Archive pour le 5 septembre, 2011
Petite introduction à la foi : méditations sur le Symbole des apôtres (Bruno Forte)
5 septembre, 2011du site:
http://www.esprit-et-vie.com/article.php3?id_article=1535
Bruno Forte
Petite introduction à la foi : méditations sur le Symbole des apôtres
P. Pierre Jay, p.s.s.
Traduction de l’italien par Simone Rouers, Paris, Bayard Éd., 2006. – (12×21), 176 p., 14,90 €.
Esprit et Vie n°150 – mai 2006 – 2e quinzaine, p. 25-26.
Aujourd’hui, à la Sorbonne, deux statues se font face : l’une de Bossuet, l’autre de Gerson. Vénéré comme un saint, célébré et par le pape Benoît XIV et par saint François de Sales, Gerson, chancelier en Sorbonne, termina sa vie agitée et féconde à Lyon où il réunissait des enfants pour leur faire le catéchisme. Ce souvenir m’a été suggéré par la lecture de ce petit volume.
Les commentaires du Symbole des apôtres abondent. Chaque année, plusieurs sont imprimés et nous arrivent. Les pasteurs dans l’Église en sont souvent les auteurs, ce qui montre la conscience vive qu’ils ont de leur charge pastorale.
Voici donc le dernier en date. L’auteur est connu, du moins était connu jusqu’alors comme l’un des grands théologiens italiens. Aujourd’hui il est archevêque, nommé en juin 2004 par Jean-Paul II. Son petit commentaire du Credo mérite d’attirer l’attention. Il apparaît exceptionnel à plus d’un titre.
Exceptionnel par son volume. Il tient les promesses de l’intitulé « petite introduction ».
Il l’est plus encore par son contenu. L’auteur nous avait prouvé, dans ses publications antérieures, qu’il était en phase avec les idées et les besoins de notre époque. Il montre ici qu’il peut dialoguer en toute simplicité avec le monde et les hommes de ce temps.
Il est sûr qu’un livre n’est jamais adapté à tous et à chacun. Être adapté à tous serait ne l’être à personne. Mais cette fois il faut souligner l’amplitude des lecteurs potentiels. « Mon ambition : dire la foi des chrétiens, en termes simples et essentiels aux croyants et aux non-croyants. » (p. 9.) Pari tenu !
Plusieurs caractères apparaissent à la lecture. La simplicité et la profondeur de la présentation. La richesse du contexte biblique. L’auteur, il l’a fait dans d’autres livres, a joint à chaque chapitre une prière, comme un tremplin pour la prière personnelle du lecteur.
Cela étant dit, que citer ? On ne le fera que pour mettre en appétit sur des questions qui habitent aujourd’hui de nombreuses consciences, chrétiennes on non. Alors, un peu au hasard : « Parler de Dieu, c’est raconter l’aventure de l’amour. » (p. 13.) « Pas de sycomore qui nous ait entendu. Pas de montagne qui se soit déplacée. Où est la foi sur terre ? Dans la douleur qui déchire des êtres sans défense, qui meurent en invoquant Dieu. » (p. 21.) « Père tout-puissant. D’où vient en lui ce « courage » d’aimer ? » (p. 35.)
Peut-être pourrait-on regretter la présentation du Saint-Esprit. Je dois, bien sûr, partir du texte français puisque je n’ai pas l’original italien. L’auteur écrit : « Le Consolateur actualise l’œuvre du Christ, il la rend présente et agissante dans la diversité de l’histoire des hommes. » (p. 89.) Ne pourrait-on dire que l’Esprit répandu, c’est l’œuvre du Christ rédempteur ? « Mis en possession de l’Esprit, il a répandu ce que vous voyez. » C’est parce que l’Esprit est répandu que le Christ est manifesté comme le Seigneur ressuscité.
La troisième partie du Credo, c’est la résurrection du Christ à l’œuvre dans le monde : Église, pardon, résurrection de la chair, vie éternelle qui sont à la fois le présent et le futur de l’humanité. Déjà là et pas encore. Cette dimension est encore trop absente des mentalités occidentales qui, faute de ce soubassement, se précipitent sur la réflexion théologique : l’Esprit est l’amour personnel. En un mot, on dépend peut-être trop des recherches sur la Sainte Trinité en ne profitant pas suffisamment des données du Nouveau Testament.
