Archive pour le 21 décembre, 2012

Ghirlandaio Domenico. Visitation, approx. 1491, Musée du Louvre, Paris

21 décembre, 2012

Ghirlandaio Domenico. Visitation, approx. 1491, Musée du Louvre, Paris dans images sacrée ghirlandaio-visitation

http://www.artinvest2000.com/ghirlandaio_visitation.htm

Dimanche 23 décembre: commentaires de Marie Noëlle Thabut – premiere et deuxieme lectures

21 décembre, 2012

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

Dimanche 23 décembre: commentaires de Marie Noëlle Thabut

PREMIERE ET DEUXIEME LECTURES

PREMIERE LECTURE – Michée 5, 1-4

Parole du Seigneur.
1 Toi, Bethléem Ephrata,
 le plus petit des clans de Juda,
 c’est de toi que je ferai sortir
 celui qui doit gouverner Israël.
 Ses origines remontent aux temps anciens,
 à l’aube des siècles.
2 Après un temps de délaissement,
 viendra un jour où enfantera
 celle qui doit enfanter,
 et ceux de ses frères qui resteront
 rejoindront les enfants d’Israël.
3 Il se dressera et il sera leur berger
 par la puissance du SEIGNEUR,
 par la majesté du nom du SEIGNEUR son Dieu.
 Ils vivront en sécurité, car désormais sa puissance s’étendra
 jusqu’aux extrémités de la terre,
4 et lui-même, il sera la paix !

