Archive pour le 28 juin, 2013

Sts. Peter and Paul the Apostles

28 juin, 2013

Sts. Peter and Paul the Apostles  dans images sacrée agiois_petros___paylos2

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29 JUIN : SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL – Homélie prononcée à Bussy par le père Boris le 12 juillet 2002

28 juin, 2013

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29 JUIN : SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL – HOMÉLIE

Homélie prononcée à Bussy par le père Boris le 12 juillet 2002

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit,

Cette fête des saints Pierre et Paul est une des grandes fêtes de l’année liturgique. On peut dire que c’est par excellence –après la Pentecôte, bien sûr– la fête de l’Église. Quand saint Pierre et saint Paul sont représentés, soit à la Pentecôte, soit à l’Ascension, Paul est toujours près de Pierre. Le rassemblement de ces deux apôtres signifie la plénitude de l’Église.
Je commencerai par parler de saint Pierre. Quand nous regardons sa vie, nous voyons que Pierre n’est jamais seul. Il apparaît d’abord avec son frère André, et encore ce n’est pas Pierre qui découvre le Seigneur, mais c’est André qui va l’annoncer à son frère Pierre. Tous deux étaient du village de Bethsaïde, près du Lac de Tibériade. Il y a actuellement des icônes de saint André et de saint Pierre qui ont un sens symbolique. Dans la mesure où l’on veut que Pierre représente l’Église romaine –et il n’est pas seul à la représenter, il est apôtre pour l’Église entière– et André l’Église d’Orient, cette icône voudrait être le symbole de la réconciliation entre les Églises d’Orient et d’Occident, celles qu’on appelle quelquefois les deux poumons de l’Église. Pierre fut donc avec André parmi les premiers appelés. Mais très tôt, dans les Évangiles, ce n’est plus avec son frère qu’on le voit mais avec Jean, et Jacques, les fils de Zébédée. Quand le Seigneur envoyait les disciples deux par deux, Pierre allait avec Jean. Il y a donc un lien particulier qui s’instaure entre Pierre et le « disciple que Jésus aimait. » On le voit à la Sainte Cène, lorsque Pierre, n’osant pas s’adresser directement à Jésus, s’adresse à Jean dont la tête repose sur la poitrine du Maître pour qu’il demande « Et qui est celui qui va te livrer ? » Jean avait une intimité avec le Seigneur que Pierre n’avait pas, malgré son courage, malgré sa force, malgré toute sa spontanéité. Après la Résurrection, on les voit tous les deux courir ensemble vers le Tombeau et c’est Jean qui « vit et crut ». De même, lorsqu’ils pêchaient sur le lac de Tibériade, c’est Jean qui reconnaît Jésus sur la rive, mais c’est Pierre qui se jette à l’eau pour aller à sa rencontre. Dans l’Église primitive, à Jérusalem ou en Samarie, Pierre et Jean vont ensemble prêcher la Bonne Nouvelle.
Mais on trouve ensuite, dans la tradition ecclésiale, un autre couple formé par Pierre et Paul. Ils participent tous les deux au premier Concile de Jérusalem, Pierre le premier –il est toujours nommé le premier dans les listes des apôtres, on précise souvent « Pierre d’abord »– et Paul le dernier –lui qui s’appelait « l’avorton »– apparu comme un paradoxe, une contradiction, lui qui persécutait les chrétiens et gardait les vêtements de ceux qui lapidaient Étienne. À partir de là, par un retour en arrière, l’Église situe Paul en face de Pierre dans une relation unique jusqu’à la fin des temps. C’est pourquoi, dans toute la vie de l’Église, Pierre et Paul seront toujours évoqués ensemble et représentés ensemble même avant qu’ils ne se rencontrent, à la Pentecôte et à l’Ascension.
