Archive pour le 7 septembre, 2012

Feast of the Nativity of the Blessed Virgin Mary

7 septembre, 2012

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http://fireofthylove.com/2011/09/08/feast-of-the-nativity-of-the-blessed-virgin-mary/

NATIVITÉ DE LA VIERGE MARIE – MÉDITATION SUR LA FÊTE AVEC LE PÈRE LEV GILLET

7 septembre, 2012

http://www.pagesorthodoxes.net/fetes/md-nativite1.htm

NATIVITÉ DE LA VIERGE MARIE

MÉDITATION SUR LA FÊTE AVEC LE PÈRE LEV GILLET

« UN MOINE DE L’ÉGLISE D’ORIENT »

Nativité de la Vierge Marie

L’année liturgique comporte, outre le cycle des dimanches et le cycle des fêtes commémorant directement Notre Seigneur, un cycle des fêtes des saints. La première grande fête de ce cycle des saints que nous rencontrons après le début de l’année liturgique est la fête de la nativité de la bienheureuse Vierge Marie, célébrée le 8 septembre [42]. Il convenait que, dès les premiers jours de la nouvelle année religieuse, nous fussions mis en présence de la plus haute sainteté humaine reconnue et vénérée par l’Église, celle de la mère de Jésus-Christ. Les textes lus et les prières chantées à l’occasion de cette fête nous éclaireront beaucoup sur le sens du culte que l’Église rend à Marie.
Au cours des vêpres célébrées le soir de la veille du 8 septembre, nous lisons plusieurs leçons tirées de l’Ancien Testament. C’est tout d’abord le récit de la nuit passée par Jacob à Luz (Gn 28, 10-17). Tandis que Jacob dormait, la tête appuyée sur une pierre, il eut un songe : il vit une échelle dressée entre le ciel et la terre, et les anges montant et descendant le long de cette échelle ; et Dieu lui-même apparut et promit à la descendance de Jacob sa bénédiction et son soutien. Jacob, à son réveil, consacra avec de l’huile la pierre sur laquelle il avait dormi et appela ce lieu Beth-el, c’est-à-dire  » maison de Dieu « . Marie, dont la maternité a été la condition humaine de l’Incarnation, est, elle aussi, une échelle entre le ciel et la terre. Mère adoptive des frères adoptifs de son Fils, elle nous dit ce que Dieu dit à Jacob (pour autant qu’une créature peut faire siennes les paroles du Créateur) :  » Je suis avec toi, je te garderai partout où tu iras… « . Elle, qui a porté son Dieu dans son sein, elle est vraiment ce lieu de Beth-el dont Jacob peut dire :  » Ce n’est rien de moins qu’une maison de Dieu et la porte du ciel « . La deuxième leçon (Ez 43, 27-44, 4) se rapporte au temple futur qui est montré au prophète Ézéchiel ; une phrase de ce passage peut s’appliquer très justement à la virginité et à la maternité de Marie :  » Ce porche sera fermé. On ne l’ouvrira pas, on n’y passera pas, car Yahvé le Dieu d’Israël y est passé. Aussi sera-t-il fermé  » [43]. La troisième leçon (Pr 9, 1-11) met en scène la Sagesse divine personnifiée :  » La Sagesse a bâti sa maison, elle a dressé ses sept colonnes… Elle a dépêché ses servantes et proclamé sur les hauteurs de la cité… « . L’Église byzantine et l’Église latine ont toutes deux établi un rapprochement entre la divine Sagesse et Marie [44]. Celle-ci est la maison bâtie par la Sagesse ; elle est, au suprême degré, l’une des vierges messagères que la Sagesse envoie aux hommes ; elle est, après le Christ lui-même, la plus haute manifestation de la Sagesse en ce monde.
L’Évangile lu aux matines du 8 septembre (Lc 1 : 39-49, 56) décrit la visite faite par Marie à Élisabeth. Deux phrases de cet évangile expriment bien l’attitude de l’Église envers Marie et indiquent pourquoi celle-ci a été en quelque sorte mise à part et au-dessus de tous les autres saints. Il y a d’abord cette phrase de Marie elle-même :  » Oui, désormais toutes les générations me diront bienheureuse, car le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses  » [45]. Et il y a cette phrase dite par Élisabeth à Marie :  » Tu es bénie entre les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni « . Quiconque nous reprocherait de reconnaître et d’honorer le fait que Marie soit  » bénie entre les femmes  » se mettrait en contradiction avec l’Écriture elle-même. Nous continuerons donc, comme  » toutes les générations « , à appeler Marie  » bienheureuse « . Nous ne la séparerons d’ailleurs jamais de son Fils, et nous ne lui dirons jamais  » tu es bénie  » sans ajouter ou du moins sans penser :  » Le fruit de tes entrailles est béni « . Et s’il nous est donné de sentir parfois l’approche gracieuse de Marie, ce sera Marie portant Jésus dans son sein, Marie en tant que mère de Jésus, et nous lui dirons avec Élisabeth :  » Comment m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne à moi ? « 
