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Lectio Divina – Année C: Epiphanie du Seigneur (Mt 2,1-12)
3 janvier, 2013http://say.sdb.org/blogs/JJB/2013/01/01/lectio-divina-annee-c-epiphanie-du-seign-12
Lectio Divina – Année C: Epiphanie du Seigneur (Mt 2,1-12)
par Juan José Bartolomé
[P. Txema Martínez, traducteur]
Mathieu ne nous offre pas la chronique d’un épisode de l’enfance de Jésus, comme il peut le sembler à simple vue ; il réfléchit, plutôt, sur l’identité réelle du nouveau-né et il nous avance de forme voilée une explication du refus qu’il souffrira après. Jésus est l’attendu descendant de David, dont la souveraineté fut reconnue en Israël depuis le principe avec l’aide de l’Écriture. Mais l’Écriture qui l’annonçait avec détaille, ne fut pas suffisante pour obtenir son acceptation : ceux qui ne savaient pas où le trouver se mirent en route ; les proches, désintéressés, laissèrent l’initiative aux païens. La docilité du gentil, qui se sert de n’importe quel indice dans le ciel pour se mettre en chemin vers le Dieu-avec-nous, contraste avec l’entêtement du Juif, qui sait lui où doit apparaître Dieu, mais qu’il ne se daigne pas d’apparaître par là. Dans l’intention de Mathieu, et plus au-delà de tout sentimentalisme, le récit est un sérieux avertissement : savoir bien qui est Jésus et où on peut le rencontrer, ne conduit pas nécessairement ni à la foi et ni à l’offrande qu’il mérite. Et cela peut conduire, cependant, à le perdre. Ce n’est pas vrai qu’encore aujourd’hui continuent à le chercher, et pleins de dons, ceux qui moins le connaissent ou ceux qui sont les plus éloignés de lui ? Que s’intéressent à lui ceux qui en étaient plus éloignés et plus ignorants, n’est pas une simple anecdote : perd Dieu celui qui, comptant déjà sur sa présence donnée, ne le cherche plus ; cette recherche, pour être authentique, doit nous retrouver pleins de dons, et non de désirs insatisfaits, pendant que nous marchons vers lui : nous pouvons aller le cherche un peu désorientés, mais non sans présents à lui offrir.
Suite:
Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des Mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : » Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu se lever son étoile et nous sommes venus nous prosterner devant lui « . En apprenant cela, le roi Hérode fut pris d’inquiétude, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les chefs des prêtres et tous les scribes d’Israël, pour leur demander en quel lieu devait naître le Messie. Ils lui répondirent : » A Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : ‘Et toi, Bethléem en Judée, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Judée ; car de toi sortira un chef, qui sera le berger d’Israël mon peuple’. Alors Hérode convoqua les Mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile leur était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : » Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, avertissez-moi pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui « . Sur ces paroles du roi, ils partirent.
Et voilà que l’étoile qu’ils avaient vue se lever les précédait ; elle vint s’arrêter au-dessus du lieu où se trouvait l’enfant. Quand ils virent l’étoile, ils éprouvèrent une très grande joie. En entrant dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
Mais ensuite, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.
I. LIRE : Comprendre ce que le texte dit en considérant comme le dit
Après avoir raconté la naissance du Messie à Bethléem, avec l’épisode des sages d’Orient, Mathieu fait publique la nouvelle : ici ne sont plus des anges qui annoncent et des bergers qui veillent la nuit, comme nous le racontait Luc (Lc 2, 8-20), sinon des étrangers venus de très loin guidés par une étoile qui se chargent de faire connaître la bonne nouvelle : « le roi des juifs vient de naître ». Quoique les faits se présentent comme vraisemblables (naissance de Jésus à Bethléem, pendant les derniers années du roi Hérode ; croyance populaire de que l’apparition de nouvelles étoiles signalait un changement important dans la histoire et la naissance d’un personnage…), sa chronique sert au programme du rédacteur : seulement les païens de loin savent qu’Israël a déjà le Messie et le cherchent sans repos pour l’adorer, bien qu’ils méconnaissent qui est lui et où le trouver. La destinée tragique de Jésus, être ignoré par ses compatriotes et cherché par les étrangers, commence à se réaliser depuis le commencement même de son apparition sur la terre. Manifestation publique et public rejet sont liés depuis le principe.
