4 août – Saint Jean-Marie Vianney, Curé d’Ars

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4 août – Saint Jean-Marie Vianney, Curé d’Ars

Sommaire :

A propos du Curé d’Ars
La puissance divine dans la faiblesse
Prière du Curé d’Ars

Biographie
On écoutait M. Vianney comme un nouvel apôtre que Jésus-Christ envoyait à son Eglise, pour y renouveler la sainteté et la ferveur de son divin Esprit, en un siècle dont la corruption l’a si profondément altéré dans l’âme de la plupart des hommes. Et c’est une grande merveille que ne proposant, comme les apôtres, qu’une doctrine incompréhensible à la raison humaine et très amère au goût dépravé du monde – car il ne parlait que de croix, d’humiliations, de pauvreté, de pénitence – cette doctrine fut si bien accueillie…
Le saint curé parlait sans autre travail préparatoire que sa continuelle application à Dieu ; il passait sans délai et sans transition du confessionnal à la chaire, et toutefois, il y apportait une imperturbable assurance, une merveilleuse impassibilité qui ne naissait nullement de la certitude, mais plutôt de l’oubli complet et absolu de lui-même…
M. Vianney n’avait aucun souci de ce qu’on pouvait dire ou penser de lui. Quelle que fût la composition de son auditoire, bien que des évêques et d’autres illustres personnages soient venus souvent se mêler à la foule qui entourait sa chaire, jamais sa parole n’a trahi la moindre émotion, ni le moindre embarras provenant d’une crainte humaine. Lui, si timide et si modeste quand il traversait les rangs pressés de l’assistance, souvent imposante, qui remplissait l’église à l’heure du catéchisme, il n’était plus le même homme ; il avait l’air d’un triomphateur. Il portait la tête haute ; son visage était illuminé ; ses yeux lançaient des éclairs… Il aurait eu le pape, les cardinaux, les rois au pied de sa chaire, qu’il n’aurait dit ni plus ni moins, ne pensant qu’aux âmes et ne faisant penser qu’à Dieu. Cette véritable domination oratoire suppléait chez lui le talent et la rhétorique : elle donnait aux choses les plus simples, sorties de cette bouche vénérable, une majesté singulière et une irrésistible autorité.
La forme qu’employait le curé d’Ars n’était pas autre chose que l’enveloppe la plus transparente que prend l’idée afin de paraître le plus possible telle qu’elle est, créant elle-même l’expression qui lui convient. Il savait mettre les vérités de l’ordre le plus élevé à la portée de toutes les intelligences ; il les revêtait d’un langage familier ; il attendrissait par la simplicité ; il ravissait par la doctrine… Ainsi, les considérations sur le péché, sur l’injure qu’il fait à Dieu et le mal qu’il fait à l’homme n’étaient pas un jeu de son esprit, mais le travail douloureux de sa pensée ; elles le pénétraient, le consternaient : c’était le trait de fer enfoncé dans sa poitrine. Il soulageait son âme en l’épanchant…
La foi du bon curé d’Ars était toute sa science ; son livre, c’était Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il ne cherchait pas la sagesse ailleurs qu’en JésusChrist, dans sa mort et dans sa croix. Il n’y avait pas pour lui d’autre sagesse véritable, pas d’autre sagesse utile… C’est dans la prière, à genoux aux pieds du Maitre, en couvrant ses pieds divins de larmes et de baisers ; c’est en présence du saint tabernacle, où il passait ses jours et ses nuits, c’est là qu’il avait tout appris.
A. Monnin « Le curé d’Ars » (Editions Douniol, 1864).

