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PSEUDO-ÉPIPHANE DE SALAMINE : QU’EST-CECI ? UN GRAND SILENCE RÈGNE AUJOURD’HUI SUR LA TERRE, UN GRAND SILENCE ET UNE GRANDE SOLITUDE.
3 juillet, 2013http://www.patristique.org/Pseudo-Epiphane-de-Salamine-Meditation-pour-un-samedi-saint.html
PSEUDO-ÉPIPHANE DE SALAMINE : MÉDITATION POUR UN SAMEDI SAINT
ATTRIBUÉE, À TORT, À ÉPIPHANE DE SALAMINE (315-403), CETTE MÉDITATION INTRODUIT AU MYSTÈRE DU SAMEDI SAINT.
QU’EST-CECI ? UN GRAND SILENCE RÈGNE AUJOURD’HUI SUR LA TERRE, UN GRAND SILENCE ET UNE GRANDE SOLITUDE.
Un grand silence parce que le roi dort. La terre a tremblé et s’est calmée parce que Dieu s’est endormi dans la chair, et qu’il est allé réveiller ceux qui dormaient depuis des siècles. Dieu est mort dans la chair et les enfers ont tressailli. Dieu s’est endormi pour un peu de temps et il a réveillé du sommeil ceux qui séjournaient dans les enfers…
Il va chercher Adam, notre premier père, la brebis perdue. Il veut aller visiter tous ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l’ombre de la mort. Il va pour délivrer de leurs douleurs Adam dans ses liens et Ève captive avec lui, lui qui est en même temps leur Dieu et leur fils.
Descendons avec lui pour voir l’alliance entre Dieu et les hommes. Là se trouve Adam, le premier père et, comme premier créé, enterré plus profondément que tous les condamnés. Là se trouve Abel, le premier mort, et comme premier pasteur juste, figure du meurtre injuste du Christ pasteur. Là se trouve Noé, figure du Christ, le constructeur de la grande arche de Dieu, l’Église. Là se trouve Abraham, le père du Christ, le sacrificateur qui offrit à Dieu par le glaive et sans le glaive un sacrifice mortel sans mort. Là demeure Moïse, dans les ténèbres inférieures, lui qui jadis a séjourné dans les ténèbres supérieures de l’arche de Dieu. Là se trouve Daniel, dans la fosse de l’enfer, lui qui jadis a séjourné sur la terre, dans la fosse aux lions. Là se trouve Jérémie, dans la fosse de boue, dans le trou de l’enfer, dans la fosse de la mort. Là se trouve Jonas dans le monstre capable de contenir le monde, c’est-à-dire dans l’enfer en signe du Christ éternel. Et, parmi les prophètes, il en est un qui s’écrie : « du ventre de l’enfer, entends ma supplication, écoute mon cri ! » et un autre « des profondeurs, je crie vers toi, Seigneur, Seigneur, entends ma voix » – Et un autre encore : « Fais rayonner ton visage, et nous serons sauvés ! »…
Mais, comme par son avènement, le Seigneur voulait pénétrer dans les lieux les plus inférieurs, Adam en tant que premier père et que premier créé de tous les hommes et en tant que premier mortel, lui qui avait été tenu captif plus profondément que tous les autres, et avec le plus grand soin, il entendit le premier le bruit des pas du Seigneur qui venait vers les prisonniers. Et il reconnut la voix de celui qui cheminait dans la prison et s’adressant à tous ceux qui étaient enchaînés avec lui depuis le commencement du monde, il parla ainsi : « J’entends les pas de quelqu’un qui vient vers nous ! » Et pendant qu’il parlait, le Seigneur entra tenant les armes victorieuses de la croix. Et lorsque le premier père Adam le vit, plein de stupeur il se frappa la poitrine et cria aux autres : « Mon Seigneur soit avec vous tous ! » Et le Christ répondit à Adam : « Et avec ton esprit ». Et lui ayant saisi la main, il lui dit : « Tiens-toi debout, toi qui dormais, lève-toi d’entre les morts et le Christ t’illuminera. Je suis ton Dieu et, à cause de toi, je suis devenu ton fils. Lève-toi, toi qui dormais, car je ne t’ai pas créé pour que tu séjournes ici enchaîné dans l’enfer. Surgis d’entre les morts, je suis la Vie des morts. Lève-toi, toi, l’œuvre de mes mains, toi, mon effigie, qui a été faite à mon image. Lève-toi et partons d’ici car tu es en moi et je suis en toi, nous formons tous deux une personne unique et indivisible.
