Archive pour le 24 juin, 2013
24 JUIN 2013 : MÉDITATION – SAINT JEAN-BAPTISTE
24 juin, 2013http://www.chemindamourverslepere.com/archive/2013/06/24/meditation-saint-jean-baptiste.html
24 JUIN 2013 : MÉDITATION – SAINT JEAN-BAPTISTE
« « Que sera cet enfant ? » se disent tous ceux qui entendent raconter les événements. Les espérances messianiques étaient alors assez ravivées dans le peuple. On attendait vaguement le roi d’Israël, le Sauveur qui délivrerait la race de Jacob de la domination romaine. Le trône de David était vide, les prophéties allaient peut-être se réaliser…
Que sera cet enfant ? Personne ne pouvait prévoir le rôle de Jean, sauf Zacharie qui connaissait le divin secret.
Sur chacun de nous, à notre naissance, cette question se pose. Nous recevons de Dieu la vie de nature et, par le baptême, la vie de grâce. Que ferons-nous de ces deux vies qui doivent se confondre et n’en faire qu’une pour l’éternité ? Question terrible, car la réponse décide de notre bonheur ou de notre malheur. Chacun de nous a selon les desseins de la Providence, sa route à parcourir pour atteindre le but suprême. Le tout est de la suivre, les yeux fixés sur ce but. La route, c’est le sens de Dieu pour nous. Tout ce qui est conforme à ce sens est bon, est vrai, car cette conformité nous met en rapport direct avec Dieu. Ce qui n’est pas conforme à ce sens, est péché, nous éloigne de la route, du but, par conséquent, qui est Dieu.
[...]
A l’Esprit-Saint, le grand illuminateur des âmes, d’ouvrir nos yeux pour voir et connaître Dieu. Notre pire faiblesse en ce monde, c’est l’ignorance de Dieu. Nous sommes assis dans « les ténèbres, dans l’ombre de la mort » et nous ne voyons pas plus haut, ni plus loin que la terre. Dieu nous échappe parce que notre âme n’est pas assez pure, assez limpide, assez dégagée de la terre, qui nous prend par tous nos sens. Ceux qui voient Dieu par la lumière de l’Esprit-Saint, ne peuvent pas ne pas l’aimer. Et c’est pourquoi il faut supplier Dieu de purifier nos yeux, afin que nous puissions le connaître. Que l’Orient se lève sur nos esprits enténébrés pour nous montrer la voie de la paix ! »
R.P. Mortier, o.p., L’Evangile – Simples commentaires pour la vie chrétienne (Naissance de Jean-Baptiste), Société Saint-Augustin, Desclée de Brouwer et Cie, Lille – Paris – Bruges, 1925.
NATIVITÉ DE SAINT JEAN BAPTISTE (24/6) – LECTURE DU LIVRE D’ISAÏE (49, 1-6) – première lecture de la messe du jour
24 juin, 2013NATIVITÉ DE SAINT JEAN BAPTISTE (24/6) : TEXTES
LECTURE DU LIVRE D’ISAÏE (49, 1-6)
Écoutez-moi, îles lointaines ! Peuples éloignés, soyez attentifs ! J’étais encore dans le sein maternel quand le Seigneur m’a appelé ; j’étais encore dans les entrailles de ma mère quand il a prononcé mon nom. Il a fait de ma bouche une épée tranchante, il m’a protégé par l’ombre de sa main ; il a fait de moi sa flèche préférée, il m’a serré dans son carquois. Il m’a dit : “Tu es mon serviteur, Israël, en toi je me glorifierai.” Et moi, je disais : “Je me suis fatigué pour rien, c’est pour le néant, c’est en pure perte que j’ai usé mes forces.” Et pourtant, mon droit subsistait aux yeux du Seigneur, ma récompense auprès de mon Dieu. Maintenant le Seigneur parle, lui qui m’a formé dès le sein de ma mère pour que je sois son serviteur, que je lui ramène Jacob et que je lui rassemble Israël. Oui, j’ai du prix aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force. Il parle ainsi : “C’est trop peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus de Jacob et ramener les rescapés d’Israël : je vais faire de toi la lumière des nations, pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre.”
Psaume 138 [139]
Je te rends grâce, ô mon Dieu, pour tant de merveilles.
Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais !
Tu sais quand je m’assois, quand je me lève ;
de très loin, tu pénètres mes pensées,
tous mes chemins te sont familiers.
