Archive pour le 25 mai, 2012
HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – PENTECÔTE 2009
25 mai, 2012CHAPELLE PAPALE EN LA SOLENNITÉ DE PENTECÔTE
HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI
Basilique Vaticane
Dimanche 31 mai 2009
Chers frères et sœurs!
A chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie, nous vivons dans la foi le mystère qui s’accomplit sur l’autel, c’est-à-dire que nous participons à l’acte suprême d’amour que le Christ a réalisé par sa mort et sa résurrection. Le même et l’unique centre de la liturgie et de la vie chrétienne – le mystère pascal – assume ensuite, dans les différentes solennités et fêtes, des « formes » spécifiques, avec des significations différentes et des dons de grâce particuliers. Parmi toutes les solennités, la Pentecôte se distingue par son importance, parce qu’en elle se réalise ce que Jésus lui-même avait annoncé comme étant le but de toute sa mission sur la terre. En effet, alors qu’il montait à Jérusalem, il avait déclaré à ses disciples: « Je suis venu jeter un feu sur la terre et comme je voudrais que déjà il fût allumé! » (Lc 12, 49). Ces paroles trouvent leur réalisation la plus évidente cinquante jours après la résurrection, à Pentecôte, antique fête juive qui, dans l’Eglise, est devenue par excellence la fête de l’Esprit Saint: « Ils virent apparaître des langues qu’on eût dites de feu;… Tous furent alors remplis de l’Esprit Saint » (Ac 2, 3-4). Le feu véritable, l’Esprit Saint, a été apporté sur la terre par le Christ. Il ne l’a pas arraché aux dieux, comme le fit Prométhée, selon le mythe grec, mais il s’est fait le médiateur du « don de Dieu » et il l’a obtenu pour nous, par le plus grand acte d’amour de l’histoire: sa mort sur la croix.
Dieu veut continuer à donner ce « feu » à chaque génération humaine, et naturellement, il est libre de le faire quand et comme il le veut. Il est esprit, et l’esprit « souffle où il veut » (cf. Jn 3, 8). Mais il y a une « voie normale » que Dieu a choisie pour « jeter le feu sur la terre »: cette voie c’est Jésus, son Fils unique incarné, mort et ressuscité. A son tour, Jésus a constitué l’Eglise comme son Corps mystique, afin qu’elle prolonge sa mission dans l’histoire. « Recevez l’Esprit Saint » – a-t-il dit aux Apôtres au soir de la résurrection, en accompagnant ces paroles par un geste expressif: il a « soufflé » sur eux (cf. Jn 20, 22). Il a ainsi montré qu’il leur transmettait son Esprit, l’Esprit du Père et du Fils. Et maintenant, chers frères et sœurs, dans la solennité d’aujourd’hui, l’Ecriture nous dit encore une fois comment doit être la communauté, comment nous devons être, pour recevoir le don de l’Esprit Saint. Dans le récit, qui décrit l’événement de Pentecôte, l’auteur sacré rappelle que les disciples « se trouvaient tous ensemble en un seul lieu ». Ce « lieu » est le Cénacle, la « chambre haute », où Jésus avait tenu la Dernière Cène avec ses apôtres, où il leur était apparu, ressuscité; cette pièce qui était devenue pour ainsi dire le « siège » de l’Eglise naissante (cf. Ac 1, 13). Cependant, plutôt que d’insister sur le lieu physique, les Actes des Apôtres veulent faire remarquer l’attitude intérieure des disciples: « Tous d’un même cœur étaient assidus à la prière » (Ac 1, 14). Donc, la concorde entre les disciples est la condition pour que vienne l’Esprit Saint; et le présupposé de la concorde est la prière.