Nous avons vu déjà souvent que les prophètes emploient deux types de langage : premier langage, les avertissements pour ceux qui se laissent aller, qui oublient l’Alliance avec Dieu et ses exigences : le prophète est là pour les avertir qu’ils sont en train de fabriquer eux-mêmes leur propre malheur… deuxième langage, les encouragements pour ceux qui essaient de rester fidèles mais qui risquent bien de se décourager à la longue. Et c’est aussi difficile d’écouter les encouragements quand on n’en peut plus que d’accepter les reproches quand ils sont mérités. Le texte que nous avons sous les yeux est bien évidemment de la deuxième veine, celle des encouragements. Où trouve-t-on la preuve qu’on est en période difficile et qu’on est bien près de se décourager ? Quand le prophète écrit « Après un temps de délaissement », il est évident qu’il fait allusion à la période qu’on est en train de vivre ; très certainement le peuple se sent délaissé par Dieu. Et il en vient à dire : toutes les belles promesses qu’on nous a répétées depuis des siècles, ce n’étaient que de belles paroles. Le roi idéal qu’on nous a promis, il n’est pas encore né ! Il ne verra jamais le jour.
 De quelle période historique s’agit-il ? On ne le sait pas trop : le prophète Michée a vécu au huitième siècle dans la région de Jérusalem, à l’époque où l’empire assyrien était très inquiétant ; et les rois de l’époque ne ressemblaient guère au portrait idéal du roi-Messie qu’on attendait ; on pouvait bien se croire délaissés ; ce texte pourrait donc être de Michée. Mais, pour des quantités de raisons, de langue, de style, de vocabulaire, beaucoup pensent que ce texte, dans sa forme actuelle, est très tardif et qu’il aurait été inséré a posteriori dans le livre de Michée.1 A ce moment-là, les raisons du découragement seraient dans la disparition de la royauté ; depuis l’exil à Babylone, le trône de Jérusalem n’existe plus, David n’a plus de descendant ; on vit presque sans discontinuer sous domination étrangère. C’est bien à ce moment-là, justement, qu’on a éprouvé le plus urgent besoin de se rappeler les promesses concernant le Messie.
 Notre prophète (que ce soit Michée ou un autre ne change pas le sens) répond : vous vous croyez délaissés, mais pourtant, soyez bien certains que le projet de Dieu se réalisera. Le Messie naîtra : « Après un temps de délaissement, viendra un jour où enfantera celle qui doit enfanter ». En français, cette phrase pourrait sembler du fatalisme ; mais c’est tout le contraire : « viendra un jour où enfantera celle qui doit enfanter », cela signifie que cela doit arriver, non pas par nécessité, mais c’est une certitude. Simplement parce que Dieu l’a promis. « Celle qui doit enfanter », cela veut dire : celle qui est prévue pour cela dans le plan de Dieu. Et alors, il faut comprendre que le temps de délaissement apparent qu’on est en train de vivre n’est qu’un moment dans le déroulement de l’histoire humaine.
 Pourquoi cette insistance sur Bethléem ? « Toi, Bethléem Ephrata, le plus petit des clans de Juda, c’est de toi que je ferai sortir celui qui doit gouverner Israël. » Il y a deux raisons : premièrement, on sait que le Messie doit être de la descendance de David ; or c’est à Bethléem que le prophète Samuel était venu, sur ordre de Dieu, choisir un roi parmi les huit fils de Jessé… Donc, pour des oreilles habituées, le seul nom de Bethléem évoquait la promesse du Messie.
 Deuxièmement, le contraste est voulu entre la grande et orgueilleuse Jérusalem et l’humble bourgade de Bethléem : « le plus petit des clans de Juda ». Un prophète ne peut pas manquer d’épingler cela ! C’est dans la petitesse, la faiblesse que la puissance de Dieu se manifeste. Selon sa méthode habituelle, Dieu choisit les petits pour faire de grandes choses. Et ce n’est certainement pas par hasard que le prophète accole le nom Ephrata à celui de Bethléem : car Ephrata signifie « féconde » ; ce nom était en fait le nom d’un clan seulement parmi tous ceux qui étaient installés dans la région de Bethléem ; mais, désormais, c’est Bethléem tout entière qui sera appelée « féconde ».
 Cette prophétie de Michée sur la naissance du Messie à Bethléem était certainement bien connue du peuple juif. La preuve en est que, dans l’épisode des rois Mages (Mt 2, 6), Matthieu nous rapporte que les scribes ont cité au roi Hérode la phrase de Michée pour guider la route des Mages vers Bethléem. Mais qui s’est souvenu ensuite que Jésus était bien né à Bethléem ? Pour beaucoup des contemporains de Jésus, il était le Nazaréen ; pour ceux-là, il était impensable que ce Galiléen soit le Messie. On en a la preuve dans l’évangile de Jean par exemple : quand on a commencé à se poser sérieusement des questions au sujet de Jésus, quand certains ont commencé à dire « il est peut-être le Christ ? », on répondait : « Mais voyons… le Christ ne peut pas venir de Galilée, Michée l’a bien dit… » ; voici ce passage : « Parmi les gens de la foule qui avaient écouté les paroles de Jésus, les uns disaient : Vraiment, voici le Prophète ! D’autres disaient : le Christ, c’est lui. Mais d’autres encore disaient : le Christ pourrait-il venir de Galilée ? L’Ecriture ne dit-elle pas qu’il sera de la lignée de David et qu’il viendra de Bethléem, la petite cité dont David était originaire ? C’est ainsi que la foule se divisa à son sujet. » (Jn 7, 40 – 43).
 Revenons aux paroles de Michée ; il reprend les termes de la fameuse promesse, toujours la même, répétée au long des siècles depuis David : un roi naîtra dans la descendance de David ; tel un berger, il fera régner la justice et la paix. Et pas seulement sur Jérusalem : le prophète insiste comme à plaisir sur l’extension de la paix promise : c’est l’humanité tout entière qui est concernée dans l’espace et dans le temps : dans l’espace « Ils vivront en sécurité, car désormais sa puissance s’étendra jusqu’aux extrémités de la terre »… dans le temps puisque « ses origines remontent aux temps anciens, à l’aube des siècles ». Le dessein bienveillant de Dieu est vraiment pour tous les hommes de tous les temps !
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 Note
 1 – La note d’universalisme très marquée au verset 3 s’explique mieux si cette prédication (insérée dans le livre de Michée) n’est pas du prophète Michée lui-même (au huitième siècle av.J.C.), mais d’un disciple postérieur : car l’universalisme du projet de Dieu (tout comme le monothéisme strict dont il est le corollaire) n’a été compris que pendant l’Exil à Babylone probablement.

