DIMANCHE 5 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – PREMIERE LECTURE – Actes 15, 1-2. 22-29
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DIMANCHE 5 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT
PREMIERE LECTURE – Actes 15, 1-2. 22-29
1 Certaines gens venus de Judée
voulaient endoctriner les frères d’Antioche
en leur disant :
« Si vous ne recevez pas la circoncision
selon la loi de Moïse,
vous ne pouvez pas être sauvés. »
2 Cela provoqua un conflit et des discussions assez graves
entre ces gens-là et Paul et Barnabé.
Alors on décida que Paul et Barnabé,
avec quelques autres frères,
monteraient à Jérusalem auprès des Apôtres et des Anciens
pour discuter de cette question.
22 Finalement, les Apôtres et les Anciens
décidèrent, avec toute l’Eglise,
de choisir parmi eux
des hommes qu’ils enverraient à Antioche avec Paul et Barnabé.
C’étaient des hommes
qui avaient de l’autorité parmi les frères ;
Jude (appelé aussi Barsabbas), et Silas.
23 Voici la lettre qu’ils leur confièrent :
« Les Apôtres et les Anciens saluent fraternellement
les païens convertis, leurs frères,
qui résident à Antioche, en Syrie et en Cilicie.
24 Nous avons appris que quelques-uns des nôtres,
sans aucun mandat de notre part,
sont allés tenir des propos
qui ont jeté chez vous le trouble et le désarroi.
25 Nous avons décidé à l’unanimité
de choisir des hommes que nous enverrions chez vous,
avec nos frères bien-aimés Barnabé et Paul,
26 qui ont consacré leur vie
à la cause de Notre Seigneur Jésus-Christ.
27 Nous vous envoyons donc Jude et Silas
qui vous confirmeront de vive voix ce qui suit :
28 L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé
de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations
que celles-ci, qui s’imposent :
29 vous abstenir de manger
des aliments offerts aux idoles,
du sang, ou de la viande non saignée,
et vous abstenir des unions illégitimes.
En évitant cela, vous agirez bien.
Courage ! »
Nous avons déjà entendu parler de la communauté d’Antioche de Syrie dans les textes des dimanches précédents… aujourd’hui, nous la trouvons affrontée à une crise grave : on est vers l’an 50 de notre ère ; dès le début, à Antioche, il y a eu des chrétiens d’origine juive et des chrétiens d’origine païenne ; mais peu à peu, entre eux, la cohabitation est devenue de plus en plus difficile : leurs modes de vie sont trop différents. Non seulement, les chrétiens d’origine juive sont circoncis et considèrent comme des païens ceux qui ne le sont pas ; mais plus grave encore, tout les oppose dans la vie quotidienne, à cause de la multiplicité des pratiques juives auxquelles les chrétiens d’origine païenne n’ont aucune envie de s’astreindre : de nombreuses règles de purification, d’ablutions et surtout des règles très strictes concernant la nourriture.
Et voilà qu’un jour des Chrétiens d’origine juive sont venus tout exprès de Jérusalem pour envenimer la querelle en expliquant qu’on ne doit admettre au baptême chrétien que des Juifs ; concrètement, les païens sont priés de se faire Juifs d’abord, (circoncision comprise) avant de devenir Chrétiens.
Derrière cette querelle, il y a au moins trois enjeux : premièrement, faut-il viser l’uniformité ? Pour vivre l’unité, la communion, faut-il avoir les mêmes idées, les mêmes rites, les mêmes pratiques ?
Le deuxième enjeu est une question de fidélité : tous ces chrétiens, de toutes origines, souhaitent rester fidèles à Jésus-Christ, c’est évident !… Mais, concrètement, en quoi consiste la fidélité à Jésus-Christ ? Jésus-Christ lui-même était juif et circoncis : cela veut-il dire que pour devenir Chrétien il faut d’abord devenir Juif comme lui ?
Il est vrai aussi que les tout premiers Chrétiens sont tous des Juifs. Puisque les apôtres choisis par le Christ étaient tous juifs… et même, pour aller plus loin, ils étaient tous originaires de Galilée… On ne va pas restreindre l’annonce de l’Evangile aux Galiléens pour autant… c’est une évidence !
On ne va pas la restreindre aux Juifs de naissance, non plus… d’ailleurs, la question est déjà tranchée à Antioche. Certains chrétiens sont d’origine païenne, on l’a déjà vu. Mais ces chrétiens d’origine païenne, peut-être faudrait-il les initier d’abord au judaïsme pour ensuite en faire des Chrétiens ? Concrètement, cela veut dire qu’on accepterait de baptiser des païens, mais à condition qu’ils adhèrent d’abord à la religion juive et qu’ils se fassent circoncire.
Oui, mais on peut tenir un autre raisonnement : Jésus-Christ a agi de telle manière, dans les circonstances où il se trouvait ; dans d’autres circonstances, il aurait agi différemment ; par exemple, lui qui était galiléen s’est entouré de Galiléens, mais ce n’est pas une condition pour devenir Chrétien.
La décision prise à l’époque, à Jérusalem, nous venons de le lire, adoptera cette deuxième façon de voir : être fidèle à Jésus-Christ ne veut pas dire forcément reproduire un modèle figé. Pour le dire autrement, fidélité n’est pas répétition : quand on étudie l’histoire de l’Eglise, on est émerveillé justement de la faculté d’adaptation qu’elle a su déployer pour rester fidèle à son Seigneur à travers les fluctuations de l’histoire !
Enfin, il y a un troisième enjeu, plus grave encore : le salut est-il donné par Dieu sans conditions, oui ou non ? « Si vous ne recevez pas la circoncision, vous ne pouvez pas être sauvés », c’est ce qu’on commence à entendre dire à Antioche : cela voudrait dire que Dieu lui-même ne peut pas sauver des non-Juifs… cela voudrait dire que c’est nous qui décidons à la place de Dieu qui peut ou ne peut pas être sauvé… cela voudrait dire enfin que la foi en Jésus-Christ ne suffit pas ? Mais pourtant Jésus lui-même a bien dit « celui qui croira et sera baptisé sera sauvé » ; il n’a pas ajouté qu’il fallait en plus être Juif pratiquant et circoncis… et puis, par définition, la grâce, c’est gratuit ! Nous ne pouvons pas ajouter par nous-mêmes des conditions à la grâce de Dieu.
On sait la fin de l’histoire ; les Apôtres prennent une double décision : les Chrétiens d’origine juive ne doivent pas imposer la circoncision et les pratiques juives aux Chrétiens d’origine païenne ; mais de l’autre côté, les Chrétiens d’origine païenne, par respect pour leurs frères d’origine juive, s’abstiendront de ce qui pourrait troubler la vie commune, en particulier pour les repas. Il est très intéressant de remarquer qu’on n’impose à la communauté chrétienne que les règles qui permettent de maintenir la communion fraternelle. C’est certainement la meilleure manière d’être vraiment fidèle à Jésus-Christ : lui qui a dit « c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on vous reconnaîtra pour mes disciples » (Jn 13, 35).
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Compléments
Ces questions autour de la circoncision et des pratiques de la loi juive peuvent paraître d’un autre âge : sommes-nous vraiment concernés ?
Oui, car la question de fond autour de la grâce est toujours d’actualité ; nous avons toujours besoin de nous réentendre dire que la grâce est gratuite : c’est le sens même de ce mot ! Cela veut dire que Dieu ne fait jamais de comptes avec nous !
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