Archive pour le 19 novembre, 2011
La résurrection dans l’Ancien Testament
19 novembre, 2011du site:
La résurrection dans l’Ancien Testament
Les plus anciennes, et les seules preuves incontestées en faveur de la résurrection des morts dans tout l’Ancien Testament de langue hébraïque datent du 2 ème siècle (environ 165-164 av. J.-C.) de l’époque de la résistance à l’hellénisation, que le Séleucide Antiochius IV Epiphane essayait d’imposer aux Juifs (interdiction du culte juif, adoration du dieu de l’Empire, Zeus Olympien, et même de l’Empereur dans le Temple). On sait que cette rigoureuse politique d’hellénisation d’Antochius provoqua bientôt, sous la conduite des Maccabées, la révolte du peuple qui finalement s’acheva par la victoire du judaïsme.
Dans cette crise de l’époque des Maccabées, l’auteur d’apocalypse avait, pour mettre en garde et pour interpréter les signes des temps, pris la place des prophètes des VIII eme – VI eme siècles, époque de la crise également. Tel fut le livre de Daniel, dans lequel la prédication apocalyptique, après plusieurs essais chez les prophètes, atteignit sa pleine dimension. De nos jours, on ne devrait plus mettre en doute que le Livre de Daniel, vu sa langue, sa théologie (angéologie tardive) et sa composition sans unité , n’est en aucune façon le fait d’un visionnaire à la cour babylonienne du VI ème siècle, mais plutôt celui d’un auteur du II ème siècle, justement du temps d’Antochius IV Epiphane. En ce qui concerne la résurrection, il se [123] trouve au dernier chapitre de ce Livre de Daniel (originellement de caractère apocalyptique) un passage qui a été vraisemblablement influencé par des idées perses : » En ce temps se lèvera Michel, le grand prince qui se tient auprès des enfants de ton peuple. Ce sera un temps d’angoisse tel qu’il n’y en aura pas eu jusqu’alors depuis que nation existe. En ce temps-là ton peuple échappera : tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre. Un grand nombre de ceux qui dorment au pays de la poussière s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les, autres pour l’opprobre, pour l’horreur éternelle. Les doctes resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui ont enseigné la justice à un grand nombre, comme les étoiles, pour toute l’éternité. » (Dan 12, 1-3)
Il ne fait pas de doute que, en ces temps de persécution – pour l’auteur du Livre de Daniel justement, temps de détresse avant la fin des temps, où hommes, femmes et enfants ont été cruellement persécutés en raison de leur attachement à la Loi -, le vieux problème de la juste rétribution se soit posé avec beaucoup plus d’acuité que pour les générations antérieures, du temps des Ptolémées et de Qohélet. Devant la fidélité de tant de martyrs à leur foi – placés devant l’alternative du reniement ou de la mort -, on devait à plus forte raison se demander : l’injustice se répare t-elle seulement en cette vie ? Quel peut être le sens de la mort des martyrs, quand ceux qui sont fidèles à leur foi n’obtiennent plus de récompense ni en cette vie-ci (ils sont déjà morts), ni dans une autre vie (qui n’est qu’une existence fantomatique) ? Où donc est Dieu avec sa justice ? La réponse de l’auteur d’apocalypse est la suivante : à ce temps de détresse succèdera le temps de la fin, où Israël sera sauvé, et – voilà la nouveauté – où les morts ressusciteront : les témoins de leur foi et leurs persécuteurs. Car les morts, qui ont dormi au « pays de la poussière » , se réveilleront et reviendront à la vie en tant que personnes humaines complètes (et non pas seulement en tant qu’âmes) dans cette vie d’ici-bas qui désormais durera éternellement, sans fin : pour les sages, sous forme d’une vie éternelle ; pour les autres, sous forme d’un éternel opprobre – même si cela n’est pas précisé.