C’est toi qui as créé mes reins,
qui m’as tissé dans le sein de ma mère.
Je reconnais devant toi le prodige,
l’être étonnant que je suis.
Étonnantes sont tes œuvres,
toute mon âme le sait.
Mes os n’étaient pas cachés pour toi
quand j’étais façonne dans le secret.
Lecture du livre des Actes des Apôtres (13, 22-26)
Dans la synagogue d’Antioche de Pisidie, Paul disait aux Juifs : “Dieu a suscité David pour le faire roi, et il lui a rendu ce témoignage : J’ai trouvé David, fils de Jessé, c’est un homme selon mon cœur ; il accomplira toutes mes volontés. Et, comme il l’avait promis, Dieu a fait sortir de sa descendance un sauveur pour Israël : c’est Jésus, dont Jean Baptiste a préparé la venue en proclamant avant lui un baptême de conversion pour tout le peuple d’Israël.
Au moment d’achever sa route, Jean disait : ‘Celui auquel vous pensez, ce n’est pas moi. Mais le voici qui vient après moi, et je ne suis pas digne de lui défaire ses sandales.’ Fils de la race d’Abraham, et vous qui adorez notre Dieu, frères, c’est à nous tous que ce message de salut a été envoyé.”
Acclamation
Alléluia, Alléluia.
Réjouissons-nous de la naissance de Jean : il sera le prophète du Très-Haut, il marchera devant le Seigneur pour lui préparer le chemin.
Alléluia.
Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc (1, 57-66. 80)
Quand arriva le moment où Élisabeth devait enfanter, elle mit au monde un fils. Ses voisins et sa famille apprirent que le Seigneur lui avait prodigué sa miséricorde, et ils se réjouissaient avec elle. Le huitième jour, ils vinrent pour la circoncision de l’enfant. Ils voulaient le nommer Zacharie comme son père. Mais sa mère déclara : “Non, il s’appellera Jean.” On lui répondit : “Personne dans ta famille ne porte ce nom-là !” On demandait par signes au père comment il voulait l’appeler. Il se fit donner une tablette sur laquelle il écrivit : “Son nom est Jean.” Et tout le monde en fut étonné. À l’instant même sa bouche s’ouvrit, sa langue se délia : il parlait et il bénissait Dieu. La crainte saisit alors les gens du voisinage, et dans toute la montagne de Judée on racontait tous ces événements. Tous ceux qui les apprenaient en étaient frappés et disaient : “Que sera donc cet enfant ?” En effet, la main du Seigneur était avec lui.
L’enfant grandit et son esprit se fortifiait. Il alla vivre au désert jusqu’au jour où il devait être manifesté à Israël.
24 JUIN : NATIVITÉ DE SAINT JEAN-BAPTISTE
24 juin, 2013http://missel.free.fr/Sanctoral/06/24.php
24 JUIN : NATIVITÉ DE SAINT JEAN-BAPTISTE
Sommaire :
Evangile (Luc, I 57-80)
Méditation et historique
EVANGILE SELON SAINT LUC (I 57-80)
Quand à Elisabeth, le temps fut révolu où elle devait enfanter, et elle donna naissance à un fils. Et ses voisines et ses parents apprirent que le Seigneur avait magnifié sa miséricorde à son égard, et ils s’en réjouissaient avec elle.
Or, le huitième jour, ils vinrent pour circoncire[1] l’enfant, et ils voulaient l’appeler Zacharie, du nom de son père[2]. Et prenant la parole, sa mère dit : « Non, mais il s’appellera Jean.[3] » Et on lui dit : « Il n’y a personne de ta parenté qui soit appelé de ce nom. » Et on demandait par signes au père comment il voulait qu’on l’appelât[4]. Et ayant demandé une tablette, il écrivit : « Jean est son nom.[5] » Et ils furent tous étonnés.
Sa bouche s’ouvrit à l’instant même et sa langue se délia[6], et il parlait, bénissant Dieu. Et la crainte s’empara de tous leurs voisins et, dans toute la région montagneuse de la Judée, on s’entretenait de toutes ces choses. Et tous ceux qui en entendirent parler les mirent dans leur cœur, en disant : « Que sera donc cet enfant ? » Et de fait la main du Seigneur était avec lui[7].
