Archive pour le 18 septembre, 2012
Lorsque la peur s’empare des artistes – Pére Manns
18 septembre, 2012http://198.62.75.4/opt/xampp/custodia/?p=1314
Lorsque la peur s’empare des artistes
SBF Dialogue
L’autocensure artistique est à la une des journaux. Les artistes redoutent les réactions du monde musulman, alors qu’auparavant ils ne se souciaient guère du monde chrétien et peu du public juif. En Allemagne l’autocensure d’Idoménée a ému récemment le monde du spectacle. Au nom de la sécurité du public la direction de l’Opéra allemand a décidé, fin septembre, de supprimer de son programme l’opéra de Mozart. En effet dans la scène finale Idoménée, le roi de Crète, brandit les têtes de Poséidon, Jésus, Bouddha et Mahomet. Pourtant aucune intimidation n’avait été adressée à l’Opéra. La police régionale avait seulement mis en garde l’Opéra contre d’éventuelles réactions de musulmans qui pourraient se sentir offusqués.
Les blocages mentaux dans le domaine de la liberté d’expression se multiplient. Le débat est sensible en Allemagne après la conférence de Benoit XVI à Regensbourg, comme il l’avait été au Danemark l’an passé. En février, lors du carnaval de Düsseldorf, les organisateurs ont demandé aux participants de ne pas exhiber de satires de l’islam. En 2004 un char du défilé représentait un ayatollah coincé dans un hamburger géant baptisé « Burger Mollah de chez MacBush ». La sécurité avant toutes choses, s’est justifié le président du comité. Ne réveillons pas les chiens qui dorment.
L’Espagne de Zapatero, qui n’est pas tendre pour l’Eglise catholique, a elle aussi été touchée par cette vague d’autocensure. Le folklore de nombreuses communes commémorait chaque année la reconquête du pays par des évocations de batailles opposant « maures » et « chrétiens ». Près de Valence, les festivités se concluent par la destruction d’une figure géante de Mahomet. Beaucoup d’autres municipalités avaient arrêté ces pratiques, à la demande de l’Eglise, après Vatican II. Sans respect des autres, il n’y a pas de dialogue.
En Italie, où dans certaines écoles catholiques on avait enlevé le crucifix pour ne pas blesser la sensibilité des jeunes musulmans, les menaces de Smith se sont répétées contre la peinture de l’Eglise S. Petronio de Bologne qui met Mahomet en enfer. Le pape qui a demandé pardon aux juifs devrait faire la même demande de pardon aux musulmans.
En Angleterre la galerie Whitechapel, dans l’exposition consacrée à l’artiste Hans Bellmer, a écarté dix dessins érotiques, étant donné que dans le quartier habitent des musulmans. La liste de ces autocensures sera certainement allongée prochainement. Personne n’en doute.
On est malgré tout autorisé à se poser quelques questions. La société dite démocratique et laïque aurait-elle peur de certains sujets et ne respecterait-elle que les musulmans? Il est vrai que le monde artistique a une sensibilité à fleur de peau et sait d’où vient la violence et le terrorisme. Il vaut mieux prévenir que guérir. L’auto-critique est certainement une valeur à sauver dans la formation des jeunes générations, mais est-elle absolue? N’a-t-elle pas aussi ses limites? En France on a communiqué à grands frais sur le Da Vinci Code sans qu’il ait été précisé une seule fois qu’il s’agissait d’une œuvre de fiction aux antipodes de la réalité historique et biblique. Pourquoi le monde artistique utilise-t-il deux poids et deux mesures? Ce n’est pas ainsi qu’il contribuera à rétablir un dialogue authentique. L’art serait-il donc un reflet de la société? Ne faudrait-il pas revenir aux livres de jadis intitulés: Du bon usage des critiques? Peut-on évoquer les divergences de vues entre le monde islamique et l’Occident sans tomber dans le piège de l’idéologie? Les questions sont nombreuses. Leur réponse se trouve, en partie, dans l’Histoire. En quelques années, les attentats islamistes, les revendications communautaires et la poussée intégriste ont suscité une crainte légitime envers une religion éloignée de la culture chrétienne. Le retour à l’histoire qui est maîtresse de vie s’impose si on veut contribuer au réveil de la sagesse.