Hors de la Bible hébraïque, dans l’ Ancien Testament grec (des Septante), on trouve d’autres témoignages de cette espérance en la [224] résurrection si tardivement apparue, en particulier dans le Second Livre des Martyrs d’Israël qui contient les plus anciens récits de martyres juifs, modèles des Actes de martyres dans l’Eglise. Et précisément dans le célèbre septième chapitre (…)
A la différence du Livre de Daniel, il n’est manifestement pas question d’une résurrection « eschatologique », d’une [125] résurrection terrestre à la fin des temps, mais – peut-être parce que l’attente prochaine de Daniel n’avait pas été comblée par le récent passé – d’une résurrection transcendante, d’une résurrection céleste d’avant le temps : on pense là à une admission ou à une élévation au ciel après la mort – idée qui, beaucoup plus tard, devait avoir une importance capitale dans la foi en Jésus de Nazareth et en sa résurrection. (…)
Cependant, l’argumentation en faveur de la résurrection atteint son point culminant avec les deux discours de la mère qui est présentée davantage comme philosophe que comme mère (…) [126] A la différence de ce qui se passe chez les Egyptiens, où la momie doit rester absolument intacte pour la vie éternelle, la mutilation corporelle et l’anéantissement physique eux-mêmes ne constituent pas des limites pour le Dieu d’Israël. Ces textes de l’Ancien Testament le montrent : la croyance à la résurrection des morts est une conséquence de la foi au Créateur. (…) Pour l’Ancien Testament, en effet, ce n’est pas en raison de son essence spirituelle et de son caractère divin qu’une âme humaine survit, mais c’est plutôt l’homme tout entier qui est ressuscité par l’action de Dieu : par le miracle d’une nouvelle création dont la raison est la fidélité de Dieu à sa créature. (…)
[128] Nous ne pouvons oublier qu’une part non négligeable des Juifs, fidèles à la Loi, n’acceptaient pas alors la croyance en la résurrection et ne l’acceptent pas encore aujourd’hui. Contrairement au second Livre des Martyrs d’Israël, le premier ne dit mot d’une résurrection des morts ; les héros, que sont les Maccabées, ne récoltent de leur mort prématurée que la gloire et l’honneur et ils continuent de « vivre » uniquement dans le souvenir du peuple. Au temps de Jésus de Nazareth encore, un siècle et demi plus tard, et tout à fait dans le même sens, le groupe des Sadducéens refuse l’idée de résurrection.
Le Christ, Roi de l’univers (20 novembre 2011) – (Biblique)
19 novembre, 2011du site:
http://www.bible-service.net/site/436.html
Le Christ, Roi de l’univers (20 novembre 2011)
Le Christ-Roi, c’est le Fils de l’homme qui revient en gloire pour juger tous les hommes. Il est présenté comme un Roi qui sépare ses sujets, comme on sépare les brebis des chèvres, selon un seul critère : ce qu’ils auront fait ou pas aux “ petits ” (évangile). Le prophète Ézékiel, comme le psaume 22 avaient déjà utilisé cette image de la brebis qui est veillée par le berger (première lecture). Paul, lui, évoque également la fin des temps comme une récapitulation de tout le créé, dans le Christ (deuxième lecture).
• Ézékiel 34,11-12.15-17
Le prophète Ézéchiel, pour expliquer la sollicitude de Dieu pour son peuple, utilise l’image parlante du berger, le bon Pasteur veillant sur ses brebis. Or, lorsque Ézéchiel parlait ainsi, la royauté en Israël était déchue et le peuple était soumis à la déportation, loin de sa terre, se croyant abandonné par son Seigneur.
Non, ce n’est pas vrai, répond Ézékiel. Même si la réalité semble dire le contraire, Dieu n’a pas abandonné son peuple. Bien au contraire, il est comme un berger qui veille avec beaucoup de tendresse sur ses brebis, qui les protège de tout danger, qui va les chercher lorsqu’elles se sont égarées dans le brouillard ou l’obscurité, qui les fait paître là ou la nourriture est abondante, qui soigne celles qui sont blessées, etc. Nous avons donc déjà dans l’Ancien Testament, quelques siècles avant Jésus, une description allégorique de Dieu comme Bon Pasteur, image que les chrétiens reprendront pour décrire Jésus, le Bon berger, qui veille sur ses brebis, et qui n’hésite pas à laisser le troupeau pour aller chercher celle qui s’est égarée. Jésus témoignera d’un Dieu plein de tendresse à l’égard de ses enfants, non seulement par son enseignement, mais aussi dans sa vie même.
• Psaume 22
À la suite du prophète Ézékiel, le psalmiste utilise l’image du berger pour décrire ce que Dieu réalise pour l’homme. Les images sont rafraîchissantes, apaisantes. Si nous regardons comment Dieu agit envers l’homme, nous relevons d’abord 7 actions : il est mon berger, il me fait reposer, il me mène vers les eaux tranquilles, il me fait revivre, il me conduit par de justes chemins, il est avec moi, son bâton me guide et me rassure. Voilà pour le berger, puis il y a un changement d’image. De berger, le Seigneur est comparé à un hôte. Là encore, deux actions : il prépare la table pour moi, il répand le parfum sur ma tête. Neuf attitudes de Dieu envers l’homme que je suis, pour prendre soin de moi. Et pourquoi fait-il tout cela ? Gratuitement, simplement “ pour l’honneur de son nom ”.
