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LA VIGILE PASCALE COMME LIEU-SOURCE DES SACREMENTS : APPROCHE HISTORIQUE ET THÉOLOGIQUE
26 mars, 2013http://www.esprit-et-vie.com/breve.php3?id_breve=492
ESPRIT & VIE
FRANCESCO PLATANIA
LA VIGILE PASCALE COMME LIEU-SOURCE DES SACREMENTS : APPROCHE HISTORIQUE ET THÉOLOGIQUE
Existe-t-il un lieu et un temps spécifique pour la célébration de l’initiation chrétienne ? La recherche historique et la réflexion théologique nous proposent simultanément la Vigile pascale comme le sein matriciel de toute liturgie et la célébration par excellence qui résume l’uvre du salut. Une synthèse rapide de cette approche historique nous permettra d’évoquer l’enjeu dégagé par la réforme de ce rituel.
AUX ORIGINES
La Vigile pascale célèbre la mort et la résurrection du Seigneur, le passage du Ressuscité de la mort à la vie. Cette vérité, de l’ordre de la foi, est proclamée solennellement jusqu’à nos jours dans l’une des préfaces du Missel romain : « [Christ] est l’Agneau véritable qui a enlevé le péché du monde : en mourant, il a détruit notre mort ; en ressuscitant, il nous a rendu la vie [1]. »
Depuis le ive siècle, l’œuvre du salut dans sa totalité fut répartie le long des liturgies de la Semaine sainte et du carême, avec des expressions rituelles diverses. Les contenus de la Vigile pascale ont toujours gardé avec force l’idée du salut accompli par la mort et la résurrection du Christ. Le mot utilisé pour indiquer l’action du Christ et la célébration liturgique de cette action est Pâque [2]. Ce mot est présent dans l’Epistula Apostolorum (130-140 ap. J.-C.), qui constitue le plus ancien témoignage d’une fête chrétienne annuelle de Pâque [3].
Dès lors, Pâque reste le nom propre de la Vigile, le cœur de toute la célébration. Le jeûne, le rassemblement de la communauté, les prières, les lectures de l’Ancien et du Nouveau Testament et l’eucharistie suivie d’une agape fraternelle dans la joie du Ressuscité constituent les éléments fondamentaux typiques de la célébration de la Vigile qui se termine au chant du coq [4]. Dès l’époque de Tertullien, la nuit de Pâque devient déjà la grande nuit de l’initiation chrétienne ; cette pratique se généralise aux environs du ive siècle. Les anciens Ordines monastiques prennent en compte la situation réelle de l’absence de catéchumènes et renoncent à tout ce qui, dans la liturgie, concernait les sacrements de l’initiation. À partir du xiiie siècle, face à la disparition généralisée de candidats au baptême pendant la Vigile, les livres liturgiques romains, puis le Missel de saint Pie V, gardent les rites baptismaux et font de la bénédiction de l’eau le sommet de cette liturgie.
La célébration pascale, mémoire du salut offert par Dieu à l’homme, est la fête par excellence, la fête des fêtes et l’expression cultuelle du christianisme en ce qu’il garde d’essentiel. Autrement dit, la Pâque n’est que la fête du Christ car « Christ est notre Pâque ». Les changements survenus au cours des siècles conduisirent à célébrer les événements de la rédemption d’une façon plus historique, tout en gardant la conception primitive.
En Orient comme en Occident, la sainte nuit de Pâque garde son caractère central : elle est le but de toute l’année et de toutes les fêtes de la liturgie de l’Église universelle. En effet, la célébration hebdomadaire de l’eucharistie lui permet de ne pas être seulement anniversaire, souvenir du passé, mais mémorial : accueil et réalisation du salut de Dieu hic et nunc pro nobis ; jour du Seigneur, Pâque hebdomadaire, à la fois premier et huitième jour de la semaine.
Au cours du iiie siècle à Jérusalem, les pèlerins souhaitaient vivre les événements du salut dans les lieux et à l’heure où ils s’étaient passés [5]. Témoin privilégié de ces usages, le Journal de voyage d’Égérie [6]. Ces liturgies de Jérusalem gardent un rôle décisif dans l’organisation des célébrations du Triduum pascal : les chapitres 35 et 36 du Journal de voyage d’Égérie décrivent tout ce qui se passe dans les trois jours mémoriaux de la passion, de la mort et de la résurrection du Seigneur. De telles liturgies restent fondées sur l’unité du mystère pascal, chaque jour rappelant le précédent et s’ouvrant sur le suivant, la Pâque célébrée en trois jours. À la mémoire de la résurrection du Christ, furent unis la mémoire de sa Passion et de sa mort, le Triduum du Christ « crucifié, enseveli et ressuscité » [7]. Aujourd’hui, le Triduum commence par la Missa in Cena Domini, le soir du Jeudi saint, il continue par l’action liturgique de la passion du Seigneur, le soir du Vendredi saint pour trouver son sommet dans la Vigile pascale, au soir du Samedi saint, et s’achever par les vêpres du dimanche de Pâque.
