Archive pour le 7 janvier, 2013

The Magi’s Journey

7 janvier, 2013

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Bethléem – Réflexions – Frédéric Manns, ofm

7 janvier, 2013

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Bethléem – Réflexions

Frédéric Manns, ofm

« Maison du pain » : telle serait selon Jérôme l’étymologie populaire du terme Bethléem. Dans un village ignoré, loin des agitations impériales de la forteresse romaine située non loin de là et connue sous le nom de l’Hérodion, paraît un enfant qui dans la fragilité de sa venue met un terme à l’attente inquiète d’Israël. Sur la tige de Jessé une fleur vient d’éclore. 
Jésus n’est pas l’homme divin que la mythologie grecque célébrait dans sa quête de sagesse. Il n’est pas non plus le symbole de l’humanité exaltée au point de devenir Dieu. Il est Dieu qui se fait homme. Le scandale chrétien est l’humanisation de Dieu, sa kénose, son humilité. 
Le message d’un Dieu qui s’humilie est déjà contenu dans les évangiles de l’enfance. Tandis que l’Evangile de Marc s’ouvre sur la proclamation du Règne de Dieu, Matthieu et Luc ont senti le besoin d’insister sur le mystère de l’Incarnation de Dieu. Le Dieu qui se fait homme vient accomplir les Ecritures d’Israël: « Si tu pouvais déchirer les cieux et descendre ». Un Dieu qui partage la condition de l’homme, qui souffre avec son peuple, qui intervient pour le libérer, voilà une nouveauté surprenante, mais déjà annoncée par les Ecritures. 
La Bible avait célébré l’efficacité de la Parole qui fut l’instrument de la création du monde. « Par sa Parole les cieux ont été faits ». Cette parole n’était autre que la Sagesse de Dieu. Ben Sira est arrivé à cette conclusion après de longues méditations. Le Nouveau Testament qui accomplit l’Ancien Testament en le dépassant, affirme dans le Prologue de l’Evangile de Jean: « Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous ». La Parole devient une personne en qui la gloire de Dieu se manifeste. Bethléem, la cité du roi David, accueille ce message révélé aux petits et non pas aux sages. La Sagesse a dressé sa tente au milieu des hommes. Dieu se révèle comme l’Emmanuel, un Dieu avec les hommes. 
Les Pères de l’Eglise frappés par une telle nouveauté ont commenté bien des fois cet événement. Une bonne nouvelle de cette envergure ne peut être que chantée, car elle réjouit le coeur. Elle ouvre les portes à une espérance illimitée. Irénée de Lyon, héritier de la tradition johannique, célèbre la nouveauté absolue de l’incarnation. Dieu fait toutes choses nouvelles. La naissance du Verbe fait craquer l’écorce de vétusté du monde. Tout ce qui est vieux et usé recule devant la naissance de Jésus. Celui qui vient de Dieu apporte avec lui toute la nouveauté. « Cieux nouveaux, terre nouvelle », avait annoncé le prophète Isaïe. C’est dire que la naissance de l’enfant de Bethléem a une dimension cosmique. Toute la création attend la libération, puisqu’elle a été soumise au péché. 
En s’incarnant la Parole de Dieu se fait ce que nous sommes pour que nous devenions ce qu’elle est. La terre est transformée en cieux au moment de l’incarnation par celui qui devient le « laboureur de Dieu », selon l’expression de Clément d’Alexandrie. Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu, répéteront les Pères de l’Eglise. Il s’est fait pauvre pour nous enrichir. Il s’est fait petit pour nous permettre de grandir. 
L’incarnation du Fils de Dieu signifie la vocation de l’homme à être divinisé. Fils de Dieu, nous le sommes réellement, affirme Saint Jean dans sa première lettre. Reconnaître cette dignité, c’est renoncer à proclamer l’absurdité du monde. La condition humaine a été tellement ennoblie qu’une étincelle divine resplendit en chaque créature. L’Esprit de Dieu qui a couvert Marie de son ombre est encore capable de répéter le même miracle. 