Et Zacharie, son père, fut rempli du Saint-Esprit et il prophétisa[8] en disant[9] :
« Béni soit le Seigneur Dieu d’Israël : il visite[10] et rachète son peuple. Il nous suscite une force de salut dans la maison de David, son serviteur, comme il l’a dit par la bouche des saints, ceux d’autrefois[11] , ses prophètes[12]. Salut qui nous arrache à l’oppresseur, aux mains de tous nos ennemis[13] ; amour qu’il scellait avec nos pères et souvenir de son alliance sainte ; serment juré à notre père Abraham de nous donner, qu’affranchis de la crainte, délivrés des mains de l’oppresseur, nous le servions en justice[14] et sainteté devant sa face tout au long de nos jours. Et toi, petit enfant, qu’on nommera prophète du Très-Haut, tu marcheras devant la face du Seigneur pour préparer ses voies ; pour annoncer à son peuple le salut en rémission de ses péchés, par l’amour du cœur de notre Dieu qui vient nous visiter ; soleil levant, lumière d’en haut sur ceux de la ténèbre qui gisent dans l’ombre de la mort[15] , et guide pour nos pas au chemin de la paix.[16] »
Quant à l’enfant, il croissait, et son esprit se fortifiait[17]. Et il fut dans les endroits déserts jusqu’au jour où il se présenta à Israël.
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[1] La circoncision avait été donnée à Abraham pour distinguer sa race de toute autre race et la préparer à posséder les biens promis à Dieu; quand arriva ce qui avait été promis, le signe fut aboli. A la circoncision, qui cesse à J.-C., succède le baptême; et c’est pourquoi Jean devait être circoncis. On l’imposait au huitième jour; l’enfant était moins sensible à la souffrance; et d’autre part on lui imposait cette marque qui l’incorporait au peuple de Dieu avant qu’il ne put le vouloir lui-même, pour établir que c’était une pure grâce. On lui donnait après la circoncision le nom qu’il devait porter, car avant de faire nombre dans le peuple de Dieu, il devait porter le signe de Dieu. Cela signifiait aussi que pour être inscrit au livre de vie, il devait avoir dépouillé les passions charnelles (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[2] On pensait qu’à cet enfant du miracle on ne pouvait donner de nom plus honorable que celui de son père Zacharie, de ce prêtre qui avait passé sa longue vie dans la piété et la justice. » Cela ne pouvait déplaire à la mère. Ce ne fut donc pas par répugnance pour ce nom, mais sous l’action de l’Esprit Saint qu’elle se montra si affirmative (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31).
[3] Elle ne pouvait pas ignorer le nom du précurseur du Christ, elle qui avait prophétisé le Christ (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31).
[4] Zacharie, prêtre de la classe d’Abia, époux d’Elisabeth, avait été réduit au silence pour n’avoir pas cru à l’annonce de l’Ange : « Moi, je suis Gabriel, qui me tiens devant Dieu, et j’ai été envoyé pour te parler et t’annoncer cette bonne nouvelle. Et voici que tu vas être réduit au silence et sans pouvoir parler jusqu’au jour où ces choses arriveront, pour ce que tu n’as pas cru à mes paroles, lesquelles s’accompliront en leur temps » (évangile selon saint Luc, I 19-20).
[5] Nous ne lui imposons pas nous-mêmes sont nom : il a déjà son nom donné par Dieu, nous le faisons connaître seulement. Les saints méritent de recevoir leur nom de Dieu ; les anges ne font que transmettre ces noms, ils ne les donnent pas eux-mêmes. Il apparaît bien que ce sera là non pas un nom de parenté, mais de prophétie (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31 & 32).
[6] Il aurait été contradictoire qu’à l’apparition de celui qui devait être la voix, son père demeurât muet (saint Grégoire de Nazianze : discours XII).
Cette bouche avait été fermée par l’Ange; elle est ouverte par le fils qui avait été promis par l’Ange (saint Maxime de Turin : homélie LXV).
Il convenait que la foi déliât cette langue qui avait été liée par l’incrédulité. Croyons, nous aussi, et notre langue qui demeure embarrassée tant que nous sommes dans les liens de l’incrédulité, saura trouver des paroles pleines de raison. Si nous voulons savoir parler, sachons écrire en esprit les mystères de Dieu : sachons écrire non sur des tablettes, mais dans nos cœurs, tout ce qui annonce le Christ (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 32).
