Archive pour mai, 2012

Pape Benoît: La présence de l’Esprit dans nos coeurs dans les Lettres de saint Paul

24 mai, 2012

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2006/documents/hf_ben-xvi_aud_20061115_fr.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 15 novembre 2006

La présence de l’Esprit dans nos coeurs dans les Lettres de saint Paul

Chers frères et soeurs,

Aujourd’hui aussi, comme déjà dans les deux catéchèses précédentes, nous revenons à saint Paul et à sa pensée. Nous nous trouvons devant un géant non seulement du point de vue de l’apostolat concret, mais également de celui de la doctrine théologique, extraordinairement profonde et stimulante. Après avoir médité la dernière fois sur ce que Paul a écrit à propos de la place centrale que Jésus Christ occupe dans notre vie de foi, nous examinons aujourd’hui ce qu’il dit sur l’Esprit Saint et sur sa présence en nous, car ici aussi, l’Apôtre a quelque chose d’une grande importance à nous enseigner.
Nous connaissons ce que saint Luc nous dit de l’Esprit Saint dans les Actes des Apôtres, en décrivant l’événement de la Pentecôte. L’Esprit de Pentecôte apporte avec lui une impulsion vigoureuse à assumer l’engagement de la mission pour témoigner de l’Evangile sur les routes du monde. De fait, le Livre des Actes rapporte toute une série de missions accomplies par les Apôtres, tout d’abord en Samarie, puis sur la bande côtière de la Palestine, et enfin vers la Syrie. Ce sont surtout les trois grands voyages missionnaires accomplis par Paul qui sont rapportés, comme je l’ai déjà rappelé dans une précédente rencontre du mercredi. Cependant, dans ses Lettres, saint Paul nous parle de l’Esprit d’un autre point de vue également. Il n’illustre pas uniquement la dimension dynamique et active de la troisième Personne de la Très Sainte Trinité, mais il en analyse également la présence dans la vie du chrétien, dont l’identité en reste marquée. En d’autres termes, Paul réfléchit sur l’Esprit en exposant son influence non seulement sur l’agir du chrétien, mais également sur son être. En effet, c’est lui qui dit que l’Esprit de Dieu habite en nous (cf. Rm 8, 9; 1 Co 3, 16) et que « envoyé par Dieu, l’Esprit de son Fils est dans nos coeurs » (Ga 4, 6). Pour Paul donc, l’Esprit nous modèle jusque dans nos profondeurs personnelles les plus intimes. A ce propos, voilà quelques-unes de ses paroles d’une importance significative: « En me faisant passer sous sa loi, l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus m’a libéré, moi qui étais sous la loi du péché et de la mort… L’Esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont encore peur; c’est un Esprit qui fait de vous des fils; poussés par cet Esprit, nous crions vers le Père en l’appelant: « Abba! »" (Rm 8, 2.15). On voit donc bien que le chrétien, avant même d’agir, possède déjà une intériorité riche et féconde, qui lui a été donnée dans le Sacrement du Baptême et de la Confirmation, une intériorité qui l’établit dans une relation de filiation objective et originale à l’égard de Dieu. Voilà notre grande dignité: celle de ne pas être seulement des images, mais des fils de Dieu. Et cela est une invitation à vivre notre filiation, à être toujours plus conscients que nous sommes des fils adoptifs dans la grande famille de Dieu. Il s’agit d’une invitation à transformer ce don objectif en une réalité subjective, déterminante pour notre penser, pour notre agir, pour notre être. Dieu nous considère comme ses fils, nous ayant élevés à une dignité semblable, bien que n’étant pas égale, à celle de Jésus lui-même, l’unique véritable Fils au sens plein. En lui nous est donnée, ou restituée, la condition filiale et la liberté confiante en relation au Père.
Nous découvrons ainsi que pour le chrétien, l’Esprit n’est plus seulement l’ »Esprit de Dieu », comme on le dit normalement dans l’Ancien Testament et comme l’on continue à répéter dans le langage chrétien (cf. Gn 41, 38; Ex 31, 3; 1 Co 2, 11.12; Ph 3, 3; etc.). Et ce n’est pas non plus un « Esprit Saint » au sens large, selon la façon de s’exprimer de l’Ancien Testament (cf. Is 63, 10.11; Ps 51, 13), et du Judaïsme lui-même dans ses écrits (Qumràn, rabbinisme). En effet, à la spécificité de la foi chrétienne appartient la confession d’un partage original de cet Esprit de la part du Seigneur ressuscité, qui est devenu Lui-même « l’être spirituel qui donne la vie » (1 Co 15, 45). C’est précisément pour cela que saint Paul parle directement de l’ »Esprit du Christ » (Rm 8, 9), de l’ »Esprit de Fils » (Ga 4, 6) ou de l’ »Esprit de Jésus Christ » (Ph 1, 19). C’est comme s’il voulait dire que non seulement Dieu le Père est visible dans le Fils (cf. Jn 14, 9), mais que l’Esprit de Dieu s’exprime aussi dans la vie et dans l’action du Seigneur crucifié et ressuscité!
Paul nous enseigne également une autre chose importante: il dit qu’il n’existe pas de véritable prière sans la présence de l’Esprit en nous. Il écrit en effet: « Bien plus, l’Esprit vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. L’Esprit lui-même intervient pour nous par des cris inexprimables. Et Dieu, qui voit le fond des coeurs, connaît les intentions de l’Esprit: il sait qu’en intervenant pour les fidèles, l’Esprit veut ce que Dieu veut » (Rm 8, 26-27). C’est comme dire que l’Esprit Saint, c’est-à-dire l’Esprit du Père et du Fils, est désormais comme l’âme de notre âme, la partie la plus secrète de notre être, d’où s’élève incessamment vers Dieu un mouvement de prière, dont nous ne pouvons pas même préciser les termes. En effet, l’Esprit, toujours éveillé en nous, supplée à nos carences et il offre au Père notre adoration, avec nos aspirations les plus profondes. Cela demande naturellement un niveau de grande communion vitale avec l’Esprit. C’est une invitation à être toujours plus sensibles, plus attentifs à cette présence de l’Esprit en nous, à la transformer en prière, à ressentir cette présence et à apprendre ainsi à prier, à parler avec le Père en tant que fils dans l’Esprit Saint.
Il existe également un autre aspect typique de l’Esprit que nous enseigne saint Paul: il s’agit de son lien avec l’amour. En effet, l’Apôtre écrit: « Et l’espérance ne trompe pas, puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5, 5). Dans ma Lettre encyclique « Deus caritas est », je citais une phrase très éloquente de saint Augustin: « Tu vois la Trinité quand tu vois la charité » (n. 19), et je poursuivais en expliquant: « En effet, l’Esprit est la puissance intérieure qui met leur coeur [des croyants] au diapason du coeur du Christ, et qui les pousse à aimer leurs frères comme Lui les a aimés » (ibid.). L’Esprit nous introduit dans le rythme même de la vie divine, qui est vie d’amour, en nous faisant personnellement participer aux relations qui existent entre le Père et le Fils. Il n’est pas sans signification que Paul, lorsqu’il énumère les divers fruits de l’Esprit, place l’amour à la première place: « Mais voici ce que produit l’Esprit: amour, joie, paix, etc. » (Ga 5, 22). Et puisque, par définition, l’amour unit, cela signifie tout d’abord que l’Esprit est Créateur de communion au sein de la communauté chrétienne, comme nous le disons au début de la Messe selon une expression paulinienne: « Que la communion de l’Esprit Saint [c'est-à-dire celle qu'Il opère] soit avec vous tous » (2 Co 13, 13). D’autre part, cependant, il est également vrai que l’Esprit nous incite à nouer des relations de charité avec tous les hommes. C’est pourquoi, lorsque nous aimons, nous donnons de l’espace à l’Esprit, nous lui permettons de s’exprimer en plénitude. On comprend ainsi pourquoi Paul rapproche dans la même page de la Lettre aux Romains les deux exhortations: « Laissez jaillir l’Esprit » et « Ne rendez à personne le mal pour le mal » (Rm 12, 11.17).
Enfin, l’Esprit constitue selon saint Paul des arrhes généreuses qui nous ont été données par Dieu lui-même, comme avance et comme garantie de notre héritage futur (cf. 2 Co 1, 22; 5, 5; Ep 1, 13-14). Nous apprenons ainsi de Paul que l’action de l’Esprit oriente notre vie vers les grandes valeurs de l’amour, de la joie, de la communion et de l’espérance. C’est à nous qu’il revient d’en faire chaque jour l’expérience, en suivant les suggestions intérieures de l’Esprit, aidés dans notre discernement par la direction éclairante de l’Apôtre.