Les maîtres spirituels, en méditant le mystère du Verbe incarné, ont souvent parlé du Verbe abrégé. La parole longue de l’Ancien Testament qui a inspiré les prophètes s’abrège dans l’enfant qui naît à Bethléem. Et cette parole demande à naître dans le coeur des croyants. Saint François en conclura que le prédicateur doit faire une parole brève, puisque le Christ est la parole brève du Père, celle qui résume la Loi et les Prophètes. Le Christ, parole brève, résume son enseignement en un seul commandement: celui de l’amour. Il suffit que le prédicateur centre son homélie sur ce thème fondateur. 
Noël évoque une triple naissance: la naissance du Fils unique engendré par le Père céleste dans l’essence divine, celle qui s’accomplit à Bethléem par une mère qui dans sa fécondité garde l’absolue pureté; et celle par laquelle Dieu naît chez ceux qui l’accueillent. C’est dire que la symphonie de Noël reste inachevée tant que le coeur des croyants reste fermé. 
La Parole qui s’incarne demande de bannir tout ce qui est désincarné, rétréci et étriqué. Elle n’est plus simplement objet d’étude et d’approfondissements intellectuels. Etant devenue une personne, elle exige adoration, contemplation et respect. Plonger dans ce mystère c’est dilater son coeur et son regard pour éviter de se recroqueviller dans un repli frileux devant les possibilités étonnantes de notre monde. 
Rappeler l’incarnation en tête des Evangiles c’est redire l’originalité de la pensée chrétienne. Le Fils de Dieu qui partage la condition de l’homme est l’Adam nouveau, celui qui réalise pleinement la vocation de l’homme. Il est la Sagesse de Dieu annoncée dans l’Ancien Testament qui établit sa demeure parmi les hommes. Il est l’Emmanuel qui souffre et se réjouit avec l’humanité et la ramène vers le Père. A partir de Noël tout s’achemine sous la poussée de l’amour vers la Face du Père. Le temps est déjà enveloppé par l’éternité, parce que l’éternité s’est engagée dans le temps. La nuit du monde se transforme progressivement en clarté. 
Le Fils de Dieu lorsqu’il devient fils de la terre se laisse contenir en un point de l’espace et du temps. Bien plus il se laisse conditionner par une langue et une culture. En réalité, c’est lui qui contient l’univers. Il ne veut pas s’approprier à travers son corps le monde comme une proie, mais il le fait corps d’unité, chair cosmique et eucharistique. En lui le monde devient corporéité spirituelle, il est vivifié par l’Esprit. 
Le judaïsme et l’Islam refusent l’incarnation du Fils de Dieu en raison de la transcendance de Dieu. Un Dieu ne peut se mêler à sa créature qu’au risque de perdre sa divinité, affirment-ils. Le christianisme proclame que Dieu aime les hommes au point de devenir homme. L’incarnation n’est pas une humiliation de la raison de l’homme, mais la reconnaissance de la vraie dignité de l’homme. Elle est la finalité de la création : tout a été créé pour lui, affirme saint Paul. Origène, dans son Commentaire de l’Evangile de Matthieu 14,7 rappelait que le corps du Christ n’est pas quelque chose à côté de l’Eglise qui est son corps. Dieu ne les a pas unis comme deux, mais en une seule chair, défendant que l’homme sépare l’Eglise et Dieu. D’une façon invisible le mystère de l’incarnation se prolonge dans l’Eglise. 
La vie que Dieu a communiquée est une irradiation de son amour trinitaire. Le but de l’incarnation du Fils de Dieu a été de rendre possible la communion avec Dieu et entre les hommes. Un Dieu qui ne serait pas Trinité ne serait ni amour ni partage. Or ce partage commence à Noël et signifie le salut. 
Faire étape à Bethléem, c’est pour Jean Paul II fêter la rencontre du Christ eucharistique qui est la maison du pain de vie. C’est aussi préparer l’humanité pour le retour du retour en gloire du Fils de Dieu. 
Non loin de là au camp palestinien de Deheishe le pape en saluant les réfugiés qui depuis la guerre de 1948 connaissent une situation de précarité rend hommage à la dignité de tout homme. C’est une même logique qui le pousse à vénérer l’enfant de la crèche et le pauvre sans défense. Les réfugiés du monde entier connaissent une condition difficile qui fut celle de la sainte famille lorsqu’elle dut fuir en Egypte pour échapper à la colère d’Hérode. Il est urgent pour les chrétiens de déchiffrer les signes d’un autre monde qui commence à germer dans le nôtre. 