Je voudrais dire aussi quelques mots sur ce que l’on peut appeler « les faiblesses » de saint Pierre. Pierre, celui qui avait encore une foi chancelante, qui voulait marcher sur les eaux mais qui sombrait, celui qui voulait dissuader le Seigneur d’aller vers les souffrances. C’est ce qui suit immédiatement le passage que nous venons de lire, la confession de Pierre à Césarée. Quand Pierre dit au Seigneur : « Non, ne va pas à Jérusalem, Seigneur », le Seigneur lui répond : « Éloigne-toi de moi, Satan. Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes.»
Quel mot terrible ;! Satan, c’est-à-dire tentateur. Simon se souviendra de cette leçon dans sa première épître, qui est une des plus sublimes de tout le Nouveau Testament. Il y revit toute la passion du Christ à travers la prophétie d’Isaïe : « Lui qui n’a pas commis de péché et dans la bouche duquel il ne s’est pas trouvé de mensonge. Lui qui a porté nos péchés dans son corps sur le bois, afin que, morts pour le péché, nous vivions pour la justice ; lui par les meurtrissures duquel vous avez été guéris.» Pierre applique cette prophétie à Jésus, « qui n’ouvre pas la bouche quand il est mené à l’immolation ».
D’autre part, saint Pierre a reçu du Seigneur un nom nouveau, comme nous l’avons entendu aujourd’hui : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Il est le roc et l’Église se souvient de cette parole en considérant que tout évêque chargé de veiller sur le troupeau de l’Église entre dans le mystère du roc, qu’on appelle la « pétrinité » de saint Pierre. Rome a voulu en faire une exclusive pour le siège du pape, ce que l’Orient n’a pas accepté tout en reconnaissant à Rome une primauté dans l’amour, une primauté dans le service plus qu’une primauté dans l’autorité. Et, c’est à cela que répond déjà Pierre dans son épître d’une façon très claire : « Approchez-vous du Seigneur, Lui la pierre vivante rejetée par les hommes, mais choisie et précieuse devant Dieu. Et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle, un saint sacerdoce.»
Simon, fils de Jonas, dit Pierre, ne se réserve pas ce nom symbolique que Dieu lui a donné, il rappelle que la seule pierre véritable, c’est Jésus, sur lequel l’Église est fondée. Et nous, tous ensemble, nous formons des pierres, tous ensemble nous sommes unis par le ciment de l’Esprit Saint, lien de l’amour et de l’unité, qui fait de nous non plus des cailloux épars mais un édifice vivant, saint, capable de porter en lui la présence de Dieu. Il ne s’agit pas seulement de l’église comme bâtiment, mais de l’église que chaque fidèle est, car nous sommes tous le temple de Dieu, l’édifice spirituel, l’Église du Christ dans lequel se réalise la présence du Tout-Autre, du Tout-Saint, du Dieu Trinité.
Une dernière chose : dans son épître, saint Pierre reprend les Béatitudes et y met un point d’orgue, en guise de paroles de consolation pour les Églises éprouvées. « Ne soyez pas surpris comme d’une chose étrange qui vous arrive, de la fournaise qui est au milieu de vous pour vous éprouver. Réjouissez-vous – comme dans les Béatitudes – de la part que vous avez aux souffrances du Christ afin que vous soyez aussi dans la joie et l’allégresse lorsque sa gloire apparaîtra. Et si vous êtes outragés pour le nom du Christ, bienheureux êtes-vous, car l’Esprit de gloire, l’esprit de Dieu repose sur vous.» Voyez-vous, cette joie qui nous est promise au Royaume et qui nous est annoncée dès maintenant, c’est la joie et la plénitude dans l’Esprit Saint.