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DEUXIEME LECTURE – Hébreux 10, 5-10

Frères,
5 en entrant dans le monde,
 le Christ dit, d’après le Psaume :
 Tu n’as pas voulu de sacrifices ni d’offrandes,
 mais tu m’as fait un corps.
6 Tu n’as pas accepté les holocaustes
 ni les expiations pour le péché ;
7 alors je t’ai dit :
 Me voici, mon Dieu,
 je suis venu pour faire ta volonté,
 car c’est bien de moi que parle l’Ecriture.
8 Le Christ commence donc par dire :
 Tu n’as pas voulu ni accepté
 les sacrifices et les offrandes,
 les holocaustes et les expiations pour le péché
 que la Loi prescrit d’offrir.
9 Puis il déclare :
 Me voici, je suis venu pour faire ta volonté.
 Ainsi, il supprime l’ancien culte pour établir le nouveau.
10 Et c’est par cette volonté de Dieu que nous sommes sanctifiés,
grâce à l’offrande que Jésus a faite de son corps, 
 une fois pour toutes.

Par deux fois, dans ces quelques lignes, nous avons entendu la même phrase : « Me voici, mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté » ; elle est extraite du psaume 39/40. Quelques mots, d’abord, sur ce psaume : c’est un psaume d’action de grâces ; il commence par décrire le danger mortel auquel le peuple d’Israël a échappé : « D’un grand espoir j’espérais le SEIGNEUR : il s’est penché vers moi pour entendre mon cri. Il m’a tiré de l’horreur du gouffre, de la vase et de la boue ; il m’a fait reprendre pied sur le roc, il a raffermi mes pas. » Ce dont il est question ici, c’est la sortie d’Egypte ! Et c’est pour cette libération qu’on rend grâce. Le psaume continue : « Dans ma bouche, il a mis un chant nouveau, une louange à notre Dieu. » Et un peu plus loin : « Tu n’as pas voulu de sacrifices ni d’offrandes, mais tu m’as fait un corps. Tu n’as pas accepté les holocaustes ni les expiations pour le péché ; alors je t’ai dit : Me voici, mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté ». Traduisez : la meilleure manière de rendre grâce à Dieu, ce n’est pas de lui offrir des sacrifices, c’est de nous rendre disponibles pour faire sa volonté.
 Car, en définitive, ce « me voici », c’est la seule réponse que Dieu attend du coeur de l’homme ; c’est le fameux « me voici » des grands serviteurs de Dieu ; c’est celui d’Abraham, pour commencer, au moment du sacrifice d’Isaac ; entendant la voix de Dieu qui l’appelait, il a répondu simplement « me voici » ; et cette disponibilité du patriarche a toujours été donnée en exemple aux fils d’Israël : l’épisode que nous appelons le « sacrifice d’Isaac » (Gn 22) est considéré comme un modèle alors qu’on sait bien qu’Isaac n’a pas été immolé ; preuve qu’on a compris depuis longtemps que la disponibilité vaut mieux que tous les sacrifices.
 Un autre célèbre « me voici », ce fut celui de Moïse au buisson ardent ; et cette disponibilité a suffi à Dieu pour faire de ce berger qui se disait bègue le grand chef de peuple qu’il est devenu.
 Quelques siècles plus tard, au temps des Juges, un autre « Me voici » fut celui du petit Samuel, celui qui devait devenir un grand prophète du peuple d’Israël. Rappelez-vous le récit de sa vocation : il avait été consacré par ses parents au service de Dieu dans le sanctuaire de Silo auprès du prêtre Eli, et il habitait avec le vieux prêtre. Une nuit, il avait entendu à plusieurs reprises une voix qui l’appelait ; ce ne pouvait être que le prêtre, bien sûr ; et par trois fois, l’enfant s’était levé précipitamment pour répondre au prêtre « tu m’as appelé, me voici ». Et celui-ci, chaque fois, répondait « mais non, je ne t’ai pas appelé ». A la troisième fois, le prêtre avait compris que l’enfant ne rêvait pas et lui avait donné ce conseil : « la prochaine fois que la voix t’appellera, tu répondras : Parle SEIGNEUR, ton serviteur écoute. » (1 S 3, 1-9). Et Samuel est resté dans la mémoire d’Israël comme un modèle de disponibilité à la volonté de Dieu. C’est lui qui, quelques années après cette nuit mémorable, devenu adulte, a osé dire au premier roi d’Israël (Saül) cette phrase superbe : « Le SEIGNEUR aime-t-il les holocaustes et les sacrifices autant que l’obéissance à la parole du Seigneur ? Non ! L’obéissance est préférable au sacrifice, la docilité à la graisse des béliers. » (1 S 15, 22). L’idéal de Samuel c’était tout simplement d’être un humble serviteur de Dieu, ce qu’il fut pendant de nombreuses années.