[7] Maintenant encore l’Eglise célèbre cette naissance ; elle ne célèbre que trois naissances, celle du Fils de Dieu, celle de sa mère et celle-ci ; elle sait « que pour l’homme le jour de la mort est meilleur que celui de sa naissance », et que toute naissance humaine est accompagnée de tristesse. C’est pourquoi elle célèbre la mort des martyrs qu’elle appelle leur naissance, car ils naissent vraiment à la vie quand ils se dépouillent de la vie pour le Christ. Mais cette naissance de Jean, l’Eglise la célèbre avec assurance sur la parole si expresse de l’Ange (saint Pierre Damien : sermon XXIII, sur la nativité de saint Jean-Baptiste, 4).
[8] Voyez comme Dieu est bon et comme il pardonne complètement : non seulement il rend ce qu’il avait pris, mais il accorde des faveurs que l’on ne pouvait espérer. Cet homme, tout à l’heure muet, prophétise; ceux qui auront renié Dieu, sous l’action des grâces nouvelles, le loueront. Que personne donc ne perde confiance; que personne, au souvenir des fautes anciennes, ne désespère des dons de Dieu. Dieu sait changer ses jugements, si vous savez renoncer à vos fautes (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 33).
[9] Ce cantique contient deux prophéties : l’une relative au Christ, l’autre à Jean. La première est exprimée dans ces paroles qui annoncent la chose comme déjà présente : « Dieu a visité. » Celle qui a rapport au Précurseur sera annoncée tout à l’heure au futur (Origène : homélie X sur l’évangile selon saint Luc).
[10] Ce peuple qu’il a visité, c’est cette nation qui depuis si longtemps portait le nom de peuple de Dieu, et qui depuis longtemps semblait abandonnée de Dieu. C’était aussi ce peuple qui, dans le monde entier, gémissait sous le joug du péché et que le sang du Sauveur allait racheter et dont il allait faire son peuple par cette rédemption (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[11] Je pense qu’Abraham, Isaac et Jacob, au jour de l’avènement du Christ, ont joui des effets de sa miséricorde; il n’est pas possible que ceux qui avaient vu de loin son jour et en avaient eu une grande joie, n’aient pas eu une joie plus grande au jour où vint celui dont il est dit, « qu’il a, par le sang de sa croix, fait la paix et sur la terre et dans le ciel » (Origène : homélie X sur l’évangile selon saint Luc).
[12] Toutes les Ecritures de l’ancienne Loi avaient eu pour objet le Christ ; Adam lui-même et tous les patriarches après lui, par leurs paroles ou par leurs actes, avaient rendu témoignage de cette économie qui préparait le Christ (saint Bède le Vénérable).
[13] Nos ennemis sont aussi nos convoitises, qui nous font la guerre dans nos membres, et nos péchés qui nous accablent, et nos faiblesses qui nous tuent, et les terreurs de la conscience qui ne nous laissent aucun repos (Bossuet).
[14] Non plus dans la justice charnelle des Juifs qui mettaient leur confiance dans les victimes et les observances de la Loi, mais dans une justice spirituelle, se traduisant en œuvres bonnes : dans la sainteté qui nous rend dignes de Dieu, et dans la justice qui nous fait accomplir tous nos devoirs envers le prochain; non plus dans une justice extérieure, comme est celle des hommes qui cherchent à plaire aux hommes, mais dans une justice qui agit devant Dieu, qui cherche non l’approbation des hommes, mais celle de Dieu; et cela non pas une fois ou pour un temps, mais tous les jours de la vie (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[15] L’ombre de la mort c’est l’oubli envahissant l’âme : de même que la mort met un abîme entre le mort et les régions de la vie, de même l’oubli entre l’âme et l’objet qui s’est éloigné de son souvenir : le peuple juif, ayant oublié Dieu, était dans la mort par rapport à Dieu (saint Grégoire le Grand : « Moralia in Job », XVI 30).
[16] Nous dressons nos pas dans le chemin de la paix quand le mouvement de nos actes est toujours en accord avec la grâce de notre Créateur (saint Grégoire le Grand : homélie XXXIII sur les péricopes évangéliques, 4).
[17] Il y a des hommes qui cultivent en eux la vigueur corporelle pour être vainqueurs dans les combats : l’athlète de Dieu se fortifiait dans l’esprit pour briser la puissance de la chair (Origène : homélie XI sur l’évangile selon saint Luc).