Les Mages et Hérode sont les authentiques protagonistes de l’épisode. Les Mages, dont la recherche, guidés par une étoile, mais sans trop de lumières, fait connaître la naissance du « roi juif » à Hérode, roi des juifs. Hérode, dont les scribes connaissent les Écritures et savent où doit naître le Messie, n’a aucune intention d’aller le trouver. Le contraste ne peut pas être plus évident : alertés et conduits par la nature, les Mages se sont mis en route ; guidés par une étoile, mais beaucoup plus par son désir de adorer le Messie juif, ils questionnent à celui qui puisse les aider. En possédant l’Écriture et connaissant le lieu, près d’où il habite, Hérode et ses savants ne bougent pas, mais ils y restent sursautés. Savoir que le Messie est né les remplit, non de joie, mais d’une peur formidable. Le salut peut être redoutable pour celui qui ne le désire pas.
Pendant qu’Hérode a la Parole et celui qui le lui interprète à sa disposition, les Mages n’ont qu’une étoile comme guide et qui, des fois, se cache. Obligés à enquêter, ne s’arrêtent pas de chercher. Et l’étoile revient à leur montrer le chemin et le but. À celui qui cherche le Dieu adorable, ne lui manqueront pas d’étoiles qui le conduiront jusqu’à Lui et, même, lui serviront de guide ceux qui ni croient, ni leur intéresse que le Messie soit né.
Ce n’est pas indifférent qu’« une immense allégresse » précédât la rencontre avec le petit enfant et avec Marie, sa mère : la joie dans la recherche précède la rencontre, celle-ci l’annonce immédiate. Ce n’est pas indifférent, non plus, que les dont vinssent après l’adoration : plus on donne, moins coûte offrir, quand plus adorable ressentons le Seigneur. Ce n’est pas indifférent, loin de là, qu’on trouvât Jésus près de sa mère. Pourquoi manque-t-il ici Joseph, s’il a été le protagoniste du récit antérieur ? : Jésus, que nous cherchons, n’est pas loin de Marie.
II. MÉDITER : Appliquer ce que le texte dit à la vie
Le récit de l’adoration des Mages complète la chronique de l’incarnation de Dieu, le mystère que nous sommes en train de célébrer durant ces jours-ci. La fête d’aujourd’hui n’est pas seulement, comme on pense fréquemment, une fête tendrement familiale où, selon la tradition, nous avons l’habitude de couronner les enfants comme les rois du foyer pour un jour. C’est vrai, il y aura quelques raisons par lesquelles le peuple chrétien a osé rappeler les dons que le petit Jésus reçut de mains des inconnus et faire des cadeaux aux petits enfants de la maison et aux personnes le plus familières. Mais ce que, en réalité, nous les chrétiens nous célébrons c’est la toute première manifestation de Jésus au monde païen. Ce ne sont pas les rois Mages la raison de notre fête sinon Dieu qui se révèle à celui qui le cherche. Ce ne sont pas non plus les dons qu’il mérita recevoir mais son épiphanie aux plus éloignés ce que nous célébrons : en vain se serait Dieu incarné s’il n’eut été reconnu que par ses parents ! De bien peu aurait servi que Marie et Joseph accueillissent le fils que Dieu leur avait donné, si le monde, bergers proches et éloignés Mages, n’eussent pas connu son existence ! La venue des étrangers à Bethléem, chargés de dons et de désirs de l’adorer, marque le commencement de l’accomplissement du salut : Jésus cesse d’être seulement le fils de Joseph et Marie pour devenir le Messie d’Israël et Sauveur du monde.
Malgré tout, c’est beaucoup ce que peuvent nous enseigner ces hommes qui, venus d’orient, cherchaient Jésus en suivant la route de son étoile et en demandant à tous ceux qu’ils retrouvaient en route. Leur désir de l’adorer les avait éloignés de leur patrie. Ils ne se sont contentés de savoir de son existence : découverte l’étoile, ils n’allaient pas s’arrêter jusqu’à ce qu’ils l’eussent connu. Et ils ont demandé de l’aide à celui qui savait plus qu’eux, bien qu’il n’ait pas leurs bonnes intentions. Et ils ont continué à chercher dans le ciel la lumière qui les guidât jusqu’au nouveau-né. Ils avaient trop de désir de l’adorer et les dons, qu’ils chargeaient pour l’honorer, n’étaient pas lourds à porter. Tout leur valait la peine pour arriver à contempler Dieu. Et ce qui est le plus curieux c’est que furent eux, des étrangers en Israël, les seuls intéressés à savoir où pouvait naître le roi des juifs.
