Archive pour le 21 novembre, 2012

Angelico, Présentation au Temple

21 novembre, 2012

Angelico, Présentation au Temple dans images sacrée Presentazione%20di%20Ges%F9%20al%20Tempio%20Mantegna

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Les anonymes des évangiles (Introduction)

21 novembre, 2012

http://www.bible-service.net/site/1578.html

Les anonymes des évangiles

(Introduction)

Les évangiles se présentent à nous comme une succession des rencontres de Jésus. Récits de vocation, récits de miracles, discours et polémiques provoqués par des interlocuteurs à chaque fois nouveaux, ce sont plus d’une trentaine d’épisodes qui s’articulent sur l’intrigue principale de chaque évangile. De nombreux personnages apparaissent puis disparaissent. Si on excepte Jésus, le héros de l’histoire, ainsi que ceux qui l’accompagnent, nous sommes peu renseignés sur la plupart d’entre eux. Nous ignorons leur destin et même leur nom pour la plus grande joie des conteurs et des romanciers qui imagineront la suite de l’histoire, comblant ainsi les vides…
Si l’on s’en tient aux évangiles, il n’est pas inutile de s’interroger sur la signification de ces rencontres : qui Jésus rencontre-t-il ? Comment ? Pourquoi ? Bien sûr, affronter ces questions, c’est interroger les choix narratifs, considérer les récits dans leur particularité et dans leur enchaînement – ce que nous pouvons appeler leur « trajectoire ». Cette trajectoire est au service d’une orientation théologique, d’un regard porté sur le Christ, sa manière d’entrer en relation avec les hommes et les femmes, souvent anonymes, qui croisent sa route. Au gré des lectures et des analyses, il s’agit donc de tenir ensemble trois expériences qui s’articulent, s’éclairent et parfois s’entremêlent :
 le noyau dur, irréductible et inatteignable, de l’expérience de Jésus historique, homme de la rencontre ;
 l’expérience des premières communautés qui ont recueilli la mémoire de Jésus, non sans la mesurer à la multiplicité des rencontres qui les avaient constituées comme communautés ;
 notre expérience personnelle et communautaire de lecteurs marqués par des rencontres de personnes dont nous ignorons les noms mais qui ont fait date dans nos existences.
Dans le cadre de ce Dossier, il n’était évidemment guère possible de traiter l’ensemble des évangiles. Il a donc fallu opérer un certain nombre de choix :
1) Nous nous sommes restreints aux évangiles synoptiques. L’étude de l’évangile de Jean nous aurait entraînés sur d’autres terrains : les récits de rencontre y sont plus longs et plus complexes. Il suffit de mentionner ici l’épisode de la guérison de l’aveugle-né (Jn 9) qui se déploie en plusieurs petites scènes dont certaines se déroulent en l’absence de Jésus.
2) Dans les évangiles synoptiques, nous nous sommes limités à ce qu’il est convenu d’appeler le « ministère de Jésus » depuis son baptême jusqu’à l’entrée à Jérusalem, prédication dans le Temple incluse.
3) Parmi les nombreux épisodes, nous avons privilégié les suivants :
 La rencontre de Jésus avec la veuve dans le Temple (Mc 12,41-44) est apparue comme une bonne entrée en matière, le personnage étant anonyme et la rencontre rapide (s’agit-il d’ailleurs vraiment d’une rencontre ?). La lecture de l’épisode fournira quelques clés pour la suite du travail.
 L’étude des rencontres de Jésus avec les personnes souffrantes (malades ou possédés) s’est imposée, vu leur importance dans les récits évangéliques.
· La catégorie des rencontres avec les parents qui intercèdent pour leur enfant, quoique peu nombreuse, méritait d’être traitée à part, non seulement pour l’émotion qui s’en dégage, mais pour la théologie construite par chaque évangéliste.

