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Dimanche 12 août : commentaires de Marie Noëlle Thabut: Premiere Lecture – Premier Livre des Rois 19, 4 – 8
10 août, 2012http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html
Dimanche 12 août : commentaires de Marie Noëlle Thabut
Premiere Lecture – Premier Livre des Rois 19, 4 – 8
Le prophète Elie, fuyant l’hostilité de la reine Jézabel,
4 marcha toute une journée dans le désert.
Il vint s’asseoir à l’ombre d’un buisson,
et demanda la mort en disant :
« Maintenant, SEIGNEUR, c’en est trop !
Reprends ma vie :
Je ne vaux pas mieux que mes pères. »
5 Puis il s’étendit sous le buisson, et s’endormit.
Mais voici qu’un ange le toucha et lui dit :
« Lève-toi et mange ! »
6 Il regarda, et il y avait près de sa tête
un pain cuit sur la braise et une cruche d’eau.
Il mangea, il but, et se rendormit.
7 Une seconde fois, l’Ange du SEIGNEUR le toucha et lui dit :
« Lève-toi et mange !
Autrement le chemin serait trop long pour toi. »
8 Elie se leva, mangea et but.
Puis, fortifié par cette nourriture,
il marcha quarante jours et quarante nuits
jusqu’à l’Horeb, la montagne de Dieu.
Nous avons déjà eu l’occasion de parler du prophète Elie (dix-neuvième dimanche ordinaire A) ; je vous rappelle brièvement son histoire : nous sommes dans les années 875 à 850 av.J.C. environ. Elie était originaire de Tishbé en Galaad (au nord de ce que nous appelons aujourd’hui la Jordanie), et il était surnommé Elie le Tishbite ; mais son vrai nom, Eliyyah, signifiait « Mon Dieu, c’est Yah » (première syllabe du nom de Dieu), ce qui résume bien sa vie : laquelle fut un combat incessant contre l’idolâtrie.
Or le royaume du Nord où Elie exerçait sa mission de prophète traversait une grave crise religieuse : le roi Achab avait épousé une princesse païenne, Jézabel, fille du roi de Sidon. Là-bas, on adorait Baal. La nouvelle reine n’avait pas changé de religion en épousant Achab ; au contraire, elle avait introduit son idolâtrie dans le palais même du roi à Samarie : elle avait apporté avec elle des statues de ses divinités, et pire encore, d’innombrables prêtres et prophètes de Baal qui faisaient la loi au palais.
Le récit que nous lisons ce dimanche se situe dans un moment crucial des relations entre la reine païenne qui donne un très mauvais exemple à tout son peuple et Elie, le prophète du Dieu unique. Je vous rappelle ce qui vient de se passer : on pourrait le résumer en deux grands épisodes : une longue période de sécheresse et le sacrifice du Carmel.
Acte 1, la sécheresse : c’est un fait historique qu’il y a eu au Moyen-Orient une très grande sécheresse au neuvième siècle. L’historien juif Flavius Josèphe (premier siècle ap.J.C.) en parle. Dans une civilisation exclusivement agricole, sécheresse veut dire famine et donc mort à très brève échéance : de nombreuses villes anciennes ont disparu de la carte uniquement à l’occasion d’une sécheresse durable. Prévenu par Dieu, Elie commence par déclarer solennellement « Par la vie du SEIGNEUR, le Dieu d’Israël au service duquel je suis, il n’y aura ces années-ci ni rosée ni pluie sinon à ma parole ». Traduisez Dieu est le seul maître des éléments, vos Baals n’y peuvent rien. Puis il se met à l’abri car Dieu lui a dit : « Va-t-en d’ici, dirige-toi vers l’orient et cache-toi dans le ravin de Kerith, qui est à l’est du Jourdain. Ainsi tu pourras boire au torrent, et j’ai ordonné aux corbeaux de te ravitailler là-bas. » (1 R 17, 3-4). La sécheresse persistant, le torrent cesse de couler et Dieu envoie Elie un peu plus loin, à Sarepta, près de Sidon. Là, Elie sera secouru par une veuve pauvre et aura l’occasion de lui prouver sa reconnaissance en accomplissant pour elle deux miracles (nous en reparlerons dans quelques semaines ; cf le trente-deuxième dimanche).