Frédéric Manns
Le roi Salomon et la découverte de la vraie croix : par Sandro Magister
18 septembre, 2012http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1350326?fr=y
Le roi Salomon et la découverte de la vraie croix
Au Liban, Benoît XVI a demandé pour tous le bénéfice de cette grammaire commune qu’est le droit naturel. Et il a indiqué aux chrétiens la croix comme signe de la victoire. Suivant l’exemple de Constantin, l’empereur qui assura la liberté de religion
par Sandro Magister
ROME, le 16 septembre 2012 – À peine son avion avait-il atterri à l’aéroport de Beyrouth que Benoît XVI a demandé aux citoyens du Liban de faire preuve de la sagesse du roi Salomon. Afin de conserver cet « équilibre » essentiel entre les chrétiens et leurs frères appartenant à d’autres religions qui peut servir de « modèle pour les habitants de toute la région et pour le monde entier ».
Dans un pays qui porte les marques d’une guerre civile et qui a été plusieurs fois envahi par des armées étrangères, le pari était audacieux. Mais le pape Joseph Ratzinger n’a pas hésité à le faire, au cours des trois jours de sa visite.
Dans le discours qu’il a adressé, au palais présidentiel de Baadba, le samedi 15 septembre, aux représentants de la république libanaise, aux membres du gouvernement, aux dirigeants religieux et aux représentants du monde de la culture, il a demandé à tous de se retrouver unis autour de ces « valeurs communes à toutes les grandes cultures, parce qu’enracinées dans la nature de l’être humain ».
Parmi ces valeurs, il a mis au premier plan la liberté religieuse.
À partir d’une référence inattendue à Constantin, qui concéda, en 313 après J.-C., la liberté aux chrétiens dans l’empire, Benoît XVI a demandé à ce que, non seulement au Liban – seul pays de la région dans lequel la conversion des musulmans au christianisme soit socialement tolérée – mais dans tout le Moyen-Orient, on ait pleine liberté de pratiquer publiquement toute foi religieuse, « sans mettre sa vie en danger ».
En plus de cela, parmi les « bases » de cette « grammaire qu’est la loi naturelle inscrite dans le cœur de l’homme », le pape a particulièrement mis en valeur « le caractère sacré de la vie donnée par le Créateur ».
La défense de la vie, a-t-il dit, est la voie qui conduit à la véritable paix :
« Aujourd’hui, les différences culturelles, sociales, religieuses, doivent aboutir à vivre un nouveau type de fraternité, où justement ce qui unit est le sens commun de la grandeur de toute personne et le don qu’elle est à elle-même, aux autres et à l’humanité. Là se trouve la voie de la paix ! Là est l’engagement qui nous est demandé ! Là est l’orientation qui doit présider aux choix politiques et économiques, à chaque niveau et à l’échelle planétaire ! ».*
Mais, ayant dit cela à tous les citoyens du Liban sans distinction, Benoît XVI s’est aussi adressé directement aux chrétiens.