Le récit évangélique n’est pas un conte enfantin, c’est la narration d’une tragédie. Il ne raconte pas ce qui s’est passé un jour, sinon qu’il décrit ce qui arrive aujourd’hui : les proches continuent engagés dans des discussions sans terme, pendant que les éloignés se pressent pour arriver jusqu’à Dieu. Les puissants conspirent pour faire disparaître celui dont on vient d’apprendre l’existence ; l’Hérode de service simule un intérêt au nouveau-né, pour mieux cacher ses projets homicides. Et aucun croyant d’Israël ne se mobilise pour aller à sa rencontre ; seulement des païens continuent leur chemin jusqu’à le trouver. Si réussir à l’adorer était la bonne aventure des Mages, se refuser à le faire fut le péché des connaisseurs, et continue à l’être. Ceux qui ne savaient rien sur Dieu ce sont eux qui se mettent en marche pour le chercher. Ceux qui connaissaient même le lieu où il devait naître, ne firent même pas un pas pour le connaître. Furent les plus éloignés les plus généreux ; et de bons païens, les meilleurs croyants : ils ne pensaient même pas à rien lui demander quand ils l’eussent rencontré, ils ne souhaitaient qu’adorer le Messie de Dieu.
Pour notre malheur, ça continue aujourd’hui à venir de loin à adorer notre Dieu, pendant que nous, qui pensons l’avoir tout près, nous nous absorbons dans des discussions sur où peut-il être, sans avoir le courage de nous lancer à sa recherche. Pour notre honte, ce sont les païens qui continuent à se charger des dons à lui offrir quand il se mettent en route pour le trouver, pendant que les croyants doivent passer un grand besoin et avoir quelque chose à lui demander pour nous mettre en chemin vers Dieu. Pour savoir où il est, nous pensons qu’il est facile tomber sur lui et ne le cherchons pas ; pour ne pas avoir le désir de l’adorer, nous perdons, comme cela arriva à Bethléem, un Dieu enfant adorable.
Nous ne pouvons pas nous excuser parce que, à différence des Mages, nous n’avons vu aucune étoile ; et ce n’est pas un bon prétexte, non plus, ne rien avoir de valeur à lui offrir ; pour se mettre à le chercher, il suffit de vouloir le connaître, avoir un désir ardant de l’honorer. Le fait c’est que Dieu put se manifester au monde, parce qu’il y eut des hommes que le cherchaient ; et ce qui est tragique c’est que Dieu fût adoré par des païens et non par des croyants, pour des étrangers venus de loin et non par des compatriotes qui n’avaient presque rien à risquer pour le trouver.
À Bethléem Dieu se montra petit enfant adorable, mais ne l’ont adoré que ceux qui s’étaient fatigués à le chercher. À quoi peut nous servir aujourd’hui nous rappeler ce jour-là, si nous ne remarquons pas le risque que nous sommes en train de courir tous les jours pour ne pas nous mettre en route, d’une fois pour toutes, vers lui. N’importe pas trop que nous ne sachions pas bien où est-ce qu’il nous attend, comme ne lui importe pas la richesse des dons que nous puissions lui présenter. Le Dieu de Bethléem, qui veut être pour nous un Dieu adorable, a laissé suffisantes étoiles dans nos vies qui nous guideront jusqu’où il nous attend et il y a toujours sur notre route trop de monde à qui en demander : ce qui est réellement important c’est si nous avons encore un désir d’adorer un Dieu que nous avons identifié à un petit enfant inoffensif.