Acte 2, le sacrifice du Carmel : au bout de deux ans de sécheresse, Dieu annonce que la pluie va tomber et il envoie Elie prévenir Achab ; mais au lieu de se contenter de porter la bonne nouvelle, Elie cherche à exploiter la situation au profit de son Dieu ; il lance un défi aux innombrables prophètes de Baal : est-ce Baal ou le Dieu d’Israël qui est capable d’envoyer le feu du ciel ? Défi relevé, Elie d’un côté, le groupe des quatre cents prophètes de Baal de l’autre, chacun construit un autel gigantesque et prépare un sacrifice sur le mont Carmel. Mais les prophètes de Baal ont beau invoquer leurs dieux toute la journée, il ne se passe rien. Alors, à son tour, Elie se met à prier : « SEIGNEUR, Dieu d’Abraham, d’Isaac et d’Israël, fais que l’on sache aujourd’hui que c’est toi qui es Dieu en Israël » (1 R 18, 36) ; et le feu du ciel embrase tout le bûcher en un instant. Le peuple est éberlué. Elie profite de la liesse générale pour faire massacrer tous les prophètes de Baal. (Entre nous soit dit, cela Dieu ne le lui avait pas demandé !) Comme on pouvait s’y attendre, la reine Jézabel entre en grande fureur et menace Elie de mort. Il n’a plus qu’à fuir.
Et nous voici au début de notre lecture de ce dimanche : « Le prophète Elie, fuyant l’hostilité de la reine Jézabel, marcha toute une journée dans le désert. » Il est seul ; au passage, il a laissé son serviteur à Béer-Shéva et s’est enfoncé dans la solitude du désert. Le voilà bien fatigué, pire même découragé et doutant de lui-même : « Je ne vaux pas mieux que mes pères » dit-il. Pourquoi ? Parce que, tout à coup, il prend conscience de son indignité : il a annoncé un Dieu terrible, en éliminant tous les opposants ; ne s’est-il pas trompé de combat ? Pire, il a exigé des preuves de la présence de son Dieu : ne ressemble-t-il pas à ses pères qui, tout au long de l’Exode, murmuraient contre Dieu et l’obligeaient à se manifester ?
Or, voilà qu’au sein même de sa fuite et de sa détresse, il va découvrir un Dieu de compassion ; l’ange du Seigneur lui apporte la nourriture nécessaire pour survivre dans sa longue marche en lui disant : « Lève-toi et mange, car autrement le chemin serait trop long pour toi. » Il y puisera la force de marcher quarante jours et quarante nuits jusqu’à la montagne du Sinaï (on l’appelle aussi l’Horeb).[1]
Il ne va pas là-bas par hasard : car c’est là que, déjà, Dieu s’est manifesté à Moïse : dans le feu du buisson ardent, il a prononcé son nom et manifesté sa sollicitude pour son peuple (Ex 3) ; dans la puissance, le vent, l’orage, et le tremblement de terre, il lui a donné les tables de la Loi (Ex 19) ; dans une caverne, il l’a caché pour le protéger de son rayonnement (Ex 33, 21-23). Les pas d’Elie le portent tout naturellement vers cette caverne de Moïse : là il découvrira le vrai visage de son Dieu ; car le temps est venu d’accueillir une nouvelle étape de la Révélation. Dieu est tout-puissant, oui, mais sa toute-puissance est celle de l’amour, dans la douceur d’une « brise légère ». En attendant, il n’a pas trop de quarante jours et quarante nuits pour se préparer : dans la Bible, le nombre quarante évoque toujours une gestation. Dans cette longue marche qui est aussi le temps de sa conversion, il est nourri par « l’Ange du SEIGNEUR », manière pudique de parler de Dieu en personne.
Désormais, chaque fois que nous nous approchons de la table eucharistique, nous entendons le Seigneur lui-même nous inviter : « Lève-toi et mange, car la route sera longue ».
Homélie du père Jacques Fournier pour le dimanche 12 août 2012
10 août, 2012http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/jfournier.html
Homélie du père Jacques Fournier pour le dimanche 12 août 2012
Tout en continuant aujourd’hui notre méditation sur le « Pain de Vie », arrêtons-nous aussi sur l’épisode vécu par le prophète Elie, car il est proche de ce que nous vivons souvent. Et la réponse de Dieu est de même nature pour nous que pour lui, il dépose auprès de nous le pain qui nous redonne vitalité par la vitalité divine.
