrius d’Alexandrie, qui lui interdit alors d’enseigner dans la Didascalée. Origène se retire alors à Césarée, en ajoutant à l’enseignement une tâche de prédication. Plus tard, il permettra à des tachygraphes de transcrire les entretiens qu’il donnait à l’assemblée chrétienne ; mais une très grande partie de sa prédication est disparue, faute d’avoir été retranscrite, lors de ses entretiens. L’oeuvre d’Origène est considérable ; tout en accueillant les valeurs de la philosophie grecque, il dénonce clairement toutes les faiblesses du paganisme, et en ce sens, il faut oeuvre d’apologiste, dégageant alors l’originalité du christianisme, en manifestant la grandeur de l’homme pour la foi chrétienne. Prédicateur, il s’est révélé comme un homme de Dieu ; théologien, il a construit un système dans lequel il intégrait toutes les disciplines et toutes les traditions qu’il pouvait connaître. Une de ses oeuvres, à laquelle il travailla pendant une trentaine d’années, s’intitule les Hexaples – en six colonnes, il présente l’ensemble de la Bible :
1/ Texte hébreu, en caractères hébraïques
2/ Texte hébreu, en caractères grecs
3/ Traduction en grec : Aquila
4/ Traduction en grec : Symnaque
5/ Traduction en grec : Septante
6/ Traduction en grec : Theodotion
Son but était de donner un texte correct à la Septante, en la corrigeant à partir de I’original officiel hébraïque, et en la comparant systématiquement aux traductions autorisées en grec à son époque : il fondait ainsi la critique biblique. Sous la persécution de Dèce, en 253, Origène est arrêté, et il meurt des suites des tortures qu’il subit en prison. Ses incertitudes doctrinales lui ont valu de connaître une condamnation posthume de la part de l’Eglise, au sixième siècle : il diluait trop l’action du Christ dans une sorte de processus cosmique, qui évacuait ainsi l’historicité du christianisme et son caractère décisif pour l’ensemble de l’histoire de l’humanité. A Césarée, où Origène trouva refuge, lorsqu’il fut exilé d’Égypte, l’école qu’il y fonda devint la dépositaire de son oeuvre : c’est dans cette école qu’Eusèbe de Césarée reçut sa formation.
le milieu du troisième siècle est une période où l’Occident latin trouve sa pleine originalité dans une forme d’expression purement latine, car si l’usage du grec est encore reconnu comme officiel, le latin prend une place de plus en plus considérable. Novatien sera à cette époque le premier grand théologien de langue latine, bien que celui-ci fût condamné par un concile romain. En tout cas, l’Eglise est une communauté strictement organisée autour de l’évêque de Rome, en particulier Corneille, de ses prêtres, diacres et sous-diacres : la hiérarchie se trouve donc implantée dans une Eglise, dont l’autorité est reconnue par les autres Églises locales, auxquelles elle transmet ses décisions les plus importantes, et celles-ci sont bien accueillies, en particulier par l’Eglise de Carthage. Cette dernière se regroupe alors autour d’une personnalité importante, son évêque Cyprien, qui a laissé à la postérité une oeuvre littéraire importante. Évêque et donc pasteur responsable, il est amené à prendre des positions qui doivent assurer l’intégrité de l’Eglise. Dèce avait ordonné à tous les citoyens de son empire de participer à un sacrifice général aux dieux de l’empire ; les chrétiens ne pouvaient offrir ce sacrifice sans trahir du même coup leur propre foi.