Rencontres avec des souffrants
Dans les trois évangiles synoptiques, le ministère de Jésus se déroule sous le signe de la rencontre avec celles et ceux qui souffrent : malades, possédés et leur entourage. Depuis longtemps, la recherche exégétique s’est employée à classer ce qu’on appelle communément les « récits de miracle », elle en a dégagé les schémas types et s’est rendue attentive à l’originalité littéraire et théologique de chaque évangile. Nous y ajouterons les catégories apparues dans le chapitre précédent : premier, dernier, unique. Pour chaque évangile, nous poserons la question : qui sont le premier et le dernier souffrants rencontrés par Jésus ? En quoi chaque rencontre est-elle unique ?
L’étude se déploiera comme suit : un premier temps sera consacré aux convergences entre les évangiles synoptiques et un second temps à l’originalité de chacun. Et ceci en nous plaçant de deux points de vue : d’abord en essayant de saisir la trajectoire qui mène de la première à la dernière rencontre, ensuite en nous concentrant sur le portrait d’une personne particulière.
Convergences
Nous envisageons ici les récits de guérison et d’exorcisme communs aux évangiles synoptiques, dans leur singularité comme dans leur succession. À la lecture du tableau suivant, il est possible de relever un certain nombre de séquences communes qui s’enchaînent plus ou moins dans un même ordre.
Premières guérisons
Cette première séquence comprend la guérison d’un possédé et celle de la belle-mère de Pierre suivi d’un « sommaire » au coucher du soleil, dans le cadre plus ou moins strict d’une journée à Capharnaüm. On peut y joindre la guérison du lépreux. Selon les évangiles, les récits ne s’enchaînent pas dans le même ordre, en fonction de la christologie de chacun.
Le pur et l’impur
Toutefois, même si chez Matthieu la carrière de Jésus commence par la purification d’un lépreux alors qu’elle débute, chez Marc et Luc, par un exorcisme, ces premiers récits de rencontre se situent tous sur la frontière entre le pur et l’impur. L’homme de la synagogue est « possédé par un esprit impur » (Mc 1,23 ; Lc 4,33) et le lépreux demande à « être purifié » (Mt 8,2-3) ; les trois synoptiques ont fait le choix de saisir Jésus sur une zone de fracture des sociétés de leur temps. Et cela, de façon publique : l’exorcisme a lieu dans le cadre public de la synagogue de Capharnaüm (Mc 1,21 ; Lc 4,33) et des foules nombreuses suivent Jésus qui descend de la montagne quand survient le lépreux (Mt 8,1). Ce dernier récit se trouve d’ailleurs dans les trois évangiles. Jésus « étend la main », comme jadis Moïse quand il accomplissait des prodiges (Ex 14,21.27).
Une femme malade
Les évangélistes synoptiques s’accordent pour dire que la belle-mère de Pierre est la première femme rencontrée par Jésus. C’est aussi la première fois que Jésus franchit le seuil d’une maison. Les trois récits s’achèvent sur le service : « elle les [le] servait » (Mc 1,31 et //). Certains auteurs féministes ont pu, à raison, analyser ce récit, en particulier celui de Mt, comme un récit de vocation : Pierre et ses compagnons sont appelés à devenir pêcheurs d’hommes, la belle-mère de Pierre est appelée à servir. Quoi qu’il en soit, nous pouvons au moins prendre acte d’un nouveau point d’accord entre les évangiles synoptiques : le contraste entre cette femme, personnalité reconnue de l’entourage apostolique, et les autres anonymes qualifiés par leur seule maladie : le possédé, le lépreux.
Les rencontres avec les pécheurs
Cette deuxième séquence comprend la guérison du paralytique, l’appel du collecteur d’impôt et le repas en compagnie des pécheurs qui s’achève sur une déclaration de Jésus révélant le sens de sa mission : « Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs » (Mc 2,17 et //).
Le récit de la guérison du paralytique présente des traits communs aux trois synoptiques : Jésus voit la foi avant de libérer l’infirme de son péché et de son handicap. Pour la première fois dans le cours des évangiles apparaît le groupe des scribes opposants à Jésus ; dans le même temps, le récit s’achève sur un chœur final qui rend gloire à Dieu (Mc 2,12b et //).
Un contraste est établi entre le paralytique anonyme et le disciple collecteur d’impôt connu sous le nom de Lévi (selon Lc et Mc) ou Matthieu (selon Mt). Dans les deux cas, la rencontre commence par un regard : Jésus « voit » la foi des porteurs, puis il « voit » le collecteur d’impôt assis à son bureau. Par la suite, sa parole a un effet immédiat : le paralytique prend son brancard et part, Lévi/Matthieu se lève et suit Jésus.
Les polémiques
Une polémique vient s’insérer dans le récit de la guérison de l’homme à la main desséchée. Une controverse précédente a porté sur le respect du sabbat (Mc 2,23 et //). L’épisode, qui a pour cadre le sabbat et la synagogue, vient conforter et illustrer la déclaration de Jésus : « Le Fils de l’homme est maître du sabbat » (Mc 2,27 et //). En tous les cas, elle aboutit à un complot contre Jésus. Le verbe katagorô, « accuser » apparaît ici pour la première fois (Mc 3,2 et //) et ne revient que dans le cadre des récits de la Passion. Cette guérison provocante oriente déjà vers le drame final. La perspective s’élargit ensuite par la mention de guérisons et exorcismes collectifs (Mc 3,10-11 et //).
