Archive pour août, 2012
Jésus est la vraie nourriture
17 août, 2012Homélie du 20e dimanche ordinaire B
17 août, 2012http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/
P. Fabien Deleclos, franciscain (T) 1925 – 2008
Homélie du 20e dimanche ordinaire B
Pr 9, 1-6 ; Ep 5, 15-20 ; Jn 6, 51-58
Il n’y a pas de brevet ni de diplôme qui puissent confirmer chez qui que ce soit son intelligence des choses de Dieu. Il existe cependant un chemin qui permet d’y accéder. Un chemin qui aboutit à un repas dont la Sagesse a dressé la table et fignolé le menu.
L’invitation est lancée tous azimuts à tous ceux qui manquent de sagesse et d’intelligence. Un premier test d’humilité qui risque fort d’agresser la susceptibilité et la vanité de tous ceux et celles qui sont ancrés définitivement dans leurs certitudes et leurs connaissances des choses de la terre et du ciel. On ne se bousculera donc pas au banquet de la Vérité, qui fait tomber les masques et dévalue décorations et préséances.
« Venez manger mon pain et boire le vin que j’ai apprêtés ! ». Deuxième test ou deuxième piège. Car il ne s’agit pas d’un banquet gastronomique, ni d’une invitation à s’enivrer « du vin qui réjouit le cœur… ». C’est une question de vie ou de mort : « Quittez votre folie et vous vivrez », ou, comme l’écrit Paul : « Ne vivez pas comme des fous, mais comme des sages. Ne soyez donc pas irréfléchis, mais comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur… Laissez-vous remplir par l’Esprit Saint » (2e lecture).
La sagesse de Dieu et son Verbe, c’est tout un. Et les repas qu’ils préparent et président sont tous deux « manducation » de la parole d’amour et du pain de vie, Sagesse incarnée dans la Loi et Parole devenue chair en Jésus Christ.
Manger et vivre, s’abstenir et mourir. C’est le seul choix qui nous est offert. « Celui qui mange ma chair, dit Jésus, et boit mon sang, demeure en moi, et moi, je demeure en lui… Celui qui me mangera vivra par moi ». Par contre, « Si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’Homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous ».
Nous voici plongés en plein mystère, où la science est sans pouvoir et les analyses chimiques inutiles. Pour pénétrer au cœur de ce réel fondamental, il faut opérer une conversion du cœur et modifier son regard, percer la croûte des réalités visibles et contrôlables, pour atteindre la vérité sans visage et la source invisible.
Confrontés à cette révélation, « les juifs, écrit Jean, discutaient entre eux », multipliant les interrogations incrédules et méfiantes, que poursuivent d’ailleurs les chrétiens depuis des siècles. L’histoire de l’eucharistie, en effet, qui rassemble et unit, forme et nourrit, sanctifie les pécheurs et envoie des témoins, reste une histoire mouvementée, parsemée elle aussi d’incrédulité destructrice ou de sentimentalité passionnée et aveugle.
Vulgaire et triste bataille de rites, où l’on sacrifie la Parole et le Pain, l’amour et l’unité, à la relativité des mots et des gestes. Fragilité de la foi en l’humanité du Christ, qui transforme parfois la messe en un « sacrifice redoutable » et l’autel en « table effrayante ». Le Christ indivisible, Dieu et homme, Parole et Pain, fut bien des fois écartelé jusqu’à la division de son corps mystique qui est l’Eglise. Certes, pendant des siècles, Parole et Pain furent également mangés et respectés, accueillis et vénérés. C’est ainsi, par exemple, que l’évangéliaire était souvent enrichi d’une reliure à couverture d’ivoire, d’or pur ou d’argent, car en lui, c’est le Christ lui-même qu’on voulait honorer.
Mais on vit aussi au XIIe siècle une vague de dévotion eucharistique mettre tellement à l’honneur la contemplation de l’hostie que l’on en vint à remplacer la communion sacramentelle par des « communions spirituelles ». Le « prenez et mangez » de Jésus était devenu « regardez et adorez ».
Vatican II, puisant aux sources mêmes de la Tradition, nous a heureusement rappelé que les Divines Ecritures doivent être vénérées comme le Corps même du Seigneur, et que l’Eglise a mission « de prendre le Pain de Vie sur la table de la Parole de Dieu et sur celle du Corps du Christ, pour l’offrir aux fidèles ».
Mais après ce rappel essentiel, qui est une question de vie ou de mort, les retards imposants et chroniques des invités au rassemblement dominical, révèlent une étonnante négligence du repas de la Parole. Comme si la réception du Pain pouvait dispenser d’une adhésion au Verbe qui conditionne la communion d’amour. Et comment est traité et habillé, respecté et vénéré le « Livre de la Parole », qui est présence du Verbe proclamant la Bonne Nouvelle ?
MESSE DE L’ASSOMPTION, HOMÉLIE DE BENOÎT XVI, 15 AOÛT 2012
17 août, 2012http://www.zenit.org/article-31600?l=french
MESSE DE L’ASSOMPTION, HOMÉLIE DE BENOÎT XVI, 15 AOÛT 2012
« En Dieu, il y a de la place pour l’homme »
ROME, jeudi 16 août 2012 (ZENIT.org) – « Dans l’Assomption, nous voyons qu’en Dieu, il y a de la place pour l’homme », déclare Benoît XVI. Et plus encore : « dans l’homme, il y a de la place pour Dieu ».
Le pape a présidé la messe de la solennité de l’Assomption de la Vierge Marie ce mercredi 15 août 2012 à Castel Gandolfo, dans la paroisse Saint Thomas de Villeneuve.
Il a rappelé aux fidèles présents que la présence de Dieu dans les cœurs, si nécessaire pour le monde, était le fruit de la foi.