Il me souvient des argumentations d’un professeur de jadis qui, pour démontrer la supériorité d’Aristote sur Platon, disait de ce dernier : « Ce n’est qu’un poète. » Depuis la phrase de Pessoa a éclairé le chemin des lecteurs : « La littérature est la preuve que la vie ne suffit pas. » Comment dire d’un archevêque qu’il est aussi poète ? Et la poésie donne à pressentir l’au-delà des mots sans lequel les mots ne seraient que ce qu’ils sont.
Est-il bon compte rendu sans critique ? Voici. Aucune joie n’est complète. La mienne a été atteinte par la reliure de cette œuvre. Je ne parle d’un livre qu’après l’avoir lu plusieurs fois. Cela limite la production. Mais cela expose aussi à voir le volume s’effeuiller. J’ai perdu les pages 131-132. C’est égal, le risque en vaut la chandelle !
Année paulienne : Homélie sur le discours de saint Paul à Athènes en Actes 17, 16-34 –
5 septembre, 2011du site:
Année paulienne : Homélie sur le discours de saint Paul à Athènes en Actes 17, 16-34 –
Mercredi de la 6e semaine de Pâques.
« Ce que vous vénérez, sans le connaître, voilà ce que, moi, je viens vous annoncer. » Homélie prononcée lors de la fête du Supérieur général par Mgr Hermann Giguère P.H. à la chapelle du Pavillon Jean-Olivier-Briand, Séminaire de Québec, le 20 mai 2009. Textes de l’Écriture: Actes17, 15.22-18,1(discours de saint Paul à Athènes au complet : Actes 17, 16-34) et Jn 16, 12-15. Mercredi de la 6e semaine de Pâques.
Les lectures d’aujourd’hui demanderaient des commentaires assez développés, mais n’ayez crainte, je ne serai pas très long. Il reste qu’en cette année paulienne, le discours de saint Paul devant les Athéniens résonne à nos oreilles de façon interpellante. Le contenu de cette annonce de l’Évangile tranche avec celle de Pierre après la Pentecôte ou encore avec le discours de Paul à Antioche (Actes 13, 16-43) que nous avons lu au cours des dernières semaines. Il s’agit toujours du même Évangile bien sûr que Paul annonce, mais nous pouvons constater ici que Paul se préoccupe non seulement du contenu, mais aussi de la façon de transmettre ce contenu. Voilà pourquoi, ce discours de Paul aux Athéniens est des plus actuels pour nous.
I- Contexte : le deuxième voyage missionnaire
De l’an 49 à l’an 52, selon les spécialistes de saint Paul, celui-ci est engagé dans son deuxième voyage missionnaire qu’il commence à Antioche dans les difficultés avec Barnabé qu’il laisse pour traverser la Turquie actuelle avec Silas (Actes 15, 36-40). Plus de mille kilomètres. Il retrouve les communautés déjà fondées notamment celle des Galates et rencontre Timothée qui l’accompagnera pour le reste du voyage. Le groupe s’embarque pour la Macédoine, poursuit sa route, évangélisant Thessalonique et Bérée et Paul se retrouve à Athènes, la capitale culturelle de la Grèce. Il y est seul attendant que Timothée et Silas viennent le rejoindre.
Transportons-nous dans cette capitale il y a presque 2000 ans en même temps que Paul. La ville est une des plus belles villes de l’époque, pleine d’animation, de culture comme le sont aujourd’hui Paris ou New-York. Parcourons la ville avec Paul. Admirons-y les magnifiques bâtiments, les riches maisons sculptées en pierre blanche, les théâtres et les fontaines. Avec Paul, au fil de notre promenade, nous découvrons aussi les nombreux temples où l’on adorait une multitude de divinités. Petits temples bien souvent avec colonnades et frontons sculptés et décorés. Chaque temple a son dieu ou sa déesse.
II- Un discours exemplaire
Lorsqu’il commence à s’adresser aux gens réunis autour de lui à l’Aréopage, Paul se sert de cette visite pour en faire un point d’accrochage : « En effet, en parcourant la ville, et en observant vos monuments sacrés, j’y ai trouvé, en particulier, un autel portant cette inscription : ‘ Au dieu inconnu’ ».