La puissance divine dans la faiblesse
Ce que le monde tient pour insensé, c’est ce que Dieu a choisi pour confondre les sages ; et ce que le monde tient pour rien, c’est ce que Dieu a choisi pour confondre les forts. Et Dieu a choisi ce qui dans le monde est sans considération et sans puissance, ce qui n’est rien, pour réduire au néant ce qui est, afin que nulle chair ne se glorifie devant Dieu (I Corinthiens I 27-29). Après avoir décrit ce plan de la Providence, saint Paul le montre réalisé dans sa personne : Je n’ai pas jugé que je dusse savoir par­mi vous autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié…, et ma parole et ma prédication n’avaient rien du langage persuasif de la sagesse, mais l’Esprit-Saint et la force de Dieu en démontraient la vérité… (I Corinthiens II 1-5). Saint Paul détermine ainsi les lois générales de l’évangélisation : la conversion n’est pas œuvre de la sagesse hu­mai­ne, mais œuvre de la puissance divine. C’est bien ce que nous montre la vie du Saint Curé d’Ars que nous célébrons aujourd’hui, démons­tra­­tion éclatante de la primauté des moyens surnaturels dans l’œu­vre de l’apostolat. Il y a, chez ce prêtre, une telle dispropor­tion entre les résultats prodigieux et les infériorités humaines, que les résultats manifestement les fruits de la grâce. Infirma mundi elegit Deus (Dieu a choisi ce qui est faible). Lorsqu’en 1878, à trente-deux ans, l’abbé Vianney prit possession de sa petite paroisse, il était bien ce nul aux yeux du monde, dont Dieu allait faire la plus grande valeur sacerdotale de son siècle. Les gens d’Ecully où il était vicaire, avaient signifié à l’autorité diocésaine qu’ils ne désiraient pas à un curé aussi simple. Physiquement, il n’avait rien d’attirant et sa tenue vestimen­taire ne l’avantageait pas. Certes, il était très propre, mais il avait une minable apparence (soutane usagée et rapiécée, vieux chapeau déformé, gros souliers rapiécés) au point que certains de ses confrères avaient honte de s’asseoir près de lui, lors de leurs réunions périodiques. Il n’avait pas non plus la réputation d’être une intelligence : sans être mal doué, il avait commencé trop tard ses études secondaires et resta longtemps rebelle au latin ; il échoua si piteusement à son examen de philosophie qu’il fut refusé une première fois au Grand Séminaire et quand, enfin reçu, il fut question de son admission au sous-diaconat, il semble bien qu’il ne l’emporta qu’au bénéfice de sa piété.
- Le jeune Vianney, demanda l’examinateur à ses professeurs, est-il pieux ?
Sait-il réciter son chapelet ? A-t-il de la dévotion à la Vierge Marie ?
- C’est, pour la piété, répondirent-ils, le modèle du Séminaire.
- Eh bien donc ! conclut l’examinateur, je le reçois : la grâce de Dieu fera le reste.
Ses supérieurs, cependant, prenaient leurs précautions. Quand, au lendemain de son sacerdoce, il fut nommé vicaire à Ecully, ce fut sans l’autorisation, jusqu’à nouvel ordre, d’entendre les confessions. Un de ses confrères lui dira charitablement, un jour, à Ars : M. le Curé, quand on a si peu de théologie que vous, on ne devrait jamais mettre le pied dans un confessionnal. D’autant que par humilité, il force encore la note : Quand je suis avec les autres prêtres, je suis comme Bordin (un idiot du pays). Il y a toujours dans les familles un enfant qui a moins d’esprit que ses frères et ses sœurs ; eh bien ! chez nous, j’étais cet enfant-là. Et un jour, montrant de lui un portrait, par ailleurs assez peu res­sem­­blant, il disait : C’est bien moi. Voyez comme j’ai l’air bête !… On ne voit pas que l’abbé Vianney eut des dons de parole, de plu­me ou d’action, pour compenser cette infériorité de culture et mê­me de théologie. Après avoir sué sang et eau pour composer et apprendre ses sermons, il les prononçait d’une voix si gutturale et sur une note si élevée, qu’on lui reprochait de crier comme un sourd, jusqu’au moment où une perte de mémoire l’obligeait à descendre de chaire avant d’avoir fini. Il a ainsi couvert des pages de sa fine écriture, mais n’a jamais rien publié. Du point de vue hu­main, ce curé n’a rien pour réussir et rien ne le signale à l’at­ten­tion, sinon pour s’en moquer. Il semble voué à végéter dans ce village inconnu du diocèse et plus encore de la France.