Homélie de Benoît XVI
Chers frères et sœurs,
Le 1ernovembre 1950, le vénérable pape Pie XII proclamait comme dogme que la Vierge Marie, « au terme de sa vie terrestre, fut élevée à la gloire du ciel en son âme et en son corps ». Cette vérité de foi était connue de la Tradition, affirmée par les Pères de l’Eglise, et c’était surtout un aspect important du culte rendu à la Mère du Christ. C’est justement l’élément cultuel qui a constitué, pour ainsi dire, la force motrice qui détermina la formulation de ce dogme : le dogme apparaît comme un acte de louange et d’exaltation à l’égard de la Sainte Vierge. Cela émerge du texte même de la Constitution apostolique, où l’on affirme que le dogme est proclamé « en l’honneur du Fils, pour la glorification de sa Mère et la joie de toute l’Eglise ». Fut ainsi exprimé, dans sa forme dogmatique, ce qui avait déjà été célébré dans le culte et la dévotion du peuple de Dieu comme la glorification la plus haute et la plus stable de Marie : l’acte de proclamation de Celle qui a été enlevée au ciel, se présenta ainsi presque comme une liturgie de la foi. Et, dans l’Evangile que nous venons d’entendre, Marie prononce de manière prophétique certaines paroles qui orientent dans cette perspective. Elle dit en effet : « Désormais toutes les générations me diront bienheureuse » (Lc 1, 48). C’est une prophétie pour toute l’histoire de l’Eglise. Cette expression du Magnificat, rapportée chez saint Luc, indique que la louange rendue à la Vierge Marie, Mère de Dieu, intimement unie au Christ son fils, concerne l’Eglise de tous les temps et de tous les lieux. Et la citation de ces paroles par l’évangéliste présuppose que la glorification de Marie était déjà présente à l’époque de saint Luc et qu’il considérait que c’était un devoir et un engagement de la communauté chrétienne vis-à-vis de toutes les générations. Les paroles de Marie disent que c’est un devoir, pour la foi de l’Eglise, de se souvenir de la grandeur de la Vierge. Cette solennité est donc une invitation à louer Dieu et à regarder la grandeur de Marie parce que c’est sur le visage de ses enfants que nous reconnaissons qui est Dieu.
Mais pourquoi Marie est-elle glorifiée par son Assomption dans le ciel ? Saint Luc, nous l’avons entendu, voit la racine de l’exaltation et de la louange rendue à Marie dans l’expression d’Elisabeth : « bienheureuse celle qui a cru » (Lc 1, 45). Et le Magnificat, ce chant au Dieu vivant et agissant dans l’histoire, est un hymne de foi et d’amour, qui jaillit du cœur de la Vierge Marie. Elle a vécu avec une fidélité exemplaire ; elle a conservé au plus intime de son cœur les paroles adressées par Dieu à son peuple, les promesses faites à Abraham, Isaac et Jacob, et en a fait le contenu de sa prière : dans le Magnificat, la parole de Dieu était devenue celle de Marie, lumière sur sa route, au point de la rendre disponible pour accueillir en son sein le Verbe de Dieu fait chair. La page de l’Evangile d’aujourd’hui rappelle cette présence de Dieu dans l’histoire et à travers les événements ; elle contient en particulier une référence au chapitre six du Second livre de Samuel (6, 1-15), dans lequel David transporte l’Arche sainte de l’Alliance. Le parallèle que fait l’Evangéliste est clair : Marie, qui attend la naissance de son fils Jésus, est l’Arche sainte qui porte en elle la présence de Dieu, une présence qui est source de consolation, d’une joie qui comble. Jean, en effet, danse dans le sein d’Elisabeth, tout comme David dansait devant l’Arche. Marie est « la visite » de Dieu qui apporte la joie. Dans son chant de louange, Zacharie le dira de manière explicite : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, de ce qu’il a visité et délivré son peuple » (Lc 1, 68). La maison de Zacharie a fait l’expérience de la visite de Dieu avec la naissance inattendue de Jean-Baptiste, mais surtout par la présence de Marie qui porte en son sein le Fils de Dieu.
Mais nous nous demandons maintenant : qu’est-ce que l’Assomption de Marie apporte à notre chemin, à notre vie ? La première réponse est la suivante : dans l’Assomption, nous voyons qu’en Dieu, il y a de la place pour l’homme, Dieu lui-même est la maison aux nombreuses demeures dont parle Jésus (cf. Jn 14, 2) ; Dieu est la maison de l’homme, en Dieu il y a l’espace de Dieu. Et Marie, en s’unissant, en étant unie à Dieu, ne s’éloigne pas de nous, elle ne va pas sur une galaxie inconnue ; au contraire celui qui va à Dieu se rapproche, parce que Dieu est proche de nous tous, et Marie, unie à Dieu, participe de la présence de Dieu, elle est plus proche de nous, de chacun de nous. Saint Grégoire le Grand a eu, au sujet de saint Benoît, une belle expression que nous pouvons appliquer aussi à Marie : saint Grégoire le Grand dit que le cœur de saint Benoît est devenu si grand que toute la création peut entrer dans ce cœur. Cela est encore plus vrai pour Marie : Marie, entièrement unie à Dieu, a un cœur si grand que toute la création peut entrer dans ce cœur, et les ex-voto partout sur la terre le démontrent. Marie est proche, elle peut écouter, elle peut aider, elle est proche de chacun de nous. En Dieu, il y a de l’espace pour l’homme, Dieu est proche et Marie, unie à Dieu, est très proche, elle a un cœur aussi large que celui de Dieu.
Mais il y a encore un autre aspect : non seulement il y a en Dieu, de la place pour l’homme, mais dans l’homme, il y a de la place pour Dieu. Cela aussi nous le voyons en Marie, l’Arche sainte qui porte la présence de Dieu. En nous, il y a de l’espace pour Dieu, et cette présence de Dieu en nous, si importante pour illuminer le monde plongé dans la tristesse et dans les problèmes, se réalise par la foi : par la foi, nous ouvrons les portes de notre être pour que Dieu puisse entrer en nous, pour que Dieu puisse être la force qui donne vie à notre être et nous ouvre un chemin. En nous, il y a de l’espace, ouvrons-nous, comme Marie, en disant : « Que ta volonté soit faite, je suis la servante du Seigneur ». En nous ouvrant à Dieu, nous ne perdons rien. Au contraire, notre vie s’enrichit et grandit.
