Archive pour le 6 juillet, 2012

Ezechiel le prophète, la vision

6 juillet, 2012

Ezechiel le prophète, la vision dans images sacrée 15%20ANGELICO%20EZEKIEL%20S%20VISION

http://www.artbible.net/1T/Eze0101_Ezechiel/pages/15%20ANGELICO%20EZEKIEL%20S%20VISION.htm

Ezechiel 2,2-5 – commentaires de Marie Noëlle Thabut

6 juillet, 2012

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

Dimanche 8 juillet : commentaires de Marie Noëlle Thabut

PREMIERE LECTURE – EZECHIEL 2, 2 – 5

2 L’Esprit vint en moi,
il me fit mettre debout,
et j’entendis le Seigneur qui me parlait ainsi :
3 « Fils d’homme je t’envoie vers les fils d’Israël,
vers ce peuple de rebelles qui s’est révolté contre moi.
Jusqu’à ce jour, eux et leurs pères
se sont soulevés contre moi,
4 et les fils ont le visage dur,
et le coeur obstiné.
C’est à eux que je t’envoie, et tu leur diras :
Ainsi parle le Seigneur Dieu…
5 Alors, qu’ils écoutent ou qu’ils refusent,
– car c’est une engeance de rebelles, –

ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux. »
Rassurez-vous, les paroles que Dieu a adressées à Ezéchiel ne se sont pas limitées à ce que nous venons d’entendre ! Ce texte n’est qu’une toute petite partie du long récit de la vocation d’Ezéchiel, dans les premiers chapitres de son livre. A ne s’en tenir qu’aux quelques versets proposés pour ce dimanche, l’appel de Dieu semblerait un peu court et sévère ; aurait-il suffi à galvaniser Ezéchiel pour des années ? Mais c’est oublier dans quel climat ont résonné ces paroles. Quand Dieu envoie en mission, il donne toujours la force nécessaire : pour Ezéchiel, ce fut une vision grandiose, inoubliable dont le souvenir désormais soutiendrait tous ses efforts.
Nous sommes à Babylone, au tout début de l’Exil, avec la première vague des déportés chassés de Jérusalem par Nabuchodonosor en 597. Très loin, là-bas, sur la colline de Sion, le Temple est encore debout et Dieu y réside toujours puisqu’il l’a promis. Mais alors que reste-t-il aux exilés ? Désormais loin de Dieu, il ne leur reste que leurs yeux pour pleurer apparemment, en attendant des jours meilleurs.
Mais voilà que Dieu s’adresse à Ezéchiel, ici, bien loin de la mère-patrie et du Temple : c’est la première très Bonne Nouvelle de ce livre : Dieu n’est pas assigné à résidence à Jérusalem, il est également présent à Babylone, au bord du fleuve Kebar, là où est déporté son peuple. Ezéchiel voit les cieux s’ouvrir et le voilà plongé dans un univers de beauté indicible : plus tard il tentera bien de raconter sa vision, mais pour tous ceux qui n’y ont pas assisté, c’est proprement inimaginable : dans un univers de flammes, de feu, de pierres précieuses, de torches vivantes à visages d’hommes, d’animaux ailés, se déplaçait en tournoyant le chariot qui portait le trône de Dieu. Indicible, inracontable, peut-être, mais le feu qui émane du trône de Dieu vient d’embraser l’âme d’Ezéchiel, il est armé pour sa mission.
Laquelle promet d’être difficile : « Fils d’homme, je t’envoie vers les fils d’Israël, vers ce peuple de rebelles qui s’est révolté contre moi. » On a peut-être un peu trop l’habitude de croire que le peuple en Exil à Babylone ne faisait qu’un autour de ses prêtres et de ses prophètes, dans la fidélité à la Loi et l’espérance du retour. En fait, si l’on en croit ce texte, les choses étaient moins simples. Il est probable que, là-bas, au contact de l’idolâtrie ambiante, les tentations d’abandonner la foi juive ont été très fortes. D’autant plus qu’en pareil cas, si l’on veut survivre loin du pays, il faut bien s’adapter. Certains pensent probablement que l’intransigeance n’est pas le bon plan.