Quelques mots pour terminer sur saint Paul. Il y a tellement à dire ;! Dans cette seconde épître aux Corinthiens nous avons entendu les épreuves de saint Paul, ses souffrances sans nom, mais en même temps la grâce que Dieu lui a donnée d’être élevé au troisième ciel et d’entendre des paroles ineffables que nul homme ne peut répéter et qu’il ne pouvait lui-même nous redire. Et, pour qu’il ne s’enorgueillisse pas, le Seigneur lui a donné « une écharde dans la chair, comme un ange de Satan qui le souffletait » – c’est très mystérieux, nous ne savons pas de quoi il s’agissait. Était-ce une tentation ? Était-ce une maladie ? nous ne savons –. Saint Paul en souffrait, il supplia le Seigneur de l’en libérer, par trois fois, mais le Seigneur lui répondit : « Ma grâce te suffit. C’est dans la faiblesse que se manifeste ma puissance. » C’est pourquoi saint Paul ne voulait se glorifier que de ses propres faiblesses, afin qu’à travers ses faiblesses puisse se manifester davantage la puissance de Dieu.
Que dirai-je encore ? Saint Paul possédait cette évidence intérieure de la vie en Christ, lorsqu’il disait : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi ». Quelle audace de pouvoir le dire ! mais quelle joie aussi ! C’est notre programme à chacun : car ce « moi » est le vieil homme, c’est le moi avare, le moi colérique, égoïste, avec toutes les tares du vieil homme qui s’agglutinent dans ce moi pécheur qui doit mourir. Quand le Christ vit en moi, par la grâce du Saint Esprit, alors je regarde le monde lui-même d’un œil nouveau : Ce n’est plus moi qui parle, c’est le Christ qui parle en moi ; ce n’est plus moi qui aime, c’est le Christ qui aime en moi. Il y a ainsi un recentrement profond de notre existence entière sur le Christ, sans que ma personnalité –oh… ma personnalité…– ne soit brimée ni contrainte ni réduite à zéro. Au contraire, elle renaît dans une vie nouvelle de joie. Alors, nous trouvons la puissance et la grâce d’aimer, comme saint Paul, de participer avec l’Esprit Saint à la naissance nouvelle des enfants de Dieu.
C’est sur cela que je voudrais terminer, sur cette parole de saint Paul : « Mes petits enfants – pour saint Paul, nous sommes tous ses petits enfants, pas plus – pour qui je souffre à nouveau les douleurs de l’enfantement jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous. » Les douleurs de l’enfantement, cela signifie que, pour que le Christ puisse naître en nous, il y a tout un travail intérieur à faire. L’enfantement est une image, que le Seigneur reprend dans le Discours des adieux : « Lorsqu’une femme met au monde un enfant, elle est dans la souffrance, mais quand elle a enfanté elle est dans la joie parce qu’un homme est venu au monde. » Cet enfant qui vient au monde, ce sont les enfants de saint Paul et de tous ceux qui participent avec lui à cette gestation, oubliant à la fin leur souffrance, car celui qui participe, qui est auprès d’une âme en train de naître en Christ, sent en lui-même ses propres douleurs. C’est le mystère de la compassion, du partage de la souffrance de l’autre que nous vivons par l’Esprit Saint. Dans l’Esprit Saint nous devenons capables de sentir comme si c’était notre propre souffrance les souffrances de l’autre, comme si c’était notre propre joie les joies de l’autre. Tout cela nous est donné dans l’Esprit Saint et tout cela, les saints apôtres Pierre et Paul nous le communiquent.
Creusons davantage, à travers les épîtres pauliniennes, les épîtres de saint Pierre et les Actes des apôtres, toutes ces lois de la vie chrétienne, qui nous conduisent par la naissance et la croissance jusqu’à la plénitude de vie en Christ par l’Esprit Saint.