Ainsi, foi et espérance se rejoignent. On parle beaucoup aujourd’hui d’un monde meilleur qui devrait venir : ce serait cela notre espérance. Si ce monde meilleur doit venir, et quand, nous ne le savons pas, je ne le sais pas. Mais il est sûr qu’un monde qui s’éloigne de Dieu ne devient pas meilleur, mais pire. Seule la présence de Dieu peut garantir un monde bon. Mais ne parlons pas de cela.
Il y a une chose, une espérance qui est certaine : Dieu nous attend, il nous espère, nous n’avançons pas dans le vide, nous sommes attendus. Dieu nous attend et, en allant dans l’autre monde, nous trouvons la bonté d’une Mère, nous retrouvons nos proches, nous trouvons l’Amour éternel. Dieu nous attend : voilà la grande joie et la grande espérance de cette fête. Marie nous visite, elle est la joie de notre vie et la joie est espérance.
Que dire de plus ? Un cœur grand, la présence de Dieu dans le monde, un espace pour Dieu en nous et un espace en Dieu pour nous, l’espérance, être attendus : voilà la symphonie de cette fête, le signe que nous donne la méditation de cette solennité. Marie est l’aurore et la splendeur de l’Eglise triomphante ; elle est consolation et espérance pour le peuple encore en chemin, dit la Préface de ce jour. Confions-nous à son intercession maternelle, afin qu’elle nous obtienne du Seigneur la grâce d’une foi plus forte dans la vie éternelle ; qu’elle nous aide à bien vivre dans l’espérance le temps que Dieu nous donne. Une espérance chrétienne, qui n’est pas seulement une nostalgie du Ciel, mais un désir de Dieu vivant et actif, dans notre monde aujourd’hui, désir de Dieu qui fait de nous des pèlerins infatigables et qui alimente en nous le courage et la force de la foi, qui sont aussi courage et force de l’amour. Amen.
Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
La lectio divina à la lumière des Pères de l’Eglise
17 août, 2012http://ursule-tours.cef.fr/spip.php?article246
La lectio divina à la lumière des Pères de l’Eglise
Pour la première fois, Jean Paul II parle de la « lectio divina »comme d’une pratique féconde pour la vie spirituelle de tous les chrétiens.
Pour la première fois, Jean Paul II parle de la « lectio divina » comme d’une pratique féconde pour la vie spirituelle de tous les chrétiens. Voici ses paroles :
« Il n’y a pas de doute que le primat de la sainteté et de la prière n’est concevable qu’à partir d’une écoute renouvelée de la Parole de Dieu… Il est nécessaire, en particulier, que l’écoute de la Parole devienne une rencontre vitale, selon l’antique et toujours actuelle tradition de la « lectio divina » permettant de puiser dans le texte biblique la parole vivante qui interpelle, qui oriente, qui façonne l’existence »
Qu’est-ce donc que la lectio divina ?
Elle est une approche priante de la Bible, considérée comme un tabernacle, un lieu provilégié de la rencontre avec Dieu le Bien Aimé. Elle provient d’une longue tradition, pratiquée par les pères du désert, elle a été mise en forme, pourrait -on dire, par un moine cistercien du 12è siècle, Guigues le Chartreux, qui décrit les étapes importantes de la « lectio divina » telle qu’elle est pratiquée, individuellement, encore aujourd’hui chez les moines.
« Rencontre vitale » nous dit Jean Paul II. Il en va de notre vie spirituelle, de notre relation à Dieu. « Ignorer les Ecritures , c’est ignorer le Christ » disait Saint Jérôme au 4è siècle. Et nous n’ignorons pas les Ecritures, nous n’ignorons pas le Christ, dans la tradition ignatienne, mais la « lectio divina » insiste spécialement sur la lecture de toute l’Ecriture, il s’agit d’une prise de connaissance un peu systématique, qui permet que les textes s’enrichissent les uns les autres, se comprennent et s’éclairent les uns par les autres.
Donc il est indispensable de fréquenter les Ecritures, mais il faut encore « être disponible pour Dieu » dit Origène et il explique qu’il faut se convertir. Le mouvement de la conversion qui nous fait nous détourner du péché, du mensonge, des futilités, nous retourne nécessairement vers le Dieu Saint et Vrai et c’est dans sa Parole en particulier que nous le rencontrons. Se convertir, se tourner vers le Seigneur, c’est donc finalement « se fiancer à sa Parole » selon une formule belle d’Origène.
« Etre disponible pour Dieu », Saint Jérôme nous dit que la règle de Saint Pacôme prescrivait aux moines, « chaque dimanche, de ne s’adonner qu’à la prière et aux lectures. » Cette règle monastique devrait être l’idéal de tout chrétien. C’était ce qui était pratiqué autrefois, dans certaines familles de croyants : on lisait la Bible en famille, dans la soirée du dimanche… Ecoutons sur ce sujet Saint Jean Chrisostome : « Quelques uns parmi vous disent : je ne suis pas moine, j’ai une femme, des enfants, et les affaires de mon foyer dont j’ai la charge. Mais c’est là ce qui détruit tout : tu estimes la lecture des divines Ecritures réservée aux moines, alors qu’elle te serait plus nécessaire qu’à eux. Toi qui vis au milieu du monde et y reçois chaque jour des blessures, as plus grand besoin de remède. »
Les moines ne supportent pas de ne pas se nourrir de la Parole de Dieu : Ils ont à essayer de vivre, à la lettre, ce que signifie la conversion : oubli des choses du monde pour ne plus fréquenter que la Parole de Dieu. On comprend ainsi que la « lectio divina » devienne dès l’origine, la pièce majeure de l’organisation monastique.