La réforme de la Vigile pascale et de la Semaine sainte (1951 et 1955)
La décision du pape Pie XII fut un acte courageux dans la mesure où il recentrait la chrétienté sur le mystère pascal, pivot de la vie de l’Église et de la vie liturgique. En effet, la restauration de la Vigile pascale, par le décret Dominicæ resurrectionis vigiliam du 9 février 1951, et de la liturgie de la Semaine sainte, par le décret Maxima redemptionis nostra mysteria du 16 novembre 1955, provoquèrent une explosion de joie dans toute l’Église et furent le signal qu’enfin, la liturgie quittait l’aspect d’obligation rubriciste, tant les rites de la Semaine sainte étaient restés figés depuis 1570. Le Triduum sacrum, dans la conscience ecclésiale, représente le centre le plus précieux de toute l’année liturgique par son ancienneté et sa richesse. Nous pouvons donc affirmer que ces décrets de 1951 et de 1955 représentent un pas important dans l’histoire liturgique depuis saint Pie V et avant le concile Vatican II.
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[1] Missel romain : 1978, 482 ; première préface de Pâques.
[2] Après des recherches dans des dictionnaires linguistiques, nous choisissons d’utiliser ici le nom féminin singulier Pâque, issu du latin chrétien pascha, substantif neutre, traité comme un féminin, qui désigne dans son origine la Pâque juive, et par métonymie indique l’agneau pascal et aussi la fête chrétienne. Le mot est emprunté au nom grec neutre de même sens paskha et celui-ci, par l’intermédiaire de l’araméen pashã, à l’hébreu biblique pèsah, que l’on croit dérivé du verbe pãsah : « passer outre, épargner ».
[3] Voir O. Casel, La fête de Pâques dans l’Église des Pères, Paris, Éd. du Cerf, coll. « Lex Orandi », n° 37, 1963, p. 19 s.
[4] Un témoignage de cette habitude est déjà présent dans la Epistula Apostolorum 15, la Didascalia 21 et les Constitutiones Apostolorum 5, 18, 1. En 260, Denis d’Alexandrie témoigne de cet usage dans la Epistula ad Basilidem : voir P.G. 10, 1272.
[5] P. Jounel, « Le dimanche et la semaine », dans A.-G. Martimort, L’Église en prière, IV, « La liturgie et le temps », Paris, Éd. Desclée De Brouwer, 1983, p. 21-41.
[6] P. Maraval, Égérie. Journal de voyage, Paris, Éd. du Cerf, coll. « Sources chrétiennes », n° 296, 1982.
[7] Ces expressions sont déjà présentes vers la fin du ive siècle, utilisées par Ambroise de Milan et Augustin d’Hippone. Voir A. Nocent, « La Semaine sainte dans la liturgie romaine », dans A. G. Kollamparampil (dir.), Hebdomadæ sanctæ celebratio. Conspectus historicus comparativus, Bibliotheca Ephemerides Liturgicæ, Subsidia, 93, C.L.V., Rome, Éd. Liturgiche, 1997, p. 278-310.
HOMÉLIE DU JEUDI SAINT, MESSE DU SOIR EN MÉMOIRE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR
26 mars, 2013HOMÉLIE DU JEUDI SAINT, MESSE DU SOIR EN MÉMOIRE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR
C’est dans un climat paisible que la liturgie nous donne de célébrer le dernier repas du Christ. Pourtant l’évènement que commémorait Jésus, ce soir là, s’était vécu dans un climat d’urgence. L’urgence du départ, de la libération. Pour Dieu il y avait urgence que son peuple retrouve sa liberté. Il y a comme un contraste entre la première lecture qui nous fait le récit du dernier repas des juifs en terre d’Exile et le dernier repas de Jésus. Il nous invite à nous assoir autour de lui, à gouter la paix qui règne autour de lui. Saint Jean nous dit qu’il fait nuit dehors alors restons un peu dans cette lumière douce. Restons un peu pour rencontrer Jésus.