PAPE BENOÎT: « SI VOUS VIVEZ AVEC LE CHRIST, VOUS DEVIENDREZ DES SAGES » – Homélie pour l’Epiphanie

7 janvier, 2013

 http://www.zenit.org/article-33021?l=french

« SI VOUS VIVEZ AVEC LE CHRIST, VOUS DEVIENDREZ DES SAGES »

Homélie de Benoît XVI pour l’Epiphanie

Benoît XVI

ROME, Sunday 6 January 2013 (Zenit.org).
« Si vous vivez avec le Christ, liés à nouveau à lui dans le sacrement, alors vous aussi vous deviendrez des sages. Alors vous deviendrez des astres qui précèdent les hommes et leur indiquent le juste chemin de la vie », dit Benoît XVI aux quatre nouveaux évêques qu’il a ordonnés en la basilique Saint-Pierre, ce dimanche matin, 6 janvier, en la solennité de l’Epiphanie, comem c’est la tradition depuis Jean-Paul II.
Ce sont : son secrétaire, Mgr Georg Gänswein, préfet de la Maison pontificale, un Français, nonce au Guatemala, Mgr Nicolas Thévenin – de la Communauté Saint-Martin -, un archevêque du Nigeria, Mgr Fortunatus Nwachukwu, nonce au Nicaragua, et le nouveau secrétaire de la Congrégation pour l’Education catholique, Mgr Angelo Vincenzo Zani. 
Le pape présente les Mages de l’Evangile en ces termes : « Les hommes qui partirent alors vers l’inconnu étaient, en tout cas, des hommes au cœur inquiet. Des hommes poussés par la recherche inquiète de Dieu et du salut du monde. Des hommes en attente qui ne se contentaient pas de leur revenu assuré et de leur position sociale peut-être reconnue. Ils étaient à la recherche de la réalité la plus grande. Ils étaient peut-être des hommes instruits qui avaient une grande connaissance des astres et qui probablement disposaient aussi d’une formation philosophique. Mais, ils ne voulaient pas seulement savoir beaucoup de choses. Ils voulaient savoir surtout l’essentiel ».
Homélie de Benoît XVI pour l’Epiphanie 2013 :
Chers frères et sœurs,
Pour l’Église croyante et priante, les Mages d’Orient qui, sous la conduite de l’étoile, ont trouvé la route vers la crèche de Bethléem sont seulement le début d’une grande procession qui s’avance dans l’histoire. À cause de cela, la liturgie lit l’évangile qui parle du cheminement des Mages avec les splendides visions prophétiques d’Isaïe 60 et du Psaume 72, qui illustrent par des images audacieuses le pèlerinage des peuples vers Jérusalem. Comme les bergers qui, en tant que premiers hôtes auprès de l’Enfant nouveau-né couché dans la mangeoire, personnifient les pauvres d’Israël et, en général, les âmes humbles qui vivent intérieurement en étant très proches de Jésus, ainsi les hommes provenant de l’Orient personnifient le monde des peuples, l’Église des Gentils – les hommes qui à travers tous les siècles se mettent en marche vers l’Enfant de Bethléem, honorent en Lui le Fils de Dieu et se prosternent devant Lui. L’Église appelle cette fête « Épiphanie » – la manifestation du Divin. Si nous regardons le fait que, dès le début, les hommes de toute provenance, de tous les continents, de toutes les diverses cultures et de tous les divers modes de pensée et de vie ont été et sont en marche vers le Christ, nous pouvons vraiment dire que ce pèlerinage et cette rencontre avec Dieu dans la figure de l’Enfant est une Épiphanie de la bonté de Dieu et de son amour pour les hommes (cf. Tt 3, 4).