S’en est trop
Elie marche dans un désert. Les êtres et les choses sont contre lui. Seul un buisson le protège de l’ardeur du soleil. Un buisson … ce n’est pas un arbre. A l’hostilité de la reine, se joint une certaine hostilité de la nature. Il est à bout de forces physiques et psychologiques. Il se sent abandonné et il est seul. « C’en est trop ». Malgré son découragement et son amertume, il lui reste la foi en Dieu, même si elle n’est pas faite de confiance, peut-être. Il ne considère pas que Dieu est hors de sa vie, alors que tant de nos contemporains le pensent, ce qui les conduit au bord du suicide, de la drogue ou du vice.
Elie découvre ses limites. Il s’estimait au-dessus des autres, parce qu’il avait été appelé par Dieu, parce que le choix de Dieu était sur lui. Il découvre que le prophète, l’homme de Dieu, est comme les autres : « Je ne vaux pas mieux que mes pères. » Dieu lui a confié une mission dont il s’aperçoit qu’elle le dépasse. Elle lui paraît même impossible à réaliser. « Reprends ma vie ». Il s’étendit à l’ombre du buisson et s’endort.
Amour attentif de dieu
Or Dieu, lui, ne se lasse jamais. Il ne connaît ni amertume ni découragement envers les hommes quand il les voit s’égarer parce qu’ils ne comprennent pas ce qu’il leur propose. Et Dieu lui prépare un pain cuit sur la braise et une cruche d’eau, rafraîchissante dans ce désert brûlant. Jésus a fait de même, au bord du lac, au matin de la pèche miraculeuse. (Jean 21.9)
Fortifié par cette nourriture, Elie reprend vie et peut marcher quarante jours et quarante nuits jusqu’à la montagne de Dieu, la montagne de la rencontre et de l’Alliance. Il en sera de même après le discours de Jésus sur le Pain de vie. Si les uns se retirent, d’autres se regroupent autour de Pierre : « A qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. » (Jean 6. 66 à 69)
Il n’est aucune situation qui ne reçoive une réponse de Dieu. A nous d’y être attentif, à nous de savoir patienter, à nous d’y apporter une participation de nous-mêmes si minime soit-elle. Dieu nous répond. « Je cherche le Seigneur. Il me répond…Un pauvre crie, le Seigneur entend ! » (psaume 33)
Au-delà de l’expérience immédiate
Dans l’Evangile de ce dimanche, les auditeurs se présentent, eux aussi, dans une attitude proche de celle d’Elie. Ils récriminent. Ils ne peuvent ni ne savent reconnaître la véritable personnalité de Jésus dans l’appel que leur lance le fils du charpentier et le fils de Marie de Nazareth, dans cette surprenante et même choquante affirmation : « Je suis descendu du ciel ! »
Nous-mêmes sommes déroutés par les affirmations de Jésus si nous en restons à leur simple énoncé et à notre expérience immédiate. Ces étonnantes affirmations justifient les abandons des premiers auditeurs, paysans réalistes de la terre de Galilée et juifs religieux adorant le Dieu unique.
Leur attitude devant elles, nous la reprenons d’une autre manière. Ne mesurant pas toute l’ampleur de ce pain qui est présence de la Vie divine en Jésus-Christ, nous en arrivons à dire : « La messe ? je n’en vois pas l’utilité. » Mais la messe n’est-elle fait que pour notre seule utilité ? La « réalisation » de la présence divine, du Christ mort et ressuscité, est-elle sans utilité ?
« Si je prie chaque jour, si je pratique la charité et l’amour envers les autres, est-ce que cela ne vaut pas mieux ? » C’est que nous ne réalisons pas assez que la plénitude de cet amour du prochain n’a sa source et ne se réalise, ne devient réelle, que dans le partage du Pain vivant que Dieu nous donne en son amour.
Combien de fois, lorsque nous montons vers la table eucharistique, n’en sommes-nous pas restés au seul « pain partagé » d’un repas communautaire alors qu’il est le pain vivant de Celui qui est gloire de Dieu et salut du monde.