Par ailleurs, à l’époque, une question se posait : si nous sommes le peuple vaincu, n’est-ce pas une preuve que notre Dieu est moins puissant que les autres ? Et, du coup, certains étaient tentés de changer de religion.
On devine à travers ces lignes que le prophète aura fort à faire, le mot « rebelles » revient plusieurs fois sous sa plume : « C’est une engeance de rebelles… Jusqu’à ce jour, eux et leurs pères se sont soulevés contre moi, et les fils ont le visage dur, et le coeur obstiné. » On pourrait diagnostiquer une « rébellion congénitale » en quelque sorte ! Thème connu bien avant Ezéchiel : déjà Moïse s’en plaignait : ce n’est pas un hasard s’il avait transformé le nom de l’étape de Rephidim dans le Sinaï en Massa et Meriba (épreuve et querelle) en souvenir des récriminations continuelles du peuple pendant l’Exode.
Des siècles plus tard, à l’orée de l’Exil, justement, méditant cette rude expérience de Moïse, le livre du Deutéronome lui faisait dire : « Souviens-toi, n’oublie pas que tu as irrité le SEIGNEUR ton Dieu dans le désert. Depuis le jour où tu es sorti d’Egypte, jusqu’à votre arrivée ici, vous avez été en révolte contre le SEIGNEUR… Et le SEIGNEUR m’a dit : Je vois ce peuple : eh bien ! C’est un peuple à la nuque raide ! » (Dt 9, 7. 13).
Dans le texte d’aujourd’hui, le reproche est particulièrement cinglant : car le peuple est comparé à Pharaon lui-même, le modèle de l’endurcissement du coeur ! (Au verset 4, quand le prophète dit : « les fils ont le coeur obstiné », il emploie exactement le même mot hébreu que celui qui avait caractérisé le roi d’Egypte dans le livre de l’Exode : « le coeur du Pharaon resta endurci » (Ex 7, 13). C’est donc la suprême injure. Voilà Ezéchiel bien prévenu ; et ce peuple est si rebelle que le prophète, à n’en pas douter, aura fort à faire pour se faire entendre et justifier son autorité ; c’est pourquoi il précise bien qu’il ne parle pas de lui-même : « L’Esprit vint en moi, il me fit mettre debout », et cette parole n’est pas la sienne ; il prend bien soin de préciser : Ainsi parle le SEIGNEUR Dieu… Au verset suivant, Dieu invitera son porte-parole à garder courage : « Ecoute, fils d’homme, n’aie pas peur d’eux et n’aie pas peur de leurs paroles, tu es au milieu de contradicteurs et d’épines, tu es assis sur des scorpions ; n’aie pas peur de leurs paroles et ne t’effraie pas de leurs visages, car c’est une engeance de rebelles. Tu leur diras mes paroles, qu’ils t’écoutent ou qu’ils ne t’écoutent pas : ce sont des rebelles. » (Ez 2, 6).
Mais, précisément, à travers la gravité même des reproches adressés par Dieu à son peuple, on peut lire la deuxième très Bonne Nouvelle du texte de ce dimanche : ce peuple est dur et indocile, soit ; eh bien, même cela n’arrête pas la fidélité de Dieu à son Alliance : quelle que soit leur attitude, d’écoute ou de refus « ils sauront qu’il y a un prophète au milieu d’eux. » Traduisez, ils sauront que Dieu continue de leur parler, de les appeler.