• 1 Corinthiens 15,20-26.28
Le chapitre 15 de la lettre aux Corinthiens est un long développement de Paul sur la résurrection, sur la résurrection du Christ, gage de la nôtre.
Paul insiste beaucoup pour faire admettre à des Grecs que « si les morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus, alors, n’est pas ressuscité. » (15,16).
Paul continue ici en s’appuyant sur cette affirmation : le Christ est bien ressuscité. Il est ainsi le premier de l’humanité nouvelle, nouvel Adam. Le pouvoir que le Père lui a donné est un pouvoir royal, celui de constituer un peuple et de marcher à sa tête. Mais au lieu d’être un pouvoir conquis, c’est un pouvoir donné, un pouvoir absolu donné par le Père à son Fils, au nom de l’obéissance du Fils et de son sacrifice. La croix est vraiment le trône du Christ comme Roi. Le royaume nouveau du Christ c’est la plénitude de l’union dans l’amour du Père : « Tout en tous ».
• Matthieu 25,31-46
Ce texte, qu’on appelle improprement “ Le jugement dernier ” est précédé, dans l’Évangile de Matthieu, de plusieurs textes consacrés à expliquer comment se passera, pour ceux qui ont suivi Jésus, la rencontre définitive avec Jésus et son Père : par exemple la parabole dite des vierges sages ou des vierges folles, la parabole des talents des talents. Le texte d’aujourd’hui parle de la rencontre finale avec Jésus de tous ceux qui ne l’ont pas connu ici-bas, pour quelque raison que ce soit. En effet, Jésus parle du moment où seront rassemblées devant lui “ toutes les nations ” ; et, dans l’Évangile, l’expression “ les nations ” désigne toujours les nations païennes.
Parmi ces nations, Jésus établira deux groupes. À sa droite, c’est-à-dire à la place d’honneur, il placera les brebis et à sa gauche, les chèvres. Dans toute l’antiquité, en en particulier dans la Bible, la brebis est le symbole de la vertu : non agressive, sans défense, soumise, elle a toujours besoin de soins et d’attention. Dans le premier Testament, la relation affectueuse entre le berger et sa brebis est constamment utilisée comme image de la relation entre Dieu et son Peuple (cf. première lecture et psaume). La chèvre, par opposition, est agressive, maussade, combative, désobéissante.
Jésus, dans cet évangile distingue deux groupes parmi les païens qui ne l’ont pas connu ici-bas et qui n’ont pas eu l’occasion de connaître sa Révélation dans la Bible. Parmi eux, les uns hériteront le royaume des cieux et les autres iront au châtiment éternel. La différence ne sera pas fondée sur leur attitude à l’égard de Dieu, mais sur leur attitude à l’égard du prochain. Jésus s’identifie sans cesse à ces “ petits ”.
Homélie 34e dimanche ordinaire A, Christ Roi de l’Univers
19 novembre, 2011du site:
Homélie 34e dimanche ordinaire A, Christ Roi de l’Univers
Ez 34, 11-12, 15-17 ; 1 Co 15, 20-26.28 ; Mt 25, 31-46
Rappelez-vous le film de Danis Tanovic : « L’enfer ». Un enfer sur terre. Avec un casting d’enfer, dont Marie Gillain et Emmanuelle Béart. Un critique le décrivait plein de symbolismes. D’ailleurs, Satan, l’Enfer et leurs horreurs, refont surface. De nombreux collégien(ne)s se laissent même séduire par la mouvance satano-gothique musicale et vestimentaire, mais qui véhicule aussi des idées mortifères.
Parmi des œuvres byzantines séculaires, on voit également l’archange Michel pesant les âmes des défunts sur une balance. Tandis qu’un horrible démon tente de la faire pencher de son côté. Aux tympans de la cathédrale d’Autun, on découvre les damnés, entassés dans un chaudron, et un diable qui les pousse de sa fourche vers l’huile bouillante. Des scènes inspirées par des textes de l’Apocalypse, provenant eux-mêmes du livre de Daniel, deux siècles plus vieux, à une époque de persécution, de détresse, et donc d’horreur.