À la liturgie du même jour, nous lisons, ajoutés l’un à l’autre (Lc 10, 38-42 – 11, 27-28), deux passages de l’évangile que l’Église répétera à toutes les fêtes de Marie et auxquels cette répétition même donne la valeur d’une déclaration particulièrement importante. Jésus loue Marie de Béthanie, assise à ses pieds et écoutant ses paroles, d’avoir choisi  » la meilleure part qui ne lui sera pas enlevée « , car  » une seule chose est utile « . Ce n’est pas que le Seigneur ait blâmé Marthe, si préoccupée de le servir, mais  » s’inquiète et s’agite pour beaucoup de choses « . L’Église applique à la vie contemplative, en tant que distincte de (nous ne disons pas : opposée à) la vie active, cette approbation donnée à Marie de Béthanie par Jésus. L’Église applique aussi cette approbation à Marie, mère du Seigneur, considérée comme le modèle de toute vie contemplative, car nous lisons dans d’autres endroits de l’évangile selon Luc :  » Marie … conservait avec soin, tous ces souvenirs et les méditait en son cœur… Et sa mère gardait fidèlement tous ces souvenirs en son cœur  » (Lc 2, 19, 51). N’oublions pas d’ailleurs que la Vierge Marie s’était auparavant consacrée, comme Marthe, et plus que Marthe, au service pratique de Jésus, puisqu’elle avait nourri et élevé le Sauveur. Dans la deuxième partie de l’évangile de ce jour, nous lisons qu’une femme  » éleva la voix  » et dit à Jésus :  » Heureuses les entrailles qui t’ont porté et les mamelles que tu as allaitées « . Jésus répondit :  » Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent « . Cette phrase ne doit pas être interprétée comme une répudiation de la louange de Marie par la femme ou comme une sous-estimation de la sainteté de Marie. Mais elle met exactement les choses au point ; elle montre en quoi consiste le mérite de Marie. Que Marie ait été la mère du Christ, c’est là un don gratuit, c’est un privilège qu’elle a accepté, mais à l’origine duquel sa volonté personnelle n’a pas eu de part. Au contraire, c’est par son propre effort qu’elle a entendu et gardé la parole de Dieu. En cela consiste la vraie grandeur de Marie. Oui, bienheureuse est Marie, mais non principalement parce qu’elle a porté et allaité Jésus ; elle est surtout bienheureuse parce qu’elle a été, à un degré unique, obéissante et fidèle. Marie est la mère du Seigneur ; elle est la protectrice des hommes : mais, d’abord et avant tout cela, elle est celle qui a écouté et gardé la Parole. Ici est le fondement  » évangélique  » de notre piété envers Marie. Un court verset, chanté après l’épître, exprime bien ces choses :  » Alléluia ! Écoute, ô ma fille et vois, et incline ton oreille  » (Ps 45, 10).
L’épître de ce jour (Ph 2, 4-11) ne mentionne pas Marie. Paul y parle de l’Incarnation : Jésus qui,  » de condition divine… s’anéantit lui-même, prenant condition d’esclave et devenant semblable aux hommes… « . Mais il est évident que ce texte a les rapports les plus étroits avec Marie et a été aujourd’hui choisi à cause d’elle. Car c’est par Marie qu’est devenue possible cette descente du Christ en notre chair. Nous revenons donc en quelque sorte à l’exclamation de la femme :  » Heureuses les entrailles qui t’ont porté… « . Et par suite l’évangile que nous avons lu est comme une réponse et un complément à l’épître :  » Heureux… ceux qui écoutent la parole… « .
Un des tropaires de ce jour établit un lien entre la conception du Christ-lumière, si chère à la piété byzantine, et la bienheureuse Vierge Marie :  » Ta naissance, ô vierge mère de Dieu, a annoncé la joie au monde entier, car de toi est sorti, rayonnant, le soleil de justice, Christ, notre Dieu « .
La fête de la nativité de Marie est en quelque sorte prolongée le lendemain (9 septembre) par la fête de Saint Joachim et Sainte Anne dont une tradition incertaine a fait les parents de la Vierge [46].

