DIETRICH BONHOEFFER – 1906- 1945 – mort le 9 avril 1945 au camp de concentration de Flossenbürg

http://www.erf-auteuil.org/protestantisme/dietrich-bonhoeffer.html

DIETRICH BONHOEFFER – 1906- 1945

Dietrich Bonhoeffer, né le 4 février 1906 à Breslau (aujourd’hui Wrocław), mort le 9 avril 1945 au camp de concentration de Flossenbürg, en Bavière, près de l’actuelle frontière germano-tchèque, est un pasteur luthérien évangélique, théologien, écrivain et résistant au nazisme.
(extrait du Wikipedia)

1906-1945

Les grandes figures du Protestantisme n°6

Dietrich Bonhoeffer chercha sa route en un cheminement douloureux qui le mena, de la lutte pour la liberté de l’Eglise, à l’engagement politique. En 1939, à la sécurité douillette de l’asile américain, il préféra retourner en Allemagne.  » Je dois traverser cette période difficile de notre histoire nationale avec les chrétiens d’Allemagne  » expliqua-t-il. Privé de sa chair à l’Université, puis interdit de parole à l’Eglise, à cause de ses prises de position contre le nazisme, arrêté en 1943, traîné de prison en camp de concentration, Bonhoeffer fut condamné à la pendaison pour conspiration contre le régime. La sentence fut exécutée le 9 avril 1945. Il avait à peine 39 ans. Le matin de son exécution, il fit un culte, à la demande de se camarades. Ensuite, on vint le chercher pour l’emmener au gibet ; il eut juste le temps d’écrire au crayon son nom et son adresse dans son Plutarque, à la première et à la dernière page, et sur une page du milieu. C’était le dernier ouvrage qu’il avait demandé et reçu.
 » Le Prix de la Grâce  » et  » De la vie communautaire  » sont fortement marqués par sa théologie, axée sur le christocentrisme et la réhabilitation de l’Eglise visible – Eglise responsable qui doit inviter le chrétien non à se tourner vers un  » monde meilleur  » à venir, ce qui est fuite vers l’éternité, mais à trouver par lui-même la solution à ses problèmes : l’Eglise et le chrétien appartiennent pleinement au monde.
Du chrétien, Bonhoeffer réclame une vie de discipline, dans l’obéissance au Christ. Dans Le Prix de la Grâce, il tonne contre l’apathie de ses contemporains, leur abandon à tout effort, leur refus de la contrainte, leur paresse à se réformer :  » La grâce à bon marché, c’est la grâce considérée comme une marchandise à liquider, le pardon au rabais, le consolation au rabais, le sacrement au rabais ; la grâce servant de magasin intarissable à l’Eglise où des mains inconsidérées puisent pour distribuer sans hésitation ni limite ; la grâce non tarifée, la grâce qui ne coûte rien […]. La grâce à bon marché, c’est la grâce que n’accompagne pas l’obéissance, la grâce sans la croix, la grâce abstraction faite de Jésus-Christ vivant et incarné « . La grâce coûte cher, dit-il encore,  » parce qu’elle contraint l’homme à se soumettre au joug de l’obéissance à Jésus-Christ « .
De même qu’il refusa cette  » ennemie mortelle de notre Eglise  » qu’est la grâce à bon marché, il rejeta l’image d’un Dieu  » d’émotions sentimentales « , qu’il opposait à celle d’un Dieu de vérité. Dénonçant la fraternité chrétienne prise comme communauté rêvée pieuse, il écrit dans De la vie communautaire :  » Dieu hait la rêverie pieuse, car elle fait de nous des êtres durs et prétentieux. Elle nous fait exiger l’impossible de Dieu, des autres et de nous-même. Au nom de notre rêve, nous posons à l’Eglise des conditions et nous nous érigeons en juges sur nos frères et sur Dieu lui-même « . De ce fait, quand les choses ne vont pas, quand le rêve se brise, nous accusons nos frères, puis Dieu, et puis,  » en désespoir de cause, c’est contre nous-mêmes que se tourne notre amertume « .