El Greco, St Francis in Prayer before the Crucifix

23 mai, 2012

El Greco, St Francis in Prayer before the Crucifix dans images sacrée

http://it.wikipedia.org/wiki/File:El_Greco,_St_Francis_in_Prayer_before_the_Crucifix.JPG

Benoît XVI: Saint François d’Assise

23 mai, 2012

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100127_fr.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 27 janvier 2010

Saint François d’Assise

Chers frères et sœurs,
Dans une récente catéchèse, j’ai déjà illustré le rôle providentiel que l’Ordre des frères mineurs et l’Ordre des frères prêcheurs, fondés respectivement par saint François d’Assise et par saint Dominique Guzman, eurent dans le renouveau de l’Eglise de leur temps. Je voudrais aujourd’hui vous présenter la figure de François, un authentique « géant » de sainteté, qui continue à fasciner de très nombreuses personnes de tous âges et de toutes religions.
« Surgit au monde un soleil ». A travers ces paroles, dans la Divine Comédie (Paradis, chant XI), le plus grand poète italien Dante Alighieri évoque la naissance de François, survenue à la fin de 1181 ou au début de 1182, à Assise. Appartenant à une riche famille – son père était marchand drapier –, François passa son adolescence et sa jeunesse dans l’insouciance, cultivant les idéaux chevaleresques de l’époque. A l’âge de vingt ans, il participa à une campagne militaire, et fut fait prisonnier. Il tomba malade et fut libéré. De retour à Assise, commença en lui un lent processus de conversion spirituelle, qui le conduisit à abandonner progressivement le style de vie mondain qu’il avait mené jusqu’alors. C’est à cette époque que remontent les célèbres épisodes de la rencontre avec le lépreux, auquel François, descendu de cheval, donna le baiser de la paix, et du message du Crucifié dans la petite église de saint Damien. Par trois fois, le Christ en croix s’anima, et lui dit: « Va, François, et répare mon église en ruine ». Ce simple événement de la parole du Seigneur entendue dans l’église de Saint-Damien renferme un symbolisme profond. Immédiatement, saint François est appelé à réparer cette petite église, mais l’état de délabrement de cet édifice est le symbole de la situation dramatique et préoccupante de l’Eglise elle-même à cette époque, avec une foi superficielle qui ne forme ni ne transforme la vie, avec un clergé peu zélé, avec un refroidissement de l’amour; une destruction intérieure de l’Eglise qui comporte également une décomposition de l’unité, avec la naissance de mouvements hérétiques. Toutefois, au centre de cette église en ruines se trouve le crucifié, et il parle: il appelle au renouveau, appelle François à un travail manuel pour réparer de façon concrète la petite église de Saint-Damien, symbole de l’appel plus profond à renouveler l’Eglise même du Christ, avec la radicalité de sa foi et l’enthousiasme de son amour pour le Christ. Cet événement qui a probablement eu lieu en 1205, fait penser à un autre événement semblable qui a eu lieu en 1207: le rêve du Pape Innocent III. Celui-ci voit en rêve que la Basilique Saint-Jean-de-Latran, l’église mère de toutes les églises, s’écroule et un religieux petit et insignifiant la soutient de ses épaules afin qu’elle ne tombe pas. Il est intéressant de noter, d’une part, que ce n’est pas le Pape qui apporte son aide afin que l’église ne s’écroule pas, mais un religieux petit et insignifiant, dans lequel le Pape reconnaît François qui lui rend visite. Innocent III était un Pape puissant, d’une grande culture théologique, et d’un grand pouvoir politique, toutefois, ce n’est pas lui qui renouvelle l’église, mais le religieux petit et insignifiant: c’est saint François, appelé par Dieu. Mais d’autre part, il est intéressant de noter que saint François ne renouvelle pas l’Eglise sans ou contre le Pape, mais seulement en communion avec lui. Les deux réalités vont de pair: le Successeur de Pierre, les évêques, l’Eglise fondée sur la succession des apôtres et le charisme nouveau que l’Esprit Saint crée en ce moment pour renouveler l’Eglise. C’est ensemble que se développe le véritable renouveau.
Retournons à la vie de saint François. Etant donné que son père Bernardone lui reprochait sa générosité exagérée envers les pauvres, François, devant l’évêque d’Assise, à travers un geste symbolique, se dépouille de ses vêtements, montrant ainsi son intention de renoncer à l’héritage paternel: comme au moment de la création, François n’a rien, mais uniquement la vie que lui a donnée Dieu, entre les mains duquel il se remet. Puis il vécut comme un ermite, jusqu’à ce que, en 1208, eut lieu un autre événement fondamental dans l’itinéraire de sa conversion. En écoutant un passage de l’Evangile de Matthieu – le discours de Jésus aux apôtres envoyés en mission –, François se sentit appelé à vivre dans la pauvreté et à se consacrer à la prédication. D’autres compagnons s’associèrent à lui, et en 1209, il se rendit à Rome, pour soumettre au Pape Innocent III le projet d’une nouvelle forme de vie chrétienne. Il reçut un accueil paternel de la part de ce grand Souverain Pontife, qui, illuminé par le Seigneur, perçut l’origine divine du mouvement suscité par François. Le Poverello d’Assise avait compris que tout charisme donné par l’Esprit Saint doit être placé au service du Corps du Christ, qui est l’Eglise; c’est pourquoi, il agit toujours en pleine communion avec l’autorité ecclésiastique. Dans la vie des saints, il n’y a pas d’opposition entre charisme prophétique et charisme de gouvernement, et si apparaissent des tensions, ils savent attendre avec patience les temps de l’Esprit Saint.
En réalité, certains historiens du XIXe siècle et même du siècle dernier ont essayé de créer derrière le François de la tradition, un soi-disant François historique, de même que l’on essaie de créer derrière le Jésus des Evangiles, un soi-disant Jésus historique. Ce François historique n’aurait pas été un homme d’Eglise, mais un homme lié immédiatement uniquement au Christ, un homme qui voulait créer un renouveau du peuple de Dieu, sans formes canoniques et sans hiérarchie. La vérité est que saint François a eu réellement une relation très directe avec Jésus et avec la Parole de Dieu, qu’il voulait suivre sine glossa, telle quelle, dans toute sa radicalité et sa vérité. Et il est aussi vrai qu’initialement, il n’avait pas l’intention de créer un Ordre avec les formes canoniques nécessaires, mais simplement, avec la parole de Dieu et la présence du Seigneur, il voulait renouveler le peuple de Dieu, le convoquer de nouveau à l’écoute de la parole et de l’obéissance verbale avec le Christ. En outre, il savait que le Christ n’est jamais « mien », mais qu’il est toujours « nôtre », que le Christ, je ne peux pas l’avoir « moi » et reconstruire « moi » contre l’Eglise, sa volonté et son enseignement, mais uniquement dans la communion de l’Eglise construite sur la succession des Apôtres qui se renouvelle également dans l’obéissance à la parole de Dieu.
Et il est également vrai qu’il n’avait pas l’intention de créer un nouvel ordre, mais uniquement de renouveler le peuple de Dieu pour le Seigneur qui vient. Mais il comprit avec souffrance et avec douleur que tout doit avoir son ordre, que le droit de l’Eglise lui aussi est nécessaire pour donner forme au renouveau et ainsi réellement il s’inscrivit de manière totale, avec le cœur, dans la communion de l’Eglise, avec le Pape et avec les évêques. Il savait toujours que le centre de l’Eglise est l’Eucharistie, où le Corps du Christ et son Sang deviennent présents. A travers le Sacerdoce, l’Eucharistie est l’Eglise. Là où le Sacerdoce, le Christ et la communion de l’Eglise vont de pair, là seul habite aussi la parole de Dieu. Le vrai François historique est le François de l’Eglise et précisément de cette manière, il parle aussi aux non-croyants, aux croyants d’autres confessions et religions.