MÉDITATION ET HISTORIQUE
L’Église célèbre la naissance du Sauveur au solstice d’hiver et celle de Jean-Baptiste au solstice d’été. Ces deux fêtes, séparées l’une de l’autre par un intervalle de six mois, appartiennent au cycle de l’Incarnation ; elles sont, par leur objet, dans une mutuelle dépendance ; à cause de ces relations, on peut leur donner le même titre, c’est en latin : nativitas, naissance ; natalis dies, Noël.
Pourquoi célébrer la naissance de Jean-Baptiste, se demande saint Augustin, dans un sermon qui se lit à l’office nocturne ? La célébration de l’entrée de Jésus-Christ dans ce monde s’explique fort bien ; mais les hommes – et Jean-Baptiste en est un – sont d’une condition différente ; s’ils deviennent des saints, leur fête est plutôt celle de leur mort : leur labeur est consommé, leurs mérites sont acquis ; après avoir remporté la victoire sur le monde, ils inaugurent une vie nouvelle qui durera toute l’éternité. Saint Jean-Baptiste est le seul à qui soit réservé cet honneur ; et cela dès le cinquième siècle, car la nativité de la Vierge Marie ne fut instituée que beaucoup plus tard. Ce privilège est fondé sur ce fait que Jean a été sanctifié dès le sein de sa mère Élisabeth, quand elle reçut la visite de Marie sa cousine ; il se trouva délivré du péché originel ; sa naissance fut sainte, on peut donc la célébrer. C’est un homme à part, il n’est inférieur à personne, non surrexit inter natos mulierum major Jobanne Baptista. L’ange Gabriel vint annoncer sa naissance, son nom et sa mission, nous dit saint Maxime, dans une leçon de l’octave ; sa naissance merveilleuse a été suivie d’une existence admirable, qu’un glorieux trépas a couronnée ; l’Esprit Saint l’a prophétisé, un ange l’a annoncé, le Seigneur a célébré ses louanges, la gloire éternelle d’une sainte mort l’a consacré. Pour ces motifs, l’Église du Christ se réjouit dans tout l’univers de la naissance du témoin qui signala aux mortels la présence de celui par lequel leur arrivent les joies de l’éternité.
Saint Augustin, qui s’appliquait à découvrir les raisons mystérieuses des événements, a voulu savoir pourquoi Jésus-Christ est né à l’équinoxe d’hiver et Jean-Baptiste à celui d’été. Dans le sermon du quatrième jour dans l’octave, il nous propose ce qu’il a découvert : Jean est un homme, le Christ est Dieu. Que l’homme se fasse petit, pour que Dieu apparaisse plus grand, suivant ces paroles dites par Jean au sujet du Sauveur : il faut qu’il croisse et que moi, je diminue. Pour que l’homme soit abaissé, Jean naît aujourd’hui, où les jours commencent à diminuer ; pour que Dieu soit exalté, le Christ naît au moment où les jours commencent à grandir. tout cela est très mystérieux. La naissance de Jean-Baptiste, que nous célébrons, est, comme celle du Sauveur, pleine de mystère. Quel est ce mystère, si ce n’est celui de notre humiliation, comme la naissance du Christ est pleine du mystère de notre élévation.
Ces témoignages de saint Maxime et de saint Augustin prouvent que cette fête est l’une des plus anciennes du calendrier. Sa célébration est constatée dès le milieu du quatrième siècle. Elle a déjà sa place parmi les solennités importantes ; on lui donna bientôt une octave et une vigile et elle traversa le moyen âge avec ce complément.
Les Pères du Concile de Bâle, dans leur quarante-troisième session (1441), firent suivre son octave d’une fête nouvelle, la Visitation, et Eugène IV eut soin de confirmer plus tard cette mesure. Ce n’est pas le Concile de Bâle, il est vrai, qui établit cette fête, il n’eut qu’à la fixer au 2 juillet ; son institution remonte au pontificat d’Urbain VI qui espérait, par ce moyen, appeler la protection de Notre Dame sur l’Église menacée d’un nouveau schisme ; la bulle qui lui assignait un jour après l’Annonciation fut promulguée par Boniface IX (1389).