Certains subirent le martyre plutôt que d’offrir de l’encens aux idoles, ce fut le cas de l’évêque de Rome, Fabien. Mais d’autres cédèrent aux pressions qui leur étaient faites ; ce fut le plus grand nombre, et même deux évêques africains consentirent à sacrifier aux idoles. Une fois la persécution terminée, il était important de déterminer l’attitude que l’Eglise devait avoir envers ceux qui avaient renié leur foi, afin de conserver la vie, envers ceux qui étaient appelés les ‘lapsi’. C’est le problème de la pénitence et de la réintégration des renégats dans la communauté qui se trouve ainsi posé. Certains prêtres carthaginois réconciliaient très facilement ceux qui avaient succombé, en estimant que les ‘confesseurs’ qui avaient subi le martyre sans perdre la vie pouvaient intercéder pour les ‘lapsi’, sans qu’il leur soit imposé de délai pénitentiel. Cyprien développe une conception qui rejoint la position commune de l’ensemble de l’Eglise : sans négliger le rôle d’intercession des confesseurs, il insiste sur la nécessité d’imposer une pénitence longue et sévère. Il se montre ainsi beaucoup plus exigeant que ses propres prêtres. Cyprien communique sa décision à l’Eglise de Rome et aux autres Églises Rome n’avait plus d’évêque depuis le martyre de Fabien, et c’est Novatien qui lui répond au nom des prêtres et des diacres de Rome, se déclarant d’accord avec Cyprien. Mais lorsque Corneille sera élu évêque de Rome, en 251, Novation dévoilera sa véritable position, en affirmant qu’aucune réconciliation n’est possible pour les ‘lapsi’, ce qui lui vaudra la condamnation d’un concile local réuni par Corneille, qui obtient le plein accord de Cyprien. Ce conflit à propos des renégats est le reflet d’un conflit entre deux options pour l’Eglise : peut-elle être le rassemblement d’une élite d’hommes spirituels ou doit-elle être une communauté qui rassemble tous les hommes ? A côté des plus grands saints et des martyrs, il y a place pour la foule innombrable des chrétiens ordinaires qui essaient de progresser dans la vie selon les exigences de Évangile
Au quatrième siècle, alors que l’Eglise a conquis une certaine liberté religieuse, il ne lui est plus nécessaire de défendre sa doctrine ou ses principes moraux : le temps des apologistes est achevé. Mais il devient important, pour la communauté chrétienne, de se définir une doctrine qui prenne en compte les données philosophiques. Le quatrième siècle sera l’âge des grands docteurs qui, au milieu des conflits dogmatiques, vont affirmer la foi de l’Eglise, dans une pure fidélité à Évangile Pendant les premières années de la persécution, sous Dioclétien, Eusèbe de Césarée, d’origine pourtant modeste, révise et édite tous les livres saints ainsi que les oeuvres d’Origène qui se trouvaient à Césarée : il compile tous les ouvrages qui lui sont accessibles et constitue ainsi des recueils qui lui serviront à composer ultérieurement ses grands ouvrages. Après avoir dû s’exiler, au cours de la persécution, il rentre à Césarée et y est élevé à l’épiscopat : c’est la grande période de sa vie où il devient le premier écrivain à composer une histoire de l’Eglise. Rapidement, Eusèbe est impliqué dans la crise suscitée dans l’Eglise par le prêtre Arius, pour qui il prend parti ; et, à partir du concile de Nicée, qui tentera de régler l’affaire arienne, il est de plus en plus engagé dans les polémiques ecclésiastiques… Il déploya son talent à montrer la mission presque providentielle que l’Empire romain, pacifié autour de Constantin, a pu jouer dans l’histoire de l’Eglise. Et lorsque Constantin meurt, Eusèbe compose un éloge de ce grand empereur, dont le règne était, selon lui, le signe même de l’action de Dieu qui veut assurer la victoire définitive de la foi chrétienne sur le paganisme.
Contemporain d’Eusèbe de Césarée, qu’il rencontra au cours du concile de Nicée, Athanase d’Alexandrie joua un grand rôle dans la définition dogmatique de la trinité, de la nature même du Dieu unique en trois personnes. A Nicée, il accompagnait son évêque, dont il était le diacre et le secrétaire personnel ; en 328, la foule, exaltant son ascétisme, l’acclame lorsqu’il est élu successeur de son évêque, Alexandre. Mais l’affaire arienne qui n’a pas été entièrement résolue à Nicée lui fera connaître une vie agitée par des exils répétés, une vie de proscrit éloigné de sa vie épiscopale. Et malgré les vicissitudes de son existence, il composa une oeuvre théologique magistrale, en prenant son appui sur les décisions conciliaires : il se place d’emblée dans la perspective de l’histoire du salut. Le Christ a pu sauver les hommes parce qu’il était vraiment Dieu, et ce salut qu’il apporte n’est autre qu’une divinisation de l’humanité : le Fils de Dieu s’est fait homme pour que tous les hommes puissent devenir enfants de Dieu. Telle est l’affirmation centrale de la pensée théologique d’Athanase, qui assurera la démarche trinitaire et christologique dans l’histoire ultérieure du dogme chrétien.