Homélie du 14e dimanche ordinaire B

6 juillet, 2012

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

Homélie du 14e dimanche ordinaire B

Ex 2, 2-5 ; 2 Co 12, 7-10 ; Mc 6, 1-6

Nous avons tous bien entendu : « Les proches de Jésus (qui étaient des croyants et des pratiquants) étaient choqués à cause de lui ». Et nous avons tous bien entendu que Jésus « s’étonnait de leur manque de foi ». Face aux prophètes, nous sommes exactement aujourd’hui dans la même situation. Qu’il s’appelle Ezéchiel ou Paul de Tarse, Helder Camara, abbé Pierre, ou sœur Emmanuelle… , et a fortiori Jésus de Nazareth, tout prophète prend des risques. Son langage et son comportement tranchent avec l’habituelle « langue de bois » ou, dans l’Eglise, « la langue de buis », et la rigidité des pratiques stéréotypées.
Tout prophète est toujours confronté à des interlocuteurs très susceptibles, qui s’appellent, même en chacun de nous, autorité et pouvoir, tradition et idéologie, ordre et convenances, opposition à toute critique et à toute remise en cause. Face à des murs de pierre ou des rideaux de fer hermétiques, le prophète est souvent très seul et combat à mains nues. Mais il a toujours eu, dans l’histoire de l’Alliance entre Dieu et son peuple, une mission vitale à remplir. Irremplaçable ! Quand les voix prophétiques sont étouffées, la foi entre en agonie.
Le vrai prophète est l’homme ou la femme du souffle. Le souffle de l’Esprit. Cet Esprit qui nous fait passer de la crainte à la confiance, qui nous fait sortir des pièces barricadées ou verrouillées.
La parole du prophète se moule dans la Bonne Nouvelle. Elle est une parole libre, parfois rude, toujours exigeante, mais une parole d’invitation et de dialogue, et non pas un décret autoritaire. Une parole infiniment respectueuse des consciences, qui nourrit l’espoir au lieu de brandir des menaces et de cultiver la peur.
Depuis toujours, tout prophète, comme le Christ, va d’abord vers les plus pauvres, les plus marginalisés, les plus dispersés. Les intouchables. Il ose donc franchir les barrières culturelles, religieuses, politiques et sociales. Même quand elles sont protégées par les barbelés et les tabous des certitudes et des « vérités » définitives.
Comme au temps du Christ, il est des prophètes aujourd’hui qui fréquentent des Samaritains hérétiques, des Marie-Madeleine parfumées et de scandaleux Zachée… jusque sur les plateaux de télévision, qui constituent la plus grande place publique du monde. Intolérable ! crie d’une seule voix le chœur des super-vertueux et des orthodoxes purs et durs.
Aujourd’hui encore, il est des passionnés de l’Evangile, qui vont annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ en des lieux peu recommandables et dans des publications douteuses. Et l’on voit même des cardinaux et des évêques, qui refusent une pastorale de ghetto, sortir de leur sacristie, de leur palais épiscopal, pour fréquenter des infréquentables et leur offrir la Bonne Nouvelle. Cela fait partie de leur mission.
Les prophètes se montrent toujours moins préoccupés par les dogmes qu’ils respectent, que par les situations et les problèmes concrets que vivent les hommes et les femmes de leur temps.
Comme Jésus, ils pratiquent la loi de l’amour plutôt que l’amour de la loi. Ils choquent donc inévitablement tout ce qui, en nous et autour de nous, peut s’appeler pharisien, bien-pensant, spécialiste de la loi et grand-prêtre.
Voyons Paul de Tarse, l’homme de l’ouverture et des intuitions prophétiques. Un exemple éclatant ! C’est ainsi qu’il s’est refusé à imposer la circoncision traditionnelle et sacrée aux chrétiens convertis du paganisme et formés par une toute autre culture. Et il s’est opposé farouchement à tous ceux qui tentaient de leur imposer les mille et une prescriptions de la loi de Moïse. Son principe : Ce n’est pas la loi avec « ses commandements et décrets » qui sauve, mais bien la foi au Christ.
Nous vivons encore aujourd’hui ce genre de tensions entre le « pouvoir » central de l’Eglise et celui des Eglises locales, tensions entre Pierre et Paul, entre l’institution et les charismes, les traditions figées et la Tradition vivante. Mais il n’y a pas de quoi s’affoler. Il ne s’agit ni de guerre, ni d’opposition, ni de désunion. C’est un signe de santé. D’ailleurs, ces mêmes tensions et combats se manifestent aussi dans nos territoires intérieurs. Nous sommes tous et chacun interpellés et choqués par les prophètes. Il ne faut donc pas avoir peur d’un débat dans l’Eglise. Ni même d’une confrontation qui peut, et même doit, rester fraternelle. D’ailleurs le respect et l’obéissance « n’empêchent pas d’avoir un avis ». Et la foi n’est pas là pour « piétiner la raison ».
Un évêque français, Mgr Mondésert (1) constate publiquement, d’une manière critique mais toujours positive et sereine, que « le décalage entre l’Eglise et toute une partie de la société s’approfondit à cause du discours ecclésial en matière de morale privée… Un écart se creuse entre le discours officiel de l’Eglise et les pratiques du plus grand nombre… L’autorité romaine… donne le sentiment de ne pas assez prendre en compte ce qui fait la complexité, voire la difficulté, de la vie des personnes ». Puis, en parlant de l’ensemble des chrétiens, il ajoute : « Il me semble que nous sommes victimes, là encore, d’une vision pyramidale de l’Eglise universelle… Même si l’on parle beaucoup de communion ou de collégialité, l’on a encore trop souvent l’impression que l’Eglise fonctionne davantage comme une société qui se voudrait parfaite, sans conflits, ni taches. Ni erreurs, ni péchés… Avec à sa tête un pouvoir central ! » Or, « l’Eglise ne se définit pas d’abord ainsi sur une relation de supériorité et de pouvoir. Mais bien, avant tout, sur une relation d’amour et de service, sur ce rapport de proximité existant entre Dieu et les êtres humains… On choisit trop souvent la rigidité des préceptes au détriment de la sollicitude pastorale, le juridisme au lieu du sens des personnes… En interpellant ainsi mon Eglise au nom de l’Evangile, en rappelant avec force les droits de la conscience et de la liberté humaine, je ne me sens pas seul. Je renoue avec cette histoire, qui a su, au fil des siècles, donner à l’Eglise son visage original. »
Mais ce n’est pas de tout repos. Car les prophètes de tous les temps entendent toujours les mêmes refrains qui leur sont adressés : « Qu’ils se taisent ! Sinon qu’on les crucifie ! ».

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008

Mgr Mondésert, « Libres propos sur l’Eglise », DDB 1994.