Le Noël d’été a, comme celui d’hiver, son cortège liturgique. Sa vigile est une réduction de l’Avent : L’Église présente à nos réflexions le récit évangélique de la mission de l’ange Gabriel auprès de Zacharie, pour lui prédire la naissance d’un enfant : l’envoyé céleste lui dit qu’il sera grand devant le Seigneur ; l’Esprit Saint le remplira de sa vertu, dès le sein de sa mère ; il convertira un grand nombre de fils d’Israël au Seigneur leur Dieu ; il précédera le Seigneur, dans l’esprit et la vertu d’Élie ; il conciliera aux fils le cœur des pères ; il amènera les incrédules à la prudence des justes ; il préparera au Seigneur un peuple parfait. L’octave de la fête pourrait fort bien être appelée la circoncision de Jean-Baptiste : en ce jour, son père lui donna son nom et il entonna ce Benedictus Dominus Deus Israël que nous chantons tous les jours de l’année, à l’office du matin, en l’honneur de l’Oriens ex alto. La Visitation est, en quelque sorte, l’épiphanie de Jean-Baptiste : il confesse par un tressaillement la manifestation de Jésus, caché dans le sein maternel. Notre Dame chante au Seigneur le Magnificat anima mea Dominum.Ce Noël d’été précède le Noël d’hiver, comme saint Jean-Baptiste est le précurseur de Jésus-Christ ; elle l’annonce ; nous le verrons paraître quand le soleil sera au terme de ses diminutions.
L’objet historique de la fête et la doctrine qui l’éclaire sont exposés par saint Luc, au chapitre premier de son Évangile. Les trois passages qui nous intéressent sont lus aux messes de la vigile, de la Nativité et de la Visitation ; il est nécessaire d’y ajouter quelques lignes de l’évangile de saint Jean, qui termine la messe : Fuit homo missus a Deo, cui nomen erat Johannes ; his venit in testimonium, ut testimonium perbiberet de lumine, ut omnes crederent per illum ; non erat ille lux, sed ut testimonium perbiret de lumine. Il est le témoin, le précurseur, la voix de Dieu…
Une mission de ce caractère n’a pu échapper aux Prophètes de l’Ancien Testament ; il faut nous attendre à trouver, sous leur plume, des figures lumineuses qui aident à la saisir. Le plus expressif est Jérémie. Le début de sa prophétie s’applique aussi bien à saint Jean-Baptiste qu’à lui-même ; l’analogie est frappante ; il n’y a qu’à le reproduire et chacun, à première vue, pourra s’en convaincre : La parole du Seigneur s’est fait entendre ; il me disait : Je te connaissais avant de te former dans le sein de ta mère ; je t’ai sanctifié avant que tu en sortes ; je t’ai choisi pour être mon prophète devant les nations. Et j’ai bégayé, A, a, a, Seigneur, mon Dieu ; mais je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant. Et le reste. L’Église fait lire Jérémie aux matines de la fête et à la messe de la vigile. L’épître du jour est empruntée à Isaïe ; c’est de Jean-Baptiste qu’il écrit : Que les îles écoutent ; peuples éloignés, faites attention. Le Seigneur m’a appelé, il s’est souvenu de mon nom dès le sein de ma mère. Il a fait de ma langue un glaive aigu ; il m’a protégé de l’ombre de sa main ; il m’a pris comme une flèche de son choix et il m’a caché dans son carquois… Le Seigneur, qui a fait de moi son serviteur dès le sein maternel, me dit : Je t’ai donné aux nations comme leur lumière pour que tu sois mon salut jusqu’aux extrémités de la terre.