NOTES
[42] Nous ignorons absolument la date historique de la naissance de Marie. La fête du 8 septembre semble avoir pris naissance au VIe siècle en Syrie ou en Palestine. Rome l’adopta au VIIe siècle. Elle s’était déjà introduite à Constantinople ; nous avons au sujet de la Nativité une hymne de Romanos le mélode et plusieurs sermons de Saint André de Crète. Les Coptes d’Égypte et d’Abyssinie célèbrent la Nativité de Marie le 1er mai.
[43] On sait que l’Église orthodoxes, comme l’Église romaine, rejette l’hypothèse selon laquelle Marie, après la naissance de Jésus, aurait eu de Joseph plusieurs enfants. Cette théorie, soutenue au IVe siècle par Helvidius, fut combattue par Saint Ambroise, Saint Jérôme et Saint Augustin.
[44] Ce rapprochement est tout à fait indépendant des doctrines  » sophiologiques  » qu’ont soutenues certains philosophes et théologiens russes (Soloviev, Boulgakov, etc,).
[45] Nous n’ignorons pas que certains critiques modernes attribuent le Magnificat à Élisabeth, non à Marie. Cette attribution ne nous semble aucunement prouvée. Que les paroles du Magnificat aient été littéralement prononcées par Marie est une autre question : il suffit que ce cantique exprime d’une manière fidèle les sentiments de Marie.
[46] Les évangélistes canoniques ne disent rien du père et de la mère de Marie. Les légendes relatives à Joachim et Anne ont leur origine dans les évangiles apocryphes, notamment l’évangile dit de Jacques, que l’Église a rejetés et qui sont à bon droit suspects. Il n’est pas cependant exclu que certains détails authentiques, non mentionnés par les évangiles canoniques, aient trouvé place dans les apocryphes. La légende selon laquelle Anne aurait enfanté Marie à un âge avancé semble avoir été influencée par le récit biblique sur Anne, mère de Samuel. Rien n’indique qu’il faille identifier la mère de Marie avec Anne qui prophétisa dans le Temple au sujet de Jésus (Lc 2, 36-38), Mais il est certain que la mémoire des parents de Marie, sous le nom de Joachim et d’Anne, était honorée à Jérusalem dès le IVe siècle. Quoiqu’il en soit historiquement de ces noms et des détails biographiques, l’honneur rendu au père et à la mère de la très sainte Vierge est assurément légitime.

Extrait du livre L’An de grâce du Seigneur,
signé « Un moine de l’Église d’Orient »,
Éditions AN-NOUR (Liban) ;
Éditions du Cerf, 1988.