Voilà le départ. Et le discours continue avec un souci remarquable de rejoindre les auditeurs. Cependant, remarquez-le, il y a plus qu’une technique de communication ici.
Autant, jusqu’ici on voyait Paul se faisant « juif avec les juifs », autant on le voit maintenant se faire « grec avec les grecs », autant on l’entendait citer plein de passages de l’Ancien Testament et se référer à l’histoire d’Israël, autant maintenant à Athènes on sent l’adaptation au milieu païen, mais le discours s’achève avec la proclamation de la résurrection de façon non équivoque. « [Dieu] a fixé le jour où il va juger l’univers avec justice, par un homme qu’il a désigné; il en a donné la garantie à tous en ressuscitant cet homme d’entre les morts. »
L’ensemble de l’argumentation va dans le sens d’un effort pour rejoindre ceux à qui Paul s’adresse pour la proclamation de l’Évangile. Ce discours est vraiment remarquable du point de vue de la communication, mais il n’est pas seulement un effort de communicateur, il est aussi la parole d’un évangélisateur.
III- Application
On parle volontiers dans le Québec d’aujourd’hui de « nouvelle évangélisation ». La Montée des Jeunes qui a eu lieu en fin de semaine dernière avait comme thème : « Missionnaire, ose le style saint Paul. » On trouve dans le discours à Athènes, un bel exemple du « style saint Paul», d’une véritable méthode d’évangélisation.
Paul se trouve à Athènes dans une situation inédite : – il est seul, sans aide ni équipe. Qu’est-ce que Paul fait dans un tel contexte? Premièrement, Paul commence par faire le tour de la ville pour prendre connaissance du milieu dans lequel il se trouve. Deuxièmement, il cherche des ponts par lesquels il peut, avec l’Évangile, rejoindre les Athéniens dans ce qu’ils croient. C’est pourquoi, Paul ne part pas, contrairement à l’accoutumée, des affirmations bibliques pour s’adresser aux Grecs. Il part des éléments connus de leur culture par lesquels il y a une porte d’entrée pour l’Évangile. Et, troisièmement, Paul proclame le kérigme : « Il est ressuscité, oui, cet homme est vraiment ressuscité » comme le chante notre liturgie pascale.
L’approche est différente de celle qu’il avait avec les juifs, mais son message ne change pas. Il demeure le même qu’à Antioche : Dieu a ressuscité Jésus pour en faire le Premier-Né d’une multitude de frères et sœurs, même si Paul sent que celui-ci est difficile à entendre pour les Grecs. En effet, on se moque de lui, mais ce n’est pas l’échec total, étant donné que naît à Athènes une petite communauté chrétienne : Denys, Damaris et quelques autres (Actes 17, 32- 34).
Le pape Paul VI écrivait dans l’ Exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi » : « Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de Dieu ne sont pas annoncés.»
Et Jean-Paul II, faisant écho à ces paroles, écrit dans Novo millennio ineunte : « Nous ne sommes certes pas séduits par la perspective naïve qu’il pourrait exister pour nous, face aux grands défis de notre temps, une formule magique. Non, ce n’est pas une formule qui nous sauvera, mais une Personne, et la certitude qu’elle nous inspire : Je suis avec vous ! »
Conclusion
Cette méditation, plus longue que ce que je m’imaginais, nous garde, avec saint Paul, dans le sillage du texte de l’évangile de Jean qui nous invite à rester toujours attentifs à l’Esprit si nous voulons connaître et suivre Jésus. « Il reprend ce qui vient de moi, dit Jésus, pour vous le faire connaître. » (Jn 16,15)
Prions, chers amis, pour que nous sachions bien discerner les voies de l’Esprit pour notre Église d’aujourd’hui, pour notre communauté et pour notre cheminement de vie personnel,
Que cette Eucharistie nous donne d’être, de plus en plus, unis au Seigneur ressuscité comme des membres vivants et rayonnants de la beauté, de la bonté et de l’amour de Celui en qui « il nous est donné de vivre, de nous mouvoir, d’exister » (Actes 17, 28).
Amen!
Mgr Hermann Giguère, P.H.
Supérieur général du Séminaire de Québec
20 mai 2009