Lorsque la peur s’empare des artistes – Pére Manns

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Lorsque la peur s’empare des artistes

SBF Dialogue

L’autocensure artistique est à la une des journaux. Les artistes redoutent les réactions du monde musulman, alors qu’auparavant ils ne se souciaient guère du monde chrétien et peu du public juif. En Allemagne l’autocensure d’Idoménée a ému récemment le monde du spectacle. Au nom de la sécurité du public la direction de l’Opéra allemand a décidé, fin septembre, de supprimer de son programme l’opéra de Mozart. En effet dans la scène finale Idoménée, le roi de Crète, brandit les têtes de Poséidon, Jésus, Bouddha et Mahomet. Pourtant aucune intimidation n’avait été adressée à l’Opéra. La police régionale avait seulement mis en garde l’Opéra contre d’éventuelles réactions de musulmans qui pourraient se sentir offusqués.
Les blocages mentaux dans le domaine de la liberté d’expression se multiplient. Le débat est sensible en Allemagne après la conférence de Benoit XVI à Regensbourg, comme il l’avait été au Danemark l’an passé. En février, lors du carnaval de Düsseldorf, les organisateurs ont demandé aux participants de ne pas exhiber de satires de l’islam. En 2004 un char du défilé représentait un ayatollah coincé dans un hamburger géant baptisé « Burger Mollah de chez MacBush ». La sécurité avant toutes choses, s’est justifié le président du comité. Ne réveillons pas les chiens qui dorment.
L’Espagne de Zapatero, qui n’est pas tendre pour l’Eglise catholique, a elle aussi été touchée par cette vague d’autocensure. Le folklore de nombreuses communes commémorait chaque année la reconquête du pays par des évocations de batailles opposant « maures » et « chrétiens ». Près de Valence, les festivités se concluent par la destruction d’une figure géante de Mahomet. Beaucoup d’autres municipalités avaient arrêté ces pratiques, à la demande de l’Eglise, après Vatican II. Sans respect des autres, il n’y a pas de dialogue.
En Italie, où dans certaines écoles catholiques on avait enlevé le crucifix pour ne pas blesser la sensibilité des jeunes musulmans, les menaces de Smith se sont répétées contre la peinture de l’Eglise S. Petronio de Bologne qui met Mahomet en enfer. Le pape qui a demandé pardon aux juifs devrait faire la même demande de pardon aux musulmans.
En Angleterre la galerie Whitechapel, dans l’exposition consacrée à l’artiste Hans Bellmer, a écarté dix dessins érotiques, étant donné que dans le quartier habitent des musulmans. La liste de ces autocensures sera certainement allongée prochainement. Personne n’en doute.
On est malgré tout autorisé à se poser quelques questions. La société dite démocratique et laïque aurait-elle peur de certains sujets et ne respecterait-elle que les musulmans? Il est vrai que le monde artistique a une sensibilité à fleur de peau et sait d’où vient la violence et le terrorisme. Il vaut mieux prévenir que guérir. L’auto-critique est certainement une valeur à sauver dans la formation des jeunes générations, mais est-elle absolue? N’a-t-elle pas aussi ses limites? En France on a communiqué à grands frais sur le Da Vinci Code sans qu’il ait été précisé une seule fois qu’il s’agissait d’une œuvre de fiction aux antipodes de la réalité historique et biblique. Pourquoi le monde artistique utilise-t-il deux poids et deux mesures? Ce n’est pas ainsi qu’il contribuera à rétablir un dialogue authentique. L’art serait-il donc un reflet de la société? Ne faudrait-il pas revenir aux livres de jadis intitulés: Du bon usage des critiques? Peut-on évoquer les divergences de vues entre le monde islamique et l’Occident sans tomber dans le piège de l’idéologie? Les questions sont nombreuses. Leur réponse se trouve, en partie, dans l’Histoire. En quelques années, les attentats islamistes, les revendications communautaires et la poussée intégriste ont suscité une crainte légitime envers une religion éloignée de la culture chrétienne. Le retour à l’histoire qui est maîtresse de vie s’impose si on veut contribuer au réveil de la sagesse.
Frédéric Manns

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