Archive pour le 27 août, 2011
Saint Augustin
27 août, 2011homélie du 22e dimanche ordinaire A
27 août, 2011du site:
http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/
homélie du 22e dimanche ordinaire A
Jr 20, 7-9 ; Rm 12, 1-2 ; Mt 16, 21-27
Bâtir sur le roc, c’est construire solide. Une assurance pour la vie, un succès assuré. « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise… ». Il est vrai qu’avant cette solennelle affirmation de Jésus, Simon-Pierre, au nom des disciples, avait merveilleusement affirmé sa foi au « Fils du Dieu Vivant ». « Tu es le Messie ! ». Hélas, placé sur la route, le roc peut devenir obstacle et faire trébucher les plus forts. De même, les credos les plus convaincants, les certitudes les plus profondément ancrées, gardent la fragilité des vases d’argile, si ce n’est l’illusoire sécurité de l’orgueil.
Claironner sa foi devant un public admiratif, suivre Jésus sous les applaudissements, les flashes et l’œil des caméras de la télévision, c’est une chose qui peut être grisante. Mais suivre inconditionnellement un prophète non-conformiste et son programme toujours dérangeant, essuyer quolibets, railleries et menaces, sacrifier ses illusions, renoncer aux rêves de succès et prendre de nombreux risques, c’est tout autre chose.
A peine Jésus a-t-il mis cartes sur table que Pierre-la-Fondation devient pierre d’achoppement, un piège sur la route du Seigneur. Hier, le fils de Yonas avait laissé parler en lui la voix de Dieu. Aujourd’hui, il l’étouffe et laisse s’exprimer la voix de la chair et du sang. Effrayé par les sombres perspectives d’avenir subitement entrevues, et déçu de voir menacées ses visions oniriques, Pierre passe de la louange aux vifs reproches, jusqu’à gommer la révélation et l’espérance de la résurrection. Non, Seigneur ! Tu n’auras pas à souffrir de la part des autorités religieuses, ni des garants de la Loi. Et tu n’as rien à craindre des scribes qui connaissent et conservent fidèlement « la tradition des anciens ». « Dieu t’en garde, Seigneur ! Cela ne t’arrivera pas. » Peut-on imaginer le Messie, le Fils du Dieu Vivant, mis à mort par le Grand Conseil ? C’est totalement inconcevable… Simon, « baptisé » Pierre, devient Satan. Et le « Suis-moi » d’hier se transforme en « Va-t-en loin de moi, car tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes ».
La leçon a certes porté, mais aucune leçon n’est définitive. C’est chaque jour qu’il nous faut méditer l’oracle du Seigneur : « Vos pensées ne sont pas mes pensées et mes chemins ne sont pas vos chemins » (Is 55, 8). C’est chaque jour aussi qu’il nous faut, comme le dit Paul, nous transformer en renouvelant notre façon de penser, pour savoir reconnaître quelle est la volonté de Dieu, au lieu de prendre pour modèle le monde présent.
On retrouvera Pierre à la dernière Cène, bien éveillé, au Jardin des Oliviers, profondément endormi. Dans la cour du palais du Grand Prêtre, le « Roc » trahit son Maître pour « sauver sa vie »… Et l’on vit même les disciples, après la résurrection, poser cette étonnante question : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le Royaume pour Israël ? ». Leur foi était encore encombrée et perturbée par des idées triomphalistes.
Preuve éclatante d’authenticité, les évangélistes n’ont pas cédé aux tentations de la publicité et de la propagande, avec des portraits idéalisés et toujours angéliques, pour nous présenter les colonnes de l’Eglise. Des êtres humains, des croyants, mais qui portent le trésor de Jésus Christ et de l’Evangile « dans des vases d’argile » (2 Co 4, 7).
Tout chrétien qui ne se laisse pas modeler par le monde, la pression des majorités et celle des idéologies, et qui ne cède pas aux « envoûtements de l’argent et de la puissance », perd sa vie à cause du Christ, et la gardera.
Aujourd’hui encore, la Parole et les Béatitudes du Seigneur attirent, comme sur Jérémie, « l’injure et la moquerie », et même des menaces de mort.
Nous avons nous aussi, à offrir notre personne et notre vie en sacrifice et rendre ainsi à Dieu l’adoration et le culte véritable. Tout cela se vit et s’expérimente dans l’eucharistie. Par sa Parole, le Christ se fait connaître tel qu’il est, sans masque. Comme Pierre, nous sommes invités ensuite à affirmer notre credo en ce Jésus-là. Mais ce credo de la tête ou du cœur, qui s’exprime toujours en paroles, doit se traduire aussitôt en dispositions à le suivre. C’est le sacrifice saint, comme nous le rappelle Paul, qui nous permet vraiment de communier à celui de Jésus, toujours disponible pour faire la volonté de son Père, même au risque de sa vie. La qualité et l’authenticité de l’eucharistie se mesurent et se prouvent après la célébration, quand notre conduite est conforme au credo proclamé et à la communion exprimée. Quand la messe est finie, tout commence.
P. Fabien Deleclos, franciscain (T)
SAINT AUGUSTIN : CE QU’IL SAIT AVEC CERTITUDE, C’EST QU’IL AIME DIEU.