Amen.

Père Boris

CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DE LA SOLENNITÉ DE SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL, À L’OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI (2008)

28 juin, 2013

 http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/homilies/2008/documents/hf_ben-xvi_hom_20080628_vespri_fr.html

CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DE LA SOLENNITÉ DE SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL, À L’OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE

HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs
Samedi 28 juin 2008

 Votre Sainteté et chers délégués fraternels,
Messieurs les cardinaux,
Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et sœurs,

Nous sommes réunis auprès de la tombe de saint Paul, qui naquit il y a deux mille ans à Tarse de Cilicie, dans l’actuelle Turquie. Qui était ce Paul? Dans le temple de Jérusalem, devant la foule agitée qui voulait le tuer, il se présente lui-même avec ces mots:  « Je suis juif:  né à Tarse, en Cilicie, mais élevé ici dans cette ville [Jérusalem], j’ai reçu, à l’école de Gamaliel, un enseignement strictement conforme à la Loi de nos pères; je défendais la cause de Dieu avec une ardeur jalouse… » (Ac 22, 3). A la fin de son chemin, il dira de lui-même:  « J’ai reçu la charge… [d'enseigner] aux nations païennes la foi et la vérité » (1 Tm 2, 7; cf. 2 Tm 1, 11). Maître des nations, apôtre et annonciateur de Jésus Christ, c’est ainsi qu’il se décrit lui-même en regardant rétrospectivement le parcours de sa vie. Mais avec cela, son regard ne va pas seulement vers le passé. « Maître des nations » – cette parole s’ouvre à l’avenir, vers tous les peuples et toutes les générations. Paul n’est pas pour nous une figure du passé, que nous rappelons avec vénération. Il est également notre maître, pour nous aussi apôtre et annonciateur de Jésus Christ.
Nous sommes donc réunis non pour réfléchir sur une histoire passée, irrévocablement révolue. Paul veut parler avec nous – aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai voulu promulguer cette « Année paulinienne » spéciale:  pour écouter et pour apprendre à présent de lui, qui est notre maître, « la foi et la vérité », dans lesquelles sont enracinées les raisons de l’unité parmi les disciples du Christ. Dans cette perspective, j’ai voulu allumer, pour ce bimillénaire de la naissance de l’Apôtre, une « Flamme paulinienne » spéciale, qui restera allumée pendant toute l’année dans un brasero spécifique placé dans le quadriportique de la Basilique. Pour conférer de la solennité à cet événement, j’ai également inauguré la « Porte paulinienne », à travers laquelle je suis entré dans la Basilique accompagné par le Patriarche de Constantinople, par le cardinal archiprêtre et par les autres autorités religieuses. C’est pour moi un motif de joie profonde que l’ouverture de l’ »Année paulinienne » assume un caractère œcuménique, en raison de la présence de nombreux délégués et représentants d’autres Eglises et communautés ecclésiales, que j’accueille le cœur ouvert. Je salue tout d’abord Sa Sainteté le Patriarche Bartholomaios I et les membres de la délégation qui l’accompagne, ainsi que le groupe nombreux de laïcs qui, de différentes parties du monde, sont venus à Rome pour vivre avec Lui et avec nous tous, ces moments de prière et de réflexion. Je salue les délégués fraternels des Eglises qui ont un lien particulier avec l’Apôtre Paul – Jérusalem, Antioche, Chypre, Grèce – et qui forment le cadre géographique de la vie de l’Apôtre avant son arrivée à Rome. Je salue cordialement les frères des différentes Eglises et communautés ecclésiales d’Orient et d’Occident, en même temps que vous tous qui avez voulu prendre part à cette ouverture solennelle de l’ »Année » consacrée à l’Apôtre des Nations.