Chers frères et sœurs, cela vaut aussi pour l’Eglise d’aujourd’hui, cela vaut pour nous, qui sommes ici réunis. Si nous ne voulons pas que Pentecôte se réduise à un simple rite ou à une commémoration, même suggestive, mais qu’elle soit un événement actuel de salut, nous devons nous préparer dans une attente religieuse au don de Dieu, par l’écoute humble et silencieuse de sa Parole. Pour que Pentecôte se renouvelle à notre époque, il faut peut-être – sans rien ôter à la liberté de Dieu – que l’Eglise soit moins « essoufflée » par les activités et davantage consacrée à la prière. C’est ce que nous enseigne la Mère de l’Eglise, la Très Sainte Vierge Marie, Epouse de l’Esprit Saint. Cette année, Pentecôte tombe justement le dernier jour du mois de mai, où l’on célèbre habituellement la fête de la Visitation. Celle-ci fut aussi une sorte de petite « pentecôte » qui fit jaillir la joie et la louange des cœurs d’Elisabeth et de Marie, l’une stérile, et l’autre vierge, devenues ensemble mères grâce à une intervention divine extraordinaire (cf. Lc 1, 41-45). La musique et le chant qui accompagnent notre liturgie, nous aident eux aussi à être unanimes dans la prière, et c’est pourquoi j’exprime ma vive reconnaissance au chœur de la cathédrale et à l’orchestre de chambre (Kammerorchester) de Cologne. Pour cette liturgie, à l’occasion du bicentenaire de la mort de Joseph Haydn, a été choisie de façon très opportune son Harmoniemesse, la dernière des « Messes » composées par ce grand musicien, une symphonie sublime à la gloire de Dieu. A vous tous, venus pour cette circonstance, j’adresse mon salut le plus cordial.
Pour désigner l’Esprit Saint, dans le récit de Pentecôte, les Actes des Apôtres utilisent deux grandes images: l’image de la tempête et celle du feu. Il est clair que saint Luc a à l’esprit la théophanie du Sinaï, racontée dans les livres de l’Exode (19, 16-19) et du Deutéronome (4, 10-12.36). Dans le monde antique, la tempête était vue comme le signe de la puissance divine, devant laquelle l’homme se sentait subjugué et empli de crainte. Mais je voudrais souligner aussi un autre aspect: la tempête est décrite comme un « vent impétueux » et cela fait penser à l’air qui différencie notre planète des autres astres et nous permet d’y vivre. Ce que l’air est à la vie biologique, l’Esprit Saint l’est à la vie spirituelle; et de même qu’il existe une pollution atmosphérique qui empoisonne l’environnement et les êtres vivants, de même il existe une pollution du cœur et de l’esprit qui étouffe et empoisonne l’existence spirituelle. De même qu’il ne faut pas s’habituer aux poisons de l’air – c’est pourquoi l’engagement écologique représente aujourd’hui une priorité -, on devrait faire tout autant pour ce qui corrompt l’esprit. Il semble au contraire que l’on s’habitue sans difficulté à de nombreux produits qui polluent l’esprit et le cœur et qui circulent dans notre société – par exemple les images qui transforment en spectacle le plaisir, la violence ou le mépris de l’homme et de la femme. Cela aussi est une forme de liberté, dit-on, sans reconnaître que tout cela pollue, intoxique l’esprit, surtout des nouvelles générations, et finit ensuite par conditionner la liberté elle-même. La métaphore du vent impétueux de Pentecôte fait penser au contraire à quel point il est précieux de respirer un air propre, un air physique, avec les poumons, et un air spirituel, avec le cœur, l’air sain de l’esprit qui est l’amour!
L’autre image de l’Esprit Saint que nous trouvons dans les Actes des Apôtres est le feu. J’ai mentionné au début l’opposition entre Jésus et la figure mythologique de Prométhée, qui rappelle un aspect caractéristique de l’homme moderne. S’étant emparé des énergies du cosmos – le « feu » – l’être humain semble aujourd’hui s’affirmer comme un dieu et vouloir transformer le monde en excluant, en mettant de côté, ou même en refusant le Créateur de l’univers. L’homme ne veut plus être image de Dieu, mais de lui-même; il se déclare autonome, libre et adulte. Il est évident qu’une telle attitude révèle un rapport non authentique avec Dieu, conséquence d’une fausse image qu’il s’est faite de Lui, comme l’enfant prodigue de la parabole évangélique qui croit se réaliser lui-même en s’éloignant de la maison de son père. Entre les mains d’un tel homme, le « feu » et ses immenses potentialités deviennent dangereux: ils peuvent se retourner contre la vie et contre l’humanité elle-même, comme hélas le démontre l’histoire. Les tragédies de Hiroshima et de Nagasaki, dans lesquelles l’énergie atomique, utilisée à des fins belliqueuses, a fini par semer la mort dans des proportions inouïes, en représentent une mise en garde constante.