Mais le pape Jean Paul II souhaite que tous les chrétiens pratiquent la « lectio divina ».
Alors j’aimerais vous dire un peu ce que j’ai découvert chez les Pères de l’Eglise, en ce qui concerne cette pratique monastique. Les Pères de l’Eglise au sens strict, sont les pasteurs, écrivains de l’antiquité chrétienne, qui se sont signalés par leur doctrine, par leur explication de la Sainte Ecriture. Ce sont les plus proches, dans le temps, de l’époque apostolique. Et on sent chez eux une fraîcheur, une vigueur, un attachement à Jésus que je trouve très touchants. Ils ont beaucoup lu et relu les deux Testaments pour s’en nourrir et nourrir leurs ouailles et ce n’était pas facile d’avoir des livres à cette époque, pas facile de les déchiffrer. Ils parlent à longueur de pages de cette fréquentation de l’Ecriture Sainte. C’est que cela leur semble important pour les chrétiens.
J’ai suivi le plan indiqué par Guigues le Chartreux et l’exposé comportera donc 4 étapes dont la première est la lecture.
Dès que le croyant a connu Dieu et entendu sa Parole, il doit, comme le dit Origène, (du 2è siècle ) : « oubliant tout le reste, être disponible pour Dieu ».
Ne peut-on pas y sentir comme cette nostalgie d’Israël exprimée par le prophète Osée au chapitre 2 : « je vais la séduire, la conduire au désert et parler à son coeur. » ? Il semble que la foi tende secrètement, d’elle-même, vers cette écoute éternelle du Verbe, Parole substantielle et béatifiante du Dieu vivant. « Tu nous as fait pour Toi » murmurait Saint Augustin. Cela exige que l’on essaie de trouver les conditions optimales pour se mettre à cette écoute du Seigneur. Mais tout cela nous le savons bien !
Alors on lit, on écoute non pour savoir, mais pour éprouver.. Ce n’est pas une recherche intellectuelle, mais la recherche d’une personne, le Dieu vivant. La « lectio divina » éveille cette mystérieuse mémoire de Dieu qui réside au fond de notre être. Lire la Parole de Dieu c’est se souvenir de Dieu plutôt que d’apprendre du nouveau.
Origène, lui, dit qu’il faut pour accueillir la parole, « désensabler » nos coeurs, pour atteindre la source d’eau vive que Dieu a mise en nous.
Ecoutons encore St Ambroise (339-397), « Lorsque je lis les Saintes Ecritures, c’est Dieu qui se promène avec moi dans le paradis ! »
Comment ne pas désirer cette promenade pendant laquelle Dieu nous prend par la main ? « La lectio est une promenade, commentent deux moines, c’est à dire une marche libre et détendue, sans hâte, gratuite et joyeuse, ce qui implique cette liberté particulière de nous arrêter plus longuement par exemple à un mot, un peu comme une mélodie grégorienne s’arrête à certains mots en les ornant de vocalises, cette liberté qui nous fera peut être aussi reprendre et rapprocher certains membres de phrases, à la manière de Bach dans les airs des cantates. » [1]
Et c’est au cours de cette promenade, que le Seigneur se manifeste à chacun de nous comme le dit Origène : « Ce n’est pas une fois seulement que mon Seigneur Jésus est venu sur terre : il est venu également à Isaïe, il est venu à Moïse, au peuple aussi et à chacun des prophètes, il est venu ; toi non plus ne crains point : même si tu l’as déjà reçu, il reviendra à toi. »Car la parole nous met en contact direct avec la personne de Jésus.
C’est ainsi qu’ Origène, lorsqu’il commente le Cantique des Cantiques, s’écrie : « la forme divine de Jésus n’est perceptible qu’à ceux à qui il veut la révéler et qui sont prêts à accueillir cette révélation. Lorsque l’épouse, c’est à dire l’Eglise, se convertissant à Dieu, fut dépouillée du voile qui l’enveloppait (2 Co 3,16), elle aperçut son Bien Aimé sautant sur les montagnes – les livres de la loi- bondissant sur les collines – les écrits des prophètes- et cette manifestation est si évidente, si dépourvue de toute illusion qu’il n’est pas dit de l’Epoux qu’il apparaît, mais qu’il bondit, comme si, feuilletant les écrits des prophètes, elle avait vu le Christ s’en échapper et courir au devant d’elle, comme si, pour avoir quitté le voile qui la couvrait, elle voyait le Christ jaillir de chaque endroit du texte, s’élancer vers elle et lui manifester tout à coup une présence qu’elle ne peut plus mettre en doute. » Quelle image magnifique pour exprimer cette rencontre tant désirée d’un Dieu qui bondit vers nous, ses pauvres créatures, qui bondit pour nous rejoindre quand nous lisons sa Parole ! Comment ne pas désirer cette rencontre, cette présence !
Il est clair que pour en arriver là, il faut une longue fréquentation de la Parole de Dieu, Personne ne peut comprendre le sens de l’Ecriture Sainte sans en avoir acquis la familiarité par une lecture fréquente, selon ce qui est écrit : Aime la sagesse et elles t’élèvera ; elle te glorifieras si tu l’embrasses. Plus on fréquente assidûment la Parole divine, plus on en comprend les richesses, de même que la terre, plus on la cultive, plus elle porte de riches récoltes. C’est dire qu’il faudrait aller bien au delà des lectures proposées par la liturgie. Nous sommes invités à un vrai travail d’approfondissement de la Parole, pour mieux la comprendre et pour en vivre. Car la « lectio » est une lecture de sagesse : il s’agit de faire descendre la Parole de la tête au coeur, puis du coeur, « la Parole de Dieu s’installe dans les entrailles de l’homme » selon Origène. La « lectio » est écoute de la Parole de Dieu, mais surtout ouverture à une présence.