 Et vous savez bien que le titre de « serviteur » de Dieu est le plus beau compliment que l’on puisse faire à un croyant dans la Bible. Au point que, dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, dans les pays de langue grecque, on aimait donner à son enfant le prénom de « Christodule » (christodoulos) qui veut dire « serviteur du Christ » ! (Il y a un monastère de saint Christodule à Patmos, par exemple).
 Cette insistance sur la disponibilité nous donne une double leçon à la fois très encourageante et terriblement exigeante : si Dieu ne sollicite que notre disponibilité, cela signifie que chacun, chacune de nous, tels que nous sommes, peut être utile pour le Royaume de Dieu ; voilà qui est encourageant et merveilleux. Mais, deuxième conséquence, cela veut dire également que, lorsqu’un engagement de service nous est demandé, nous ne pourrons plus jamais nous abriter derrière nos arguments habituels : notre ignorance, notre incompétence ou notre indignité !
 L’auteur de la Lettre aux Hébreux reprend donc le texte du psaume 39/40 et il sait bien qu’il parle au nom du peuple tout entier ; mais il l’applique à Jésus-Christ, car personne mieux que lui ne peut dire en toute vérité : « Tu n’as pas voulu de sacrifices ni d’offrandes, mais tu m’as fait un corps. Tu n’as pas accepté les holocaustes ni les expiations pour le péché ; alors je t’ai dit : Me voici, mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté, car c’est bien de moi que parle l’Ecriture. » Notons bien que la disponibilité du Christ à la volonté du Père ne commence pas au soir du Jeudi-Saint. Ce n’est donc pas seulement la mort du Christ qui est la matière de son offrande, mais sa vie tout entière, l’amour donné à tous au jour le jour, depuis le début de sa vie : « En entrant dans le monde, le Christ dit… tu m’as fait un corps… me voici. » (v. 5-7 citant encore le psaume 39/40).
 Désormais, bien sûr, le Corps du Christ, que nous sommes, n’a rien d’autre à faire que de continuer chaque jour à dire « me voici »… (et à agir en conséquence évidemment).
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 Compléments
 - « La disponibilité vaut mieux que tous les sacrifices » : cette formule hébraïque ne signifie pas que l’on devrait supprimer les sacrifices ; mais que ceux-ci perdent leur sens s’ils ne sont pas accompagnés par une vie de disponibilité et de service de Dieu et des hommes.
 - Dans un contexte de lutte contre les idoles, on parlait aussi du « sacrifice des lèvres » ; c’est-à-dire une prière et une louange adressées au seul Dieu d’Israël. Parce que cela pouvait bien arriver qu’on offre de coûteux sacrifices au temple de Jérusalem tout en continuant à adresser des prières à d’autres dieux ; si cela ne fait pas de bien, cela ne fait pas de mal, comme on dit ; les prophètes étaient très sévères là-dessus, parce que cela fait du mal justement, contrairement à ce qu’on croit ! Offrir à Dieu le « sacrifice des lèvres » c’était lui appartenir sans partage. Et cela valait mieux, on le savait, que tous les sacrifices d’animaux. Il suffit de lire Osée par exemple : « En guise de taureaux, nous t’offrirons en sacrifice les paroles de nos lèvres. » (Os 14,3). Et en écho le psaume 50/51 : « Offre à Dieu la louange comme sacrifice et accomplis tes voeux envers le Très-Haut… Qui offre la louange comme sacrifice me glorifie. » (Ps 50/51, 14. 23).
 - En matière de disponibilité comme unique condition pour le service de Dieu, on en a un bel exemple avec l’histoire de Jacob : ce n’était pas un « enfant de choeur », et le récit biblique ne fait rien pour atténuer sa malhonnêteté parfois ! Mais il avait une qualité majeure, la soif de Dieu. C’est cela qui lui a permis d’entrer dans la grande chaîne des serviteurs du projet de Dieu.

Homélie du 4e dimanche de l’Avent, C

21 décembre, 2012

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

Homélie du 4e dimanche de l’Avent, C

Mi 5, 1-4a ; He 10, 5-10 ; Lc 1, 39-45

Michée, Paul et Luc, même combat. Trois textes, mais un seul message.