François et ses frères, toujours plus nombreux, s’établirent à la Portioncule, ou église Sainte-Marie des Anges, lieu sacré par excellence de la spiritualité franciscaine. Claire aussi, une jeune femme d’Assise, de famille noble, se mit à l’école de François. Ainsi vit le jour le deuxième ordre franciscain, celui des Clarisses, une autre expérience destinée à produire d’insignes fruits de sainteté dans l’Eglise.
Le successeur d’Innocent III lui aussi, le Pape Honorius III, avec sa bulle Cum dilecti de 1218 soutint le développement singulier des premiers Frères mineurs, qui partaient ouvrir leurs missions dans différents pays d’Europe, et jusqu’au Maroc. En 1219, François obtint le permis d’aller s’entretenir, en Egypte, avec le sultan musulman, Melek-el-Kâmel, pour prêcher là aussi l’Evangile de Jésus. Je souhaite souligner cet épisode de la vie de saint François, qui est d’une grande actualité. A une époque où était en cours un conflit entre le christianisme et l’islam, François, qui n’était volontairement armé que de sa foi et de sa douceur personnelle, parcourut concrètement la voie du dialogue. Les chroniques nous parlent d’un accueil bienveillant et cordial reçu de la part du sultan musulman. C’est un modèle dont devraient s’inspirer aujourd’hui encore les relations entre chrétiens et musulmans: promouvoir un dialogue dans la vérité, dans le respect réciproque et dans la compréhension mutuelle (cf. Nostra Aetate, n. 3). Il semble ensuite que François ait visité la Terre Sainte, jetant ainsi une semence qui porterait beaucoup de fruits: ses fils spirituels en effet firent des Lieux où vécut Jésus un contexte privilégié de leur mission. Je pense aujourd’hui avec gratitude aux grands mérites de la Custodie franciscaine de Terre Sainte.
De retour en Italie, François remit le gouvernement de l’ordre à son vicaire, le frère Pietro Cattani, tandis que le Pape confia à la protection du cardinal Ugolino, le futur Souverain Pontife Grégoire IX, l’Ordre, qui recueillait de plus en plus d’adhésions. Pour sa part, son Fondateur, se consacrant tout entier à la prédication qu’il menait avec un grand succès, rédigea la Règle, ensuite approuvée par le Pape.
En 1224, dans l’ermitage de la Verna, François vit le Crucifié sous la forme d’un séraphin et de cette rencontre avec le séraphin crucifié, il reçut les stigmates; il devint ainsi un avec le Christ crucifié: un don qui exprime donc son intime identification avec le Seigneur.
La mort de François – son transitus – advint le soir du 3 octobre 1226, à la Portioncule. Après avoir béni ses fils spirituels, il mourut, étendu sur la terre nue. Deux années plus tard, le Pape Grégoire IX l’inscrivit dans l’album des saints. Peu de temps après, une grande basilique fut élevée en son honneur, à Assise, destination encore aujourd’hui de nombreux pèlerins, qui peuvent vénérer la tombe du saint et jouir de la vision des fresques de Giotto, le peintre qui a illustré de manière magnifique la vie de François.
Il a été dit que François représente un alter Christus, qu’il était vraiment une icône vivante du Christ. Il fut également appelé « le frère de Jésus ». En effet, tel était son idéal: être comme Jésus; contempler le Christ de l’Evangile, l’aimer intensément, en imiter les vertus. Il a en particulier voulu accorder une valeur fondamentale à la pauvreté intérieure et extérieure, en l’enseignant également à ses fils spirituels. La première béatitude du Discours de la Montagne – Bienheureux les pauvres d’esprit car le royaume des cieux leur appartient (Mt 5, 3) a trouvé une réalisation lumineuse dans la vie et dans les paroles de saint François. Chers amis, les saints sont vraiment les meilleurs interprètes de la Bible; ils incarnent dans leur vie la Parole de Dieu, ils la rendent plus que jamais attirante, si bien qu’elle nous parle concrètement. Le témoignage de François, qui a aimé la pauvreté pour suivre le Christ avec un dévouement et une liberté totale, continue à être également pour nous une invitation à cultiver la pauvreté intérieure afin de croître dans la confiance en Dieu, en unissant également un style de vie sobre et un détachement des biens matériels.
Chez François, l’amour pour le Christ s’exprima de manière particulière dans l’adoration du Très Saint Sacrement de l’Eucharistie. Dans les Sources franciscaines, on lit des expressions émouvantes, comme celle-ci: « Toute l’humanité a peur, l’univers tout entier a peur et le ciel exulte, lorsque sur l’autel, dans la main du prêtre, il y a le Christ, le Fils du Dieu vivant. O grâce merveilleuse! O fait humblement sublime, que le Seigneur de l’univers, Dieu et Fils de Dieu, s’humilie ainsi au point de se cacher pour notre salut, sous une modeste forme de pain » (François d’Assise, Ecrits, Editrice Francescane, Padoue 2002, 401).
En cette année sacerdotale, j’ai également plaisir à rappeler une recommandation adressée par François aux prêtres: « Lorsqu’ils voudront célébrer la Messe, purs de manière pure, qu’ils présentent avec respect le véritable sacrifice du Très Saint Corps et Sang de notre Seigneur Jésus Christ » (François d’Assise, Ecrits, 399). François faisait toujours preuve d’un grand respect envers les prêtres et il recommandait de toujours les respecter, même dans le cas où ils en étaient personnellement peu dignes. Il donnait comme motivation de ce profond respect le fait qu’ils avaient reçu le don de consacrer l’Eucharistie. Chers frères dans le sacerdoce, n’oublions jamais cet enseignement: la sainteté de l’Eucharistie nous demande d’être purs, de vivre de manière cohérente avec le Mystère que nous célébrons.
De l’amour pour le Christ naît l’amour envers les personnes et également envers toutes les créatures de Dieu. Voilà un autre trait caractéristique de la spiritualité de François: le sens de la fraternité universelle et l’amour pour la création, qui lui inspira le célèbre Cantique des créatures. C’est un message très actuel. Comme je l’ai rappelé dans ma récente encyclique Caritas in veritate, seul un développement qui respecte la création et qui n’endommage pas l’environnement pourra être durable (cf. nn. 48-52), et dans le Message pour la Journée mondiale de la paix de cette année, j’ai souligné que l’édification d’une paix solide est également liée au respect de la création. François nous rappelle que dans la création se déploient la sagesse et la bienveillance du Créateur. Il comprend la nature précisément comme un langage dans lequel Dieu parle avec nous, dans lequel la réalité devient transparente et où nous pouvons parler de Dieu et avec Dieu.
Chers amis, François a été un grand saint et un homme joyeux. Sa simplicité, son humilité, sa foi, son amour pour le Christ, sa bonté envers chaque homme et chaque femme l’ont rendu heureux en toute situation. En effet, entre la sainteté et la joie existe un rapport intime et indissoluble. Un écrivain français a dit qu’il n’existe qu’une tristesse au monde: celle de ne pas être saints, c’est-à-dire de ne pas être proches de Dieu. En considérant le témoignage de saint François, nous comprenons que tel est le secret du vrai bonheur: devenir saints, proches de Dieu!
Que la Vierge, tendrement aimée de François, nous obtienne ce don. Nous nous confions à Elle avec les paroles mêmes du Poverello d’Assise: « Sainte Vierge Marie, il n’existe aucune femme semblable à toi née dans le monde, fille et servante du très haut Roi et Père céleste, Mère de notre très Saint Seigneur Jésus Christ, épouse de l’Esprit Saint: prie pour nous… auprès de ton bien-aimé Fils, Seigneur et Maître » (François d’Assise, Ecrits, 163).

