Archive pour le 5 janvier, 2012
Férie du temps de Noël (6 janv.), Saint Irénée de Lyon: « Fils d’Adam »
5 janvier, 2012http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20120106
Férie du temps de Noël (6 janv.)
Commentaire du jour
Saint Irénée de Lyon (v. 130-v. 208), évêque, théologien et martyr
Contre les hérésies, livre III, 22,3 ; 23,1 (trad. SC 211, p. 439s rev.)
« Fils d’Adam »
Luc présente une généalogie allant de la naissance de notre Seigneur à Adam et comportant soixante-douze générations ; il rattache de la sorte la fin au commencement et donne à entendre que le Seigneur est celui qui a récapitulé en lui-même toutes les nations dispersées à partir d’Adam, toutes les langues et les générations des hommes, y compris Adam lui-même. C’est aussi pour cela que Paul appelle Adam « la préfiguration de celui qui devait venir » (Rm 5,14), car le Verbe, Artisan de l’univers, avait ébauché d’avance en Adam l’histoire future de l’humanité dont se revêtirait le Fils de Dieu…
Le Seigneur, en devenant le Premier-né des morts (Col 1,18) et en recevant dans son sein les anciens pères, les a fait renaître à la vie de Dieu ; il est devenu le premier, le principe des vivants, parce qu’Adam était devenu le principe des morts… En commençant sa généalogie par le Seigneur, pour la faire remonter jusqu’à Adam, Luc indique que ce ne sont pas les pères qui ont donné la vie au Seigneur, mais lui au contraire qui les a fait renaître dans l’Évangile de vie. Ainsi également le nœud de la désobéissance d’Ève a été dénoué par l’obéissance de Marie, car ce que la vierge Ève avait lié par son incrédulité, la Vierge Marie l’a délié par sa foi.
Il était donc indispensable que, venant vers la brebis perdue (Mt 18,12), récapitulant une si grande histoire, recherchant son ouvrage modelé par lui-même (Lc 19,10; Gn 2,7), le Seigneur sauve l’homme qui avait été fait à son image et à sa ressemblance (Gn 1,26), c’est-à-dire Adam.
Lc 2 : les anges de Noël (biblique, texte et commentaire)
5 janvier, 2012http://www.bible-service.net/site/533.html
Lc 2 : les anges de Noël
(LE TEXTE)
2, 1 Or, en ce temps-là, parut un décret de César Auguste pour faire recenser le monde entier. 2 Ce premier recensement eut lieu à l’époque où Quirinius était gouverneur de Syrie.
3 Tous allaient se faire recenser, chacun dans sa propre ville; 4 Joseph aussi monta de la ville de Nazareth en Galilée à la ville de David qui s’appelle Béthléem en Judée, parce qu’il était de la famille et de la descendance de David, 5 pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte.
6 Or, pendant qu’ils étaient là, le jour où elle devait accoucher arriva; 7 elle accoucha de son fils premier-né, l’emmaillota et le déposa dans une mangeoire, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans la salle d’hôtes.
8 Il y avait dans le même pays des bergers qui vivaient aux champs et montaient la garde pendant la nuit auprès de leur troupeau. 9 Un ange du Seigneur se présenta devant eux, la gloire du Seigneur les enveloppa de lumière et ils furent saisis d’une grande crainte. 10 L’ange leur dit : »Soyez sans crainte, car voici, je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : 11 Il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur; 12 et voici le signe qui vous est donné: vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ».
13 Tout à coup il y eut avec l’ange l’armée céleste en masse qui chantait les louanges de Dieu et disait : 14 »Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour ses bien-aimés ».
15 Or, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, les bergers se dirent entre eux: »Allons donc jusqu’à Béthléem et voyons ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous a fait connaître ». 16 Ils y allèrent en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la mangeoire.
17 Après avoir vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant. 18 Et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les bergers. 19 Quant à Marie, elle retenait tous ces événements en en cherchant le sens. 20 Puis les bergers s’en retournèrent, chantant la gloire et les louanges de Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, en accord avec ce qui leur avait été annoncé.
Au fil du texte de Lc 2
(COMMENTAIRE)
L’enfant, les bergers et les anges
Voici donc le récit de la naissance de Jésus. La naissance elle-même occupe peu de place dans le texte. Elle est évoquée en un seul verset : Marie accouche d’un bébé, l’emmaillote et le couche dans une mangeoire. C’est tout.