Au temps des prophètes d’hier comme aujourd’hui, les croyants veulent combattre la violence et retrouver la paix, arrêter les divisions et faire l’unité, être délivrés du mal et de tous les maux, sauver le monde et se sauver avec lui. Mais il ne suffit pas pour cela de multiplier les rites extérieurs, de se purifier par des cérémonies, ni de réciter des prières, obéir aux révélations et croire aux apparitions.       
Le vrai remède, le seul sacrifice, la source de la sanctification et de la joie, c’est de reproduire à notre tour le « fiat » de Jésus et le « fiat » de Marie… « Père, me voici, je suis venu pour faire ta volonté »… « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur »… Tout est là. La vraie dévotion mariale y compris.         
Ce n’est plus de la magie, c’est de la conversion. Ce n’est plus le frisson sentimental, ni la crainte « janséniste », mais le réalisme de l’obéissance. Ce n’est plus l’illusion des actions symboliques et des faux-semblants, la trêve de Noël ou des confiseurs, mais l’esprit de l’Evangile incarné dans la vie quotidienne et dans la durée.
La liturgie de l’Avent nous a précisé les étapes de ce cheminement qui conduit à l’état de disponibilité jusqu’à l’événement de l’enfantement et de l’incarnation. Le chemin qui conduit de la graine au fruit… Ouvrir les portes de sa maison intérieure, l’aménager avec un cœur nouveau, se laisser envahir par l’Esprit qui vient nous féconder.
Il nous reste alors à porter en nous le Verbe de Dieu, ce fruit venu du ciel, puis à le mettre au monde, pour que nous puissions, par lui et avec lui, porter ces fruits savoureux que l’on appelle charité, paix et joie, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de soi, comme le précisait Paul aux chrétiens de Galatie (5, 22).
Il ne s’agit pas ici d’images ou de construction littéraire, mais de réalité de la foi et des réalités spirituelles.
Pour reprendre les expressions à la fois scientifiques et poétique d’un médecin psychiatre contemporain, et spécialiste en psychosomatique : « Nous sommes habilités, par la grâce du Père et l’activité du Saint Esprit qui nous couvre entièrement, à être en état de grossesse pendant toute notre vie. Une heureuse grossesse, qui nous fait porter Jésus. Et si nous le portons vraiment en nous, nous le sentirons en quelque sorte bouger, remuer dans nos pensées, nos sentiments, nos activités. Nous pourrons même percevoir en nous le battement de son cœur, le cœur d’un amour éternel qui nous lie à Dieu et, par lui, à tous les êtres humains. C’est déjà en nous le Royaume des cieux et la vie éternelle, le sens de notre vie et notre santé profonde ».
… Encore faut-il être très attentifs à cette présence qui se meut en nous. Prendre conscience de cet état, c’est aussi trouver le repos et la paix intérieure. Devenir comme Marie de plus en plus disponibles. C’est éveiller notre capacité d’adoration et de gratitude. C’est décupler notre capacité intérieure de foi, de confiance et de contemplation. C’est l’état même de Marie qui lui a permis de proclamer le Magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit tressaille de joie en Dieu mon sauveur ».
Porter le Christ, c’est porter la vérité la plus dépouillée d’artifice, la clarté la plus évidente, la simplicité la plus parfaite et l’objectivité totale… Et celui que nous portons désire intensément être actif au plus creux de notre quotidien, pour y susciter les merveilles que sont les fruits de l’Esprit dont parlera Paul.
Heureux sommes-nous, si nous croyons à l’accomplissement des paroles qui nous sont dites de la part du Seigneur.
Ce n’est pas une théorie mystique ni une description poétique, mais la réalité qui se vit dans l’eucharistie. Elle peut nous faire comprendre la différence entre une assistance passive à la messe, où nous attendons des grâces et des effets quasi magiques et automatiques, et la participation pleine et entière où, comme Marie, nous accueillons la Parole, nous proclamons notre « fiat » d’adhésion qui se prolonge et se prouve dans une conversion du cœur et de l’esprit. Une totale disponibilité, un engagement, dans l’amour, qui est aujourd’hui, depuis Jésus et avec lui, le nouveau et seul sacrifice qui purifie, sauve, sanctifie.
Alors, nous pourrons chanter « Magnificat », le Seigneur fit pour moi des merveilles. Mon âme exalte le Seigneur. Exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008q