Deuxième temps, la méditation priante
Là encore les Pères sont très riches dans leurs expressions quand il s’agit de la méditation. C’est une réflexion éclairée par l’Esprit. Au lieu de s’attacher aux faits et aux images matérielles, nous sommes invités à tendre, à partir d’eux, aux idées et aux réalités qu’ils évoquent. L’Ecriture ne suffit pas à faire connaître son sens, c’est l’Esprit qui nous le communique et Saint Grégoire affirme :« Les Paroles de Dieu ne peuvent absolument pas être pénétrées sans sa Sagesse : car si quelqu’un n’a pas reçu l’Esprit de Dieu, il ne peut d’aucune manière comprendre les paroles de Dieu . » D’où l’importance de l’invocation à l’Esprit Saint quand on débute cette forme de prière, comme toute prière d’ailleurs !
La « lectio divina » est une attitude d’ouverture de notre coeur à plus Grand que nous. L’Eglise nous invite à une intelligence spirituelle des Ecritures, par un rapprochement des textes qui permettent de les éclairer les uns par les autres et de dévoiler le sens profond qu’ils reçoivent du Christ, comme nous l’avons vu précédemment. Il est bon d’être attentif, dans notre Bible, à tous les rapprochements indiqués en marge. Cela nous permet d’enrichir notre lecture, de comparer les textes et de trouver les harmoniques entre eux…
La Parole vit en nous et s’enrichit de ces résonances, de ces harmoniques ainsi que des autres passages déjà mémorisés. Et l’on s’aperçoit peu à peu que l’intention l’intention des Ecrits inspirés est de nous offrir la révélation de la volonté de Dieu à notre égard.
C’est que la « rumination » de la Parole a comme effet de nous faire découvrir ce que le texte divin a à nous dire et Cassien (350-432 env ) dit : « Le sens des mots ne nous est pas découvert par une explication, mais par l’expérience que nous en avons faite. Instruits par ce que nous sentons nous-mêmes, ce ne sont pas des choses que nous avons apprises par ouï-dire, mais nous en palpons pour ainsi dire la réalité pour les avoir perçues à fond. »
Pour parvenir à cette expérience, il nous faut mastiquer la Parole, la « ruminer »,car elle est vraiment une nourriture. Ces termes disent bien que nous devenons ce que nous mangeons. Il faut manger spirituellement l’Ecriture, alors elle devient ainsi nourriture et breuvage dans cette réflexion priante. « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »
Par respect pour cette Parole de Dieu, « Il nous faut revenir au texte, en répéter les paroles et les graver profondément dans notre coeur ». Alors la mémoire peut intervenir. Cette mémoire, c’est celle du coeur, celle qui est emplie d’action de grâces pour l’ensemble du mystère du Christ, découvert et approfondi dans la Parole de Dieu. « Le souvenir des merveilles de Dieu » dont parle St Basile ( 329-379 ) entraîne la vraie méditation et nous offre la révélation objective du vouloir divin à notre égard.
Selon Cassien , comme pour Saint Thomas, l’Ecriture a 4 sens différents :
le sens historique ou littéral,
le sens allégorique ou christologique,
le sens moral ou anthropologique,
le sens eschatologique.
Par exemple, la ville de Jérusalem, représente une réalité historique , c’est la ville des juifs . Cette ville sur laquelle Jésus pleure et qui persécute les prophètes. (sens littéral) Elle devient figure de l’Eglise, la cité du Christ, Prince de la paix, dans laquelle nous entrons par le baptême (sens allégorique). Puis elle peut être encore la figure de l’âme chrétienne, cette Jérusalem que nous voulons être pour accueillir Jésus ou pour être lieu de paix pour les autres (sens moral) et enfin elle peut être la Jérusalem céleste à laquelle nous sommes destinés, à la fin des temps (sens eschatologique). Il est bien évident, qu’il n’est pas nécessaire de réfléchir sur les quatre sens que peut prendre l’Ecriture, mais ces différentes acceptions s’enrichissent les unes les autres. En cela, il faut être attentif à ce que nous suggère l’Esprit.
Alors que la « lectio » nous fait envisager le sens littéral, la « meditatio » ouvre sur les autres sens plus spirituels. Et peut se développer ainsi devant nos yeux, toute la richesse de la Parole de Dieu. Nous sommes invités à saisir par l’intelligence un peu de « la largeur, la longueur et la profondeur, en un mot l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance. » Car le Christ est à découvrir dans tous les livres de la Parole de Dieu et c’est une partie de notre recherche amoureuse, lors de la meditatio. Nous savons bien que toute l’ Ecriture est un seul livre et ce livre c’est le Christ, parce que toute l’Ecriture parle du Christ et s’accomplit dans le Christ.
Saint Augustin( 354-430 ) résume ainsi l’unité des Ecritures : « Dieu, qui est l’inspirateur et l’auteur des livres de l’un et l’autre Testaments, a fait, avec sagesse, en sorte que le Nouveau Testament fût caché dans l’Ancien et que l’Ancien Testament fût dévoilé dans le Nouveau. »
Ainsi la Parole de Dieu nous parle, plutôt Dieu lui même nous parle. Il nous dit le Christ, et Il nous dit et nous demande ce qu’hier Il ne nous disait pas, ne nous demandait pas encore.. Alors de celui qui écoute, qui cherche, qui médite en son coeur, nous devenons celui qui répond au Créateur.
Et c’est la 3è phase selon Guigues l’oratio .
La prière jaillit alors comme un élan du coeur vers le Seigneur, dont la beauté, la bonté, la générosité a été pressentie dans la méditation : c’est le désir ardent de la visite de l’Epoux.
Tout ce qui a été vécu jusqu’à cette étape est déjà prière, approche de Dieu, bien sûr, mais c’est à ce stade que le priant doit en prendre conscience et se tenir plus que jamais disponible. L’oraison est la réponse d’amour que le Fils lui-même adresse au Père, au fond de notre coeur dans l’Esprit Saint. « Cherche à ne rien dire sans lui, dit Saint Augustin, et lui ne dira rien sans toi ». Nous vivons, à ce moment, l’expression la plus pure de la vie de l’Esprit en nous. Elle nous conduit à la paix, parce qu’elle nous introduit dans la plénitude trinitaire.