Extrême sobriété, pas un mot de trop. Rien de spectaculaire : une mère et son bébé. On aimerait en savoir un peu plus. Où sont les autres personnages ? Où est Joseph ? Que fait-il ? L’auteur ne s’y intéresse pas. Il est pressé de nous emmener ailleurs, là où se déroule l’essentiel de son récit.
La scène principale se passe en effet dans un lieu indéterminé, mais à quelque distance de l’endroit qui a vu naître Jésus. Comme dans un théâtre, la scène s’éclaire d’une lumière venue d’en haut.
L’ange du Seigneur
Un Ange du Seigneur apparaît à des bergers. L’apparition de l’Ange du Seigneur n’est pas une nouveauté dans la Bible. Tout se déroule en effet selon un schéma classique : l’Ange du Seigneur arrive subitement, sa venue suscite le trouble, le messager divin annonce la naissance d’un enfant et il donne un signe. Luc connaît bien la Bible et les interventions de l’Ange du Seigneur.
Dans l’évangile de Luc c’est la troisième apparition de l’Ange du Seigneur. Il s’est déjà adressé à Zacharie, dans le Temple de Jérusalem, et à Marie dans sa maison de Nazareth. Dans les deux cas il s’agissait de Gabriel celui qui, dans le livre de Daniel, annonçait la venue du temps du salut. Ici, l’Ange du Seigneur n’est pas nommé pas plus que les destinataires du message. Ce sont des bergers anonymes.
L’enfant est pour vous
Le récit comporte une nouveauté. Tout ne se déroule pas selon le schéma convenu. L’annonce de la naissance, cette fois-ci, n’est pas destinée à de futurs parents, mais à des tiers. « Il ‘vous’ est né », dit l’Ange. Dieu donne cet enfant aux bergers, mais également à tout un peuple qui sera comblé de joie à l’annonce de la bonne nouvelle.
L’enfant, par ailleurs, n’est plus à venir, il est déjà là : « Il vous est né aujourd’hui », dit l’Ange. Nous entendons pour la première fois ce mot si important dans l’évangile de Luc que nous retrouverons lors du baptême de Jésus, lors de sa prédication inaugurale à Nazareth, lors de sa visite à Zachée et sur la croix, adressée à un des deux bandits : le mot « aujourd’hui ». Le temps du salut n’est plus à venir. Il est là, inauguré par la naissance de Jésus.
Les titres royaux
Le messager divin attribue maintenant l’enfant qui vient de naître une surabondance de titre royaux. Il est Christ, Seigneur et Sauveur.
Christ : c’est la traduction grecque du mot « Messie » qui désigne le roi attendu par le peuple juif issu de la descendance de David. Jésus justement est né dans le même village que David, à Béthléem.
Seigneur : autre terme royal utilisé pour désigner l’empereur. Mais c’est aussi le terme utilisé par la Bible grecque pour désigner Dieu.
Sauveur : encore un titre royal ou impérial. Les potentats de l’époque aimaient s’attribuer ce titre. Ils voulaient qu’on les appelle « bienfaiteurs » ou « sauveurs » de leur peuple. C’est également le mot que le livre des Juges emploie pour désigner les personnages providentiels que Dieu envoyait pour sauver son peuple en péril. C’est enfin un des mots qui désigne Dieu lui-même. Marie l’a employé dans son Magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit s’est rempli d’allégresse à cause de Dieu, mon Sauveur. »
Le hérault du roi
Dans le récit de Luc, l’Ange du Seigneur apparaît comme un hérault qui parcourt le royaume pour énumérer les titres d’un l’enfant royal destiné à monter sur le trône. Le texte n’indique pas le lieu où apparaît l’Ange. Il précise seulement que c’est « dans le même pays », celui de Marie et de Joseph, le descendant de David. Il s’adresse à la population du pays, qui attend un roi envoyé par Dieu. Ce roi vient de naître. Les bergers, qui font partie des basses classes de la société, sont les premiers à en être avertis. C’est normal, le roi vient plus particulièrement pour eux. Plus tard le Seigneur Jésus dira : « Heureux, vous les pauvres : le Royaume de Dieu est à vous. » et également : « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout petits. »
Une intrigue qui se noue
Le lecteur de l’évangile est intrigué par cette déclaration solennelle. Que signifient tous ces titres ? Comment l’enfant va-t-il régner ? À la manière de César Auguste et de son représentant Quirinius que le texte vient d’évoquer ? À la manière du roi David, ancêtre de Joseph ? Comment va-t-il monter sur le trône ?