ITALIE : LE SOUVENIR DU JUGE FALCONE ET DES PAROLES DE JEAN-PAUL II

23 mai, 2012

http://www.zenit.org/article-30900?l=french

ITALIE : LE SOUVENIR DU JUGE FALCONE ET DES PAROLES DE JEAN-PAUL II

« Convertissez-vous ! Le jugement de Dieu viendra! »

Anita Bourdin
ROME, mercredi 23 mai 2012 (ZENIT.org) – « Convertissez-vous ! Le jugement de Dieu viendra! », a déclaré Jean-Paul II en 1993, en Sicile, dans un discours fameux, enflammé. L’année précédente, deux juges anti-mafia avaient été assassinés. Vingt ans après, l’Eglise Sicile invite au courage contre cette « dictature de la mafia ».
L’Italie panse en effet ses blessures récentes – l’attentat de Brindisi contre une école professionnelle et le tremblement de terre d’Emilie Romagne – mais aussi les blessures d’il y a vingt ans : l’attentat contre le juge anti-mafia Giovanni Falcone (1939-1992) et dans son sillage celui de son ami – entre les bras duquel Falcone a expiré – le juge Paolo Borsellino (1940-1992), le 19 juillet, après 57 jours d’une activité intense contre la mafia.
En souvenir d’eux, à Rome, les lumières du Colisée seront éteintes ce mercredi soir.
Moins d’un an après ces deux massacres, Jean-Paul II s’est exclamé, le 9 mai 1993, à Agrigente : « Ce peuple, le peuple sicilien, si attaché à la vie, peuple qui aime la vie, qui donne la vie, ne peut pas vivre toujours sous la pression d’une civilisation contraire, la civilisation de la mort ! Je le dis aux responsables : « Convertissez-vous ! Un jour viendra le jugement de Dieu ! ». »
Menaces contre un évêque
Depuis 2008, un évêque sicilien est contraint de vivre sous la protection d’une escorte, a dénoncé Radio Vatican. Il a travaillé à faire attribuer à des anciens détenus des terrains confisqués à la mafia. Mgr Michele Pennisi, évêque de Piazza Armerina, a reçu une lettre de menaces : « Tu mourras comme Jésus Christ ».
Il a aussi refusé de célébrer les obsèques religieuses d’un boss de la Mafia, tué le 3 décembre 2007, lors d’une descente de la police, et fait l’objet d’intimidations. Des tracts l’accusant de « complicité avec les magistrats » ont été distribués.
On murmure, précisait Radio Vatican, qu’il a soumis l’Église à l’État, mais Mgr Pennisi continue d’exhorter ses fidèles à prier Dieu de les libérer du racket et de la mafia, de répéter dans le bulletin de son diocèse qu’il y a incompatibilité entre vie chrétienne et crime organisé, que les chrétiens doivent au contraire aider les mafieux à « se repentir » et à « changer de vie ». Il est considéré comme un « moteur anti-mafia ».
Mgr Mogavero, évêque de Mazara del Vallo, estime que la lutte contre la mafia passe par « l’éducation ». Il faut, disait-il en substance, aider les jeunes à comprendre qu’ils doivent progresser par leurs propres forces, en misant sur leurs compétences et non pas sur des « recommandations » ou des « collusions avec la mafia ».
A Palerme, le cardinal Paolo Romeo dénonce la fausse religion des membres de Cosa Nostra: les mafieux peuvent toujours exhiber leur Bible et leurs images pieuses, leur comportement reste antiévangélique et leurs oraisons offensent la foi chrétienne, rapporte toujours la même source.
Dans un document publié en vue des élections locales qui viennent d’avoir lieu, l’Église de Palerme avait appelé à une plus grande « responsabilité civique » et à un sursaut de « courage contre la dictature de la mafia », notamment pour permettre aux entreprises privées de « se développer » et du même coup de « créer des emplois ».
Plusieurs prêtres ont payé de leur vie leur résistance à la mafia, comme don Giuseppe – Pino – Puglisi, assassiné à Palerme (1937–1993). Un prêtre sicilien, don Luigi Ciotti, né en 1945, est à l’origine d’une association « Libera » et milite pour le combat contre la mafia partout où elle se trouve, pas seulement en Sicile.
Elle aura une fin
« La mafia, disait Giovanni Falcone, comme toutes les entreprises humaines a un début et une fin ». Comme le pape Jean-Paul II, Giovanni Falcone était né un 18 mai…
Avec Giovanni Falcone ont péri, le 23 mai 1992, dans l’attentat des environs de Capaci, sur l’autoroute entre Trapani et Palerme, sa femme, également magistrat, Francesca Morvillo, et trois hommes de leur escorte : Rocco Di Cillo, Antonio Montinari et Vito Schifani.
En ont réchappé, Giuseppe Costanza, qui était assis à l’arrière de la deuxième voiture du cortège – le juge avait pris le volant – et les hommes de la troisième voiture. Vingt autres personnes qui passaient alors sur l’autoroute ont également été blessées.
Lors de l’explosion d’une voiture piégée Via D’Amelio, à Palerme, devant le domicile de la mère de Paolo Borsellino qui venait lui rendre visite, a perdu la vie le juge qui avait lutté pendant cinq ans contre la mafia, et les cinq carabiniers composant son escorte, Agostino Catalano, Walter Cosina, Emanuela Loi – première femme carabinier -, Vincenzo Li Muli et Claudio Traina.
Célébrations de Palerme
Les célébrations du vingtième anniversaire ont rassemblé, ce 23 mai, des milliers de personnes à Palerme autour de plusieurs ministres italiens, du président du Conseil, Mario Monti, et du président Giorgio Napolitano, de membres des familles des deux juges et de représentants d’autres pays. Elles ont été transmises en direct sur la chaîne de télévision nationale RAI 1, depuis l’« Aula Bunker » conçue pour le maxi-procès contre les mafieux.
Le président Napolitano s’est ému, ce matin, en lançant un appel aux jeunes de s’engager à leur tour. Il a ensuite salué plusieurs personnalités présentes dont l’archevêque de Palerme, le cardinal Romeo.

Mat-27,45_Entombment,freedom

22 mai, 2012

Mat-27,45_Entombment,freedom dans images sacrée 15%20ANGELICO%20DEPOSITION

http://www.artbible.net/3JC/-Mat-27,45_Entombment,freedom_Tombeau,%20liberation/15th_siecle/index.html

Psaume 2 : Moi, aujourd’hui, je t’ai engendré

22 mai, 2012

http://www.spiritualite2000.com/page-664.php

LE PSALMISTE

Juillet – Août 2002 

Psaume 2 : Moi, aujourd’hui, je t’ai engendré

Michel Gourgues, o.p.