À cause de toi, moi, ton Dieu, je suis devenu ton fils ; à cause de toi, moi le Seigneur, j’ai pris la forme d’esclave ; à cause de toi, moi qui demeure au-dessus des cieux, je suis descendu sur la terre, et sous la terre. Pour toi, homme, je me suis fait comme un homme sans protection, livré aux juifs dans le jardin et j’ai été crucifié dans le jardin. Regarde sur mon visage les crachats que j’ai reçus pour toi, afin de te replacer dans l’antique paradis. Regarde sur mes joues la trace des soufflets que j’ai subis pour rétablir en mon image ta beauté détruite. Regarde sur mon dos la trace de la flagellation que j’ai reçue afin de te décharger du fardeau de tes péchés, qui avait été imposé sur ton dos. Regarde mes mains qui ont été solidement clouées au bois à cause de toi qui autrefois as mal étendu tes mains vers le bois… Je me suis endormi sur la croix et la lance a percé mon côté à cause de toi qui t’es endormi au paradis et as fait sortir Ève de ton côté. Ma douleur a guéri la douleur de ton côté. Et mon sommeil te fait sortir maintenant du sommeil de l’enfer. Lève-toi et partons d’ici, de la mort à la vie, de la corruption à l’immortalité, des ténèbres à la lumière éternelle. Levez-vous et partons d’ici et allons de la douleur à la joie, de la prison à la Jérusalem céleste, des chaînes à la liberté, de la captivité aux délices du paradis, de la terre au ciel.
Mon Père céleste attend la brebis perdue, un trône de chérubin est prêt, les porteurs sont debout et attendent, la salle de noces est préparée, les tentes et les demeures éternelles sont ornées, les trésors de tout bien sont ouverts, le royaume des cieux qui existait avant tous les siècles vous attend.
Source :
Homélie pour le Samedi-saint, PG 43, 444-464. Cité par H. Urs von Balthasar dans Dieu et l’homme d’aujourd’hui, « Foi Vivante » n° 16, Paris 1966, p. 258-262.
JEAN PAUL II : LES PSAUMES DANS LA TRADITION DE L’EGLISE, Lecture: Ps 150
3 juillet, 2013JEAN PAUL II
AUDIENCE GÉNÉRALE
MERCREDI 28 MARS 2001
LES PSAUMES DANS LA TRADITION DE L’EGLISE
Lecture: Ps 150
1. Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j’ai souhaité que l’Eglise se distingue davantage dans l’ »art de la prière », en l’apprenant toujours à nouveau des lèvres du divin Maître (cf. n. 32). Cet engagement doit être vécu en particulier dans la Liturgie, source et sommet de la vie ecclésiale. Dans cette optique, il est important de réserver une plus grande attention pastorale à la promotion de la Liturgie des Heures comme prière de tout le Peuple de Dieu (cf. Ibid., n. 34). En effet, si les prêtres et les religieux ont le mandat précis de la célébrer, elle est cependant vivement recommandée également aux laïcs. C’est à cela que visait, il y a un peu plus de trente ans, mon vénéré prédécesseur Paul VI, à travers la Constitution Laudis canticum dans laquelle il déterminait le modèle en vigueur de cette prière, souhaitant que les Psaumes et les Cantiques, structure portante de la Liturgie des Heures, soient compris « avec un amour renouvelé par le Peuple de Dieu » (AAS 63 [1971], 532).
Il est encourageant de savoir que de nombreux laïcs, tant dans les paroisses que dans les groupes ecclésiaux, ont appris à la valoriser. Elle reste toutefois une prière qui suppose une formation catéchétique et biblique adaptée, afin de pouvoir l’apprécier totalement.
Dans ce but, nous commençons aujourd’hui une série de catéchèses sur les Psaumes et sur les Cantiques proposés dans la prière matinale des Laudes. Je désire, de cette façon, encourager et aider toutes les personnes présentes à prier avec les mêmes paroles utilisées par Jésus et présentes depuis des millénaires dans la prière d’Israël et dans celle de l’Eglise.
2. Nous pourrions entreprendre l’étude des Psaumes de diverses façons. La première consisterait à présenter leur structure littéraire, leurs auteurs, leur formation, les contextes dans lesquels ils sont nés. Ensuite, une lecture qui en soulignerait le caractère poétique, qui atteint parfois de très hauts niveaux d’intuition lyrique et d’expression symbolique, serait suggestive. Il serait tout aussi intéressant de reparcourir les Psaumes en considérant les divers sentiments de l’âme humaine qu’ils manifestent: joie, reconnaissance, action de grâce, amour, tendresse, enthousiasme, mais également souffrance intense, récrimination, demande d’aide et de justice, qui débouchent parfois sur de la rage et des imprécations. Dans les Psaumes, l’être humain se retrouve entièrement lui-même.