Il nous faut être conscients que la Parole de Dieu nous donne les mots mêmes que nous devons adresser à Dieu. Et il est bon, lorsqu’on prie, de reprendre ces mots de Dieu. Pouvons-nous en trouver de meilleurs ?
C’est bien ce qu’ont fait Marie, Zacharie, Siméon avec leurs cantiques tout émaillés de formules de prière de L’Ancien Testament….
A propos du Notre Père, Cyprien au 3è siècle, nous exhorte : « Implorer Dieu par ses propres paroles, c’est lui adresser une prière qu’il trouve aimable et filiale…que le Père reconnaisse les paroles de son Fils lorsque nous prions… » Les Pères de l’Eglise conseillent aussi fortement de prier avec les psaumes et Saint Augustin dit « Si le texte est prière, priez, s’il est gémissement, gémissez, s’il est reconnaissance,soyez dans la joie, s’il est un texte d’espérance, espérez… Toutes ces choses en effet qui sont écrites ici, sont le miroir de nous-mêmes. » On entre ainsi en conversation avec Dieu, dans l’esprit et l’attitude du texte. La Parole est venue à nous et maintenant elle retourne à Dieu sous forme de prière. Ecoutons encore Augustin : « Ton oraison est conversation avec Dieu. Quand tu lis, Dieu te parle, quand tu pries, tu parles à Dieu. »
Point n’est besoin d’en dire plus sur cette étape qui varie d’une personne à l’autre. Mais il est sûr que la « lectio divina »est un moyen pour arriver à ce moment de la prière, qui en est l’aboutissement.
Pourtant il faut encore dire un mot de l’étape qui est la Contemplation.
Il est un moment où dans l’oraison, nous sommes invités à faire silence, et, dans n’importe quelle attitude, et par un simple élan de l’âme, nous prosterner pour adorer. La prière devient alors simple regard.
C’est l’accomplissement de la prière, la plénitude vers laquelle tend « l’oratio », mais il est impossible d’y accéder par nos propres forces, car c’est un don gratuit. C’est un amoureux attachement de l’homme à Dieu ; une sorte de conversation familière et affectueuse, l’âme illuminée se tient tranquille, pour jouir de Dieu aussi longtemps que cela est possible. « C’est un regard sur Dieu seul, écrit Cassien, un grand feu d’amour. L’âme s’y fond et s’abîme en la sainte dilection et s’entretient avec Dieu, comme avec son propre père, très familièrement, dans une tendresse de piété toute particulière… ». Il est clair qu’il n’est plus possible de réfléchir, de méditer, quand on est en présence de Dieu seul.
Mais ce n’est pas toujours que l’on peut percevoir sensiblement en nous ce « coeur brûlant » et Saint Augustin nous rassure : « C’est d’une manière cachée que Dieu parle, c’est dans le coeur qu’il dit beaucoup de choses ; une grande sonorité se produit là, dans le grand silence du coeur, quand il dit d’une grande voix : c’est moi ton salut. » et pour nous aider encore quand Dieu se tait, il dit : « Veux-tu être exaucé ? Sois pauvre. Que ce soit la détresse et non le ressentiment qui crie en toi. »
Car la contemplation comme la consolation est une grâce que nous accueillons avec reconnaissance, mais nous savons bien que ce ne peut pas être la mesure de notre prière. Même la contemplation peut se vivre dans l’aridité… et c’est fréquent d’après les Pères, alors il est bon qu’elle se transforme en simple offrande à Dieu en abandon de l’amour.
Mais nous sommes faits pour Dieu pour partager sa vie et c’est ce que nous rappelle Saint Irénée ( mort vers 200 ) :« Il est impossible de vivre sans la vie, et il n’y a de vie que par participation à Dieu et cette participation consiste à voir Dieu et à jouir de sa plénitude… la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant et la vie de l’homme, c’est la vision de Dieu Si déjà la révélation de Dieu par la création donne la vie à tous les êtres qui vivent sur la terre, combien plus la manifestation de Dieu par le Verbe, donne-t-elle la vie à ceux qui voient Dieu ».
Les mots « déification » , « divinisation » sont souvent employés par les Pères de l’Eglise d’Orient. Ce n’est jamais une identification à Dieu, mais plutôt la participation à la vie divine à laquelle nous sommes conviés. Dans l’Eglise d’Occident on dit plutôt « sanctification ».
Pour terminer je voudrais laisser encore la parole à Origène qui exprime bien l’enjeu de cette fréquentation de l’Ecriture, telle qu’elle peut se faire dans la « lectio divina » : « Tout est mystère de ce qui est dans l’Ecriture. Le Christ veut te fiancer à lui, toi aussi. Voulant donc te fiancer à lui, il t’envoie ce serviteur : la parole prophétique ; sans l’avoir d’abord accueillie, tu ne pourras pas épouser le Christ. Sache cependant que sans exercice et sans connaissance, personne n’accueille la parole prophétique ; en revanche, l’accueille celui qui sait tirer l’eau du puits… » Il fait allusion ensuite aux mariages des patriarches, Jacob et Isaac, contractés auprès du puits. Ce n’est pas par hasard, dit-il et il ajoute : « Cette union de l’âme avec le Verbe, il est certain qu’elle ne peut se réaliser que si on se laisse instruire par les livres divins, auxquels figurativement, l’Ecriture donne le nom de puits. Quiconque vient à ce puits et en tire de l’eau, c’est à dire méditant l’Ecriture, perçoit un sens et une signification plus profonde, celui-là trouvera des noces dignes de Dieu, car son âme sera unie à Dieu. »
J’ai tenté maladroitement de vous faire pressentir ce que j’ai déjà éprouvé en pratiquant la « lectio divina ». J’espère que je vous en ai donné l’envie, si vous n’avez pas encore essayé. Mais je peux dire que, même si il y a encore beaucoup de chemin à faire, c’est déjà un grand bonheur. Laissons nous convaincre par l’enthousiasme des Pères. Ils sont des guides sûrs.