Dans son récit de la naissance de Jésus, l’évangéliste Matthieu renvoie, pour chacun des épisodes qu’il raconte, à un passage des prophètes. Lorsqu’il rapporte la naissance à Bethléem, c’est un passage du prophète Michée qui lui revient à la mémoire: Et toi, Bethléem, terre de Juda, de toi sortira un chef qui sera pasteur de mon peuple… (Mt 2,6). Les psaumes, eux, ne font aucune mention de Bethléem, mais, en revanche, ils accordent une place de premier plan à David. Originaire de Bethléem, c’est là, selon un récit populaire de l’Ancien Testament, que le cadet des fils de Jessé, tout jeune encore, avait reçu l’onction du prophète Samuel (1 Sam 16,13).
Le premier des psaumes à figurer dans l’office liturgique de Noël est le Psaume 2. Il est encore cité dans le passage de l’épître aux Hébreux que nous fait lire la messe du jour de Noël : Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré Or, ce psaume paraît faire référence au rite de l’onction par lequel David ou l’un de ses successeurs était devenu roi d’Israël.
Quatre volets bien articulés
Le psaume commence par évoquer une situation politique difficile (versets 1-3): des rois et des chefs étrangers se soulèvent contre le pouvoir d’un roi d’Israël, soit qu’ils désirent s’en défaire, soit qu’ils s’en sentent menacés et qu’ils veulent l’éviter. Qui était ce roi? Les exégètes donneraient cher pour le savoir, car cela permettrait de dater le psaume et de déterminer à quelle situation exacte il fait référence. Puisque ce roi a reçu l’onction à Jérusalem (v. 6), iI doit plutôt s’agir d’un descendant de David que de David lui-même qui, lui, avait été sacré roi à Bethléem ou à Hébron, selon les traditions.
Dans la deuxième partie du psaume (versets 4-6), Yahvé lui-même intervient pour rappeler aux puissances contestataires que c’est lui qui a choisi le roi contre lequel elles se soulèvent. Le roi d’Israël est son oint , en hébreu son mashiah, le mot qui deviendra messie en français et qui sera traduit en grec par christos, en français christ .
Dans la troisième partie du psaume (versets 7-9), c’est le roi lui-même qui, à son tour, évoque le jour où il a reçu l’onction royale et les promesses qui lui ont alors été faites de la part de Dieu. C’est ici que se trouve l’énoncé solennel : Il m’a dit : ‘Tu es mon fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré ‘ (v. 7). En tant que lieutenant terrestre de Yahvé, le roi était en quelque sorte adopté par ce dernier au jour de son intronisation. Le titre de fils de Dieu servait à exprimer cette relation unique et privilégiée par rapport à Dieu. En même temps il marquait une distance, en évitant de diviniser le roi comme cela se faisait en Égypte et dans d’autres cultures avoisinantes. En Israël, le roi n’est pas Dieu, tout en bénéficiant d’une relation unique à lui : il est le fils de Dieu .
La dernière partie (versets 10-12) revient à la situation et aux personnages évoqués au point de départ. Les contestataires n’ont qu’à bien se tenir! Mieux vaut pour eux de se soumettre à Yahvé, car celui-ci ne peut qu’être fidèle à ses engagements en protégeant et en soutenant le roi qu’ils combattent.
Facteur d’espérance au lieu de pièce de musée
Tant qu’il y eut des rois en Israël, le peuple put continuer de prier le psaume en leur faveur, en se rappelant la dignité que leur conférait leur rôle et leur responsabilité uniques devant Dieu. Après l’exil, le psaume aurait dû tomber en désuétude, l’institution royale étant désormais disparue. Un peu comme des chants composés pour une circonstance donnée et qu’on oublie aussitôt, une fois l’événement passé.
Or, au lieu d’être relégué aux archives comme témoin d’un passé révolu, le psaume continua d’être prié comme témoin de l’avenir. Un jour, viendra un Messie, descendant de David, que Dieu reconnaîtra comme son fils et qui exercera une domination universelle. Certains courants de la religion juive témoignent, dès le 1er siècle avant Jésus, d’une lecture en ce sens du psaume 2. Ce dernier, au lieu d’entretenir la nostalgie du passé, sert désormais à nourrir l’espérance.
Cette espérance, il faut le dire, n’est pas toujours exempte de violence et d’accents revanchards. Ainsi en est-il par exemple, dans les Psaumes de Salomon, un recueil de prières juives qui, en empruntant les mots mêmes du psaume 2, prie pour l’avènement du Messie descendant de David: Vois, Seigneur, et suscite pour eux leur roi, fils de David, au temps que tu connais, ô Dieu, pour qu’il règne sur Israël ton serviteur. Purifie Jérusalem des nations… Qu’avec sagesse et justice il chasse les pécheurs de l’héritage, qu’il brise l’orgueil des pécheurs comme vases de potier, qu’il les fracasse avec un sceptre de fer (Psaume 17,23-26).
Ton serviteur Jésus, que tu as oint
Que deviendrait le psaume 2 pour les chrétiens, une fois que, Jésus ressuscité et exalté à la droite de Dieu, ils auraient reconnu en lui le Messie attendu? Certains de ses accents vengeurs et l’espérance en ce sens qu’il avait engendrée ne l’exposaient-ils pas de nouveau à tomber en désuétude? Il n’en fut rien. Car le psaume contenait par ailleurs trop de richesses. Dans chacun de ses volets, on pouvait voir évoqués à l’avance des aspects centraux de l’expérience et du mystère de Jésus. Ainsi, l’adversité des rois et des puissants de la terre contre le Messie (vv. 1-3) évoquait tout naturellement pour les premières communautés chrétiennes la passion de leur Seigneur, comme en témoignent les Actes des Apôtres (4,25). La déclaration solennelle : Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré (v. 7) pouvait, quant à elle, être lue en relation avec le baptême de Jésus, compris comme le moment où, tel un nouveau roi s’apprêtant à entreprendre sa mission, il avait reçu l’onction d’Esprit Saint et de puissance , comme le souligne Luc dans ses deux livres (Lc 4,18; Ac 10,38). L’intronisation solennelle du roi évoquée dans le psaume pouvait aussi être comprise en relation avec la résurrection de Jésus, exalté par Dieu et partageant désormais avec lui une seigneurie universelle (Ac 13,33; He 1,5; 5,5). Fidèle à son oint comme il avait promis jadis de l’être au roi dont parlait le psaume, Dieu, en le ressuscitant, avait révélé sa qualité de Fils – désormais entendue au sens fort – et fait tourner l’adversité en exaltation: Dieu l’a fait Seigneur et Messie et Seigneur, ce Jésus que vous, vous aviez crucifié (Ac 2,36).
Sans doute, en lisant le psaume 2 en relation avec la naissance de Jésus, la liturgie de Noël innove-t-elle par rapport au Nouveau Testament. Mais l’innovation se comprend parfaitement. Tu es mon fils, moi aujourd’hui je t’ai engendré: comment pouvait-on ne pas associer l’oracle solennel du psaume et la déclaration de saint Paul (Ga 4,4): Quand vint la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils né d’une femme…?

Note
L’onction, un rite aussi vieux que l’histoire connue. Sur cette représentation égyptienne, datant de 2800 ans avant Jésus, un personnage reçoit l’onction. S’agit–il d’un roi? Le rite en tout cas paraît important car il se déroule devant le temple d’une divinité.

« OUI À NOS RACINES JUIVES, NON À L’ANTISÉMITISME », PAR LE CARD. KOCH (I)

22 mai, 2012

 http://www.zenit.org/article-30873?l=french

« OUI À NOS RACINES JUIVES, NON À L’ANTISÉMITISME », PAR LE CARD. KOCH (I)

« Berrie Lecture » à l’Angelicum, sur « Nostra Aetate »