Selon une tradition commencée par le Bienheureux Pape Jean-Paul II, nous célébrons aussi la fête de l’Épiphanie comme le jour de l’ordination épiscopale pour quatre prêtres qui, en des fonctions diverses, collaboreront désormais au Ministère du Pape pour l’unité de l’unique Église de Jésus Christ dans la pluralité des Églises particulières. Le lien entre cette ordination épiscopale et le thème du pèlerinage des peuples vers Jésus Christ est évident. En ce pèlerinage, l’évêque a la mission non seulement de marcher avec les autres, mais de précéder et d’indiquer la route. Dans cette liturgie, je voudrais toutefois réfléchir encore avec vous sur une question plus concrète. À partir de l’histoire racontée par Matthieu, nous pouvons certainement nous faire une certaine idée du type d’hommes qu’ont dû être ceux qui, en suivant le signe de l’étoile, se sont mis en route pour aller trouver ce Roi qui aurait fondé un nouveau type de royauté, non seulement pour Israël, mais aussi pour l’humanité entière. Quel genre d’hommes ceux-ci étaient- ils donc ? Et, à partir d’eux, demandons-nous aussi si, malgré la différence d’époque et de missions, on peut percevoir quelque chose de ce qu’est l’évêque et sur la façon dont il doit accomplir sa mission.
Les hommes qui partirent alors vers l’inconnu étaient, en tout cas, des hommes au cœur inquiet. Des hommes poussés par la recherche inquiète de Dieu et du salut du monde. Des hommes en attente qui ne se contentaient pas de leur revenu assuré et de leur position sociale peut-être reconnue. Ils étaient à la recherche de la réalité la plus grande. Ils étaient peut-être des hommes instruits qui avaient une grande connaissance des astres et qui probablement disposaient aussi d’une formation philosophique. Mais, ils ne voulaient pas seulement savoir beaucoup de choses. Ils voulaient savoir surtout l’essentiel. Ils voulaient savoir comment on peut réussir à être une personne humaine. Et c’est pourquoi, ils voulaient savoir si Dieu existe, où et comment il est. S’il prenait soin de nous et comment nous pouvons le rencontrer. Ils voulaient non seulement savoir. Ils voulaient reconnaître la vérité sur nous, sur Dieu et sur le monde. Leur pèlerinage extérieur était une expression de leur cheminement intérieur, du pèlerinage intérieur de leur cœur. Ils étaient des hommes qui cherchaient Dieu et, en définitive, ils étaient en marche vers lui. Ils étaient des chercheurs de Dieu.
Mais avec cela, nous arrivons à la question : comment doit être un homme à qui on impose les mains pour l’ordination épiscopale dans l’Église de Jésus Christ ? Nous pouvons dire : il doit être avant tout un homme dont l’intérêt est tourné vers Dieu, car c’est seulement alors qu’il s’intéresse vraiment aussi aux hommes. Nous pourrions aussi le dire en sens inverse : un évêque doit être un homme à qui les hommes tiennent à cœur, un homme qui est touché par les situations des hommes. Il doit être un homme pour les autres. Toutefois, il peut l’être vraiment seulement s’il est un homme conquis par Dieu. Si pour lui, l’inquiétude pour Dieu est devenu une inquiétude pour sa créature, l’homme. Comme les Mages d’Orient, un évêque ne doit pas aussi être quelqu’un qui exerce seulement son métier et ne veut rien d’autre. Non, il doit être pris par l’inquiétude de Dieu pour les hommes. Il doit, pour ainsi dire, penser et sentir avec Dieu. Il n’est pas seulement l’homme qui porte en lui l’inquiétude innée pour Dieu, mais cette inquiétude est une participation à l’inquiétude de Dieu pour nous. Puisque Dieu est inquiet de nous, il nous suit jusque dans la mangeoire, jusqu’à la Croix. « En me cherchant, tu as peiné ; tu m’as sauvé par ta passion : qu’un tel effort ne soit pas vain », prie