PREMIERE LECTURE – Isaïe 35, 4-7a – commentaires de Marie Noëlle Thabut

7 septembre, 2012

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

Dimanche 9 septembre : commentaires de Marie Noëlle Thabut

PREMIERE LECTURE – Isaïe 35, 4-7a

4 Dites aux gens qui s’affolent :
« Prenez courage, ne craignez pas.
Voici votre Dieu :
c’est la vengeance qui vient,
la revanche de Dieu.
Il vient lui-même
et va vous sauver. »
5 Alors s’ouvriront les yeux des aveugles
et les oreilles des sourds.
6 Alors le boiteux bondira comme un cerf
et la bouche du muet criera de joie.
L’eau jaillira dans le désert,
des torrents dans les terres arides.
7 Le pays torride se changera en lac ;
la terre de la soif, en eaux jaillissantes.
A l’écoute de ce texte, deux mots nous ont surpris, peut-être, ou même choqués : la vengeance de Dieu et la revanche de Dieu : « Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu ». Disons-le tout de suite, ils n’ont pas du tout le même sens ici que dans notre langage courant du vingt-et-unième siècle !
Pour les comprendre , il faut les replacer dans leur contexte : je vous lis la phrase en entier : « Prenez courage, ne craignez pas : Voici votre Dieu, c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver » ; ce qui veut dire que la revanche de Dieu, c’est de nous sauver. Pour bien faire, il faudrait écrire : « Voici la revanche de Dieu : (« deux points ») il vient lui-même et va vous sauver », on devrait même dire « voici la revanche de Dieu : (« deux points ») il vient lui-même pour vous sauver ».
Et tout le reste du texte, ce sont des promesses : promesses de guérison, de rétablissement pour les aveugles, les sourds, les muets, les boiteux… « Alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds, alors le boiteux bondira comme un cerf et la bouche du muet criera de joie. »
Promesses, surtout, de retour au pays pour les exilés : les versets suivants que nous ne lisons pas ce dimanche viennent éclairer le contexte : « Ils reviendront, les captifs rachetés (c’est-à-dire « libérés ») par le SEIGNEUR, ils arriveront à Jérusalem dans une clameur de joie, un bonheur sans fin illuminera leur visage ; allégresse et joie les rejoindront, douleur et plainte s’enfuiront. » Effectivement, quand Isaïe prononce ces paroles, le peuple d’Israël est en exil à Babylone, après avoir vécu les atrocités du siège de Jérusalem par les armées de Nabuchodonosor.
Cinquante années d’exil, de quoi perdre courage. Ce n’est pas par hasard qu’Isaïe leur dit « Dites aux gens qui s’affolent : Prenez courage, ne craignez pas ».
Cinquante ans pendant lesquels on a rêvé de ce retour, sans oser y croire. Et voilà que le prophète dit « c’est pour bientôt » ; pour rentrer au pays, le chemin le plus direct entre Babylone et Jérusalem traverse le désert d’Arabie ; mais cette traversée du désert, Isaïe la décrit comme une véritable marche triomphale… mieux, une procession grandiose : le désert se réjouira, le pays aride exultera et criera de joie, il « jubilera » dit même le texte hébreu dans les versets qui précèdent le passage que nous lisons aujourd’hui ; ici, il insiste : « L’eau jaillira dans le désert, des torrents dans les terres arides. Le pays torride se changera en lac ; la terre de la soif, en eaux jaillissantes. » Il faut entendre la résonance de telles paroles dans un pays de sécheresse et de soif !