D’une façon plus pratique, le lecteur se demande comment les bergers vont trouver l’enfant. L’Ange du Seigneur ne répond à aucune de ces questions, mais, comme dans tous les autres récits d’annonces de naissances, il donne un signe. Il parle d’un enfant couché dans une crèche. Le signe donné par l’Ange est ambigu. Il semble en totale contradiction avec le message qui vient d’être donné. Comment la pauvreté et la faiblesse de l’enfant peuvent-elles être des signes royaux ?
Placé au début de l’évangile, ce message angélique joue un grand rôle. Il intrigue et invite à lire la suite du texte. Quelle va être la destinée de cet enfant royal couché dans une mangeoire ? La lecture de l’évangile, et plus particulièrement le récit de la longue marche de Jésus vers Jérusalem permettra petit à petit de comprendre le paradoxe. Mais le sens ultime de la royauté de Jésus ne pourra être comprise qu’après sa mort et sa résurrection.
Le choeur de l’armée céleste
Le récit continue avec l’arrivée d’un groupe nombreux qui occupe tout l’espace : l’armée céleste . Son rôle est semblable à celui d’un choeur dans un théâtre antique qui intervient à la fin d’une scène pour en tirer la leçon. L’armée céleste chante la louange de Dieu et la paix pour « les hommes de bienveillance ». Nouvelle expression ambiguë. De quelle bienveillance s’agit-il ? De celle des hommes ou de celle de Dieu ? S’agit-il des hommes de bonne volonté (selon les traductions anciennes) ou des hommes objets de la bonne volonté de Dieu (selon les traductions récentes) ? Pour formuler les choses différemment : Qu’est-ce qui est premier : la bonne disposition du coeur des hommes pour accueillir le salut de Dieu ou l’amour gratuit de Dieu pour les hommes ? Autres questions : de quels hommes s’agit-il ? Du peuple élu, objet de la promesse ou de tous les hommes de la terre ? Et enfin : en quoi consiste cette paix ? Est-elle intérieure ou extérieure, pour aujourd’hui ou pour demain ?
La suite de l’évangile apportera progressivement des réponses à ces questions. Comme le message de l’Ange du Seigneur, le chant de l’armée céleste s’adresse au lecteur pour susciter son intérêt. Il formule les questions essentielles, celles que la communauté chrétienne des origines se pose, celles qui continuent à se poser à notre foi.
Les nouveaux « anges »
Quand les anges sont partis, les bergers, qui jusqu’à présent semblaient figés comme des santons, s’animent à leur tour. Ils s’encouragent mutuellement et vont voir ce qui vient de s’accomplir. Ils y vont en hâte et annoncent ce qui leur a été révélé. Ceux qui les entendent sont étonnés. Nous retrouverons ce même étonnement chez Pierre, à la fin de l’évangile, quand, au matin de Pâque, les femmes lui transmettront le message des anges.
Les bergers maintenant s’en retournent pleins de joie. Ils ont pu constater que les paroles de Dieu se réalisaient. Ils sont devenus des « anges » à leur tour, c’est-à-dire des messagers et des célébrants. Comme l’Ange du Seigneur, ils ont annoncé un message de bonheur. Comme l’armée céleste, ils chantent maintenant les louanges de Dieu. Ils préfigurent le rôle de la communauté chrétienne chargée d’annoncer à tous les hommes la bienveillance de Dieu qui s’exerce par le Seigneur Jésus, notre seul Sauveur.
Joseph STRICHER
Article paru dans Les Dossiers de la Bible n° 70 (novembre 1997) p. 4-6
LE « MYSTÈRE DE NOËL » SELON EDITH STEIN, PAR ERIC DE RUS
5 janvier, 2012http://www.zenit.org/article-29788?l=french
LE « MYSTÈRE DE NOËL » SELON EDITH STEIN, PAR ERIC DE RUS
La naissance du Sauveur et son actualité
ROME, jeudi 22 décembre 2011 (ZENIT.org) – « Noël est le début d’une aventure qui n’est autre que celle de la grâce en nos vies »: cette lecture du « Mystère de Noël » et de son actualité pour nous, à l’école d’Edith Stein, la sainte carmélite juive – Thérèse bénédicte de la Croix -, assassinée à Auschwitz en 1942, a été réservée aux lecteurs de ZENIT pour Noël par Eric de Rus, professeur agrégé de philosophie dans l’enseignement catholique (Rueil Malmaison).