En vérité, on pourrait trouver de nombreux exemples, moins graves et pourtant tout aussi symptomatiques dans la réalité de chaque jour. L’Ecriture Sainte nous révèle que l’énergie capable de mettre le monde en mouvement n’est pas une force anonyme et aveugle, mais l’action de « l’Esprit de Dieu qui planait sur les eaux » (Gn 1, 2) au début de la création. Et Jésus Christ a « apporté sur la terre » non pas la force vitale qui l’habitait déjà, mais l’Esprit Saint, c’est-à-dire l’amour de Dieu qui « renouvelle la face de la terre » en la purifiant du mal et en la libérant de la domination de la mort (cf. Ps 103/104, 29-30). Ce « feu » pur, essentiel et personnel, le feu de l’amour est descendu sur les apôtres, réunis dans la prière avec Marie au Cénacle, pour faire de l’Eglise le prolongement de l’œuvre rénovatrice du Christ.
Enfin, une dernière réflexion tirée du récit des Actes des Apôtres: l’Esprit Saint vainc la peur. Nous savons que les disciples s’étaient réfugiés au Cénacle après l’arrestation de leur Maître et y étaient restés enfermés par peur de subir le même sort. Après la résurrection de Jésus, leur peur ne disparaît pas à l’improviste. Mais voilà qu’à Pentecôte, lorsque l’Esprit Saint se posa sur eux, ces hommes sortirent sans peur et commencèrent à annoncer à tous la bonne nouvelle du Christ crucifié et ressuscité. Ils n’avaient pas peur, parce qu’ils se sentaient entre les mains du plus fort. Oui, chers frères et sœurs, l’Esprit de Dieu, là où il entre, chasse la peur; il nous fait savoir et sentir que nous sommes entre les mains d’une Toute-Puissance d’amour: quoi qu’il arrive, son amour infini ne nous abandonne pas. C’est ce que montrent le témoignage des martyrs, le courage des confesseurs de la foi, l’élan intrépide des missionnaires, la franchise des prédicateurs, l’exemple de tous les saints, certains même adolescents et enfants. C’est ce que révèle l’existence même de l’Eglise, qui, en dépit des limites et des fautes des hommes, continue de traverser l’océan de l’histoire, poussée par le souffle de Dieu, et animée par son feu purificateur. Avec cette foi et cette joyeuse espérance, nous répétons aujourd’hui, par l’intercession de Marie: « Envoie ton Esprit, Seigneur, qu’il renouvelle la face de la terre ».
Dimanche de Pentecôte (B)- 27 Mai 2012
25 mai, 2012http://dimancheprochain.org/516-pentecote-b/#more-516
Dimanche de Pentecôte (B)- 27 Mai 2012
Abbé Jean Compazieu
En ce jour de la Pentecôte, nous célébrons avec tous les chrétiens du monde entier le don de l’Esprit Saint aux apôtres puis à toute l’Eglise. L’Evangile nous rappelle que la veille de sa mort, Jésus avait rassemblé les Douze. Il venait de leur annoncer qu’il allait les quitter ; mais il restera présent d’une autre manière et surtout, il leur enverra l’Esprit Saint. « Quand il viendra l’Esprit de Vérité, il vous guidera vers la Vérité toute entière »
Cette Vérité, c’est Jésus lui-même : C’est ce que nous lisons dans un de ses dialogues avec les disciples : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie, personne ne va au Père sans passer par moi. » Aller vers la Vérité, faire la Vérité, c’est aller à Jésus, c’est accueillir l’amour qui est en Dieu et nous laisser envahir par lui. C’est ce qui s’est passé au jour de la Pentecôte. Saint Luc nous parle d’un bruit pareil à celui d’un violent coup de vent. Les apôtres virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et qui se déposa sur chacun d’eux. Ils furent remplis de l’Esprit Saint. C’est comme un cyclone qui s’engouffre dans la maison et qui les pousse à sortir et à aller au devant des foules.