En fait, la messe, la célébration eucharistique n’est pas une prière ordinaire, pas même une prière au-dessus des autres. Elle est participation réelle et vivante à la vie de Dieu par le Christ en sa présence réelle : « Par Lui, avec Lui, en Lui, tout honneur et toute gloire ! » C’est en cela qu’elle nous invite à devenir « Imitateurs de Dieu » (Ephésiens 5. 1)
Et cette imitation ne peut être qu’une identification. « Comme le Christ, vivez dans l’amour. »
Entendre, écouter, vivre
Revenons aux paroles du Christ à Capharnaüm. Jésus se trouve devant des braves gens qui ne sont pas des intellectuels. Il n’utilise donc aucun argument persuasif ou savant pour forcer leur conviction. Nul ne peut saisir quoi que ce soit de ce qu’il dit, s’il n’écoute pas et s’il n’est pas attiré par la force de Dieu.
Entendre est une chose. L’écouter en est une autre, car c’est déjà vouloir entrer, par cette attitude d’accueil, dans la connaissance de ce que l’on a entendu. Une telle attitude permet à celui qui nous fait entendre sa pensée, en toute confiance et tout amour, d’agir en nous. Elle nous permet de partager avec lui ce qu’il nous fait ainsi connaître, ce qu’il fait naître en nous. C’est l’expérience de tout enseignant, celle du « maître » qui transmet un « savoir » à ses disciples.
Le Christ ne dit rien d’autre à ses auditeurs. Nul ne peut saisir quoi que ce soit des vérités divines s’il n’est pas instruit par Dieu lui-même. « Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire vers moi. Tout homme qui écoute les enseignements du Père vient à moi. » (Jean 6. 44) Les termes grecs qu’utilise saint Jean sont « mathéma » (la science) que nous traduisons par enseignements et « didasko » (enseigner) que nous traduisons par instruire.
Dieu seul connaît Dieu.
C’est pourquoi Jésus peut affirmer qu’il faut être instruit par la lumière de Dieu lui-même, pour entrer tant soit peu dans le mystère du Pain de Vie.
L’Eucharistie est par excellence le signe de l’Alliance de Dieu avec les hommes. Elle est l’expression originale de son amour, réalisé par Jésus en une chair humaine comme la nôtre. Un amour signifié par l’offrande et le sacrifice de son Corps et de son Sang, célébrée chaque fois que nous faisons mémoire de la mort et de la Résurrection de Celui dont nous attendons l’avènement dans la gloire.
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« Malheureusement nous avons pris l’habitude d’appeler cette célébration d’une manière toute banale : « la messe », ne retenant que le mot qui la conclut : « Ite missa est. » Ce qui est un peu court pour exprimer un mystère d’une dimension incommensurable : union d’amour en Jésus, élan d’amour avec Lui vers le Père, Communion d’amour avec les frères et sœurs qui partagent la même foi. » (Pierre Vanderlinden)
Puisque nous sommes ses enfants bien-aimés (Ephésiens 5. 1), nous pouvons reprendre la prière d’ouverture de la célébration de ce dimanche : « Fais grandir en nos cœurs l’esprit filial (qui est celui du Christ ton Fils), afin que nous soyons capables d’entrer un jour dans l’héritage qui nous est promis (dès aujourd’hui et durant notre vie terrestre) » (St Paul aux Romains. 8. 17)
11 AOÛT: CLAIRE D’ASSISE – 1193-1253
10 août, 2012http://apotres.amour.free.fr/page4/claire.htm
11 AOÛT: CLAIRE D’ASSISE – 1193-1253
François était de la bourgeoisie; Claire de la noblesse. Elle naît en 1193 (sans précision de date), d’un riche chevalier, Messire Favarone, et de Dame Ortalano. Une pieuse mère, qui, de retour de Terre Sainte, aurait perçu une voix intérieure: «De toi naîtra une lumière pour le monde.» Elle l’appellera Clara, la lumineuse. Elle lui apprend à prier et à secourir les miséreux, la fillette elle-même donnant en cachette les aliments dont elle se prive.