Traduction d’Hélène Ginabat
ROME, lundi 21 mai 2012 (ZENIT.org) – « OUI à nos racines juives, NON à l’antisémitisme » : c’est par cette formule lapidaire que le cardinal Kurt Koch présente la déclaration conciliaire « Nostra Aetate », « document de base d’un dialogue systématique avec les juifs » qui n’a cessé d’évoluer depuis cinquante ans.
« Construire sur Nostra Aetate : 50 ans de dialogue judéo-chrétien » – « Building on Nostra Aetate: 50 Years of Christian-Jewish Dialogue » – c’était en effet le thème de la cinquième édition de la « Berrie Lecture », une initiative  promue aussi par la Fondation Russell Berrie de New York, pour favoriser la compréhension mutuelle entre la foi juive et la foi chrétienne (cf. Zenit des 15 et 17 mai 2012).
Elle a eu lieu le 16 mai, à Rome, à l’Université pontificale Saint-Tomas d’Aquin – l’Angelicum -, en coopération avec  le Centre Jean-Paul II pour le dialogue interreligieux, dirigé par le rabbin Jack Bemporad.
Président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, le cardinal Kurt Koch est en tant que tel président de la Commission du Saint-Siège pour les relations religieuses avec le judaïsme.
Texte de la conférence du card. Kurt Koch (1ère partie)
C’est pour moi un honneur d’être ici aujourd’hui pour donner la Conférence Jean-Paul II sur la compréhension interreligieuse, la cinquième d’une série de conférences annuelles prestigieuses, organisées par le Centre Jean-Paul II pour le dialogue interreligieux à l’Université Angelicum. D’une manière particulière, cette université s’est engagée à favoriser le dialogue œcuménique et interreligieux au niveau académique. Le Centre Jean-Paul II est un partenariat entre l’Angelicum et la Fondation Russell Berrie, et je suis très heureux de saluer la présence d’Angelica Berrie, présidente de la Fondation, dont le nom semble refléter les aspirations communes qui ont motivé la création du Centre. Je tiens également à mentionner dans ce contexte, le Programme de bourses Russell Berrie, qui vise à développer des échanges d’idées et des liens d’amitié et de compréhension mutuelle qui, nous l’espérons, trouveront un écho bien au-delà du milieu universitaire. Le thème de cette présentation sera l’évolution historique du dialogue judéo-catholique, rendue possible par le document conciliaire « Nostra Aetate ».
I – « Nostra Aetate »: OUI à nos racines juives, NON à l’antisémitisme
Du côté catholique, la déclaration du deuxième Concile du Vatican sur la relation de l’Eglise avec les religions non-chrétiennes, «Nostra Aetate», peut être considérée comme le début d’un dialogue systématique avec les Juifs. Encore aujourd’hui, elle est considérée comme le « document de base » et la « Magna Charta » du dialogue de l’Eglise catholique romaine avec le judaïsme ; mon tour d’horizon de la conversation judéo-catholique doit donc commencer par là.
Celle-ci ne s’est pas développée dans le vide, puisque du côté chrétien, il y avait déjà eu des approches du judaïsme, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Eglise catholique, avant le Concile. Mais, surtout après le crime sans précédent de la Shoah, un effort a été fait, dans la période de l’après-guerre, en direction d’une redéfinition théologiquement fondée de la relation avec le judaïsme. Après l’assassinat en masse des Juifs d’Europe, planifié et exécuté par les nationaux-socialistes avec une perfection industrielle, un examen de conscience approfondi a été entrepris sur la façon dont un scénario aussi barbare était possible dans l’Occident chrétien. Faut-il supposer que les tendances anti-juives, présentes au sein de la chrétienté pendant des siècles, ont été complices de l’antisémitisme des nazis, raciste et égaré par une idéologie athée et néo-païenne, ou qu’elles ont été, tout simplement, ce qui lui a permis de suivre son cours ? Parmi les chrétiens aussi, il y a eu des auteurs et des victimes, mais la grande masse était certainement composée de spectateurs passifs qui ont gardé les yeux fermés face à cette réalité brutale. La Shoah est donc devenue une question et une accusation contre le christianisme : pourquoi la résistance chrétienne contre la brutalité sans limite des crimes nazis n’a-t-elle pas démontré la mesure et la clarté auxquelles on pouvait s’attendre à juste titre ? Les chrétiens et les juifs d’aujourd’hui ont-ils la volonté et la force d’une conciliation et d’une réconciliation sur la base commune de la foi dans le seul et unique Dieu d’Israël ? Quelle est l’importance du judaïsme, à l’avenir, pour les églises et communautés ecclésiales, et quelle relation théologique entretenons-nous aujourd’hui avec le judaïsme?
Peu de temps après la fin de la seconde guerre mondiale, le côté chrétien a abordé le phénomène de l’antisémitisme lors de la Conférence internationale d’urgence sur l’antisémitisme, qui eut lieu à Seelisberg du 30 Juillet au 5 Août 1947. Environ 65 personnes, juifs et chrétiens de diverses confessions, se sont réunies pour une large réflexion sur la façon dont l’antisémitisme pouvait être éradiqué à ses racines. La réunion de Seelisberg visait à jeter de nouvelles fondations pour le dialogue entre juifs et chrétiens et à donner une impulsion vers une compréhension mutuelle. Les perspectives, qui furent connues comme les «Dix points de Seelisberg», sont au fil du temps devenues pionnières et, d’une manière ou d’une autre, ont trouvé leur chemin dans la déclaration du Concile « Nostra Aetate », même si, dans ce texte, un cadre résolument théologique a été donné à la relation avec le judaïsme. Cette déclaration commence, en fait, par une réflexion sur le mystère de l’Église et un rappel du lien profond qui unit spirituellement le peuple de la Nouvelle Alliance avec la tribu d’Abraham. Les deux documents, «Nostra Aetate» et les «Dix points de Seelisberg» soulignent que le dédain, le dénigrement et le mépris du judaïsme doivent être évités à tout prix : les racines juives du christianisme sont donc explicitement mises en avant. Dans le même temps, les deux déclarations convergent – naturellement, chacune d’une manière différente – en rejetant l’accusation qui a malheureusement survécu pendant des siècles dans divers endroits, que les Juifs étaient « déicides ».
Dans la sphère chrétienne, réfléchir à la Shoah a certainement été l’une des motivations principales qui ont mené à la rédaction de «Nostra Aetate». Mais d’autres raisons peuvent sans doute également être identifiées : dans la théologie catholique, suite à la publication de l’encyclique « Divino afflante spiritu » en 1943, par le pape Pie XII, les études bibliques ont été ouvertes – bien qu’avec des mesures prudentes de débutants – à l’interprétation historico-critique de la Bible ; cela impliquait de commencer à lire les textes bibliques dans leur contexte historique et selon les traditions religieuses prévalant à leur époque. Ce processus a finalement trouvé son expression doctrinale dans le décret conciliaire sur la Révélation divine «Dei Verbum», ou plus précisément dans l’instruction adressée à l’exégète d’étudier soigneusement ce que les auteurs des textes bibliques voulaient vraiment dire : « Pour découvrir l’intention des hagiographes, on doit, entre autres choses, considérer aussi les “genres littéraires”. Car c’est de façon bien différente que la vérité se propose et s’exprime en des textes diversement historiques, ou prophétiques, ou poétiques, ou même en d’autres genres d’expression »[1]. L’observation précise de traditions religieuses historiques reflétées dans les textes de l’Écriture Sainte a eu comme conséquence que la figure de Jésus de Nazareth a été située de plus en plus clairement au sein du judaïsme de son temps. De cette façon, le Nouveau Testament a été replacé entièrement dans le cadre des traditions juives, et Jésus a été perçu comme un Juif de son temps qui se sentait une obligation vis-à-vis de ces traditions. Ce point de vue a également trouvé sa place dans la déclaration du Concile  » Nostra Aetate « , quand il affirme, en référence à la Lettre aux Romains (9, 5), que Jésus est issu, selon la chair, du peuple d’Israël, et l’Eglise « rappelle aussi que les Apôtres, fondements et colonnes de l’Église, sont nés du peuple juif, ainsi qu’un grand nombre des premiers disciples qui annoncèrent au monde l’Évangile du Christ »[2]. Depuis » Nostra Aetate « , cela fait donc partie du « cantus firmus » du dialogue judéo-chrétien de rappeler avec insistance les racines juives de la foi chrétienne. Au cours de sa visite à la synagogue de Rome, le 13 avril 1986, le pape Jean-Paul II a exprimé en ces mots nets et impressionnants: « La religion juive ne nous est pas “extrinsèque” mais, d’une certaine manière, elle est “intrinsèque” à notre religion. Nous avons donc envers elle des rapports que nous n’avons avec aucune autre religion. Vous êtes nos frères préférés et, d’une certaine manière, on pourrait dire nos frères aînés ».[3]
Cependant, ce ne sont pas seulement des approfondissements théologiques qui ont conduit, du côté chrétien, à rechercher un rapprochement théorique et pratique avec le judaïsme. En fait, des raisons politiques et pragmatiques ont également joué un rôle non négligeable dans ce domaine. Depuis la fondation de l’Etat d’Israël en 1948, l’Eglise catholique se voit confrontée, en Terre Sainte, à la réalité qu’elle doit développer sa vie pastorale au sein d’un État qui se comprend définitivement comme juif. Israël est la seule terre au monde avec une population à majorité juive et, pour cette seule raison, les chrétiens qui vivent là-bas doivent nécessairement engager un dialogue avec eux. À cet égard, le Saint-Siège a toujours poursuivi deux objectifs : permettre, d’une part, à l’activité pastorale des congrégations catholiques en Terre Sainte de se déployer sans entrave, et d’autre part, faciliter le libre accès aux lieux saints des chrétiens pour les pèlerins chrétiens. Cela nécessite, en première instance, un dialogue politique avec l’exécutif au pouvoir de l’Etat d’Israël, qui, du point de vue juif, doit naturellement toujours être intégré dans un dialogue avec les autorités religieuses du judaïsme. Les chrétiens semblent plutôt enclins à différencier et à délimiter les affaires politiques des affaires religieuses, tandis que le judaïsme s’efforce de faire converger et d’associer les deux dimensions.
Quels que soient les motifs et les facteurs qui peuvent avoir conduit individuellement à la rédaction de «Nostra Aetate», la déclaration reste la boussole essentielle de tous les efforts vers le dialogue judéo-catholique et, après 47 ans, nous pouvons affirmer avec gratitude que cette redéfinition théologique de la relation avec le judaïsme a directement porté de beaux fruits à travers l’accueil qui lui a été réservée. Il semble qu’en ce qui concerne le contenu, les Pères conciliaires, à ce moment-là, ont pris en considération presque tout ce qui, depuis, s’est avéré important dans l’histoire de ce dialogue. Du côté juif, on a souligné de façon particulièrement positive le fait que la Déclaration conciliaire a pris une position sans ambiguïté contre toute forme d’antisémitisme. C’est sur cette base, qui n’est pas la moindre, que les Juifs gardent l’espérance et l’assurance qu’ils ont, dans l’Église catholique, un allié fiable dans la lutte contre l’antisémitisme.
En ce qui concerne l’histoire de la réception des documents conciliaires, on peut sans doute oser affirmer que «Nostra Aetate» doit être compté parmi les textes du Concile qui ont permis, de manière convaincante, d’effectuer une réorientation fondamentale de l’Eglise catholique à la suite du Concile. Bien sûr, cela ne devient clair pour nous que lorsqu’on considère qu’il y avait en partie, auparavant, une grande réticence concernant les contacts entre juifs et catholiques, découlant pour une part de l’histoire du christianisme, avec sa discrimination contre les Juifs qui a été jusqu’à prendre la forme de conversions forcées. Au cours des dernières décennies, le principe fondamental du respect pour le judaïsme, exprimé dans « Nostra Aetate », a permis à des groupes qui, au départ, se considéraient mutuellement avec un certain scepticisme, de devenir petit à petit des partenaires fiables, voire même de bons amis, capables de faire face aux crises ensemble et de surmonter les conflits de manière positive.
(à suivre)