Et là, c’est un changement extraordinaire. Pierre ne mâche pas ses mots. Lui qui, 50 jours plus tôt avait renié Jésus parce qu’il avait peur, se met à faire un discours stupéfiant : « Ce Jésus que vous avez fait mourir sur la croix, Dieu l’a ressuscité… Et maintenant, il a répandu son Esprit dans le monde. » Et parmi tous ces gens qui écoutent Pierre, il y a ceux-là même qui ont réclamé la mort de Jésus. Mais là les apôtres n’ont plus peur. Désormais, rien ne peut les arrêter. Cette Bonne Nouvelle qu’ils annoncent, c’est comme un feu qui doit être répandu dans le monde entier.
Et depuis la première Pentecôte, l’Esprit Saint agit dans l’Eglise pour la guider « vers la vérité tout entière ». Bien sûr, il ne faut pas croire que tout ce qui a été fait dans l’Eglise l’a été sous l’impulsion de l’Esprit Saint. Il y a eu des divisions entre disciples du Christ, des massacres, des abus et même des scandales. Ces derniers temps, les médias nous ont rappelé des événements très douloureux. Le pape Jean-Paul II avait compris qu’il fallait demander pardon. Nous-mêmes, nous pouvons faire notre examen de conscience. Nous reconnaissons nos divisions, nos égoïsmes, toutes ces faiblesses qui ont toujours tendance à reprendre le dessus. Mais le Seigneur ne nous abandonne pas. Il continue à nous envoyer son Esprit Saint pour nous embraser de cet amour qui est en Dieu.
« Le Paraclet, l’Esprit Saint que le Père vous enverra en mon nom vous enseignera et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. » Comprenons bien, l’Evangile n’est pas un texte qu’il nous suffirait de répéter comme si le sens en était donné une fois pour toutes. Tout au long des siècles, le monde a beaucoup changé. Actuellement, il est marqué par les progrès de la technique et de la science. Mais en même temps, il vit des drames très douloureux à cause de la crise, du chômage, de la pauvreté. Les plus faibles y sont victimes de la violence et des injustices de toutes sortes.
C’est là que l’Esprit Saint intervient. Il résonne à chaque étape de notre histoire avec une perpétuelle nouveauté. C’est à sa Lumière que nous découvrons la Bible un peu comme une boussole qui nous montre la direction à prendre. Dans le contexte actuel, il vient nous rappeler que ce qui est premier ce n’est pas l’argent mais la personne. Ce qui fait la valeur d’une vie, ce n’est pas le rendement mais l’amour de tous les jours pour tous ceux et celles qui nous entourent. C’est ainsi qu’il nous remet en mémoire le grand commandement du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés »… « Tout ce que vous aurez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’aurez fait… » C’est ainsi que l’Eglise est appelée à avancer sous la conduite de l’Esprit qui lui inspire les exigences de la fidélité inventive.
Dans le récit de saint Luc, l’Esprit est comparé au vent. C’est une manière de dire qu’il est comme une énergie qui nous fait avancer et qui, à l’occasion, nous bouscule. Depuis 2000 ans, l’Eglise en a connu des tempêtes. Mais l’Esprit Saint n’a jamais cessé de souffler dans ses voiles. L’Eglise d’aujourd’hui a besoin de cette force pour reconstruire son unité. Sans lui, elle serait bien incapable d’évangéliser ce monde où les hommes ont tant de mal à se comprendre et à vivre la solidarité.
C’est avec l’Esprit Saint que nous pourrons retrouver et proposer les valeurs de l’Evangile à tous les hommes et femmes qui vivent sans perspective d’avenir. Dans une de ses lettres, saint Paul nous invite à marcher « sous l’impulsion de l’Esprit ». N’hésitons pas à lui demander son aide dans les décisions et les choix que nous avons à faire. Qu’il nous aide à retrouver la bonne route dans le maquis des sollicitations du monde actuel. Si la Pentecôte est une si grande fête, c’est parce qu’elle est l’exaltation du courage, de la vérité et de la joie. La seule vraie dévotion que nous pouvons avoir à l’égard de l’Esprit Saint c’est de lui dire « VIENS ! »
En ce jour, nous rendons grâce au Seigneur pour ce don de l’Esprit qu’il renouvelle à chaque célébration Eucharistique. Ouvrons nos esprits et nos coeurs à son souffle afin de mieux comprendre le message de Jésus, afin de mieux aimer nos frères et de leur annoncer l’Evangile avec un zèle que rien ne saurait intimider.