Assurément, cette autonomie du chrétien ne doit pas être comprise comme une liberté orgueilleuse de l’homme, mais comme la liberté humble qui est celle du disciple du Christ. Le fondement de la pensée du théologien allemand est christologique ; ce qu’il veut souligner, c’est le rapport indissoluble de Dieu et du réel et il démontre que c’est en Jésus-Christ que s’offre à l’homme la possibilité d’avoir part à la réalité de Dieu et du monde. Bonhoeffer proclame cette  » majorité  » de l’homme au nom du Christ crucifié et ressuscité : le crucifié est celui qui libère, dirige et renouvelle la  » vraie mondanité « , c’est-à-dire ce qui est authentiquement d’ici-bas.
Du fond de sa prison, il allait développer dialectiquement sa théologie du monde adulte – d’où l’ambivalence de sa pensée. L’unité paradoxale de la théologie de la croix et celle de l’âge adulte y est en tout cas nettement exprimée :  » l’age adulte, dit-il, n’est plus maintenant un motif de polémique et d’apologétique, mais on le comprend effectivement beaucoup mieux qu’il ne se comprend lui-même à partir de l’Evangile et du Christ « . Et dans son célèbre texte du 16 juillet 1944, il explique :  » En devenant majeurs, nous sommes amenés à reconnaître réellement notre situation devant Dieu. Dieu nous fait savoir qu’il nous faut vivre en tant qu’hommes qui parviennent à vivre sans Dieu. Le Dieu qui est avec nous est celui qui nous abandonne (Marc 15, 34) !  » Et encore :  » On peut dire que l’évolution du monde vers l’âge adulte, faisant table rase d’une fausse image de Dieu, libère le regard de l’homme pour le diriger vers le Dieu de la Bible qui acquiert sa puissance et sa place dans le monde par son impuissance.  » On l’aura compris, l’image d’un Dieu faible, et non tout puissant, est celle qu’il emporta avec lui au gibet.
Notons par ailleurs que pour Bonhoeffer, comme d’ailleurs pour Kierkegaard, une christologie doit commencer dans le silence, le silence de l’Eglise devant la Parole.  » Parler du Christ signifie se taire , dit-il ; se taire à propos du Christ signifie parler. Des paroles justes dites par l’Eglise à partir d’un silence juste – voilà la proclamation du Christ  » (Cours donné à l’université de Berlin pendant le semestre d’été 1933).
Il voulait écrire un ouvrage sur l’éthique ; il n’en eut pas le temps. Le livre qui aujourd’hui porte ce titre, Ethique, a été publié après sa mort par son ami Eberhard Bethge. Il se compose de fragments, d’ébauches, d’études rédigés par Bonhoeffer. On aura une idée de l’évolution de la pensée du théologien allemand en comparant le langage d’ « Ethique  » avec celui de  » Résistance et Soumission  » : Ainsi, dans le premier, il écrit :  » Etre chrétien consiste en ceci : l’homme peut et doit vivre en homme devant Dieu  » ; dans le second, il dit :  » Devant Dieu et avec Dieu nous vivons sans Dieu « . Néanmoins, tant  » Le Prix de la Grâce « , œuvre de 1937, que  » Résistance et Soumission « , ses lettres de captivité, se terminent par le motif de l’imitatio *.
Chrétiens et païens
Les hommes vont à Dieu dans leur misère Et demandent du secours, du bonheur et du pain, Demandent d’être sauvés de la maladie, de la faute et de la mort Tous font cela, tous, chrétiens et païens.
Des hommes vont à Dieu dans sa misère, Le trouvent pauvre et méprisé, sans asile et sans pain, Le voient abîmé sous le péché, la faiblesse et la mort ; Les chrétiens sont avec Dieu dans sa Passion
Dieu va vers tous les hommes dansleur misère, Dieu rassasie leur corps et leur âme de son Pain ; Pour les chrétiens et les païens, Dieu souffre la mort de la croix Et son pardon est pour tous, chrétiens et païens.

Résistance et soumission. Lettres et notes de captivité, juillet 1944.

Liliane CRÉTÉ
(*) Imitatio : Dans Le Prix de la Grâce, il écrit :  » L’image de Jésus-Christ que celui qui obéit a sans cesse devant les yeux – à côté de laquelle toutes les autres disparaissent pour lui – pénètre en lui, le remplit, le transforme, afin que le disciple devienne semblable et même en tous points identique à son maître. L’image de Jésus-Christ, par la communion quotidienne, grave l’image du disciple. « 

Laisser un commentaire