Traduction de l’original anglais par ZENIT

[1] Dei Verbum, N° 12.
[2] Nostra Aetate, N° 4.
[3] Jean-Paul II, Allocution dans la synagogue lors de la rencontre avec la communauté juive de la ville de Rome le 13 avril 1986 : « Nous remercions le Seigneur pour la fraternité retrouvée et pour la profonde entente entre l’Eglise et le judaïsme ».

Sainte Rita de Cascia

21 mai, 2012

Sainte Rita de Cascia dans images sacrée saint-rita-of-cascia

http://www.saintritadundalk.org/about-saint-rita.htm

22 mai – Sainte Rita de Cascia

21 mai, 2012

http://missel.free.fr/Sanctoral/05/22.php

22 mai – Sainte Rita de Cascia

Sommaire :

  Biographie
  Litanies (les Litanies sur le site)

Biographie

Sainte Rita naquit en Italie, à Rocca Poréna, petit hameau de Cascia[1], le 22 mai 1381. Ses parents[2] l’avaient longtemps demandée au Seigneur et, alors que tout espoir semblait perdu, sa mère avait reçu de Dieu l’assurance que sa prière était exaucée. Selon une inspiration céleste, l’enfant du miracle fut appelée Rita, diminutif de Margarita, ce qui signife « perle précieuse. »
Peu de temps après son baptême, tandis que Rita reposait paisiblement dans une corbeille d’osier, sous la garde de ses parents qui travaillaient aux champs, un essaim d’abeilles vint bourdonner autour de son berceau. Entrant dans la bouche entr’ouverte de Rita, les abeilles y déposèrent leur miel sans lui faire aucun mal. Loin de gâter leur fille unique par une éducation sans fermeté, les vieux parents s’appliquèrent à la former à la vertu. Obéissante et courageuse, Rita travaillait de bon cœur, aidant ses parents dans les soins du ménage.
Ne voulant se faire remarquer que de Dieu seul, Rita sacrifiait dans sa toilette les frivolites qui auraient pu la rendre plus gracieuse. Sa douceur, sa charité envers les pauvres, étaient remarquables. Rita ne savait guère lire ni écrire mais elle savait regarder et comprendre son crucifix. Seule dans sa chambre, elle priait longuement devant l’image de Jésus. En son cœur grandissait le désir de mener une vie de pénitence et ses yeux se tournaient avec ardeur vers le monastère de Cascia.
Tandis que Rita se disposait à entrer au cloître, ses parents recevaient pour elle une demande en mariage. Le prétendant, Paul de Ferdinand, dit « Ferdinando », était un homme violent. Craignant de s’attirer des représailles par un refus, les parents promirent la main de leur fille. Consternée, Rita supplia Dieu de mettre obstacle à ce projet. Les voies de Dieu sont impénétrables : en la chargeant de cette croix, mais Dieu voulait donner aux épouses malheureuses un éclatant modèle de patience. Ferdinando fut pour son épouse un véritable tyran. Dominé par un esprit de méchanceté, faisant de son foyer un enfer. Jamais content, se fâchant pour un rien, il accablait d’injures la timide Rita qui frémissait de peur. Il avait la boisson mauvaise et sa pauvre femme dut subir ses fureurs et ses brusques colères[3].
Qu’aurait fait une épouse ordinaire avec un tel mari ? Mais Rita avait contemplé Jésus dans sa Passion : injuriée, elle ne répondait pas ; frappée, elle souffrait en silence. Sa patience était si héroïque, que ses voisines l’appelaient « la femme sans rancune. » Elle gravissait son calvaire en priant pour la conversion de son indigne époux. Après dix-huit ans, le miracle se produisit : touché par 1a grâce, Ferdinando se jeta aux pieds de sa vertueuse épouse, lui demanda pardon et promit de se corriger. Il tint parole. Alors commença pour Rita une vie nouvelle. Néanmoins, Ferdinando s’était créé beaucoup d’ennemis qui, sachant que le nouveau converti sortait désormais sans armes, en profitèrent pour assouvir leur vengeance. Un soir qu’il rentrait à Rocca Paréna par un sentier désert, Ferdinando fut attaqué et lâchement poignardé[4]. La douleur de Rita fut extrême, pourtant elle puisa dans sa foi la force de pardonner aux meurtriers de son mari.
Ses deux grands fils qui ne ressemblaient pas à leur mère, prirent la résolution de venger leur père. Les ayant en vain supllié de ne pas verser le sang, Rita se tourna vers Dieu et fit cette prière héroïque : « Seigneur, prenez les plutôt que les laisser devenir criminels. » Peu de temps après les jeunes gens tombaient malades et mouraient à peu d’intervalle l’un de l’autre, après s’être reconciliés avec Dieu.
Restée seule, Rita qui songeait à réaliser son désir de vie religieuse, alla frapper à la porte du mon.astère de Cascia, mais comme jamais encore une veuve n’avait été admise dans la communauté, l’abbesse la refusa. Par deux fois elle renouvela sans succès sa démarche, puis s’adressa à Dieu et « la Sainte des Impossibles » fut miraculeusement exaucée.
Une nuit qu’elle veillait en priant, elle s’entendit appeler ; elle se leva et ouvrit la porte derrière laquelle elle vit les saints qu’elle avait invoqués : saint Jean-Baptiste, saint Augustin et saint Nicolas de Tolentino. Comme dans un rêve, elle les suivit, parcourant les ruelles désertes et sombres qui la menèrent devant le couvent. Comme manœuvrée par une main invisible, la porte s’ouvrit pour la recevoir. Les saints compagnons disparurent et Rita se retrouva seule à l’intérieur de la chapelle où la trouvèrent les religieuses. Le miracle était si évident qu’on la reçut cette fois-ci avec joie.
Pour mettre la bonne novice à l’épreuve, l’abbesse lui ordonna d’arroser matin et soir un arbre mort situé a l’entrée du couvent. Voyant dans cet ordre l’expression de la volonté de Dieu, Rita accomplissait avec soin ce travail inutile et ridicule en apparence. Dieu allait montrer d’une manière éclatante combien cet acte d’obéissance lui était agréable. Un beau matin les sœurs ouvrirent des yeux étonnés : la vie était revenue dans ce bois aride. Des feuilles naissantes apparurent et une belle vigne se développa donnant en temps voulu des raisins exquis.
« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime. » Ces paroles de Jésus avaient dans l’âme de Rita une résonance profonde. Son ardent désir de compatir à la Passion du Sauveur était si véhément qu’on la trouvait souvent en larmes devant la Croix, souffrant en son âme le martyre du Christ. Un jour qu’elle était prosternée devant l’image du crucifix, elle supplia Notre Seigneur de lui faire prendre part à ses douleurs et de ressentir en sa chair la souffrance de ses blessures.
Une épine de la couronne se détacha du crucifix et vint se planter violemment au front de Rita qui tomba évanouie. La plaie resta toujours ouverte, devint purulente et l’odeur nauséubonde qui s’en dégageait obligea Rita à se retirer dans une cellule complètement à l’écart de la communauté où elle resta quinze ans.
En 1450 le pape Nicolas V accorda l’indulgence du Jubilé que l’on gagnait en allant à Rome pour vénérer les reliques de la Passion du Seigneur. Rita sollicita la permission de se joindre a ses sœurs pour le pèlerinage, mais l’abbesse refusa à cause de la plaie au front. Rita demanda à Jésus la grâce de cicatriser sa blessure jusqu’à son retour de Rome, tout en conservant la douleur. La plaie se ferma et Rita put partir pour Rome.
Au retour Rita tomba gravement malade. Sa plaie, ouverte à nouveau, la faisait beaucoup souffrir, son estomac délabré par des jeûnes rigoureux ne pouvait supporter aucune nourriture, hormis l’hostie. Elle restait étendue tout le jour sur sa dure paillasse. Ses jours semblaient comptés. Elle resta pourtant ainsi entre la vie et la mort pendant quatre ans.
Ces longues années de douleurs intolerables achevèrent de graver en son âme les traits du divin crucifié.
Un jour qu’une de ses parentes venue la visiter lui demandait ce qui pourrait lui faire plaisir, Rita répondit : « Je voudrais que tu me cueilles une rose dans le jardin de mes parents. » Or, on était au cœur de l’hiver et la campagne était sous la neige. La cousine alla toute même à Rocca Poréna où, en pénétrant dans le jardin, elle aperçut sur les branches épineuses, une rose splendide qu’elle cueillit et qu’elle porta à la mourante. « Puisque tu as été si aimable, retourne au jardin et, cette fois, rapporte m’en deux ligues fraîches. » Sans plus d’hésitation la messagère sortit en courant et trouva sur le figuier du jardin les deux figues.
Rita attendait dans la paix l’heure de Dieu. Un jour sa chambre fut innondée de lumière où apparurent Jésus et Marie qui lui annoncèrent son départ vers le ciel. Trois jours après cette apparition, Rita, serrant sur son cœur le crucifix qu’elle avait tant aimé, rendit son âme à Dieu (22 mai 1457). Elle avait soixante-seize ans. Son visage émacié prit un air de beauté incomparable, l’horrible plaie se changea en un rubis éclatant, exhalant un suave parfum. Pour annoncer sa mort, les cloches du monastère s’ébranlèrent d’elles-mêmes, et la foule accourue défila devant sa dépouille glorieuse.
Vêtu de l’habit des religieuses de l’ordre de Saint-Augustin, le corps de Sainte Rita repose dans une châsse en verre en l’église de Cascia où il est encore intact. En 1628, lors des fêtes de la béatification, on vit les yeux s’ouvrir pendant quelques instants. D’autres fois, comme il est attesté par un document officiel du 16 mai 1682, conservé aux archives de Cascia, le saint corps se souleva jusqu’à toucher le plafond de la châsse. Souvent aussi, dit la bulle de canonisation, un parfum suave s’exhalait de la dépouille pour embaumer le monastère et les pélerins.
En 1900, le pape Léon XIII, après l’examen minutieux de nombreux miracles, plaça la bienheureuse Rita au nombre des saints et composa lui même un office spécial en son honneur.