Notre lecture cherchera surtout à faire apparaître la signification religieuse des Psaumes, en montrant comment ceux-ci, bien qu’ayant été écrits il y a de nombreux siècles par des croyants juifs, peuvent être utilisés dans la prière des disciples du Christ. Nous serons aidés en cela par les conclusions de l’exégèse, mais, dans le même temps, nous nous mettrons à l’écoute de la Tradition, en particulier nous nous placerons à l’écoute des Pères de l’Eglise.
3. Ces derniers, en effet, avec une profonde pénétration spirituelle, ont su discerner et indiquer la grande « clef » de lecture des Psaumes dans le Christ lui-même, dans la plénitude de son mystère. Les Pères en étaient tout à fait convaincus: dans les Psaumes, il est question du Christ. En effet, Jésus ressuscité applique à lui-même les Psaumes lors-qu’il dit à ses disciples: « Il faut que s’accomplisse tout ce qui est écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes » (Lc 24, 44). Les Pères ajoutent que dans les Psaumes, on parle au Christ, ou que c’est le Christ lui-même qui parle. En affirmant cela, ils ne pensaient pas seulement à la personne individuelle de Jésus, mais au Christus totus, à tout le Christ, formé par le Christ tête et par ses membres.
C’est ainsi que naît, pour le chrétien, la possibilité de lire le Psautier à la lumière de tout le mystère du Christ. C’est précisément cette optique qui en fait également apparaître la dimension ecclésiale, qui est particulièrement mise en évidence par le chant choral des Psaumes. On comprend ainsi comment les Psaumes ont pu être utilisés, dès les premiers siècles, comme prière du Peuple de Dieu. Si, au cours de certaines périodes de l’histoire, est apparue une tendance à préférer d’autres prières, les moines ont eu le grand mérite de conserver allumée dans l’Eglise la flamme du Psautier. L’un d’eux, saint Romuald fondateur des Camaldules, à l’aube du second millénaire chrétien, arrivait à soutenir que – comme l’affirme son biographe Bruno de Querfurt – les Psaumes sont l’unique voie pour faire l’expérience d’une prière vraiment profonde: « Una via in psalmis » (Passio sanctorum Benedicti et Johannes ac sociorum eorundem: MPH VI, 1893, 427).
4. Avec cette affirmation, à première vue excessive, il restait en réalité ancré à la meilleure tradition des premiers siècles chrétiens, quand le Psautier était devenu le livre par excellence de la prière ecclésiale. Ce fut un choix juste face aux tendances hérétiques qui menaçaient sans cesse l’unité de foi et de communion. A ce propos, il est intéressant de mentionner une lettre merveilleuse que saint Athanase écrivit à Marcellin dans la première moitié du IVème siècle, alors que l’hérésie arienne sévissait, portant atteinte à la foi dans la divinité du Christ. Face aux hérétiques qui attiraient les gens à eux, notamment à travers des chants et des prières qui en gratifiaient les sentiments religieux, le grand Père de l’Eglise se consacra de toutes ses forces à enseigner le Psautier transmis par l’Ecriture (cf. PG 27, 12sq). Ce fut ainsi qu’au « Notre Père », la prière du Seigneur par antonomase, s’ajouta la pratique, vite devenue universelle parmi les baptisés, de la prière psalmodique.
5. Egalement grâce à la prière communautaire des Psaumes, la conscience chrétienne a rappelé et compris qu’il est impossible de s’adresser au Père qui habite dans les cieux sans une authentique communion de vie avec les frères et les soeurs qui habitent sur terre. De plus, en s’insérant de façon vitale dans la tradition de prière des juifs, les chrétiens apprirent à prier en racontant les magnalia Dei, c’est-à-dire les grandes merveilles accomplies par Dieu, que ce soit dans la création du monde et de l’humanité, ou dans l’histoire d’Israël et de l’Eglise. Cette forme de prière puisée à l’Ecriture n’exclut assurément pas des expressions plus libres, et celles-ci continueront non seulement à caractériser la prière personnelle, mais également à enrichir la prière liturgique elle-même, par exemple avec des hymnes et des tropaires. Le Livre du Psautier demeure toutefois la source idéale de la prière chrétienne, et l’Eglise continuera à s’en inspirer au cours du nouveau millénaire.