Cependant, Claire devient une belle adolescente à la blonde chevelure, une écuyère habile à monter l’alezan. Et les galants ne manquent pas… Mais elle rêve d’un autre époux. Elle a entendu parler, comme toute la ville d’Assise, de François, le fils du riche drapier Bernardone, qui, après de folles équipées, a jeté sa bourse tintante de ducats pour épouser Dame Pauvreté. Elle l’a rencontré par les chemins, vêtu d’une minable coule de paysan, charroyant de la chaux et des pierres, ne demandant pour nourriture que le pain de la charité et une gorgée de l’eau des fontaines. Claire est frappée par une telle conversion. Dieu ne l’appelle-t-il pas à un dépouillement semblable? Mais comment réaliser son offrande? Son père veut en faire l’épouse d’un chevalier; il ne permettra pas l’engagement de sa fille.
A l’insu de ses parents, Claire se rend auprès de François, qui l’encourage dans son projet. Il cite l’Evangile: «Quiconque aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi.» Au cours d’un dernier entretien, il met au point le départ secret de Claire: ce sera le jour des Rameaux. Le dimanche 18 mars 1211, en la cathédrale Saint-Rufin, elle se joint, comme d’habitude, aux autres jeunes filles de la noblesse pour recevoir les palmes que distribue l’évêque Guido. Arrive la nuit décisive. Dans le palais du seigneur Favarone, tout le monde dort, jusqu’aux hommes d’armes. Claire parvient à ouvrir une porte dérobée. Libre, elle dévale les ruelles coupées d’escaliers et, passé la poterne, court à travers les vignes et les oliveraies argentées par le clair de lune.
La voici enfin, au milieu des bois, dans la petite église de ses voeux: Sainte-Marie des Anges de la Portioncule. François et ses frères, qui l’attendaient, l’accueillent avec des torches allumées. Elle arrive parée de ses plus beaux atours: robe de satin réhaussée d’or et coupée d’hermine, brodequins de soie, perles dans les cheveux. Prosternée devant l’autel, elle se consacre au Seigneur JésusChrist.
Elle reparaît bientôt, enveloppée d’une bure grossière, les pieds nus dans des sandales de bois, un épais voile noir sur la tête, dont les ciseaux de François ont fait tomber toutes les nattes blondes. La noble fille des Favarone, à 18 ans, est devenue la petite Soeur Claire.
L’exemple est contagieux. Bientôt Claire est rejointe par sa propre soeur Agnès, puis par Benvenuta, Amata, Pacifica… Ainsi naît spontanément le groupe des Pauvres Dames. Son berceau? L’ermitage Saint-Damien, si paisible derrière sa garde de cyprès. On y voit encore le choeur où psalmodiaient les premières Clarisses, la cloche qui appelait à l’oraison, le coin de terrasse où Claire poursuivait ses silencieux colloques, rythmés par le chant des cigales.
A Saint-Damien, sainte pauvreté est à l’honneur. Claire a obtenu du pape Innocent III un singulier privilège, le «privilège de la pauvreté absolue»: ni fonds de terre, ni rentes. Ses filles tendent la main. Et quand elles rentrent, elle les déchausse elle-même, lave leurs pieds, les baise.
Après 42 ans passés en ce lieu, la maladie cloue la fondatrice sur le sac de paille qui lui sert de matelas. Ses filles pleurent. Elle sourit. Elle meurt, une dernière, louange aux lèvres: «Beni sois-tu, Seigneur, de m’avoir créée.» C’était le 11 août 1253.
Claire sans frontières
Depuis plus de sept siècles, près d’un millier de monastères de Clarisses ont fleuri à travers le monde, du Mexique au Japon, de Madagascar au Viêtnam. Les amis de Charles de Foucauld se souviennent qu’il fut le jardinier de la communauté de Nazareth. En nos jours troublés, on pense au monastère de l’Unité, près de Beyrouth, blessé par la guerre, et aux trois couvents qui subsistent sur cette terre déchirée, l’ex-Yougoslavie. La France, pour sa part, compte 870 Clarisses, qui prient en 54 monastères, en majorité situés dans le Midi. De nouvelles fondations se préparent en Suisse, au Togo, aux Philippines. Les échanges entre Clarisses des divers pays favorisent l’unité de la grande famille.
(D’après le père Jean Toulat – Chrétiens magazine n°72 – 15 juin 1994)