Ecrivain, il a publié deux recueils de poésie ainsi que des essais consacrés à la pensée d’Édith Stein et à la démarche artistique.
« Le Mystère de Noël »
En 1931, à Ludwigshafen (Allemagne), la philosophe catholique Edith Stein prononça une conférence sur le thème du Mystère de Noël. Cette méditation nous ouvre à la profondeur inouïe du mystère de la naissance du Sauveur et à son actualité dans nos vies et pour le monde.
Edith Stein nous situe immédiatement dans la contemplation de « l’Enfant qui apporte la paix à la terre ». Mais ne nous y trompons pas : l’étoile qui luit, haute et pure dans la nuit de Noël, nous signifie que la venue de la Lumière parmi nous n’est pas immédiatement reçue en raison de l’épaisseur du péché. Noël c’est ce grand mystère de l’Amour semé dans l’obscurité, et finalement victorieux ! « C’est là une vérité difficile et grave, que l’image poétique de l’Enfant dans la crèche ne doit pas nous masquer. »
Edith Stein déchiffre l’éclat de l’étoile suivie par les bergers dans la nuit comme un appel qui doit se frayer douloureusement son chemin dans nos cœurs. Car Noël est déjà l’écrin de l’appel du Sauveur que les disciples entendront résonner : « Suis-moi ». Et d’ajouter : « Il le dit aussi pour nous, et nous place devant le choix entre lumière et ténèbres. »
En d’autres termes, Noël est le début d’une aventure qui n’est autre que celle de la grâce en nos vies. Edith Stein a appris à l’école des maîtres du Carmel, Thérèse de Jésus et Jean de la Croix en particulier, que la grâce veut se déployer en nous comme une semence de vie qui nous transforme en nous faisant communier à la Vie même de Dieu. Et c’est précisément en Jésus que s’accomplit ce mystère, Lui dont nous devenons, par le baptême, les membres vivants de son Corps qui est l’Eglise.
C’est pourquoi la suite de la méditation d’Edith Stein insiste sur les signes fondamentaux d’une existence humaine unie à Dieu : l’amour de charité envers le prochain, – « qu’il soit parent ou non, que nous le trouvions sympathique ou non, qu’il soit ou non moralement digne de notre aide » –, et la remise de notre volonté entre les mains du Père. Faire la volonté de Dieu c’est « mettre nos mains dans celles de l’Enfant divin » à l’imitation de la Vierge Marie, de saint Joseph et de tous les saints. Dans sa contemplation de l’Enfant-Dieu Edith Stein nous entraîne sur les chemins d’une véritable configuration au Christ et au mystère du salut. Car accueillir l’Enfant-Dieu c’est participer à la disposition fondamentale du Cœur du Christ tout entier amoureusement remis au Père, comme son enfant bien-aimé, dans une confiance « inébranlable ».
Par conséquent, l’enjeu de Noël est de laisser la grâce « pénétrer de vie divine toute une vie d’homme ». Ce qui suppose d’« être chaque jour en relation avec Dieu » par l’écoute de sa parole, par la prière intérieure et liturgique, par la vie sacramentelle. A l’école de l’Enfant-Dieu nous apprenons à vivre en « enfant de Dieu » afin de « naître à l’immensité de la vie du Christ. » Tel est « le chemin ouvert à chacun de nous, à l’humanité tout entière. »
Dans cette conférence d’Edith Stein nous retrouvons, encore et toujours, la pédagogue et phénoménologue qui éduque notre regard intérieur. Ici il s’agit de déchiffrer sous l’apparente insignifiance de la crèche la grandeur d’un immense appel : celui de prendre part au « grand œuvre du Rédempteur ».
Si Noël est la fête de la joie c’est sans doute parce que la joie est un mouvement qui nous tire hors de nous-mêmes. La contemplation de Jésus dans la crèche réalise précisément cette sortie de nous-mêmes. L’émerveillement devant la beauté cachée du Sauveur nous libère de nous-mêmes et nous ouvre au monde qui attend que lui nous annoncions par nos vies « la Lumière éternelle qui est Amour et Vie ».
Edith Stein avait une amie très estimée en la personne de la poétesse et résistante allemande Gertrud von le Fort. De bien belle manière la poétesse résume cet appel que Noël fait tinter au cœur de chaque chrétien : « Chantez-le dans l’attente de l’aube, chantez-le doucement, doucement à l’oreille des ténèbres du monde ! ».
Eric de Rus