Nous sommes donc ici rassemblés pour nous interroger sur le grand Apôtre des Nations. Nous nous demandons non seulement:  qui était Paul? Nous nous demandons surtout:  Qui est Paul? Que me dit-il? En cette heure, au début de l’ »Année paulinienne » que nous inaugurons, je voudrais choisir dans le riche témoignage du Nouveau Testament trois textes, dans lesquels apparaît sa physionomie intérieure, la spécificité de son caractère. Dans la Lettre aux Galates, il nous a offert une profession de foi très personnelle, dans laquelle il ouvre son cœur aux lecteurs de tous les temps et révèle quelle est l’impulsion la plus profonde de sa vie. « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi » (Ga 2, 20). Tout ce que Paul accomplit part de ce centre. Sa foi est l’expérience d’être aimé par Jésus Christ de manière tout à fait personnelle; elle est la conscience du fait que le Christ a affronté la mort non pour quelque chose d’anonyme, mais par amour pour lui – de Paul – et que, en tant que Ressuscité, il l’aime toujours, c’est-à-dire que le Christ s’est donné pour lui. Sa foi est le fait d’être frappé par l’amour de Jésus Christ, un amour qui le bouleverse jusqu’au plus profond de lui-même et qui le transforme. Sa foi n’est pas une théorie, une opinion sur Dieu et sur le monde. Sa foi est l’impact de l’amour de Dieu sur son cœur. Et ainsi, cette foi est l’amour pour Jésus Christ.
Paul est présenté par de nombreuses personnes comme un homme combatif qui sait manier l’épée de la parole. De fait, sur son parcours d’apôtre les disputes n’ont pas manqué. Il n’a pas recherché une harmonie superficielle. Dans la première de ses Lettres, celle qui s’adresse aux Thessaloniciens, il dit:  « Nous avons cependant trouvé l’assurance qu’il fallait pour vous annoncer, au prix de grandes luttes, l’Evangile de Dieu… Jamais, vous le savez, nous n’avons eu un mot de flatterie » (1 Th 2, 2.5). Il considérait que la vérité était trop grande pour être disposé à la sacrifier en vue d’un succès extérieur. La vérité dont il avait fait l’expérience dans la rencontre avec le Ressuscité méritait pour lui la lutte, la persécution, la souffrance. Mais ce qui le motivait au plus profond, était d’être aimé par Jésus Christ et le désir de transmettre cet amour aux autres. Paul était un homme capable d’aimer, et toute son œuvre et sa souffrance ne s’expliquent qu’à partir de ce centre. Les concepts de base de son annonce se comprennent uniquement à partir de celui-ci. Prenons seulement l’une de ses paroles-clés:  la liberté. L’expérience d’être aimé jusqu’au bout par le Christ lui avait ouvert les yeux sur la vérité et sur la voie de l’existence humaine – cette expérience embrassait tout. Paul était libre comme un homme aimé par Dieu qui, en vertu de Dieu, était en mesure d’aimer avec Lui. Cet amour est à présent la « loi » de sa vie et il en est précisément ainsi de la liberté de sa vie. Il parle et agit, mû par la responsabilité de la liberté de l’amour. Liberté et responsabilité sont liées ici de manière inséparable.  Se  trouvant dans la responsabilité de l’amour, il est libre; étant quelqu’un qui aime, il vit totalement dans la responsabilité de cet amour et ne prend pas la liberté comme prétexte pour l’arbitraire et l’égoïsme. C’est dans le même esprit qu’Augustin a formulé la phrase devenue ensuite célèbre:  Dilige et quod vis fac (Tract. in 1Jo 7, 7-8) – aime et fais ce que tu veux. Celui qui aime le Christ comme Paul l’a aimé peut vraiment faire ce qu’il veut, car son amour est uni à la volonté du Christ et donc à la volonté de Dieu; car sa volonté est ancrée à la vérité et parce que sa volonté n’est plus simplement sa volonté, arbitre du moi autonome, mais qu’elle est intégrée dans la liberté de Dieu et apprend de celle-ci le chemin à parcourir.
Dans  la  recherche  du  caractère intérieur de saint Paul je voudrais, en deuxième lieu, rappeler la parole que le Christ ressuscité lui adressa sur la route de Damas. Le Seigneur lui demande d’abord:  « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? ». A la question:  « Qui es-tu, Seigneur? », est donnée la réponse:  « Je suis Jésus, celui que tu persécutes » (Ac 9, 4). En persécutant l’Eglise, Paul persécute Jésus lui-même:  « Tu me persécutes ». Jésus s’identifie avec l’Eglise en un seul sujet. Dans cette exclamation du Ressuscité, qui transforma la vie de Saul, est au fond désormais contenue toute la doctrine sur l’Eglise comme Corps du Christ. Le Christ ne s’est pas retiré au ciel, en laissant sur la terre une foule de fidèles qui soutiennent « sa cause ». L’Eglise n’est pas une association qui veut promouvoir une certaine cause. Dans celle-ci, il ne s’agit pas d’une cause. Dans celle-ci il s’agit de la personne de Jésus Christ, qui également en tant que Ressuscité est resté « chair ». Il a la « chair et les os » (Lc 24, 39), c’est ce qu’affirme le Ressuscité dans Luc, devant les disciples qui l’avaient pris pour