Quand J.M. Vianney fut envoyé à Ars, le Vicaire général lui dit : Mon ami, vous êtes nommé curé d’Ars. C’est une petite pa­roisse où il n’y a pas beaucoup d’amour de Dieu : vous en met­trez. Deux ans après son arrivée, Ars était regardée comme une pa­roisse fervente. Cinq ans plus tard, le saint Curé pouvait écri­re : Je suis dans une petite paroisse pleine de religion, qui sert le Bon Dieu de tout son cœur. Après neuf ans, il rendait, en chaire, ce témoignage resté célèbre : Mes frères, Ars n’est plus Ars ! J’ai confessé et prêché dans des jubilés, dans des missions. Je n’ai rien trouvé comme ici. Il s’était attaqué tout de suite à l’ignorance en catéchisant et en instruisant ses paroissiens ; il mena la lutte con­tre le travail du dimanche, les cabarets, le blasphème et les dan­ses ; il restaura et embellit sa vieille église. De son orphe­li­nat de la Providence, son œuvre préférée, il fit une pépinière de bon­nes chrétiennes et un centre d’intercession. A la base de cette transfor­mation miraculeuse, il y avait ses prières et ses péni­ten­ces. Cette conversion d’Ars n’est qu’un départ de la merveille de l’œuvre accomplie. Depuis dix ans qu’il est curé, ce village ignoré du plateau de la Dombe, commence de devenir célèbre. Le nom du Curé d’Ars vole de bouche en bouche, aux alentours et au loin.
Alors se mit en branle ce pèlerinage, qui fit d’Ars, pendant tren­te ans, le village le plus fréquenté de France. D’abord quelques bonnes dévotes de Dardilly, sa paroisse natale, et d’Ecully où il fut vicaire ; bientôt sa renommée fit tache d’huile et il vint des fou­les toujours renaissantes ; on faisait la file pour entrer dans l’égli­se, étuve l’été, glacière l’hiver, où on restait de longues heures, remis souvent au lendemain, ce qui obligeait à organiser entre soi des numéros d’ordre pour ne pas perdre son tour. Il confessait seize, et même dix-huit heures les longs jours d’été, sans éterniser la conversation, ne donnant à chaque confession que le temps nécessaire, mais il fallait attendre son tour 30, 50, et même 70 heures. Certaines années, Ars vit passer 80 000 et 100 000 pèlerins… Cela dura jusqu’à sa mort, en 1859. La statue de son saint curé a sa place dans nombre d’églises et de chapelles. Vers lui, comme vers leur inspirateur et leur protec­teur, se tournent tant et tant de saints prêtres, même dans les formes nouvelles d’apostolat que nécessite l’évolution de la vie moderne, afin d’apprendre et de recevoir de lui, ce qui reste toujours l’âme de tout apostolat : la vie intérieure. Car voilà bien la grande leçon du saint Curé d’Ars. Il y a une telle disproportion entre les moyens humains et les résultats obtenus, qu’il faut bien dire que le doigt de Dieu est là. Que des génies, comme saint Augustin ou saint Thomas d’Aquin, que des hommes d’action, comme saint Dominique ou saint Ignace de Loyola, aient exercé et exercent encore une telle influence, cela n’étonne pas l’esprit des hommes, mais que ce petit curé de campagne, sans moyens, soit devenu le centre de tout son siècle, voilà qui force la réflexion qui aboutit à croire que la conversion des âmes est l’œuvre de la grâce qui la grâ­ce s’obtient par la force de la prière et la générosité du sa­cri­fi­ce, oratione et jejunio (la prière et la pénitence), la loi immuable.
Il ne s’agit pas de négliger les talents que Dieu nous a donnés que nous devons, au contraire, mettre en valeur ; pendant toute sa vie, le saint Curé d’Ars a fourni bien des efforts pour acquérir la scien­ce religieuse que requiert le ministère sacerdotal. Mais le pres­tige humain et toutes les activités déployées ne sont rien s’ils ne sont pas vivifiés par l’amour de Dieu, selon ce que nous enseigne l’apôtre Paul dans la première lettre aux Corinthiens : J’aurais beau parler toutes les langues de la terre et du ciel, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, et toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien (I Corinthiens XIII 1-3) . Que seraient les grands saints évoqués tout à l’heure, s’ils n’avaient eu, avec leur génie et leur action, cet amour de Dieu et cette sainteté ? Des noms dans l’his­­toire de la pensée, mais non pas ces convertisseurs d’âmes qu’ils restent encore. Évidemment à même vertu héroïque, à même sainteté, à même pauvreté, à même mortification n’est pas néces­sairement promis un tel rayonnement et c’est une preuve de l’intervention manifeste de Dieu que nous soyons des serviteurs inutiles. Il n’en reste pas moins que le levain qui soulève les masses est d’abord la vie intérieure et vertueuse.
Abbé C-P Chanut

Prière du Curé d’Ars

Je vous aime, ô mon Dieu,
et mon seul désir est de vous aimer jusqu’au dernier soupir de ma vie.
Je vous aime, ô mon Dieu infiniment aimable,
et j’aime mieux mourir en vous aimant que de vivre un seul instant sans vous aimer.
Je vous aime, ô mon Dieu,
et je ne désire le ciel que pour avoir le bonheur de vous aimer parfaitement.
Je vous aime, ô mon Dieu,
et je n’appréhende l’enfer que parce qu’on y aura jamais la douce consolation de vous aimer.
O mon Dieu, si ma langue ne peut dire à tout moment que je vous aime,
du moins je veux que mon coeur vous le répète autant de fois que je respire.
Ah ! Faites-moi la grâce de souffrir en vous aimant,
de vous aimer en souffrant
et d’expirer un jour en vous aimant
et en sentant que je vous aime.
Et plus j’approche de ma fin,
plus je vous conjure d’accroître mon amour et de le perfectionner.
Amen.

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