Car, et celui-ci est un Dieu à la portée des étrangers, ce Dieu que, tombant à genoux, ont adoré les Mages, ce Dieu auquel les guida une étoile, ce Dieu qu’ils trouvèrent à Bethléem, avec Marie sa mère, n’était qu’un petit enfant. Là où se fixa l’étoile, là les attendait Dieu. Et parce qu’ils ne se sont pas scandalisés et ils ont accepté que le Messie qu’ils cherchaient était le nouveau-né qu’ils voyaient, ces païens devinrent les premiers croyants au Dieu de l’Encarnación. Car un petit enfant, le fils de Marie, fut la première manifestation de Dieu, seulement par cela, le peuple chrétien voit chez les petits enfants une image première de leur Dieu. Et à cause de cela nous célébrons l’épiphanie du Seigneur par la générosité de dons pour nos enfants ; nous ne pouvons pas oublier que Dieu voulut se cacher dans un petit enfant et qu’Il s’est révélé par la première fois comme Dieu dans le fils de Marie : la face du petit enfant, le visage de nos enfants, continue à être le plus divin, le plus proche de Dieu, que nous les croyants nous avons.
Aujourd’hui que nous célébrons que Dieu a voulu être adoré à Bethléem comme un petit enfant, nous devrions nous demander comment est-il possible que les chrétiens convertissons nos familles, nos villes, nos sociétés en des lieux inhospitalier pour les petits enfants. Un monde où les enfants gênent, sont encombrants, c’est un monde en manque de Dieu. Notre société, et nos familles, sont païennes, quand elles ne savent pas adorer Dieu dans leurs enfants. Et elles ne les adorent pas, non seulement quand elles ne leur permettent pas naître, sinon quand, nés, les abandonnent, méprisent ou malmènent. Nous nous condamnons à ne jamais nous rencontrer avec le Dieu de Jésus, si nous continuons impassibles devant le manque de défense du plus petit, si nous ne savons pas découvrir chez eux le visage adorable de notre Dieu. Nous sommes en train de devenir des païens, peut-être sans nous en rendre compte, mais non moins efficacement, parce que pour nous le petit enfant n’est plus l’être adorable, désiré. Notre monde met son avenir en danger et nous, les croyants, notre foi.
PAPE BENOÎT: UNE NOUVEAUTÉ RADICALE QUI CHANGE LE COURS DE L’HISTOIRE
3 janvier, 2013http://www.zenit.org/article-32998?l=french
UNE NOUVEAUTÉ RADICALE QUI CHANGE LE COURS DE L’HISTOIRE
Catéchèse de Benoît XVI sur la Nativité, 2 janvier 2013
Benoît XVI
ROME, Wednesday 2 January 2013 (Zenit.org).
« Comment cet enfant petit et faible peut-il avoir apporté dans le monde une nouveauté radicale au point de changer le cours de l’histoire ? N’y a-t-il pas quelque chose de mystérieux dans son origine ? », se demande Benoît XVI en contemplant l’Enfant Jésus. Il répond : « Il est le Fils unique du Père, il vient de Dieu ».
Le pape explique ainsi que « ce qui arrive à Marie, à travers l’action de l’Esprit divin, est une nouvelle création ».
Dans sa première audience générale de l’année, ce mercredi 2 janvier, le pape a repris ses catéchèses sur le thème de la foi en méditant le mystère de l’origine de Jésus, devant les milliers de visiteurs rassemblés dans la salle Paul VI du Vatican.
Catéchèse de Benoît XVI en italien :
Chers frères et sœurs,
La Nativité du Seigneur éclaire encore une fois de sa lumière les ténèbres qui enveloppent souvent notre monde et notre cœur, et apporte l’espérance et la joie. D’où vient cette lumière ? De la grotte de Bethléem, où les pasteurs trouvèrent « Marie et Joseph et le nouveau-né couché dans la crèche » (Lc 2, 16). Devant cette Sainte Famille surgit une autre question, plus profonde : comment cet enfant petit et faible peut-il avoir apporté dans le monde une nouveauté radicale au point de changer le cours de l’histoire ? N’y a-t-il pas quelque chose de mystérieux dans son origine, qui va au-delà de cette grotte ?