Jésus et les évangélistes ont évidemment utilisé images et traditions de leur culture. Ils se sont notamment inspirés d’Ezéchiel, qui, six siècles plus tôt, avait connu l’exil à Babylone. A cette époque, les rois des peuples nomades étaient considérés comme des bergers. Ezéchiel a connu de très mauvais pasteurs, qui ont conduit leur pays à la ruine. Une royauté guerrière. Les brebis ont été malmenées, dépouillées, amenées en captivité ou condamnées à fuir. Comme aujourd’hui, il y a des millions d’immigrés traumatisés, sans papiers, ni argent, ni abris.
Mais que faire ? Susciter un autre esprit. Changer de régime. D’où, l’avertissement du prophète : » Maintenant, dit le Seigneur, j’ irai moi-même à la recherche de mes brebis, et je veillerai sur elles « . Non pas pour remplacer les gouvernements en place, mais pour établir entre Dieu et ses enfants des relations de service et d’amour, de justice et de paix, de tendresse et de sollicitude. Pour le prophète, le vrai pouvoir se traduit en service. D’abord, pour les plus faibles. Plus tard, on dira que la royauté de Dieu s’incarne en Jésus Christ par des gestes expressifs, tel celui du lavement des pieds.
C’est ce que nous retrouvons dans la fresque du » Jugement universel « , brossée par Matthieu.
Nous serons jugés. Nous le sommes même chaque jour, sur le service d’amour vrai, rendu à nos semblables, dont les plus vulnérables et les plus délaissés. Mais Matthieu ne s’adresse plus au public d’Ezéchiel, ni à celui de Jésus. Nous sommes dans les premiers temps de l’Eglise. Les chrétiens attendent le retour du Christ. C’est pour très bientôt. Demain peut-être. Donc, plus la peine de chercher du travail, ni de se marier, ni de faire des projets. D’où, la tentation pour certains de se croiser les bras en attendant, sans rien faire. Conséquence ? On se désintéresse des problèmes concrets de la vie courante, personnelle, sociale, culturelle ou politique. Au risque de se contenter d’une spiritualité désincarnée et passive. Réactions de Matthieu et de Paul : De grâce, réveillez-vous, revenez sur terre ! Et regardez bien autour de vous.
Oui, le Christ reviendra. A la fin des temps. Mais il est toujours présent. On peut même le croiser sans pour autant le voir, surtout parmi les petits, les souffrants, les marginalisés. Et c’est chaque jour que le Christ est témoin et juge de nos comportements vis-à-vis d’autrui, proche ou lointain. Notamment, mais pas seulement, ceux et celles qui souffrent de la faim, de l’injustice, de la solitude ou de la prison, de la haine, de la maladie, du refus de pardon, du mépris ou de l’intolérance. Le Christ se reconnaît en eux. Tout ce qui est fait ou pas à leur égard, le touche donc personnellement.
N’allons pas croire pour autant que les brebis représentent les bons juifs ou les bons chrétiens, tandis que les boucs seraient païens, incroyants et membres d’autres religions. La distinction se fait avec d’autres critères. Il ne suffit pas de proclamer sa foi au Christ, ni de l’adorer dans un ostensoir d’or. Le visage de Dieu se découvre aussi dans celui de tous nos prochains, et dans bien des endroits où on ne le cherche guère. Or, n’importe qui peut servir le Seigneur sans même connaître son nom. Le premier temple de Dieu, c’est l’humanité souffrante. D’où l’importance des actions humanitaires et des comportements ordinaires qui, de fait, révèlent l’Evangile. Accomplir ces gestes, c’est être vraiment dans le réel, dans la vie, pour y rester définitivement. Par contre, les omettre c’est, d’une certaine manière, comme l’écrivait un moine, « manquer le train et risquer de ne jamais arriver à destination ».
Lors d’un congrès eucharistique sur le thème « Pain rompu pour un monde nouveau », Helder Camara expliquait qu’il existe un lien très fort entre l’eucharistie et la construction d’un monde meilleur. Il prit l’exemple d’un sacrilège : Tabernacle fracturé, ciboire renversé, hosties jetées dans la boue. Lors d’une célébration de réparation, il dit aux paroissiens : « Frères et sœurs, nous sommes aveugles. La découverte des hosties dans la boue nous a bouleversés, alors que chez nous le Christ dans la boue est un phénomène quotidien. C’est tous les jours que nous le rencontrons dans les taudis qui n’ont plus rien d’humain. Présent dans l’eucharistie, le Christ connaît une autre présence réelle. Dans la misère humaine »… C’est ce que vient de nous rappeler l’évangile.
Il nous reste maintenant à ruminer la leçon.
P. Fabien Deleclos, franciscain (T)
1925 – 2008