Les premières hérésies et les conciles oecuméniques
Le Concile de Nicée, dont il a déjà été question précédemment, marque une étape importante dans la vie de l’Eglise du quatrième siècle. Mais la déviation entreprise par le prêtre Arius n’était pas le premier écueil sur lequel la foi chrétienne aurait pu s’échouer. Dès les deux premiers siècles, les communautés locales, qui suivaient leurs traditions propres, connaissaient des tendances et des formes très diversifiées : l’unité de l’Eglise s’en trouvait menacée. Il y eut donc confrontation entre l’orthodoxie et l’hétérodoxie, la droite ligne de Évangile et les différentes déviations. La grande crise traversée par les communautés chrétiennes, à la fin du premier siècle et pendant une très grande partie du deuxième, est le gnosticisme. Ce dernier trouve son origine dans les zones marginales, au sens géographique et au sens spirituel, du judaïsme et du judéo-christianisme. Les ébionistes affirmaient que Jésus était un homme parmi tous les autres hommes, semblables à eux en tant que fils de Joseph et de Marie : cette conception de Jésus comme le prophète annoncé par Moïse, et non pas comme le propre Fils de Dieu, était une caractéristique de ce mouvement hétérodoxe à l’intérieur du judéo-christianisme. Les ébionistes pourraient très bien être les héritiers de sectaires Esséniens de Qumran, qui se seraient convertis au christianisme après la ruine du Temple de Jérusalem en 70. L’elkasaïsme est une autre secte qui apparaît vers l’année 100 : son fondateur aurait reçu une révélation, par un ange, lui annonçant la rémission des péchés commis après le baptême chrétien. Pour ce courant, Jésus est également un prophète ; et donc, l’elkasaïsme est un mouvement chrétien hétérodoxe. Mais il est aussi un courant juif hétérodoxe puisqu’il rejette de nombreuses pratiques du judaïsme et ne reconnaît que certaines parties de l’Ancien Testament. Les nicolaïtes condamnaient le Dieu de l’Ancien Testament qui avait trompé les espérances de la restauration d’Israël, et ils professaient une doctrine de la liberté totale, qui conduisait au libertinisme moral. Cérinthe, un autre judéo-chrétien hétérodoxe, est le premier représentant du courant gnostique : il maintenait la circoncision et le sabbat, attendait un royaume du Christ installé dans le monde matériel après la résurrection, avec la restauration du culte au Temple de Jérusalem ; le fait qu’il n’admet pas que le monde ait été créé par Dieu, mais bien par une puissance qui ignore Dieu, le place dans le gnosticisme proprement dit.
Son principal successeur, Carpocrate, rejette l’affirmation de la création du monde par le Dieu biblique ; ce monde aurait été créé par des anges ou ‘archontes’. Pour lui, Jésus est né de Joseph et une puissance divine est descendue sur lui, au moment de son baptême, sous l’apparence d’une colombe ; celui qui partage cette puissance divine descendue sur Jésus peut devenir son égal et accomplir les mêmes prodiges que lui. Carpocrate prônait également l’amoralisme. Puisque les archontes permettent ou imposent des vices aux hommes, autant les pratiquer tous sans attendre pour éviter d’être réincarné par les soins de ces mauvais anges dans des vies successives où l’on devrait encore subir tous les vices non encore pratiqués durant l’existence présente. Après Carpocrate, un des grands représentants du gnosticisme sera Marcion, le fils d’un évêque de Sinope, dans le Pont : il fut doté d’une bonne formation intellectuelle. Mais, alors qu’il était encore jeune, il fut exclu de la communauté chrétienne par son propre père. Il voyagea alors en Asie Mineure, pour faire connaître son interprétation de Évangile, mais il ne fut guère écouté des milieux chrétiens. Pour lui, le Dieu de l’Ancien Testament est un Dieu foncièrement mauvais, puisqu’il a créé l’homme faible et mortel et qu’il a permis sa chute dans le péché. Jésus a révélé l’existence du Dieu inconnu et bon : crucifié et ressuscité, Jésus est la seule et unique source de salut pour l’ensemble des hommes. Mais sa prédication, son Évangile a été falsifié par des judaïsants qui, bien que disciples immédiats de Jésus, se sont à nouveau soumis au Dieu de l’Ancien Testament. Seule, la position d’un Paul de Tarse pouvait être acceptée, à condition de la purifier de toutes les interprétations ajoutées par les judaïsants : à partir de là, il serait possible de retrouver la pureté de Évangile Avec ces données scripturaires, Marcion construit une doctrine du salut universel obtenu en menant une vie frugale, en s’abstenant du mariage et en vivant selon une discipline communautaire très forte. Sa doctrine eut un certain succès, puisque Justin, dans sa première Apologie, en 150, en signale l’existence, tout en la réfutant par ailleurs.