l’Église dans le Dies irae. L’inquiétude de l’homme pour Dieu et, à partir d’elle, l’inquiétude de Dieu pour l’homme ne doivent pas donner de repos à l’évêque. C’est cela que nous comprenons quand nous disons que l’évêque doit être d’abord un homme de foi. Car la foi n’est pas autre chose que le fait d’être intérieurement touché par Dieu, une condition qui nous conduit sur le chemin de la vie. La foi nous introduit dans un état où nous sommes pris par l’inquiétude de Dieu et fait de nous des pèlerins qui sont intérieurement en marche vers le vrai Roi du monde et vers sa promesse de justice, de vérité et d’amour. Dans ce pèlerinage, l’évêque doit précéder, il doit être celui qui indique aux hommes le chemin vers la foi, l’espérance et l’amour.
Le pèlerinage intérieur de la foi vers Dieu s’effectue surtout dans la prière. Saint Augustin a dit un jour que la prière, en dernière analyse, ne serait autre chose que l’actualisation et la radicalisation de notre désir de Dieu. À la place de la parole “désir”, nous pourrions mettre aussi la parole “inquiétude” et dire que la prière veut nous arracher à notre fausse commodité, à notre enfermement dans les réalités matérielles, visibles et nous transmettre l’inquiétude pour Dieu, nous rendant ainsi ouverts et inquiets aussi les uns des autres. Comme pèlerin de Dieu, l’évêque doit être d’abord un homme qui prie. Il doit vivre dans un contact intérieur permanent avec Dieu ; son âme doit être largement ouverte vers Dieu. Il doit porter à Dieu ses difficultés et celles des autres, comme aussi ses joies et celles des autres, et établir ainsi, à sa manière, le contact entre Dieu et le monde dans la communion avec le Christ, afin que la lumière du Christ resplendisse dans le monde.
Revenons aux Mages d’Orient. Ceux-ci étaient aussi et surtout des hommes qui avaient du courage, le courage et l’humilité de la foi. Il fallait du courage pour accueillir le signe de l’étoile comme un ordre de partir, pour sortir – vers l’inconnu, l’incertain, sur des chemins où il y avait de multiples dangers en embuscade. Nous pouvons imaginer que la décision de ces hommes a suscité la dérision : la plaisanterie des réalistes qui pouvaient seulement se moquer des rêveries de ces hommes. Celui qui partait sur des promesses aussi incertaines, risquant tout, ne pouvait apparaître que ridicule. Mais pour ces hommes touchés intérieurement par Dieu, le chemin selon les indications divines était plus important que l’opinion des gens. La recherche de la vérité était pour eux plus importante que la dérision du monde, apparemment intelligent.
Comment ne pas penser, dans une telle situation, à la mission d’un évêque à notre époque ? L’humilité de la foi, du fait de croire ensemble avec la foi de l’Église de tous les temps, se trouvera à maintes reprises en conflit avec l’intelligence dominante de ceux qui s’en tiennent à ce qui apparemment est sûr. Celui qui vit et annonce la foi de l’Église, sur de nombreux points n’est pas conforme aux opinions dominantes justement aussi à notre époque. L’agnosticisme aujourd’hui largement dominant a ses dogmes et est extrêmement intolérant à l’égard de tout ce qui le met en question et met en question ses critères. Par conséquent, le courage de contredire les orientations dominantes est aujourd’hui particulièrement urgent pour un évêque. Il doit être valeureux. Et cette vaillance ou ce courage ne consiste pas à frapper avec violence, à être agressif, mais à se laisser frapper et à tenir tête aux critères des opinions dominantes. Le courage de demeurer fermement dans la vérité est inévitablement demandé à ceux que le Seigneur envoie comme des agneaux au milieu des loups. « Celui qui craint le Seigneur n’a peur de rien » dit le Siracide (34, 16). La crainte de Dieu libère de la crainte des hommes. Elle rend libres !