Les récits de tempêtes
Jésus passe en pays païen et affronte la tempête des flots et celle du démoniaque. Dans ces deux récits, la mer joue un rôle capital comme lieu de mort par noyade (Mc 4,38 et // ; 5,13 et //).
Dans le récit de la tempête apaisée, Jésus « menace » les éléments naturels, comme il menace habituellement les esprits impurs. Curieusement, ce verbe n’est pas repris dans le récit du possédé de Gérasa. Mais il y a tout un jeu entre le singulier et le pluriel : Jésus devient de plus en plus singulier [seul] et le[s] démoniaque[s] de plus en plus pluriel[s]. Le démon s’exprime au pluriel, il se perd dans un troupeau de porcs. Et toute la ville (nouveau pluriel) vient demander à Jésus de s’en aller. Ce premier coup d’éclat de Jésus en pays païen aboutit à son expulsion de ce territoire. Le cri du possédé : « De quoi te mêles-tu, Fils du Dieu très haut ? » (Mc 5,7 et //) constitue une réponse à la déclaration des passagers de la barque : « Qui donc est-il ? » (Mc 4,41 et //). D’une certaine manière, Jésus joue son identité et le succès de sa mission dans cette rencontre tumultueuse avec le possédé païen.
La femme malade et la fillette morte
Ces deux récits sont arrimés l’un à l’autre par la technique de l’enchâssement. Par plus d’un trait, les deux personnages font l’objet d’une mise en parallèle :
 leur âge : une femme malade depuis douze ans, une fillette du même âge (Mc 5,25.42) ;
 leur statut social : une femme seule qui approche de manière subreptice, une fille de notable qui bénéficie du soutien paternel ;
 le contact avec Jésus : l’une touche son manteau alors que Jésus saisit la main de l’autre (infraction au code de pureté).
Le parallélisme entre les personnages féminins est redoublé par celui entre la femme et le père de la fillette. La foi de la femme malade rejoint la foi du notable prosterné ; notons un glissement de vocabulaire significatif : le notable supplie Jésus pour sa « fille » (thugater), mais quand Jésus est confronté à la femme guérie, c’est lui qui use de ce terme : « [Ma] fille, ta foi t’a sauvée », comme s’il se faisait le père de cette femme qui jusqu’alors ne bénéficiait d’aucune protection masculine (c’est la seule femme que Jésus interpelle de la sorte).
La technique de l’enchâssement souligne les correspondances entre les personnages et les actes de foi du notable et de la femme impure se complètent. Si l’on se place sur le plan de la rencontre, il y a là la traduction d’une expérience humaine simple et profonde : parti secourir un homme en détresse, Jésus est retardé en cours de route par une autre détresse.
Les deux fils
La guérison de l’enfant épileptique, après la transfiguration, fait résonner une voix paternelle humaine : « Je t’ai amené mon fils » (Mc 9,17 et //), qui fait écho à la voix paternelle divine : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le » (Mc 9,7 et //). Le récit illustre par ailleurs l’absence de foi des disciples et la puissance de Jésus.
Le point d’aboutissement : l’aveugle guéri
S’il y a divergence entre les synoptiques sur la première rencontre de Jésus, il y a par contre accord sur la dernière rencontre. La scène se déroule à Jéricho, elle met face à face Jésus et un [deux] aveugle[s] (Mc 10,46-52 et //), elle clôt le ministère de Jésus avant Jérusalem. Notons qu’habituellement tous les récits de guérison se concluent par le renvoi de la personne malade mais qu’ici, de façon inattendue, l’aveugle suit Jésus sur la route de Jérusalem (encadré ci-dessous). De façon diverse, selon les évangiles, la rencontre s’achève comme un récit de vocation qui semble faire pendant au récit de l’appel des premiers disciples (Mc 1,16-18 et //). C’est bien là le paradoxe : le récit du dernier miracle accompli par Jésus, c’est l’histoire de la première personne guérie qui se décide à le suivre !
Contrastes
Diversement selon les séquences, les évangiles jouent d’un certain nombre de contrastes :
 entre les foules et les individus : alternance entre les récits de guérisons collectives (les « sommaires ») et les récits de rencontre personnelle ; le même ressort fonctionne quand un personnage surgit de la foule (femme hémorroïsse chez Mc et Lc, aveugle[s] de Jéricho chez tous) ;
 entre les hommes et les femmes : le lépreux et la belle-mère de Pierre, le notable et la femme hémorroïsse ;
 entre les personnalités reconnues (la belle-mère de Pierre, le disciple Lévi/Matthieu) et les personnes anonymes (le lépreux, le possédé, le paralytique) ;
 contraste social enfin : la fillette qui bénéficie de l’intercession de son père, un notable, et la femme hémorroïsse dans sa solitude avant d’être désignée comme « fille ».
Ainsi, les évangiles permettent-ils de saisir la variété des personnes rencontrées par Jésus au-delà des clivages que la société juive du Ier siècle pouvait imposer. Jésus semble même marquer une nette préférence pour ceux qui se situent aux marges. Chaque récit évangélique organise ces contrastes de façon originale.

