UNE ÉGLISE VIVANTE QUI SE CONSTITUE PEU À PEU

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UNE ÉGLISE VIVANTE QUI SE CONSTITUE PEU À PEU

THÉOLOGIE

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À lire les Actes des Apôtres, on découvre une Église vivante qui se constitue peu à peu comme communauté…
À lire les Actes des Apôtres, on découvre une Église vivante qui se constitue peu à peu comme communauté. Non pas un groupe replié sur lui-même, fermé, mais au contraire une communauté ouverte, qui veut partager ce qu’elle a de plus précieux, qui annonce sans réserve Celui qui est au cœur de sa foi. Une communauté qui célèbre les louanges de Dieu pour ce qu’il a fait en Jésus son serviteur, une communauté qui veut vivre de l’Esprit de son Seigneur et maître, Jésus de Nazareth.

Un peuple de témoins
« Ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres » nous dit Luc (Ac 2,42). Quel est donc cet enseignement des apôtres qui retient l’attention des nouveaux croyants ? C’est précisément le témoignage qu’ils rendent à Jésus, annonçant sa résurrection, son mystère pascal et le salut qui est en lui : « cet homme que vous avez livré et supprimé en le faisant crucifier par la main de impies, Dieu l’a ressuscité  en le délivrant des douleurs de la mort » (Ac 2,23-24), déclare Pierre au jour de la Pentecôte. Et les apôtres sont eux-mêmes les « témoins de la résurrection de Jésus », comme le dit Pierre au moment de l’élection de Matthias comme douzième apôtre, pour compléter le groupe défait par la trahison de Judas (Ac 1,22).
Et leur témoignage concerne Jésus, vivante Parole de Dieu, messie promis et manifesté pour la délivrance de son peuple : « C’est lui la pierre que, vous, les bâtisseurs, aviez mise au rebut et qui est devenue la pierre angulaire. Il n’y a aucun salut ailleurs qu’en lui ; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom offert aux hommes qui soit nécessaire à notre salut », dit encore l’apôtre Pierre après la guérison de l’infirme de la Belle Porte du Temple (Ac 4,11-12).
Aujourd’hui encore, l’Église est ce peuple rassemblé par la Parole qui est le Christ. C’est le sens même du mot grec « ekklesia » qui signifie « assemblée » et que traduit notre mot « Église ». Et chaque dimanche, à l’eucharistie, nous commençons par nous rassembler pour écouter la Parole, pour entendre son message, actualisé par l’homélie d’un diacre ou d’un prêtre, qui prolonge ainsi l’enseignement des apôtres, car l’un et l’autre sont liés au ministère de l’Évêque, successeur des apôtres.
C’est ainsi que l’Église se constitue comme le peuple des témoins de Jésus, le peuple de prophètes qui répand dans le monde et pour lui la Bonne Nouvelle du ressuscité. L’Église découvre alors que, depuis le jour de la Pentecôte, elle « existe pour évangéliser » (Paul VI, Annoncer l’Évangile aux hommes de ce temps n°14, 1975). 