Et c’est cela la vengeance de Dieu ! Les assoiffés seront désaltérés ; mieux encore, les humiliés pourront relever la tête ! « Alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds. Alors le boiteux bondira comme un cerf et la bouche du muet criera de joie. »
C’est donc un sens extrêmement positif du mot « vengeance » ; pour l’homme de la Bible, il est bien clair que Dieu ne se venge pas de nous, il ne prend pas sa revanche contre nous, mais contre le mal qui nous atteint, qui nous abîme ; sa revanche c’est de nous rendre notre dignité. C’est cela la gloire de Dieu.
Mais il faut bien dire qu’on n’a pas toujours pensé comme cela ! Le texte d’Isaïe est assez tardif dans l’histoire biblique ; il a fallu tout un long chemin de révélation pour en arriver là. Au début de son histoire, le peuple de la Bible était comme tous les autres : il imaginait un Dieu à l’image de l’homme, un Dieu qui se venge comme les humains. Puis, au fur et à mesure de la Révélation, grâce à la prédication des prophètes, on a commencé à découvrir Dieu tel qu’il est, et non pas tel qu’on l’imaginait ; alors le mot « vengeance » est resté mais son sens a complètement changé ; nous avons déjà vu plusieurs fois dans la Bible ce phénomène de retournement complet du sens d’un mot : c’est le cas pour le sacrifice, par exemple, et aussi pour la crainte de Dieu.
Il a fallu bien des étapes et bien des siècles pour qu’on découvre le vrai visage de Dieu, un Dieu tout autre que nous et tout autre que ce que nous imaginons spontanément : « Ses pensées ne sont pas nos pensées et nos chemins ne sont pas ses chemins » (comme dit Isaïe : Is 55, 8)… un Dieu qui n’est qu’amour et miséricorde pour tous les hommes sans exception, même les méchants, un Dieu qui « ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse et qu’il vive » (Ez 18, 23). On a peu à peu découvert que l’expression « voici la revanche de Dieu : il vient lui-même et va vous sauver » signifie « Dieu vous aime plus que tout être au monde, et, quelle que soit l’humiliation physique ou morale que vous ayez subie, il vient pour vous libérer, pour vous relever.
Isaïe parlait de la libération des captifs de Babylone et de leur retour à Jérusalem ; mais l’humanité attend encore sa libération définitive de toute humiliation, de tout aveuglement, de toute surdité : ce sera l’oeuvre du Messie, les contemporains de Jésus le savaient bien. C’est pour cela que pour se présenter à la synagogue de Nazareth (Luc 4), Jésus a cité un autre passage tout à fait semblable d’Isaïe « Le SEIGNEUR m’a envoyé porter un joyeux message aux humiliés, guérir ceux qui ont le coeur brisé, annoncer aux prisonniers la délivrance et aux captifs la liberté, annoncer les bienfaits du SEIGNEUR et le jour de la vengeance de notre Dieu. » (Is 61, 1-2). Et quand les disciples de Jean lui ont demandé « Es-tu celui qui doit venir ? » Jésus a simplement répondu : « Allez rapporter à Jean ce que vous avez vu et entendu : Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres » (Luc 7, 22)… La bonne nouvelle, c’est que Dieu nous relève et vous sauve.