un fantôme. Il a un corps. Il est personnellement présent dans son Eglise, « Tête et Corps » forment un unique sujet dira saint Augustin. « Ne le savez-vous pas? Vos corps sont les membres du Christ », écrit Paul aux Corinthiens (1 Co 6, 15). Et il ajoute:  de même que, selon le Livre de la Genèse, l’homme et la femme deviennent une seule chair, ainsi le Christ devient un seul esprit avec les siens, c’est-à-dire un unique sujet dans le monde nouveau de la résurrection (cf. 1 Co 6, 16sq). Dans tout cela transparaît le mystère eucharistique, dans lequel l’Eglise donne sans cesse son Corps et fait de nous son Corps:  « Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1 Co 10, 16sq). En ce moment, ce n’est pas seulement Paul, mais le Seigneur lui-même qui s’adresse à nous:  Comment avez-vous pu laisser déchirer mon Corps? Devant le visage du Christ, cette parole devient dans le même temps une question urgente:  Réunis-nous tous hors de toute division. Fais qu’aujourd’hui cela devienne à nouveau la réalité:  Il y a un unique pain, et donc, bien qu’étant nombreux, nous sommes un unique corps. Pour Paul, la parole sur l’Eglise comme Corps du Christ n’est pas une comparaison quelconque. Elle va bien au-delà d’une comparaison:  « Pourquoi me persécutes-tu? » Le Christ nous attire sans cesse dans son Corps à partir du centre eucharistique, qui pour Paul est le centre de l’existence chrétienne, en vertu duquel tous, ainsi que chaque individu, peuvent faire de manière personnelle l’expérience suivante:  Il m’a aimé et s’est donné lui-même pour moi.
Je voudrais conclure par l’une des dernières  paroles  de  saint  Paul, une exhortation à Timothée de la prison, face à la mort:  « Prends ta part de souffrance pour l’annonce de l’Evangile », dit l’apôtre à son disciple (2 Tm 1, 8). Cette parole, qui se trouve à la fin des chemins parcourus par l’apôtre, comme un testament renvoie en arrière, au début de sa mission. Alors qu’après sa rencontre avec le Ressuscité, Paul, aveugle, se trouvait dans sa maison de Damas, Ananie reçut le mandat d’aller chez le persécuteur craint et de lui imposer les mains, pour qu’il retrouve la vue. A Ananie, qui objectait que ce Saul était un dangereux persécuteur des chrétiens, il fut répondu:  Cet homme doit faire parvenir mon nom auprès des peuples et des rois. « Et moi, je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom » (Ac 9, 15sq). La charge de l’annonce et l’appel à la souffrance pour le Christ vont de pair inséparablement. L’appel à devenir le maître des nations est dans le même temps et intrinsèquement un appel à la souffrance dans la communion avec le Christ, qui nous a rachetés à travers sa Passion. Dans un monde où le mensonge est puissant, la vérité se paye par la souffrance. Celui qui veut éviter la souffrance, la garder loin de lui, garde loin de lui la vie elle-même et sa grandeur; il ne peut pas être un serviteur de la vérité et donc un serviteur de la foi. Il n’y a pas d’amour sans souffrance – sans la souffrance du renoncement à soi-même, de la transformation et de la purification du moi pour la véritable liberté. Là où il n’y a rien qui vaille la peine de souffrir, la vie elle-même perd sa valeur. L’Eucharistie – le centre de notre être chrétiens – se fonde sur le sacrifice de Jésus pour nous, elle est née de la souffrance de l’amour, qui a atteint son sommet dans la Croix. Nous vivons de cet amour qui se donne. Il nous donne le courage et la force de souffrir avec le Christ et pour Lui dans ce monde, en sachant que précisément ainsi notre vie devient grande, mûre et véritable. A la lumière de toutes les lettres de saint Paul, nous voyons que sur son chemin de maître des nations s’est accomplie la prophétie faite à Ananie à l’heure de l’appel:  « Et moi je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom ». Sa souffrance le rend crédible comme maître de vérité, qui ne cherche pas son propre profit, sa propre gloire, la satisfaction personnelle, mais qui s’engage pour Celui qui nous  a  aimés et qui s’est donné lui-même pour nous tous.
En cette heure, nous rendons grâce au Seigneur, car il a appelé Paul, le rendant lumière des nations et notre maître à tous, et nous le prions:  Donne-nous aujourd’hui aussi des témoins de la résurrection, touchés par ton amour et capables d’apporter la lumière de l’Evangile dans notre temps. Saint Paul, prie pour nous! Amen.