Sr Magdeleine
[1] (Frères François et Pierre Yves, Méditation de l’Ecriture Bellefontaine p 53-54.)
Assomption de la Vierge Marie
14 août, 2012La fille de Sion. Considérations sur la foi mariale de l’Église: Joseph Ratzinger
14 août, 2012http://www.esprit-et-vie.com/article.php3?id_article=232
Joseph Ratzinger
La fille de Sion. Considérations sur la foi mariale de l’Église
P. Francis de Chaignon
Traduction, présentation et annotations par Sophie BINGELLI, Paris, Éd. Parole et Silence, coll. « Cahiers de l’École Cathédrale », n° 55, 2002.
Esprit & Vie n°72 / décembre 2002 – 2e quinzaine, p. 13-14.
Ce récent Cahier de l’École Cathédrale est la traduction de trois conférences de théologie mariale données en 1975 par Joseph RATZINGER, peu avant sa nomination comme archevêque de Munich (le texte allemand en avait été publié deux ans plus tard puis réédité en 1990).
L’auteur évalue, tout d’abord, la situation de la mariologie dans la théologie catholique et propose comme piste de réflexion de rechercher « dans l’Ancien Testament les éléments par lesquels le Nouveau Testament interprète théologiquement la figure de Marie ». Il s’agit de trois motifs vétérotestamentaires qui dessinent une théologie de la femme : la figure d’Ève, les figures de mères (fécondes ou stériles), les figures de femmes salvatrices (telles Déborah, Judith, Esther). À travers ces motifs s’élabore, en fait, une théologie du peuple que ces femmes incarnent et donc une théologie de l’Alliance ; nous accédons de la sorte à la révélation de Dieu lui-même. Dans les textes plus tardifs apparaît la figure de la sagesse, présentée comme créature de Dieu et pure réponse à son action. Or, cette figure de la sagesse demande à être réinterprétée, non seulement, de façon christologique mais également de façon mariale. La sagesse trouve son accomplissement à la fois dans le Christ, Verbe incarné, et dans l’accueil fécond de cette Parole en Marie.
Il est ainsi clairement montré que « la figure de la femme est indispensable à la cohérence de la foi biblique » (p. 43). Or, un tel principe trouve sa réalisation personnelle en Marie. Sans elle, sans le caractère marial de la foi, la création est niée, la grâce ne respecte pas la liberté humaine, le Dieu de l’Alliance est méconnu.
Le deuxième chapitre s’intéresse alors à la foi mariale de l’Église. Certes, les dogmes mariaux ne peuvent être déduits de textes isolés du Nouveau Testament. Mais ce que le premier chapitre a établi nous permet de comprendre que ces dogmes expriment l’unité de l’Ancien et du Nouveau Testament, grâce au recours à l’exégèse typologique. Sans cela, nous l’avons vu, on dissocie l’unité de l’Écriture et l’on compromet la vérité de la création et de la grâce. Nous pouvons donc voir dans la mariologie un critère d’équilibre de la théologie.
L’auteur vérifie cela sur chacun des trois dogmes mariaux fondamentaux : la maternité virginale, la conception immaculée, l’Assomption. Concernant le premier dogme, il convient de rappeler que, d’une part, l’incarnation de Dieu en Jésus-Christ a nécessairement une signification mariologique et que, d’autre part, la maternité divine de Marie a nécessairement une signification christologique (on sera attentif ici à la note 26, p. 94, qui constitue une retractatio de la position tenue par l’auteur dans Foi chrétienne hier et aujourd’hui, paru en 1969, et qui ne soulignait pas avec assez de précision la correspondance profonde entre la conception virginale et l’affirmation que la personne du Christ est celle du Fils de Dieu, de sorte que Jésus n’a que Dieu pour Père). Cette réflexion sur une vérité très contestée saisit le lien entre le biologique et le spirituel, par-delà nos tentations de les dissocier. D’ailleurs, note l’auteur, le nœud du refus de la conception virginale n’est pas, en dernier ressort, celui de l’historicité des récits évangéliques mais un présupposé implicite, une vision du monde et de Dieu qui interdit à ce dernier, au nom de notre raison scientifique, d’intervenir dans le monde. Mais c’est là régresser à une philosophie païenne…
La conception immaculée, quant à elle, éclaire la compréhension catholique de la grâce. Il n’y a pas opposition entre la Parole de Dieu et l’homme, ni irruption purement verticale, il y a un dialogue, une réponse et une correspondance. À la question du fondement scripturaire d’une telle affirmation dogmatique, il faut à nouveau répondre par le recours à la typologie. Or, ce type n’est pas abstrait mais se réalise dans une personne, celle de Marie. On lira avec soin les pages pénétrantes (spécialement p. 75-77) qui relient la question de l’immaculée conception à celle du péché originel, lui aussi intelligible uniquement grâce au recours à la typologie, à la suite de saint Paul. Dans un cas comme dans l’autre, on n’accède au fait que par la typologie qui unit Ancien et Nouveau Testament.
La dogmatisation de l’Assomption, enfin, est à comprendre comme l’acte le plus haut de vénération de Marie reflétant à nouveau l’unité des Testaments et la réalisation personnelle en Marie de ce que l’Église attend pour elle-même : la victoire définitive sur la mort, la participation de tous et de chacun non seulement à la Résurrection mais aussi à l’Ascension du Christ.
On l’aura compris, ces pages lumineuses sont d’une réelle pénétration théologique. Si elles demandent au lecteur d’être un tant soit peu familiarisé avec les grands thèmes de la théologie mariale, elles ne sont pas excessivement ardues. On regrettera seulement que la traduction soit souvent trop proche du texte allemand, d’où des obscurités qu’une réécriture aurait dû dissiper. Notons l’originalité de l’introduction qui met en perspective les propos de Joseph RATZINGER et l’anthropologie d’Edith STEIN. La troisième annexe, qui est le texte de la « Déclaration christologique commune entre l’Église catholique et l’Église assyrienne de l’Orient », datée du 11 novembre 1994, pourra surprendre. Elle n’est accompagnée d’aucun commentaire.