Tous les écrivains chrétiens, de la fin du deuxième siècle, publieront des textes s’attaquant à la théologie marcionnienne. Si Marcion était surtout un organisateur de communautés et un fondateur Églises, Valentin est un théologien et un mystique : il veut expliquer la conscience malheureuse des hommes par des raisons purement métaphysiques : la vie tragique de l’homme dans un monde hostile est l’illustration de ce que peut éprouver l’être spirituel qui se trouve enfermé dans une enveloppe charnelle, au coeur d’un monde strictement matériel. L’homme se sent appelé à une autre réalité, qui est la véritable révélation, la ‘gnose’, mais qui est réservée aux seuls spirituels purs, des hommes que la tradition juive n’a pas pu produire, puisqu’elle faisait de l’homme le responsable de son malheur collectif et individuel. L’homme spirituel aspire donc à sortir de la condition de déchéance dans laquelle il se trouve immergé pour réintégrer la patrie spirituelle qui était la sienne avant le commencement des temps…
Devant la multiplicité des courants qui traversent le deuxième siècle, l’autorité des évêques va s’affirmer : le christianisme change de visage pour s’organiser en une Eglise véritablement universelle (catholique), qui est apte à exprimer sa foi dans les concepts théologiques véhiculés à cette époque. Dans la première moitié du troisième siècle va surgir une nouvelle religion : le manichéisme, dont le fondateur, Mani, fut affilié, en même temps vraisemblablement que son père, à une secte baptiste ; il fréquenta des adeptes de différentes religions, ceux de la religion traditionnelle de l’Iran, le mazdéisme, ceux du brahmanisme et du bouddhisme, ceux du judaïsme et du christianisme – et particulièrement des disciples de Marcion. C’est en 240 que Mani aurait eu la révélation de sa mission, qui était de poursuivre l’oeuvre des grands initiateurs, Zoroastre, Bouddha, Jésus… L’Eglise qu’il veut établir est une communauté de parfaits auxquels peuvent s’adjoindre, mais à un degré inférieur, des hommes pécheurs et imparfaits : le monde matériel étant mauvais, il recommande de s’abstenir du mariage. L’influence du manichéisme se prolongera au Moyen-Age.
Au début du troisième siècle, à Rome, un certain Sabellius professe une doctrine qui porte directement atteinte au dogme de la Trinité, qui s’ébauchait dans l’Eglise : cette doctrine, le sabellianisme, est un modalisme ou un monarchianisme, en ce sens qu’elle donne une supériorité, non seulement chronologique mais aussi ontologique, au Dieu-Père, dont le Fils et l’Esprit ne sont que des modes. Une fois élu évêque de Rome, Calixte condamne Sabellius. Mais l’affaire n’en resta pas là. Elle rebondit quarante années plus tard, car certains évêques s’étaient même laissé gagner à la doctrine sabellienne et n’osaient plus parler du Fils. Cette forme hétérodoxe finissait par ne plus reconnaître les distinctions entre les personnes divines, qui étaient en quelque sorte confondues en une seule entité. Contre cette tentation hétérodoxe du monarchianisme sabellien, le prêtre Arius d’Alexandrie entreprit une réflexion pour tenter d’éclairer les relations qui pouvaient exister à l’intérieur de l’Être de Dieu. Mais la doctrine que se met à prêcher Arius est beaucoup plus philosophique que théologique : les personnes divines ne peuvent pas être confondues, mais elles ne peuvent pas davantage être égales. Pour sauvegarder, à l’intérieur de la Trinité, l’originalité du Père, non engendré et non devenu, seul à être vraiment sans principe, seul à être vrai Dieu, Arius fut conduit à dévaloriser le Verbe, en accordant au Père une supériorité ontologique. Il était ainsi amené à prôner une subordination du Fils par rapport au Père : le Fils ne peut pas être pleinement Dieu, puisqu’il a été engendré par le Père : il est un Dieu second, qui permet aux hommes d’approcher du mystère du seul vrai Dieu, qui est inconnaissable et inaccessible.