Ces lectures fournissent le texte des antiennes et des répons : l’introït et le graduel enferment, dans leur mélodie, ce que Jérémie et Isaïe ont pu dire de la sanctification de Jean-Baptiste avant sa naissance ; le verset alleluiatique et la communion répètent cette déclaration de Zacharie devant le berceau et les langes de son enfant : Tu, puer, Propheta altissimi vocaberis ; prœibis enim ante faciem Domini parare vias ejus. Tu t’appelleras, enfant, le prophète du Très-Haut ; tu iras devant la face du Seigneur pour lui préparer les voies. Nous retrouvons ces mêmes paroles aux offices du jour et de la nuit : les antiennes, qui accompagnent les psaumes de vêpres, de matines ou de laudes, sont tirées de l’Évangile et des prophètes. Les unes prennent les traits principaux du récit et le reconstituent ; par exemple, celles des laudes et des secondes vêpres : Élisabeth Zachariæ magnum virum genuit, Jobannem prœcursorem Domini, c’est l’annonce de l’événement ; de là, nous passons à la circoncision et à la tradition du nom : Innuebant patri ejus, quem vellet vocari eum ; et scripsit, dicens : Joannes est nomen ejus ; la troisième revient sur la même pensée ; après quoi, il semble que nous soyons mis en présence de l’enfant et, en le saluant nous ne pouvons que lui rendre les témoignages contenus dans l’Évangile : Inter natos mulierum non surrexit major Jobanne Baptista. Les antiennes des premières vêpres traduisent les mêmes impressions et empruntent leurs formules aux mêmes sources : le peuple chrétien se représente la scène et s’approprie les sentiments et le langage de ceux qui remplissent un rôle actif ; avec eux, il dit de Jean : Ipse præbit ante illum in spiritu et virtute Eliæ – Joannes est nomen ejus ; vinum et siceram non bibet. – Ex utero senectutis et sterili Joannes natus est præcursor Domini. Je ne dis rien des antiennes de matines : elles ont ce même caractère. Pendant que l’âme s’applique à suivre le sens des psaumes, l’imagination est occupée par ces souvenirs ; cela ne lui damande guère d’effort ; elle est paisible ; l’esprit, qui reçoit ses impulsions, découvre dans la psalmodie, à la faveur d’aperçus auxquels il n’aurait jamais songé de lui-même, des allusions ingénieuses à la solennité ; la pensée de saint Jean apparaît partout.
Les observations faites au sujet des antiennes valent pour les répons ; on s’exposerait, en les citant, à des répétitions inutiles : ils transportent, dans le chant, des textes connus déjà ; je n’en reproduirai qu’un, d’une facture assez originale. Hic est præcursor dilectus, voici le précurseur bien-aimé, et lucerna lucens ante dominum, et la lumière qui brille devant le Seigneur. Ipse est enim Joannes, qui viam Domino preparavit in eremo, c’est Jean qui a préparé au Seigneur la voie dans le désert, sed et Agnum Dei demonstravit et illuminavit mentes hominum, il a montré l’agneau de Dieu et éclairé l’esprit des hommes. Ipse præibit ante illum in spiritu et virtute Eliæ. En résumé, les antiennes et les répons ne font que répéter ce que l’Évangile présente de saillant ; ces traits sont de nature à pénétrer l’âme de la mission du précurseur et de son importance ; ils accroissent, par leur répétition même, l’admiration pour son caractère et sa personne ; son souvenir prend vie dans le cœur.
L’Ange Gabriel avait annoncé à Zacharie que la naissance de Jean serait, pour un grand nombre, une occasion de joie, multi in nativitate ejus gaudebunt. En souvenir de cette prophétie, sa fête est joyeuse ; elle a pour signe caractéristique une allégresse qui ne se trouve pas ailleurs. L’Église invite les fidèles à s’y abandonner ; il lui suffit de leur répéter, par ses antiennes, les paroles de Gabriel. Mais la piété chrétienne ne s’est pas contentée du chant liturgique pour manifester sa joie ; elle a emprunté, en les transformant, les usages par lesquels les païens célébraient le solstice : on sait que l’instinct qui portait ces derniers à substituer, dans leur vénération religieuse, les forces créées de la nature à leur auteur, les faisait rendre un culte au soleil et au feu dont il est le grand foyer ; leur dévotion s’épanchait en manifestations bruyantes, au moment des équinoxes ; les fêtes, qui bénéficiaient d’une popularité extraordinaire, consistaient surtout en des réjouissances publiques ; la principale était d’allumer de grands feux autour desquels dansait la population. Le paganisme grec et romain avait eu l’art de mêler ainsi son culte à la vie extérieure des peuples, et c’est ce qui contribua le plus à le faire entrer dans les mœurs, si profondément même que ces coutumes ont survécu au paganisme.