Vianney Bouyer, Cahier Évangile n° 160

Le « porche » de la trilogie de Joseph Ratzinger-Benoît XVI

21 novembre, 2012

http://www.zenit.org/article-32608?l=french

JOURNÉE MONDIALE DES DROITS DE L’ENFANT : « L’ENFANCE DE JÉSUS »

Le « porche » de la trilogie de  Joseph Ratzinger-Benoît XVI

Anita Bourdin                                                                             
ROME, mardi 20 novembre 2012 (Zenit.org) – Coïncidence ? Le livre de Benoît XVI sur l’enfance du Christ est présenté à la presse le jour où l’on célèbre la Journée mondiale des droits de l’enfant. Et alors que l’Eglise va entrer dans l’Avent, temps de préparation à Noël. Il s’intitule : « L’enfance de Jésus ». Il constitue comme le « porche» des deux volumes précédents. Et le pape y livre sa propre « méthode » de lecture de la bible. Elle ne manque pas d’actualité.
C’est, certes, le troisième volume de la trilogie de Joseph Ratzinger-Benoît XVI « Jésus de Nazareth », mais le pape avertit dès l’avant-propos : c’est ce volume qui constitue le « porche » des deux autres tomes consacrés à la vie publique du Christ – « Du baptême dans le Jourdain à la Transfiguration » –, puis à la passion et à la résurrection du Christ – « De l’entrée à Jérusalem à la Résurrection»-.
« Il ne s’agit pas d’un troisième volume, écrit le pape, mais d’une porte d’entrée qui introduit les deux volumes précédents consacrés à la figure et au message de Jésus de Nazareth ».
Ce livre de quelque 180 pages – Avant-Propos, 4 chapitres et un Epilogue – sort  en librairie demain, mercredi 21 novembre, en 9 langues et dans une cinquantaine de pays* : le premier tirage est d’un million d’exemplaires. D’autres traductions vont suivre, avec une distribution dans 72 pays.
Il a été présenté ce matin au Vatican par le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la culture, par Mme Maria Clara Bingemer, professeur à l’Université catholique de Rio de Janeiro, le P. Giuseppe Costa, SDB, directeur de la Librairie Editrice vaticane, et le P. Federico Lombardi, SJ, directeur de la Salle de presse du Saint-Siège.
Bref discours de la méthode
Mais avant même de lire ces pages, le pape offre un petit discours de la méthode. En quatre points. Tout d’abord, il a « cherché à interpréter » ce que les évangélistes de l’enfance, Matthieu et Luc, ont raconté, « en dialoguant avec des exégètes d’hier et d’aujourd’hui ».
Ensuite, il souligne les « deux étapes » de son interprétation. Il s’est demandé « ce qu’ont voulu dire, à leur époque, les auteurs de ces textes » : « c’est la composante historique de l’exégèse ». Le pape assume ainsi les conquêtes de l’exégèse moderne.
Il affirme en même temps la nécessité de la prise de risque de l’exégète dans une seconde étape : « Il ne faut pas laisser le texte dans le passé, en l’archivant parmi les événements arrivés il y a longtemps. La seconde question doit être: Ce qui est dit est-il vrai? Cela me regarde-t-il? Et si cela me regarde, de quelle façon? »
Et de préciser : « Devant un texte tel qu’un texte biblique, dont l’ultime et plus profond auteur, selon notre foi, est Dieu lui-même, la question du rapport entre le passé et le présent fait immanquablement partie de l’interprétation elle-même ».
Le pape va devance les objections en affirmant : « Cela ne diminue pas, mais accroît le sérieux de la recherche historique ». Voilà un choix exégétique qui a son poids.
L’auteur n’en reconnaît pas moins  les limites de l’investigation lorsqu’il s’agit de la bible : « Toute interprétation reste en deçà de la grandeur du texte biblique ».
Il affirme également son objectif : « J’espère que ce petit livre, en dépit de ses limites, pourra aider de nombreuses personnes dans leur chemin vers et avec Jésus ».
L’origine de Jésus et du baptisé