27 août, 2011du site:
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/augustin/confessions/livre10.htm#_Toc509574567
SAINT AUGUSTIN – LES CONFESSIONS – LIVRE DIXIÈME –
CHAPITRE VI.
CE QU’IL SAIT AVEC CERTITUDE, C’EST QU’IL AIME DIEU.
8. Ce que je sais, de toute la certitude de la conscience, Seigneur, c’est que je vous aime. Vous avez percé mon coeur de votre parole, et à l’instant je vous aimai. Le ciel et la terre et tout ce qu’ils contiennent ne me disent-ils pas aussi de toutes parts qu’il faut que je vous aime? Et ils ne cessent de le dire aux hommes, « afin qu’ils demeurent sans excuse ( Rom. I, 20). » Mais le langage de votre miséricorde est plus intérieur en celui dont vous daignez avoir pitié, et à qui il vous plaît de faire grâce (Ibid, IX ; 15); autrement le ciel et la terre racontent vos louanges à des sourds.
Qu’aimé-je donc en vous aimant? Ce n’est point la beauté selon l’étendue, ni la gloire selon le temps, ni l’éclat de cette lumière amie à nos yeux, ni les douces mélodies du chant, ni la suave odorance des fleurs et des parfums, ni la manne, ni le miel, ni les délices de la volupté.
Ce n’est pas là ce que j’aime en aimant mon Dieu, et pourtant j’aime une lumière, une mélodie, une odeur, un aliment, une volupté, en aimant mon Dieu; cette lumière, cette mélodie, cette odeur, cet aliment, cette volupté, suivant l’homme intérieur; lumière, harmonie, senteur, saveur, amour de l’âme, qui défient les limites de l’étendue, et les mesures du temps, et le souffle des vents, et la dent de la faim, et le dégoût de la jouissance, Voilà ce que j’aime en aimant mon Dieu.
9. Et qu’est-ce enfin? J’ai interrogé la terre, et elle m’a dit: « Ce n’est pas moi. » Et tout ce qu’elle porte m’a fait même aveu. J’ai interrogé la mer et les abîmes, et les êtres animés qui glissent sous les eaux, et ils ont répondu: « Nous ne sommes pas ton Dieu; cherche au-dessus de nous. » J’ai interrogé les vents, et l’air avec ses habitants m’a dit de toutes parts: « Anaximènes se trompe; je ne suis pas Dieu. » J’interroge le ciel, le soleil, la lune, les étoiles, et ils me répondent: « Nous ne sommes pas non plus le Dieu que tu cherches. » Et je dis enfin à tous les objets qui se pressent aux portes de mes sens: « Parlez-moi de mon Dieu, puisque vous ne l’êtes pas; dites-moi de lui quelque chose. » Et ils me crient d’une voix éclatante: « C’est lui qui nous a faits ( Ps. XCIX, 3). »
La voix seule de mon désir interrogeait les créatures, et leur seule beauté était leur réponse. Et je me retournai vers moi-même, et je me suis dit : Et toi, qu’es-tu? Et j’ai répondu:
« Homme. » Et deux êtres sont sous mon obéissance; l’un extérieur, le corps; l’autre en moi et caché, l’âme. Auquel devais-je plutôt demander mon Dieu, vainement cherché, à travers le voile de mon corps, depuis la terre jusqu’au ciel, aussi loin que je puisse lancer en émissaires les rayons de mes yeux? (454)
Il valait mieux consulter l’être intérieur, car tous les envoyés des corps s’adressaient au tribunal de ce juge secret des réponses du ciel et de la terre et des créatures qui s’écriaient Nous ne sommes pas Dieu, mais son ouvrage. L’homme intérieur se sert de l’autre comme instrument de sa connaissance externe; moi, cet homme intérieur, moi esprit, j’ai cette connaissance par le sens corporel. J’ai demandé mon Dieu à l’univers, et il m’a répondu : Je ne suis pas Dieu, je suis son oeuvre.
10. Mais l’univers n’offre-t-il pas même apparence à quiconque jouit de l’intégrité de ses sens? Pourquoi donc ne tient-il pas à tous même langage? Animaux grands et petits le voient, sans pouvoir l’interroger, en l’absence d’une raison maîtresse qui préside aux rapports des sens. Les hommes ont ce pouvoir afin que les grandeurs invisibles de Dieu soient aperçues par l’intelligence de ses ouvrages ( Rom. I, 20). Mais ils cèdent à l’amour des créatures; et, devenus leurs esclaves, ils ne peuvent plus être leurs juges.
Et elles ne répondent qu’à ceux qui les interrogent comme juges; et ce n’est point que leur langage, ou plutôt leur nature, varie, si l’un ne fait que voir, si l’autre, en voyant, interroge; mais dans leur apparente constance, muettes pour celui-ci, elles parlent à celui-là, ou plutôt elles parlent à tous, mais elles ne sont entendues que des hommes qui confrontent ces dispositions sensibles avec le témoignage intérieur de la vérité. Car la Vérité me dit : Ton Dieu n’est ni le ciel, ni la terre, ni tout autre corps. Et leur nature même dit aux yeux: Toute grandeur corporelle est moindre en sa partie qu’en son tout. Et tu es supérieure à tout cela; c’est à toi que je parle, ô mon âme, puisque tu donnes à ton corps cette vie végétative, que nul corps ne donne à un autre. Mais ton Dieu est la vie même de la vie.