Homélie du 23e dimanche ordinaire B

7 septembre, 2012

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

Homélie du 23e dimanche ordinaire B

Is 35, 4-7 ; Jc 2, 1-5 ; Mc 7, 31-37

Mais où est donc ce Royaume nouveau annoncé par Isaïe et inauguré par Jésus Christ, où l’on ne trouve ni aveugles, ni sourds, ni boiteux ? Ce n’est pas encore demain la veille !
Cependant, Isaïe ne se trompe pas, et Marc ne nous fait pas prendre des vessies pour des lanternes. Mieux encore, ce qu’ils annoncent et ce qu’ils affirment est toujours d’actualité. Et c’est à l’actualité qu’il faut recourir pour mieux comprendre l’expérience et le langage bibliques, qui ne séparent pas, comme nous le faisons trop souvent, l’histoire profane et l’histoire sainte, les évènements quotidiens et la Parole de Dieu. Dans les faits que nous qualifions spontanément de « réels », les auteurs bibliques savent discerner, infiniment plus que nous, des « signes » qui révèlent la face cachée des évènements et nous font découvrir la place occupée par Dieu dans l’histoire des êtres humains.
Les évènements auxquels fait allusion Isaïe présentent beaucoup de similitudes avec les évènements du monde actuel : libération de peuples opprimés, liberté retrouvée mais difficile à gérer, rêve d’un monde nouveau où règnera l’abondance. Et quand Isaïe met son espoir dans le païen Cyrus et qu’il prédit aux exilés et aux opprimés le retour à leur patrie, il a vu juste. Mais quand il décrit ce nouveau paradis terrestre, il joue en même temps sur le registre symbolique, où la libération, les guérisons et l’abondance transcendent les réalités politiques et le bien-être physique et matériel.
Sa lecture des évènements et ses analyses ne sont pas celles d’un historien ni d’un politologue ou d’un observateur matérialiste, il lit avec le cœur et l’esprit d’un poète et d’un croyant. Et il découvre une face cachée où Dieu est présent et agissant.
Premier message d’incarnation : Quand le peuple de Dieu multiplie les initiatives de paix et cherche à triompher de la guerre, de la haine, de la vengeance… quand il lutte contre la famine, les injustices et les oppressions, les esclavages et les servitudes de tous genres, les ravages de la maladie, il pose des jalons sur la route qui conduit l’humanité à la réalisation d’un monde selon le cœur de Dieu. Il fait progresser le Royaume de Dieu.
Deuxième message : Quand les auteurs bibliques du premier ou du second Testament précisent même que le Royaume de Dieu sera arrivé quand les aveugles, les sourds, les boiteux et les muets seront guéris, il s’agit aussi d’une réalité symbolique qui ne nie pas, mais dépasse largement la réalité physique.
Décrivant le bon vieux temps d’une époque de paix et de prospérité, l’auteur du livre de l’Exode affirme qu’ « il n’y avait pas de sourds, puisque tous entendaient la Parole du Seigneur ; pas de muets non plus, puisque tout le peuple répondait à Moïse »… Tout comme Isaïe explique par ailleurs : « Les péchés ont fait en sorte que les Israëlites sont devenus aveugles envers la Loi. Dès lors, ils sont sourds, puisqu’ils n’apprennent pas la Torah, et leurs yeux sont fermés, puisqu’ils ne voient pas la Présence. Mais qu’adviendra-t-il quand viendra le Messie ? Il leur ouvrira les yeux et les oreilles. Alors, ils entendront la Parole du Seigneur. »
C’est dans ce même sens que les apôtres et les disciples ont plus d’une fois mérité les reproches de Jésus et que nous les méritons encore aujourd’hui : « Vous avez des yeux, ne voyez-vous pas ? Vous avez des oreilles, n’entendez-vous pas ? »
Aujourd’hui encore, nous sommes vraiment sourds quand notre cœur est fermé à la Parole ou que nous l’entendons sans l’accueillir et la mettre en pratique. C’est la même surdité réelle qui nous atteint quand nous restons insensibles aux appels des déshérités, des affamés, des sans abris…
Et muets, nous le sommes, quand nous refusons de prononcer des paroles de paix et de pardon, de bienveillance et d’encouragement. Muets encore, quand nous craignons ou négligeons de faire écho à la Parole ou de rendre grâce à Dieu pour tant de merveilles qu’il accomplit. Nous avons donc tous besoin d’être guéris pour pouvoir voir, entendre, parler et marcher correctement, d’une manière évangélique.
Pour faire progresser l’humanité vers le Royaume de Dieu, nous avons aussi, selon nos compétences, les circonstances, à venir en aide aux aveugles, aux sourds et aux muets, aux boiteux et aux affamés, aux handicapés et aux opprimés… Comme nous le rappelle souvent l’actualité de nos journaux écrits, parlés ou télévisés, ou la Une du journal tout à fait profane de « Médecins sans frontières », aussi Parole de Dieu qui résonne dans nos cœurs : « Sommes-nous devenus sourds ? Le murmure des enfants, qui par milliers agonisent dans les pays d’Afrique à la dérive, ne parvient plus à nos oreilles… Silence… On meurt… Jusqu’où ira notre aveuglement ? De grands chocs Nord-Sud s’annoncent… Et nous ne voulons pas les voir. Des hommes et des femmes hurlent leur misère sur le pas de nos portes… Nous refusons de les entendre… » (1991).Que dire ? Sinon prier le Seigneur : « Seigneur, guéris-nous, mets tes doigts dans nos oreilles et touche notre langue ». … Laissons-nous soigner, laissons-nous guérir.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008