Dans ce contexte, un épisode des débuts du christianisme que saint Luc rapporte dans les Actes des Apôtres me vient à l’esprit. Après le discours de Gamaliel, qui déconseillait la violence envers la communauté naissante des croyants en Jésus, le sanhédrin convoqua les Apôtres et les fit flageller. Ensuite il leur interdit de parler au nom de Jésus et il les remit en liberté. Luc continue : « Mais eux, en sortant du sanhédrin, repartaient tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. Et chaque jour … ils ne cessaient d’enseigner et d’annoncer la Bonne Nouvelle du Christ Jésus » (Ac 5, 40ss.). Les successeurs des Apôtres doivent aussi s’attendre à être à maintes reprises frappés, de manière moderne, s’ils ne cessent pas d’annoncer de façon audible et compréhensible l’Évangile de Jésus Christ. Et alors ils peuvent être heureux d’avoir été jugés dignes de subir des outrages pour lui. Naturellement, nous voulons, comme les Apôtres, convaincre les gens et, en ce sens, obtenir leur approbation. Naturellement, nous ne provoquons pas, mais bien au contraire nous invitons chacun à entrer dans la joie de la vérité qui indique la route. L’approbation des opinions dominantes, toutefois, n’est pas le critère auquel nous nous soumettons. Le critère c’est Lui seul : le Seigneur. Si nous défendons sa cause, grâce à Dieu, nous gagnerons toujours de nouveau des personnes pour le chemin de l’Évangile. Mais inévitablement nous serons aussi frappés par ceux qui, par leur vie, sont en opposition avec l’Évangile, et alors nous pouvons être reconnaissants d’être jugés dignes de participer à la Passion du Christ.
Les Mages ont suivi l’étoile, et ainsi ils sont parvenus jusqu’à Jésus, jusqu’à la grande Lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (cf. Jn 1, 9). Comme pèlerins de la foi, les Mages sont devenus eux-mêmes des étoiles qui brillent dans le ciel de l’histoire et nous indiquent la route. Les saints sont les vraies constellations de Dieu, qui éclairent les nuits de ce monde et nous guident. Saint Paul, dans la Lettre aux Philippiens, a dit à ses fidèles qu’ils doivent resplendir comme des astres dans le monde (cf. 2, 15).
Chers amis, ceci nous concerne aussi. Ceci vous concerne surtout vous qui, maintenant, allez être ordonnés évêques de l’Église de Jésus Christ. Si vous vivez avec le Christ, liés à nouveau à lui dans le sacrement, alors vous aussi vous deviendrez des sages. Alors vous deviendrez des astres qui précèdent les hommes et leur indiquent le juste chemin de la vie. En ce moment nous tous ici nous prions pour vous, afin que le Seigneur vous remplisse de la lumière de la foi et de l’amour. Afin que cette inquiétude de Dieu pour l’homme vous touche, pour que tous fassent l’expérience de sa proximité et reçoivent le don de sa joie. Nous prions pour vous, afin que le Seigneur vous donne toujours le courage et l’humilité de la foi. Nous prions Marie qui a montré aux Mages le nouveau Roi du monde (Mt 2, 11), afin qu’en Mère affectueuse, elle vous montre aussi Jésus Christ et vous aide à être des hommes qui indiquent la route qui conduit à lui. Amen.

[Texte original: Italien]