La réaction officielle de l’Eglise d’Alexandrie, dirigée alors par l’évêque Alexandre, ne se fit pas attendre : cet évêque réunit un concile local, rassemblant une centaine d’évêques Égypte et de Libye, qui anathématisent Arius et l’excommunient ainsi que ceux qui restaient fidèles à sa doctrine. Mais l’affaire n’en resta pas là, elle déborda les frontières de Égypte Arius rechercha des appuis auprès de ceux qui furent jadis ses condisciples : des synodes provinciaux, notamment en Palestine, réhabilitèrent Arius… D’une crise purement doctrinale à l’origine, on passe très vite à un conflit généralisé dans toute l’Eglise, car Alexandre ne reste pas inactif : il fait parvenir, sous forme de lettres, ses décisions aux évêques grecs et à Sylvestre de Rome. L’agitation dans le monde ecclésiastique prend donc une grande extension dans l’empire que Constantin vient de réunifier, en utilisant également la force que pouvait représenter le christianisme au début du quatrième siècle. Pour résoudre les problèmes qui divisaient l’Eglise et qui menaçaient ainsi l’unité de l’Empire, Constantin convoque un concile ; et celui-ci ne sera pas seulement local, mais puisque l’empereur se considère comme le maître absolu du monde, ce concile sera mondial, universel, oecuménique. L’empereur met à la disposition des évêques la poste impériale, dont les services devaient favoriser la participation des évêques les plus éloignés. Pourtant, le nombre des évêques présents ne fut pas excessivement élevé : les Occidentaux étaient peu nombreux à Nicée une ville proche de Nicomédie, le 20 mai 325, jour où l’empereur Constantin ouvrit et présida ce premier concile oecuménique. Le pape Sylvestre de Rome délégua, à sa place, deux prêtres romains. L’absence du pape au concile créa ainsi un précédent : dans la plupart des conciles ultérieurs, l’évêque de Rome se fera représenter, afin de ne pas trop peser de son autorité sur les évêques du monde et sur le déroulement de leurs délibérations. Selon les désirs de l’empereur, les évêques commencèrent par examiner la question arienne : malgré la présence de certains partisans d’Arius, les erreurs de celui-ci furent condamnées par une puissante majorité, qui confirma ainsi les décisions du concile local d’Alexandrie. Mais, pour enrayer le développement de l’hérésie, les Pères conciliaires voulurent proclamer la foi de l’Eglise, dans son authenticité :
D’une part, le concile voulait effacer les expressions impies des ariens et, d’autre part, employer des termes tirés de Écriture et admis par tous pour confesser que le Fils n’est pas tiré du néant, mais de Dieu, qu’il est Verbe et Sagesse, et non pas une créature ou un ouvrage, qu’il est le propre rejeton du Père.
C’est ainsi qu’Athanase d’Alexandrie, le diacre et secrétaire particulier de l’évêque Alexandre, résume le concile, dans son ouvrage ‘De decretis Nicaenae synodi’. Ainsi, les Pères conciliaires proclamèrent la vraie doctrine, sous forme d’un symbole, affirmant que Jésus, le Christ est vraiment le Fils de Dieu, Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, et déclarant en plus qu’il est consubstantiel au Père (omoousioV). Un nouveau terme était ainsi introduit dans la doctrine chrétienne, un terme qui n’était pas issu de Écriture sainte, mais de la pensée philosophique ; le christianisme manifestait ainsi sa capacité de fécondité pour exprimer le donné de la révélation dans le cadre des cultures ambiantes. La doctrine chrétienne fut exprimée dans un symbole, qui serait, selon Eusèbe de Césarée, le symbole baptismal de l’Eglise de Césarée :
Nous croyons en un Dieu, Père tout-puissant, créateur de toutes les choses visibles et invisibles ; et en un Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, unique engendré du Père, c’est-à-dire de la substance du Père, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré, non créé, consubstantiel au Père, par qui tout a été fait, ce qui est dans le ciel et ce qui est sur la terre ; qui, pour nous, les hommes, et pour notre salut, est descendu, s’est incarné, s’est fait homme, a souffert, est ressuscité le troisième jour, est monté aux cieux et viendra juger les vivants et les morts ; et nous croyons en l’Esprit-Saint. Pour ceux qui disent : II fut un temps où il n’était pas, et : Avant de naître, il n’était pas, et : il a été créé du néant, ou qui disent que le Fils est d’une autre substance ou d’une autre essence, ou qu’il est soumis au changement ou à l’altération, l’Eglise catholique et apostolique les anathématise.