La question sur l’origine de Jésus émerge toujours à nouveau, c’est celle que le procurateur Ponce Pilate pose pendant le procès : « D’où es-tu ? » (Jn 19, 9). Pourtant son origine est bien claire. Dans l’évangile de Jean, quand le Seigneur affirme : « Je suis le pain descendu du ciel », les juifs réagissent en murmurant : « Celui-là n’est-il pas Jésus, le fils de Joseph, dont nous connaissons le père et la mère ? Comment peut-il dire maintenant : Je suis descendu du ciel ? » (Jn 6, 42). Et un peu plus tard, les citoyens de Jérusalem s’opposent violemment devant la prétendue messianité de Jésus en affirmant que l’on sait bien « d’où il est ; tandis que le Christ, à sa venue, personne ne saura d’où il est. » (Jn 7, 27). Jésus lui-même fait remarquer combien leur prétention de connaître son origine est inadéquate, offrant ainsi une orientation pour savoir d’où il vient : « ce n’est pas de moi-même que je suis venu, mais il m’envoie vraiment, celui qui m’a envoyé. Vous, vous ne le connaissez pas » (Jn 7, 28). Certes, Jésus est originaire de Nazareth, il est né à Bethléem, mais que sait-on de sa véritable origine ?
Dans les quatre évangiles, la réponse à la question « d’où » vient Jésus émerge clairement : sa véritable origine est le Père, Dieu ; il provient totalement de lui, mais différemment de n’importe quel prophète ou envoyé de Dieu qui l’a précédé. Cette origine du mystère de Dieu, « que personne ne connaît », est déjà contenue dans les récits de l’enfance des évangiles de Matthieu et de Luc, que nous lisons pendant le temps de Noël. L’ange Gabriel annonce : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu » (Lc 1, 35). Nous redisons ces paroles chaque fois que nous récitons le Credo, la profession de foi : « et incarnatus est de Spiritu Sancto, ex Maria Virgine », « par l’Esprit-Saint il a pris chair de la Vierge Marie ». A cette phrase, nous nous agenouillons parce que le voile qui cachait Dieu est, si l’on peut dire, enlevé et son mystère insondable et inaccessible nous touche : Dieu devient l’Emmanuel, « Dieu avec nous ». Lorsque nous écoutons les messes composées par de grands maîtres de la musique sacrée, je pense par exemple à la Messe du Couronnement de Mozart, nous remarquons aussitôt que l’on s’arrête de manière particulière sur cette phrase, presque pour exprimer par le langage universel de la musique ce que les paroles ne peuvent pas manifester : le grand mystère de Dieu qui s’incarne, qui se fait homme.
Si nous considérons attentivement l’expression « par l’Esprit-Saint, il est né de la Vierge Marie », nous voyons qu’elle inclut quatre sujets agissants. De manière explicite, sont mentionnés l’Esprit-Saint et Marie, mais « il » est sous-entendu, c’est-à-dire le Fils qui a pris chair dans le sein de la Vierge. Dans la profession de foi, le Credo, Jésus est défini à travers des dénominations diverses : « Seigneur, … Christ, Fils unique de Dieu… Dieu né de Dieu, Lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu… de même nature que le Père » (Credo de Nicée-Constantinople). Nous voyons alors que « il » renvoie à une autre personne, celle du Père. Le premier sujet de cette phrase est donc le Père qui, avec le Fils et l’Esprit-Saint, est le Dieu unique.
Cette affirmation du Credo ne concerne pas l’être éternel de Dieu, mais nous parle plutôt d’une action à laquelle prennent part les trois personnes divines et qui se réalise « ex Maria Virgine ». Sans elle, l’entrée de Dieu dans l’histoire de l’humanité n’aurait pas atteint son but et ce qui est central dans notre profession de foi n’aurait pas eu lieu : Dieu est un Dieu avec nous. Ainsi Marie appartient de manière indispensable à notre foi dans le Dieu qui agit, qui entre dans l’histoire. Elle met à disposition toute sa personne, elle « accepte » de devenir le lieu de l’habitation de Dieu.
Parfois, même dans notre cheminement et dans notre vie de foi, nous pouvons ressentir notre pauvreté, notre inadéquation devant le témoignage à offrir au monde. Mais Dieu a justement choisi une humble femme, dans un village inconnu, dans une des provinces les plus reculées du grand empire romain. Toujours, même au milieu des difficultés les plus ardues à affronter, nous devons avoir confiance en Dieu, renouvelant notre foi dans sa présence et son action dans notre histoire, comme dans celle de Marie. Rien n’est impossible à Dieu ! Avec lui, notre existence avance toujours sur un terrain sûr et elle est ouverte à un avenir rempli d’une ferme espérance.