[1] Cascia, aujourd’hui dans le diocèse de Norcia (depuis 1820), était alors dans le diocèse de Spolète.
[2] On ne peut dire avec une certitude absolue qui étaient les parents de sainte Rita. Si l’on ne peut répondre avec une certitude absolue à cette question, cela vient de ce que, à cette époque, les registres paroissiaux des baptêmes n’étaient pas tenus pour le bon peuple et que seule la naissance des très grands personnages laissait sa trace certaine dans des documents écrits du temps. Pourtant, comme Rita figurait, au couvent de Cascia, sous le nom de « Rita d’Antonio », nous sommes portés à croire que son père se nommait Antonio, ou Antoine. Dans un autre document écrit, non pour sa naissance mais, à la demande de son monastère, pour la constatation notariée d’un de ses nombreux miracles, après sa mort, on la nomme « Rita d’Antonio Mancini ». De nos jours encore, la maison où elle passa son enfance, en son village natal, est connue sous le nom de « Casa Mancini ». Dans le même document, la mère de sainte Rita est appelée « Amata ». Les parents de sainte Rita étaient de très modestes cultivateurs, en un pays de très pauvre culture.
[3] Lors de son mariage, sainte Rita avait probablement dix-huit ans, et l’on peut le situer en 1399.
[4] Si l’on considère que sainte Rita s’est mariée en 1399, l’assassinat de Ferdinando qui se situe dix-huit ans plus tard, serait donc en 1417.

Nazareth, un modeste village

21 mai, 2012

http://www.interbible.org/interBible/decouverte/archeologie/2011/arc_111223.html

23 décembre 2011

Nazareth, un modeste village

Nazareth, petit village de Galilée, n’a jamais été le théâtre de grands événements historiques. Sa mention est totalement absente de l’Ancien Testament. Les évangiles sont les premiers à en parler, comme ville propre de la famille de Jésus.
     La littérature juive des premiers siècles de l’ère chrétienne, y compris l’historien Flavius Josèphe, ne la mentionne pas davantage. Eusèbe de Césarée, au IVe siècle, le déclare encore comme un pauvre petit village de Galilée. Nos sources écrites révèlent qu’une église y est construite au VIe siècle. Le village connaîtra aussi les misères des guerres perses et arabes; il sera totalement rasé en 1263 par le sultan égyptien Baybars, pour être ensuite laissé en ruines jusqu’au XVIIe siècle.
      Avant la construction d’une nouvelle église sur l’emplacement de celle du XVIIe siècle, le père Bellarmino Bagatti, archéologue franciscain, étudia avec soin les diverses couches de débris jusqu’au roc naturel [1]. Les résultats importants de ces travaux ont paru voilà plusieurs années, et il est regrettable que le grand public n’en soit pas mieux informé.
     De la période israélite, on n’a pu repérer que quelques morceaux de céramique. Aucun village permanent n’était fondé en cet endroit, d’où le silence de l’Ancien Testament.
     À l’époque romaine, donc au temps de Jésus, le village ne comptait que quelques familles, accrochées à un mamelon rocheux et isolé, qui ne dépassait pas beaucoup le site de l’église de l’Annonciation et ses environs immédiats. On comprend alors l’intention des gens du village de vouloir jeter Jésus au bas de cet escarpement. Des grottes creusées dans ce roc et sous les maisonnettes servaient de caves, et même parfois de lieux d’habitation. Entre les maisons, on aménagea dans le même sol rocheux des silos à grains, des pressoirs, des citernes; quelques tombes ont été aussi repérées.

Plan de l’église byzantine
     C’est au-dessus d’une de ces petites maisons, munie de sa cave-grotte, que des chrétiens construisirent une première petite église. Il n’en reste que quelques fondations de murs, et de bons morceaux de sols en mosaïques, dont les motifs comportent des croix. Elle a donc dû être construite avant 427, car c’est à cette date que Théodose II défend de mettre des croix sur le sol des églises. Au cours du VIe siècle, une deuxième église plus grande fut bâtie au-dessus de la première (voir le plan). Elle présente le plan bien connu des architectes byzantins : un petit bâtiment à trois nefs précédé d’un grand atrium ou cour ouverte, à droite, une sacristie et des chambres, pour les prêtres.
     Cette église fut totalement détruite lors des invasions arabes au XIIe siècle. Les Croisés en bâtiront une autre, négligeant le plan de l’époque byzantine, sauf qu’ils la centrent davantage sur la maisonnette de l’époque romaine. Nous ne connaissions rien de cette dernière, car elle avait été rasée par Baybars en 1263; les fouilles en révélèrent le plan entier, de même que de très beaux chapiteaux, comparables à ceux de Vézelay.
     L’archéologie enrichit beaucoup notre connaissance de Nazareth; surtout, nous savons maintenant que, dès le IVe siècle, la tradition chrétienne y avait identifié une des maisonnettes de Nazareth comme celle de la famille de Jésus. Des invocations à Jésus et à Marie gravées sur des fragments de murs plâtrés d’une citerne peuvent remonter même au IIIe siècle.

[1] B. Bagatti, Excavations in Nazareth, Jérusalem, Franciscan Printing Press (Studium Biblicum Franciscanum 17), 1969.

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