Le premier chapitre pose la question de l’origine de Jésus – et ce faisant de tout homme -: « D’où es-tu ? » (Jn 19, 9). Il examine les généalogies de Jésus chez Matthieu et Luc, dont saint Jean donne la clef.
« Jean, affirme le pape, a résumé la signification la plus profonde des généalogies et nous a enseigné à les comprendre également comme explication de notre origine même, de notre vraie « généalogie ». Comme les généalogies s’interrompent à la fin, parce que Jésus n’a pas été engendré par Joseph mais très réellement est né de la Vierge Marie, par l’opération du Saint-Esprit, de la même façon cela vaut à présent aussi pour nous : notre vraie « généalogie » est la foi en Jésus, qui nous donne une nouvelle origine, nous fait naître « de  Dieu ». » (p. 25).
Les trois « annonces » à Zacharie, Marie et Joseph
Après les deux généalogies, de la mère et du père adoptif, le deuxième chapitre rassemble les trois « annonces » à Zacharie, pour la naissance de Jean-Baptiste, puis, pour la naissance de Jésus, à Marie, et à Joseph, choisi pour accueillir Marie et l’Enfant dans sa maison.
Dans le récit de l’Annonciation à Marie par Luc, le pape insiste sur la liberté humaine face à Dieu qui cherche comment sauver l’humanité. « Qu’il m’advienne selon ta parole » : « C’est le moment de l’obéissance libre, humble et en même temps magnanime, où se réalise la décision la plus haute de la liberté humaine » (p. 58).
Le pape évoque de façon originale la solitude de Marie, comme pour renvoyer, mutatis mutandis, à l’expérience de tout baptisé, en filigrane, à la sienne : « Et l’ange la quitta » (Luc 1, 38) : « La grande heure de la rencontre avec le messager de Dieu, dans laquelle toute la vie change, passe, et Marie reste seule avec la tâche qui, en vérité, dépasse toute capacité humaine (…). Elle doit continuer le chemin qui passera à travers de nombreuses obscurités – à commencer par le désarroi de Joseph face à sa grossesse, jusqu’au moment où Jésus sera déclaré « hors de sens » (Mc 3, 21 ; cf. Jn 10, 20), et même, jusqu’à la nuit de la croix. (…) L’ange s’en va, la mission demeure et avec elle mûrit la proximité intérieure avec Dieu, la vision intime et la perception de sa proximité » (p. 59).
Ce deuxième chapitre s’achève sur un développement intitulé : « L’enfantement virginal : mythe ou vérité historique ? », particulièrement significatif en cette Année de la foi. Après un tour d’horizon de différentes exégèses, le pape souligne la rationalité de l’action de Dieu dans la naissance du Christ ou dans la résurrection : « Naturellement, on ne peut attribuer à Dieu des choses insensées, déraisonnables ou en opposition avec sa création. Cependant, il ne s’agit pas ici de quelque chose de déraisonnable ni de contradictoire, mais de quelque chose de positif – du pouvoir créateur de Dieu qui embrasse tout l’être. (…) L’enfantement virginal et la résurrection réelle du tombeau sont des pierres de touche pour la foi. Si Dieu n’a pas aussi pouvoir sur la matière il n’est pas Dieu. Mais il possède ce pouvoir et par la conception et la résurrection de Jésus-Christ, il a inauguré une nouvelle création. Ainsi, en tant que Créateur il est aussi notre Rédempteur. Pour cette raison, la conception et la naissance de Jésus de la Vierge Marie sont un élément fondamental de notre foi et un signal lumineux d’espérance ». A méditer aussi à l’approche de la fête de l’Immaculée, le 8 décembre.
Le cadre historique et la géographie
Le troisième chapitre évoque la naissance de Jésus à Bethléem. C’est Noël. Il faudra le découvrir pendant l’Avent. Le pape y déploie une exégèse savoureuse dans l’alliance de l’Ancien et du Nouveau Testament, comme le recommande Vatican II dans « Dei Verbum ». Il fait par exemple observer que « Luc conclut son récit de la  naissance de Jésus, dont faisait partie aussi l’accomplissement de la Loi (cf. Lc 2, 39), par l’annonce de la Sainte Famille à Nazareth : « L’enfant grandissait, se fortifiait et se remplissait de sagesse. Et la grâce de Dieu était sur lui (2, 40) » (p. 124). Le salut de toute l’humanité est en marche, dans la pauvreté et la simplicité d’une famille.