Un peuple de frères et de sœurs
« ils étaient assidus à la communion fraternelle », dit Luc. L’insistance de Luc est grande dans les Actes des Apôtres sur cette fraternité nouvelle qui constitue la communauté chrétienne : « Ils mettaient tout en commun » (2, 44), « ils vendaient leurs propriétés et leurs biens pour en partager le prix entre tous, selon les besoins de chacun » (2,45), « nul ne considérait comme sa propriété l’un quelconque de ses biens, ils mettaient tout en commun » (4,32).
Cette fraternité ne se fonde pas seulement dans un désir solidaire de partage, elle se fonde en Jésus lui-même. En révélant à ses disciples que Dieu est Père, son Père et leur Père (Jn 20,17), Jésus leur découvre qu’ils sont tous frères et que Dieu ne fait pas de différence entre les êtres humains (Ac 10,34). Le baptême qui plonge les croyants dans la mort et la résurrection de Jésus fait donc d’eux des fils mais aussi des frères, qui doivent vivre de l’amour même de Jésus, selon sa parole : « Je vous donne un commandement nouveau :  aimez-vous les uns les autres. Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. À ceci tous vous reconnaîtront pour mes disciples : à l’amour que vous aurez les uns pour les autres. » (Jn 13,34-35)
L’Église du Christ ne cesse pas de vivre cette dimension du service, de la « diaconie », comme le cœur de son être. Au XXe siècle, elle a redécouvert avec le concile Vatican II la grandeur du sacerdoce commun des fidèles, qui lie tous les baptisés en un seul corps, en une seule fraternité, avant de poser les différences qui la structurent : « si donc, dans l’Église, tous ne marchent pas par le même chemin, tous, cependant, sont appelés à la sainteté et ont reçu à titre égal la foi qui introduit dans la justice de Dieu. Même si certains, par la volonté du Christ, sont institués docteurs, dispensateurs des mystères et pasteurs pour le bien des autres, cependant, quant à la dignité et à l’activité commune à tous les fidèles dans l’édification du corps du Christ, il règne entre tous une véritable égalité » (Vatican II, constitution Lumen Gentium, n°32). Cette fraternité, fondée en Jésus, le Fils qui nous fait fils avec lui, l’Église se doit de l’annoncer et la vivre dans de vraies communautés qui mettent en œuvre le sens du partage, entre ses membres mais aussi avec tous ceux qui sont démunis.

Un peuple de prêtres
« Ils étaient assidus à la fraction du pain et aux prières ». La fraction du pain dont parle St Luc, c’est le geste de Jésus devant les pèlerins d’Emmaüs, c’est le signe de reconnaissance du Ressuscité (Lc 24,35). Désormais, chaque dimanche, la communauté chrétienne célèbre le repas du Seigneur, manifestant ainsi qu’il est vivant et que c’est lui qui préside la communauté des siens. Très vite, les chrétiens, grâce à St Paul, prendront conscience qu’ils sont ensemble le corps du Christ ressuscité, animé par son Esprit.
En célébrant le repas du Seigneur, l’Église fait donc mémoire du mystère pascal de Jésus, elle offre sa vie donnée une fois pour toutes pour la réconciliation des hommes avec Dieu. Et même si les chrétiens de Jérusalem fréquentent encore assidûment le Temple pour les prières quotidiennes, le culte nouveau s’est tourné désormais vers Jésus lui-même. C’est lui, grand prêtre de l’alliance nouvelle, qui fait participer tout son peuple à son sacerdoce saint en même temps qu’il appelle certains au sacerdoce ministériel, comme prêtres, pour le service du peuple sacerdotal (Lumen Gentium, n°10). Ainsi l’Église est-elle le peuple de Dieu, un peuple de prêtres, de priants, chargé de chanter la louange du Seigneur, chargé aussi d’intercéder en faveur de tous les hommes par le nom de Jésus.
L’eucharistie, l’action de grâce de Jésus à son Père, apparaît ainsi le lieu « source » de l’Église en même temps que le « sommet de son action », selon la formule du Père Henri de Lubac. Née de l’eau et du sang qui coulent du côté ouvert de Jésus en croix (Jn 19,34), l’Église devient vraiment le corps du Christ, le corps dont Jésus Ressuscité est la tête et c’est de lui qu’elle reçoit toute sa vie, dans le pain de la Parole et dans le pain eucharistique. Nourris par cette vie, les chrétiens peuvent alors devenir eux-mêmes louange et action de grâce au Père, à la suite de Jésus et avec lui, ils peuvent s’offrir eux-mêmes en « sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu », selon la recommandation de St Paul (Rm 12, 1).
Communauté de la Parole, du partage et de la prière, peuple qui vit le témoignage, le service et la communion, telle nous apparaît l’Église au commencement de son histoire. C’est toujours à cette source du ministère de Jésus lui-même qu’elle puise aujourd’hui encore sa vie, pour annoncer aux hommes de ce temps la Bonne Nouvelle de Jésus, pour célébrer en son nom l’action de grâce de l’alliance nouvelle et éternelle, pour aimer comme il nous a aimés, pour servir comme lui.

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