Il y avait là, pour les chrétiens, un véritable danger ; tout le monde prenait part à ces réjouissances, qui en elles-mêmes n’avaient rien de condamnable. Mais les circonstances, en les liant à une superstition, les mettaient au service du paganisme naturaliste ; c’était un entraînement auquel on résistait fort mal. Tertullien, le premier, dénonça les chrétiens impudents, qui ne craignaient pas de célébrer ainsi les calendes de janvier, les brumalies et les saturnales. La conversion de l’Empire laissa leur popularité aux réjouissances solsticiales dans l’Afrique romaine, à Rome et dans les Gaules. Les évêques voyaient ce fait avec mécontentement ; saint augustin protestait avec énergie. Habeamus solemnem istum diem, disait-il, non sicut infideles, prpter hunc solem, sed propter eum qui fecit hunc solem, solennisons ce jour, non comme des infidèles, à cause du soleil, mais à cause de celui qui a fait le soleil. Saint Césaire proscrivit, pour les mêmes motifs, ces survivances païennes ; l’évêque franc, auteur des sermons qui nous sont parvenus sous le nom de saint Éloi, défend aux chrétiens de célébrer les solstices par des danses, des caroles et des chants diaboliques. Mais la fidélité aux superstitions pyrolatriques était tenace ; les évêques ne purent en avoir raison. C’est en vain que Charlemagne leur recommanda, par un capitulaire, de proscrire de nouveau ces feux sacrilèges et ces usages païens ; il fallut en prendre son parti et chercher à transformer, par une intention pieuse, l’abus qu’on ne pouvait supprimer. Cette évolution se produisit l’abus qu’on ne pouvait supprimer. Cette évolution se produisit dans le cours du neuvième siècle : on s’apercevait enfin qu’un retour offensif du paganisme n’était plus à craindre ; il était donc inutile de se prémunir contre un ennemi définitivement vaincu.
La réaction contre les pagania solsticiales avait sans nul doute accru la note joyeuse de la fête de saint Jean-Baptiste. Cette joie spirituelle, par son charme, contribuait à détourner les chrétiens de ces réjouissances profanes ; elle servit à ménager l’évolution, qui débarrassa ces dernières de toute pensée superstitieuses, en les associant à la fête de saint Jean-Baptiste. Le solstice d’été tomba dans l’oubli ; les feux furent allumés pour manifester la joie que la naissance du Précurseur causait au monde ; le feu devint ecclésiastique : le clergé alla processionnellement le bénir ; la Jouannée, ainsi que nos pères la nommaient, resta l’une des fêtes les plus populaires et les bourgeois des villes ne l’appréciaient pas moins que les campagnards.
Les Parisiens, entre autres, étaient amateurs des feux de saint Jean ; ils en allumaient un par quartier. Celui de la Bastille passait pour l’un des mieux réussis, la garnison de la forteresse assistait en armes à son embrasement. Il ne valait pas cependant celui de la place de Grève ; on laissait au roi l’honneur de l’allumer : Louis XI le fit en 1471, François Ier en 1528, Henri II et Catherine de Médicis en 1549, Charles IX en 1573, Henri IV en 1596, Louis XIII en 1615 et 1620, Anne d’Autriche en 1616 et 1618, Louis XIV en 1648 ; à partir de cette date, l’honneur d’allumer le feu revint au conseil de ville.
Les hommes de la Révolution furent incapables de comprendre ces réjouissances et elles disparurent, à Paris du moins, en 1789 ; il en fut de même dans la plupart des villes importantes ; à Douai, où la population tenait à ces feux au point d’en allumer un dans chaque rue, tous les soirs du 23 au 29 juin, la police les interdit en 1793 ; ils furent rallumés en 1795 et les années suivantes jusqu’en 1806, sans tenir compte d’une nouvelle défense promulguée en 1797.
Ces réjouissances populaires et religieuses faisaient entrer le sentiment chrétien dans la vie des villages et des villes ; la religion n’était pas reléguée entre les murailles des sanctuaires ; les hommes la connaissaient, ils l’aimaient comme un élément essentiel de leur existence. Les coutumes auxquelles on avait l’esprit de la mêler transmettaient, avec elles, sa pensée d’une génération à l’autre ; cela pouvait aller fort loin, car ces habitudes populaires sont tenaces. Ce fait n’a pas été toujours compris au dix-neuvième siècle. Ces traditions ont eu fréquemment pour adversaires aveugles des catholiques, qualifiés hommes d’œuvre, et des prêtres, qui ont affecté d’y voir des pratiques superstitieuses. C’est ainsi que les feux de saint Jean se sont éteints peu à peu dans un grand nombre de campagnes ; il est juste de dire que saint Jean-Baptiste n’y a pas gagné un rayon de joie spirituelle ; sa fête passe presque inaperçue ; elle attire certainement beaucoup moins de monde à la messe et à la Sainte Table que le premier vendredi du mois.