Malgré cette profession de foi, exprimée le 19 juin 325, et la condamnation des erreurs ariennes, l’arianisme n’était pas encore totalement expurgé de l’Eglise, bien que Constantin lui-même prît les mesures nécessaires pour faire appliquer les décisions conciliaires : il exila deux évêques restés solidaires d’Arius. Et si les Pères conciliaires se séparent dans l’euphorie, les discussions vont rapidement reprendre dans les milieux ecclésiastiques, en raison du caractère trop matériel du terme homoousios Ce terme n’était pas scripturaire, ainsi qu’il a déjà été dit : dans la langue courante, il signifiait : fabriqué d’un même métal. Les évêques orientaux acceptèrent difficilement ce terme d’homoousios, qui semblait tolérer la présence d’un certain subordinatianisme.
Les discussions dureront avec âpreté dans l’Eglise pendant un demi-siècle : la définition de la consubstantialité du Père et du Fils dut attendre l’empereur Théodose pour s’imposer définitivement dans la doctrine chrétienne. D’autres tendances hérétiques se faisaient jour dans l’Eglise : elles concernaient également la personne de l’Esprit-Saint. Pour en terminer avec toutes ces discussions et erreurs, l’empereur Théodose réunit un nouveau concile à Constantinople, le deuxième concile oecuménique, mais qui ne rassembla guère que des évêques orientaux : le pape Damase ne fut même pas représenté à cette assemblée, qui se déroula de mai à juillet 381. Les Pères de Constantinople reprirent le Symbole de Nicée en lui incorporant de nouveaux éléments, déjà en usage dans l’une ou l’autre Eglise orientale ; ils développèrent le troisième article du Symbole, qui concerne l’Esprit-Saint, en le nommant Seigneur, en déclarant qu’il est source de vie et qu’il procède du Père, en un mot qu’il est Dieu :
Nous croyons en un Dieu, Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de toutes les choses visibles et invisibles ;
et en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, engendré du Père avant tous les siècles, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré non créé, consubstantiel au Père, par qui tout a été fait ; qui, pour nous, les hommes et pour notre salut, est descendu des cieux, par le Saint Esprit s’est incarné de la Vierge Marie, et s’est fait homme ; il a été crucifié pour nous sous Ponce-Pilate, a souffert, a été enseveli, est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures, est monté aux cieux ; il siège à la droite du Père et il reviendra en gloire juger les vivants et les morts ; son règne n’aura pas de fin ;
et en l’Esprit Saint, le Seigneur, qui vivifie, qui procède du Père, qui avec le Père et le Fils est conjointement adoré et glorifié ; qui a parlé par les prophètes ;
et en l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique. Nous confessons un baptême pour la rémission des péchés. Nous attendons la résurrection des morts et la vie du siècle à venir.
La traduction latine de ce Symbole de la foi ajoutera ‘et du Fils’ après l’affirmation que l’Esprit ‘procède du Père’. Ce ‘Filioque’ fut d’abord introduit en Espagne, avant de se répandre dans les Églises de Gaule et de Germanie. Benoît VIII l’introduira définitivement dans le Credo de la liturgie latine, les Grecs n’admettant pas que l’on puisse ajouter une mention quelconque au symbole de la foi, proclamé par les Pères conciliaires. Ce n’est donc qu’au onzième siècle que cette profession de foi sera un texte normatif dans l’Eglise universelle : elle sera connue sous le nom de ‘symbole de Nicée-Constantinople’. Mais, après le concile de Constantinople, l’hérésie arienne est définitivement vaincue. L’empereur Théodose se charge en effet de poursuivre les ariens, tout en établissant une législation qui expurge son empire de toutes les survivances du paganisme. A la fin de son règne, le christianisme est devenu la religion officielle de tout le monde soumis à la puissance romaine. La crise arienne était enfin dissipée, et le christianisme avait acquis ses lettres de noblesse, tout en développant sa pensée théologique, dans une formulation du mystère chrétien dans les concepts philosophiques courants de cette époque.
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