Il leur a simplement demandé de « se mettre à la suite de Jésus ». Et voici ce qu’il a expliqué, dans son homélie de la messe du dimanche 16 septembre :
« Se mettre à la suite de Jésus, c’est prendre sa croix pour l’accompagner sur son chemin, un chemin incommode qui n’est pas celui du pouvoir ou de la gloire terrestre, mais celui qui conduit nécessairement à se renoncer soi-même, à perdre sa vie pour le Christ et l’Évangile, afin de la sauver. Car nous sommes assurés que ce chemin conduit à la résurrection, à la vie véritable et définitive avec Dieu. Décider d’accompagner Jésus-Christ qui s’est fait le Serviteur de tous exige une intimité toujours plus grande avec lui, en se mettant à l’écoute attentive de sa Parole pour y puiser l’inspiration de nos actes. En promulguant l’Année de la foi, qui doit commencer le 11 octobre prochain, j’ai voulu que chaque fidèle puisse s’engager de manière renouvelée sur ce chemin de la conversion du cœur. Tout au long de cette année, je vous encourage donc vivement à approfondir votre réflexion sur la foi pour la rendre plus consciente et pour fortifier votre adhésion au Christ Jésus et à son Évangile ».
Deux jours plus tôt, le soir du vendredi 14 septembre, Benoît XVI avait également placé la croix de Jésus-Christ au centre du discours par lequel il a promulgué l’exhortation apostolique qui est le couronnement du synode pour le Moyen-Orient :
« Il est providentiel que cet acte ait lieu le jour même de la fête de la Croix Glorieuse, dont la célébration est née en Orient en 335, au lendemain de la dédicace de la basilique de la Résurrection construite sur le Golgotha et le sépulcre de Notre-Seigneur par l’empereur Constantin le Grand, que vous vénérez comme un saint. Dans un mois on célébrera le 1700e anniversaire de l’apparition qui lui fit voir, dans la nuit symbolique de son incroyance, le chrisme flamboyant, alors qu’une voix lui disait : Par ce signe, tu vaincras ! » [...]
« L’exhortation apostolique ‘Ecclesia in Medio Oriente’ permet de repenser le présent pour envisager l’avenir avec le regard même du Christ. Par ses orientations bibliques et pastorales, par son invitation à un approfondissement spirituel et ecclésiologique, par le renouveau liturgique et catéchétique préconisés, par ses appels au dialogue, elle veut tracer un chemin pour retrouver l’essentiel : la ‘sequela Christi’, dans un contexte difficile et quelquefois douloureux, un contexte qui pourrait faire naître la tentation d’ignorer ou d’oublier la Croix glorieuse. C’est justement maintenant qu’il faut célébrer la victoire de l’amour sur la haine, celle du pardon sur la vengeance, celle du service sur la domination, celle de l’humilité sur l’orgueil, celle de l’unité sur la division. [...] Tel est le langage de la Croix glorieuse ! Telle est la folie de la Croix : celle de savoir convertir nos souffrances en cri d’amour envers Dieu et de miséricorde envers le prochain ; celle de savoir aussi transformer des êtres attaqués et blessés dans leur foi et leur identité, en vases d’argile prêts à être comblés par l’abondance des dons divins plus précieux que l’or (cf. 2 Co 4, 7-18). Il ne s’agit pas là d’un langage purement allégorique, mais d’un appel pressant à poser des actes concrets qui configurent toujours davantage au Christ, des actes qui aident les différentes Églises à refléter la beauté de la première communauté des croyants (cf. Ac 2, 41-47) ; des actes similaires à ceux de l’empereur Constantin qui a su témoigner et sortir les chrétiens de la discrimination pour leur permettre de vivre ouvertement et librement leur foi dans le Christ crucifié, mort et ressuscité pour le salut de tous ».
En s’exprimant ainsi, Benoît XVI a déçu, une fois de plus, ceux qui attendent de lui des gestes politiques spectaculaires ou des solutions de stratégie internationale.
Mais justement, en agissant de cette façon, il a été à l’essentiel de ce que demande sa mission.
À tous, il a rappelé la grammaire du droit naturel. Aux chrétiens, il a rappelé le signe de la croix.
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Le programme et le texte intégral, en plusieurs langues, des discours prononcés par Benoît XVI au Liban, y compris l’exhortation apostolique post-synodale « Ecclesia in Medio Oriente » :
http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/travels/2012/index_libano_fr.htm