Avant de prendre le pain, le Seigneur prend un linge et le noue autour de la taille. « Restez en tenue de Service » tel est la posture que le Christ a choisi de garder durant tout son ministère. Un service qui aujourd’hui culmine d’humilité. Ce soir Jésus sacralise le service du Frère. On ne pourra plus faire mémoire du Seigneur sans vivre cet humble service rendu aux personnes qui nous environnent. Ce service est possible si je reconnais en elles le Christ lui même. Il nous faut sans cesse demander à Dieu cette conversion du cœur qui nous fait reconnaitre en tout homme le Christ. Comment le reconnaitre encore dans un assassin ? Comment le reconnaitre en celui qui m’empêche de dormir en faisant trop bruit au dessus de chez moi ? Et pourtant c’est aussi pour eux que le Christ a voulu mourir. Le Christ lave les pieds de celui qu’il aime et aussi de celui qui va le livrer par un baiser. Le jeudi saint nous rappelle une réalité fondamentale pour notre vie chrétienne. Dans le sacrement de l’eucharistie sont uni le service du frère et le service de l’autel. Sans le service du frère, nous aboutissons au ritualisme. La liturgie devient un refuge, un simple moment de recueillement. On s’évade quelques instants de la terre pour rejoindre le ciel et puis on repart et on refait comme avant, comme tout le monde. Servir son frère en négligeant le service de l’autel, c’est prendre le risque de l’activisme sans âme et d’affadir ce service au lieu de lui donner du sel. Comment ne pas penser, à ce propos, à la Veillée du samedi soir des JMJ à Madrid ? Avant de rejoindre les jeunes pour une grande veillée d’adoration, le pape s’est arrété en chemin. Il a rejoint une communauté humaine marqué par l’handicape. Une communauté où l’on essaye d’ouvrir un chemin d’espérance à ceux qui sont accueilli. Le pape a voulu le rappeler. Il ne peut y avoir d’adhésion authentique au Christ sans une adhésion authentique à la fraternité humaine. C’est ce que le pape Benoit XVI nous rappelle dans son encyclique l’amour dans la Vérité : « L’ouverture à Dieu entraîne l’ouverture aux frères et à une vie comprise comme un mission solidaire et joyeuse »[1].
Le Jeudi Saint est un vaccin contre toute tentation de domination. A l’école du lavement des pieds, l’autorité devient un service, ses compétences une chance pour les autres. « Vous m’appeler maitre et Seigneur, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns les autres ». Ne jamais se considérer supérieur à celui que je rencontre voici un beau défit pour notre vie. Le Christ nous invite tous à nous regarder en frère. La mission est à ce prix. Le Christ après avoir lavé les pieds de ses disciples va prier le Père. Il va demander « que tous soient un ». Cette unité n’est possible qu’a une condition : se reconnaitre un fils, une fille aimé du Père et reconnaitre l’autre comme un frère différent de moi mais égal en dignité. Jean Paul II nous a laisser un testament spirituel avec la lettre apostolique Au début du nouveau millénaire. Dans cette lettre il nous indique une urgence absolue pour notre Eglise et pour le monde que Dieu a tant aimer qu’il lui a donné son Fils. Au n°43 de sa lettre apostolique Jean-Paul II nous dit ceci : « Avant de programmer des initiatives concrètes, il faut promouvoir une spiritualité de communion […]Une spiritualité de la communion consiste avant tout en un regard du cœur porté sur le mystère de la Trinité qui habite en nous, et dont la lumière doit aussi être perçue sur le visage des frères qui sont à nos côtés. Une spiritualité de la communion, cela veut dire la capacité d’être attentif, dans l’unité profonde du Corps mystique, à son frère dans la foi, le considérant donc comme « l’un des nôtres », pour savoir partager ses joies et ses souffrances, pour deviner ses désirs et répondre à ses besoins, pour lui offrir une amitié vraie et profonde. Une spiritualité de la communion est aussi la capacité de voir surtout ce qu’il y a de positif dans l’autre, pour l’accueillir et le valoriser comme un don de Dieu: un « don pour moi », et pas seulement pour le frère qui l’a directement reçu. Une spiritualité de la communion, c’est enfin savoir « donner une place » à son frère, en portant « les fardeaux les uns des autres » (Ga 6,2) et en repoussant les tentations égoïstes qui continuellement nous tendent des pièges et qui provoquent compétition, carriérisme, défiance, jalousies. Ne nous faisons pas d’illusions: sans ce cheminement spirituel, les moyens extérieurs de la communion serviraient à bien peu de chose. Ils deviendraient des façades sans âme, des masques de communion plus que ses expressions et ses chemins de croissance. »
Carine dans quelques minutes vous vous avancerez à l’autel. Vous rejoindrez le Christ réellement présent sur cet autel pour vous reconnaitre sa seour et fille bien aimée de son Père. Prenez le temps de regarder ces visages qui seront devant vous. Ce sont vos frères et sœurs en Jésus. Accueillez chacun d’eux comme un don que vous as fait le Christ et alors vous pourrais en communion avec tous vos frères et sœurs ouvrir vos mains à celui qui veut se livrer totalement à vous par amour pour vous. Que chacun ce soir renaisse au Don de Dieu et que ce don ne reste pas enfermer en votre vie mais qu’il soit livrer lui aussi à notre monde.