En professant le Credo, « par l’Esprit-Saint il a pris chair de la Vierge Marie », nous affirmons que l’Esprit-Saint, comme force du Dieu très-haut, a opéré de façon mystérieuse dans la Vierge Marie la conception du Fils de Dieu. L’évangéliste Luc rapporte les paroles de l’archange Gabriel : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre » (1, 35). Deux rappels sont évidents : le premier est le moment de la création. Au début du Livre de la Genèse nous lisons que « un vent de Dieu tournoyait sur les eaux » (1, 2) ; c’est l’Esprit créateur qui a donné vie à toutes choses et à l’être humain.
Ce qui arrive à Marie, à travers l’action du même Esprit divin, est une nouvelle création : Dieu, qui a appelé l’être à partir du néant, donne vie, par l’incarnation, à un nouveau commencement de l’humanité. Les Pères de l’Eglise parlent souvent du Christ comme du nouvel Adam, pour souligner le commencement de la nouvelle création à partir de la naissance du Fils de Dieu dans le sein de la Vierge Marie. Cela nous fait réfléchir sur la manière dont, en nous aussi, la foi apporte une nouveauté si forte qu’elle produit une seconde naissance. En effet, au commencement de notre vie chrétienne, il y a le baptême qui nous fait renaître comme enfants de Dieu, nous fait participer à la relation filiale de Jésus avec son Père.
Et je voudrais faire remarquer que le baptême se reçoit, nous « sommes baptisés » – c’est un passif – parce que personne n’est capable de devenir par soi-même enfant de Dieu : c’est un don qui est conféré gratuitement. Saint Paul rappelle que les chrétiens sont enfants adoptifs dans un passage central de sa Lettre aux Romains, où il écrit : « tous ceux qu’anime l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu.Aussi bien n’avez-vous pas reçu un esprit d’esclaves pour retomber dans la crainte ; vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait nous écrier : Abba ! Père !L’Esprit en personne se joint à notre esprit pour attester que nous sommes enfants de Dieu » (8, 14-16), et non des esclaves. C’est seulement si nous nous ouvrons à l’action de Dieu, comme Marie, seulement si nous confions notre vie au Seigneur comme à un ami en qui nous avons totalement confiance, que tout change, notre vie acquiert un nouveau sens et un nouveau visage : celui des enfants d’un Père qui nous aime et ne nous abandonne jamais.
Nous avons parlé de deux éléments : le premier élément est l’Esprit au-dessus des eaux, l’Esprit créateur ; il y a un autre élément dans les paroles de l’Annonciation.
L’ange dit à Marie : « La puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre ». C’est un rappel de la nuée sainte qui, pendant le chemin de l’Exode, s’arrêtait au-dessus de la tente du rendez-vous, au-dessus de l’arche d’alliance, que le peuple d’Israël portait avec lui, et qui indiquait la présence de Dieu (cf. Ex 40, 34-38). Marie est donc la nouvelle tente sacrée, la nouvelle arche d’alliance : par son « oui » aux paroles de l’archange, Dieu reçoit une demeure en ce monde, celui que l’univers ne peut contenir prend sa demeure dans le sein d’une vierge.
Nous voici revenus à la question d’où nous sommes partis, celle sur l’origine de Jésus, synthétisée dans la question de Pilate : « D’où es-tu ? ».
Nos réflexions font apparaître clairement, dès le début des évangiles, quelle est la véritable origine de Jésus : il est le Fils unique du Père, il vient de Dieu. Nous sommes face au grand mystère, bouleversant, que nous célébrons en ce temps de Noël : le Fils de Dieu, par l’action de l’Esprit-Saint, a pris chair dans le sein de la Vierge Marie. C’est une annonce qui résonne, toujours nouvelle, et qui porte en elle espérance et joie pour notre cœur, parce qu’elle nous donne à chaque fois la certitude que, même si nous nous sentons souvent faibles, pauvres, incapables devant les difficultés et le mal qui est dans le monde, la puissance de Dieu agit toujours et opère des merveilles précisément dans la faiblesse. Sa grâce est notre force (cf. Co 12, 9-10). Merci.
Traduction de ZENIT, Hélène Ginabat