Le quatrième chapitre s’intitule : « Les Mages d’Orient et la fuite en Egypte ». A Cologne, en 2005, pour la Journée mondiale de la jeunesse, le pape avait longuement évoqué les Mages vénérés en la cathédrale de la ville : il les aime tout spécialement.
Le pape commence par planter le cadre historique et la géographie du récit.  Puis il se demande : « Qui étaient les Mages ? », « Quel genre d’hommes ? ». Au terme de son enquête, il conclut, pour ainsi dire dans l’esprit de son « Parvis des gentils » : « Les savants de l’Orient sont un commencement, ils représentent la mise en route de l’humanité vers le Christ, ils inaugurent une procession qui parcourt l’histoire tout entière. Ils ne représentent pas seulement les personnes qui ont trouvé le chemin jusqu’au Christ. Ils représentent l’attente intérieure de l’esprit humain, le mouvement des religions et de la raison humaine à la rencontre du Christ » (p. 137).
L’étoile qui veille sur les crèches ou les sapins à Noël a droit à un développement : « Quel type d’étoile était-ce ? A-t-elle vraiment existé ? » Puis vient le passage des Mages à Jérusalem, l’Adoration à Bethléem, la fuite en Egypte et le retour en Israël.
A chaque pas, Benoît XVI lime son analyse et son interprétation à l’interprétation de la grande tradition de l’Eglise, avec les Pères notamment, et aux recherches des exégètes. Puis il risque sa parole sur le texte. Il prend position, en rétablissant parfois les perspectives, comme lorsqu’il affirme : « Les deux chapitres du récit de l’enfance chez Matthieu ne sont pas une méditation exprimée sous forme d’histoires ; au contraire, Matthieu nous raconte la véritable histoire, qui a été méditée et interprétée  théologiquement, et ainsi il nous aide à comprendre plus profondément le mystère de Jésus » (p. 169).
Vrai Dieu et vrai homme
« L’Epilogue » est constitué d’un commentaire de l’épisode de « Jésus âgé de douze ans dans le Temple » de Jérusalem et du fait que Jésus « grandit » en taille et en sagesse.
D’une part, « comme Fils, il est à tu et à toi avec le Père. Il vit en sa présence. Il le voit (…). Il est auprès du Père, il voit les choses et les hommes dans Sa lumière ». 
D’autre part, « en tant qu’homme, il ne vit pas dans une omniscience abstraite, mais il est enraciné dans une histoire concrète, dans un lieu et dans une époque, dans les différentes phases de la vie humaine, et c’est de tout cela qu’il reçoit la forme concrète de son savoir. Il apparaît donc clairement qu’il a pensé et appris d’une manière humaine ».
« Il devient effectivement évident, qu’il est vrai homme et vrai Dieu, comme l’exprime la foi de l’Eglise, conclut le pape. Nous ne pouvons définir, en dernière analyse, le profond entrelacement entre l’une et l’autre dimension. Celui-ci demeure un mystère et, toutefois, il apparaît de manière vraiment concrète dans le bref récit sur l’enfant de douze ans – récit qui ouvre ainsi, en même temps, la porte vers l’intégralité de sa figure qui nous est racontée ensuite dans les Evangiles » (p. 181).
Dieu s’est fait petit enfant et il a grandi comme un enfant des hommes, a vécu parmi eux. Ces pages déshabituent des lectures rapides voire blasées de textes parfois trop connus. Elles redécouvrent la fraîcheur des récits de l’Enfance du Christ sous des facettes nouvelles, et Benoît XVI, qui ose son interprétation croyante et fondée en raison, s’impliquant en première personne, en disant « je », met en contact direct avec la personne du Christ vivant, grâce à ces récits, si connus, et pourtant ignorés, et toujours inépuisables. Où l’enfant a ses droits.
*En France, chez Flammarion.