Homélie 3e dimanche de l’Avent, C

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Homélie 3e dimanche de l’Avent, C

So 3, 14-18 ; Ph 4, 4-7 ; Lc 3, 10-18

Ces trois textes bibliques m’ont fait penser à un vieux « tube » de Charles Trenet : « Y’a d’la joie, partout y’a d’la joie… ». Ce qui n’est généralement pas le cas. Il suffit de lire les quelques autres pages du petit livre de Sophonie. Il y est surtout question de jours de détresses et d’angoisses, d’orgueil et de manques de justice.
Quant à saint Paul, il semble vivre en dehors du temps et des préoccupations quotidiennes. Il balaye les inquiétudes, nous invite à garder la sérénité et la joie, comme s’il pratiquait la méthode Coué. Il ose même ajouter : « Ne soyez inquiets de rien ». Il a beau dire… Cela ne va pas de soi. Mais à l’époque où il écrit cette lettre, Paul est en prison, toutefois il sait qu’il va être libéré.
Cerise sur le gâteau, ce troisième dimanche de l’Avent, est même appelé le dimanche « en rose », puisque la liturgie permet ce jour-là, de remplacer le violet du temps de pénitence par le rose qui se rapproche du blanc de la fête.
Dans l’Evangile, Jean Baptiste nous annonce LA Bonne Nouvelle, mais elle n’est pas sans conditions. Heureusement, il précise ce que l’on doit faire, notamment pour découvrir le sens profond de la joie et ses racines.
Or, la joie évoquée ici n’est pas suscitée par une guérison, ni une promotion, ni une diminution des impôts. La joie naît de la rencontre avec quelqu’un. Une heureuse présence, qui ne supprime pas pour autant les difficultés. Mais il y a quelqu’un pour les porter avec nous, mieux les juger à leur juste valeur, chercher avec nous des remèdes ou des solutions. Ce qui est considérable.
La lettre de Paul, est aussi une véritable épître de la joie. Non pas la joie d’une réussite quelconque, mais celle d’appartenir au Christ. Nous dirions aujourd’hui : Heureux et fiers d’être chrétiens, et de pouvoir épouser le comportement du Christ dans ses relations avec Dieu et avec nos sœurs et nos frères humains.
Ce Verbe de Dieu, « Il est proche », proclame Sophonie. Tellement proche qu’ « il est en toi ». Cette proximité du Seigneur, précise Paul, relativise les inquiétudes, nourrit la joie, contribue à la sérénité, et donne la paix de Dieu. C’est vraiment une Bonne Nouvelle.
Mais, explique à sa manière Jean Baptiste, si le don de la sérénité et de la joie vient de Dieu et est gratuit, il ne peut se développer et porter du fruit sans une participation active de notre part. La terre de notre cœur doit être labourée par la conversion. De même, notre agir doit être inspiré et orienté par le Christ « conçu au fond de nous-même », comme l’a écrit saint Augustin. Nous pouvons ainsi le mettre au monde en le manifestant dans nos comportements.
Ce « faire », Jean Baptiste le propose encore aujourd’hui avec des mots simples et directs, que chacun peut transformer dans l’ordinaire quotidien, non pas en vœux pieux, mais en actions concrètes de justice, d’amour et de solidarité. Tous les secteurs de la vie sont concernés et aucune catégorie de personnes n’est exemptée.
Pour suivre Jésus, pour préparer sa manifestation à Noël, il ne suffit donc pas de bâtir une crèche, ni d’organiser d’émouvantes célébrations.
Le Jean Baptiste d’hier se retrouve, par exemple, dans les animateurs et animatrices des Campagnes de l’Avent « Action Vivre Ensemble ». Ils nous rappellent aujourd’hui que si les personnes, les familles, les communautés et les nations qui ont deux vêtements et de quoi manger jusqu’à posséder des surplus, les partagent avec ceux et celles qui n’en ont pas… alors, la paix et la joie seront de la partie. Pensons-y spécialement ce dimanche au moment de l’offrande matérielle, qui est un « geste solidaire en Eglise ».
Plus largement, Jean nous demande aussi de ne jamais exiger l’impossible, d’éviter la violence en tout et partout. Dont celle des mots qui blessent et qui tuent. Et donc, de mettre notre point d’honneur à ne faire de tort à personne.
C’est par ces exhortations que Jean annonçait au peuple la Bonne Nouvelle. Il l’annonce encore aujourd’hui. Les paroles de l’Ecriture sont toujours neuves. Elles restent d’actualité. Elles sont proclamées dans un monde où l’argent est toujours roi, où le profit immédiat est la règle, où les écarts entre les riches et les pauvres se creusent toujours davantage.
Le Christ attend des chrétiens qu’ils soient des prophètes du comportement… Et les prophètes ne sont pas ceux qui prédisent l’avenir, mais ceux qui s’efforcent de comprendre comment la Parole de Dieu s’applique dans les situations et les problèmes d’aujourd’hui.
Préparer Noël, c’est préparer son cœur pour que le Christ vienne vraiment s’incarner dans notre vie. C’est accepter de mettre ses interpellations sur notre table. Pour accueillir vraiment Jésus, il faut être baptisés dans l’Esprit Saint et dans le feu. Car il y a, sur nos terres intérieures, du bon grain à récolter, mais également, ne l’oublions pas, de la paille à brûler.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1951 – 2008

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