Homélie la fête de l’Assomption de la Vierge Marie
14 août, 2012Homélie la fête de l’Assomption de la Vierge Marie
(par Christophe FEREY, prêtre)
Toute l’histoire de Marie est une Visitation. Se laisser visiter, tout un art ! Ouvrir sa maison pour y laisser entrer quelqu’un qui ne vous quittera jamais ! Marie à eu ce génie de savoir ouvrir la porte et de ne jamais avoir peur de celui qu’elle accueillait dans sa vie. La visite est un art pour celui qui entre . Car Dieu ne veut pas seulement passer, il veut demeurer en nous. Dieu n’a jamais aimé l’amour à la sauvette. Son amour se donne et se livre sans aucun calcul. Il est sans retour. En Marie, Dieu a trouvé la demeure idéale. Une demeure où il était sur que tout l’espace serai disponible. Chez Marie il n’y a pas un recoin qui ne soit inaccessible à la présence de Dieu. Elle est en quelque sorte une icône où resplendi la Gloire de Dieu. Cette Gloire c’est d’habiter chez celui qui veut bien accueillir la présence de Dieu dans sa vie. En Marie nul obstacle à cette Présence. Sa vie fut un immense oui à la présence de Dieu. Marie devient ainsi créature et mère, en Jésus, d’un Dieu qui veut s’offrir à tout homme qui veux bien l’accueillir. Marie nous est offerte comme mère pour que son fils puisse naître en chacun de nous. Car Marie s’est tellement laisser façonner par Dieu qu’elle ne retient rien. Elle offre tout. Si elle retient son fils dans ses bras, c’est pour mieux l’offrir à cette humanité blessée et meurtrie par le péché. Contempler Marie c’est voir l’homme tel que Dieu l’a créé. Alors mettons nous à l’école de Marie. Il ne s’agit pas de l’idolâtrer mais à travers elle, de célébrer son Créateur et notre Sauveur. Marie a accueilli l’inattendu de Dieu malgré les risques. Nous aussi soyons attentif lorsque Dieu nous fait signe et soyons prêts à répondre. Bien souvent l’appel du Seigneur nous conduit sur des chemins que nous n’aurions jamais imaginés. Ayons confiance ! Sur ces chemins, il y a le Seigneur qui marche à nos cotés, à notre rythme. Comme Marie, nous sommes invités à être intelligents. « Comment cela va-t-il se faire ? » demande la jeune fille à l’Ange. Nous sommes invités à la suite de Marie à ne pas nous contenter de réponses toutes faites, de formules de catéchisme mais bien à rendre intelligente notre foi. Nous n’aurons jamais fini de comprendre le mystère de Dieu. Osons questionner notre foi. N’ayons pas peur de ce travail car il nous rapproche de Dieu. Mieux nous le connaîtrons et mieux nous l’aimerons en nos frères. Être à l’école de Marie, c’est se mettre en route avec Jésus. Ne pas être à la remorque mais à ses cotés. Être le témoin de son œuvre de Salut. Avec Jésus nous sommes capable de passer de grands cols. C’est ce que fait Marie en allant chez sa cousine Elisabeth. Rien n’est infranchissable avec Jésus. Et pourtant Marie à du passer un col infranchissable : celui de la mort de son fils. Malgré la douleur insupportable de voir son Fils en croix, elle reste debout. Quel mystère ! C’est celui d’un Dieu qui nous veut debout. Avec Dieu nous ne sommes pas enfermez dans une boite de coton. Nous ne sommes pas surprotégés. Dieu désir que nous puissions faire face aux épreuves de la vie et aimer malgré tout. Marie n’est pas une superwouman. Elle a simplement laisser Dieu vivre en elle. Elle a refusé que la haine ou la douleur puissent l’envahir et ne plus laisser un seul espace en elle. Marie n’est pas une sorte de femme aseptisée sans défaut et sans limites. Elle est une femme qui a répondu oui à Dieu avec ses limites et ses fragilités. Un oui qui à pu s’épanouir sur une terre bien préparée où le péché n’a pas eu de prise. Cette terre a été préparé par Dieu mais aussi par tout un peuple. Marie est l’héritière d’une foi multi-séculaire. Nous même notre terre a été travaillée jusqu’à présents pour pouvoir vivre de Dieu dans notre présent. Et vous parents, grands parents, éducateurs comment prenez vous soins de la terres de vos enfants ? Nous avons a facilité le travail de Dieu en vivant nous même l’Évangile. Ce travail c’est de se laisser peu à peu transformer par une parole touchant notre cœur. Sur une parole Marie fait confiance et dit oui. Et quelle réponse allons nous apporter à cette parole ? Lorsque Marie retourne vers Dieu c’est toute l’humanité qui avait perdu le chemin de Dieu qui retourne vers lui. Tout homme est invité à la suite de Marie à dire une seule parole qui lui ouvre le ciel : OUI. Alors vivons dans la confiance sur que tout homme peut dire oui à Dieu lorsqu’il le verra tel qu’il est non comme il aurai pu l’imaginer.
Marie est désormée au ciel, partageant la Gloire de Dieu. Pourtant elle n’est pas absente de notre vie. Dieu nous l’a donnée pour quelle soit notre mère et marche à nos cotés. Alors n’ayons jamais peur de nous tourner vers elle. Elle est le plus sur chemin pour retrouver Dieu lorsque nous nous égarons. Marie apprends-nous à chanter et à vivre ton cantique d’Action de grâce pour que notre vie soit toujours un don que nous recevons de Dieu. « Mon âme exalte le Seigneur, Exulte en Dieu mon Sauveur ».