Archive pour le 26 juillet, 2011

Saint Anne

26 juillet, 2011

Saint Anne dans images sacrée

http://www.santiebeati.it/

Lettre du Cardinal Carlo Maria Martini aux parents alors qu’il quittait son diocèse de Milan à la fin de son ministère d’évêque.

26 juillet, 2011

comme je m’ai déjà écrit du Cardinal Martini ne trouve pas beaucoup de textes en français, au contraire très peu, mais…j’ai trouvé ceci :

http://www.stignace.net/recherchedetextes/cadretextes/lettrecalmartini.htm

À tous ceux qui aiment leurs enfants et l’avenir de l’Église[1]

Lettre du Cardinal Carlo Maria Martini aux parents alors qu’il quittait son diocèse de Milan à la fin de son ministère d’évêque.

1. La famille est une vocation                              
2. L’éducation : collaboration à la joie des enfants 
3. Estime des prêtres et appréciation de leur vie    
4. La prière pour les vocations au ministère            

Pour la fête de saint Charles[2], l’année dernière, j’ai écrit une lettre aux prêtres sur l’avenir des vocations. Maintenant, avant de conclure mon ministère à Milan, je voudrais dire un mot sur ce sujet également à tous les parents, mais en élargissant le plus possible les horizons, dans le cadre de la vie de famille et dans le cadre de toute vocation chrétienne. Je vous écris cela en la fête de la Nativité de saint Jean-Baptiste, qui nous parle de la joie d’un père et d’une mère d’avoir un fils auquel Dieu a confié une grande mission. J’ai déjà parlé aux parents de ces thèmes dans quelques brèves pages des lettres de Noël dans les années passées, et je frappe maintenant de nouveau avec discrétion à votre porte.
Aurez-vous du temps pour lire aussi cette lettre ? Aurez-vous un moment de calme pour partager quelque chose de ma préoccupation et prendre un peu en considération ma proposition ? Qui sait ce que fut votre journée ? Peut-être, après des heures d’un travail difficile et effectué non sans tensions, avez-vous eu à affronter un voyage de retour à la maison qui a été plus long et plus exaspérant que d’habitude à cause d’un bouchon, d’un retard, de quelque chose d’imprévu. Et pour finir, peut-être que, à peine rentrés à la maison, vous avez croisé le regard irrité de votre fille adolescente à cause d’une permission refusée et l’agitation du plus petit avec ses caprices et son approximation décourageante afin d’en finir au plus vite avec ses devoirs. Et moi, j’ose encore vous déranger… !
Vous devez croire que ce qui me pousse à vous écrire, c’est vraiment une affection, un souci porté à votre famille, le désir de vous dire une fois encore que je suis proche de vous et mon admiration pour votre tâche éducative, si fascinante et parfois si usante.
            Je vous écris pour partager avec vous une préoccupation. Il me semble entrevoir chez beaucoup d’enfants et de jeunes un désarroi devant l’avenir, comme si personne ne leur avait jamais dit que leur vie n’est pas un hasard ou un risque, mais qu’elle est une vocation.
Aussi, je voudrais vous parler de la vocation de vos enfants et vous inviter à leur ouvrir des horizons d’espérance. En effet, vos enfants, que vous aimez tant, sont aimés encore bien avant, et d’un amour infini, par Dieu le Père : aussi sont-ils appelés à la vie, au bonheur que le Seigneur annonce dans son Évangile. Donc, le discours sur la vocation est pour suggérer la route qui mène à la joie, parce que c’est là le projet de Dieu sur chacun : qu’il soit heureux.
            Vous ne devez donc pas avoir peur : le Seigneur n’appelle que pour rendre heureux. Voilà pourquoi j’ose vous déranger. Votre bonheur et celui de vos enfants me tiennent à cœur. Et c’est pour cela que me tiennent à cœur tous les choix de vie possibles : le mariage et la vie consacrée, le don de soi dans le ministère de prêtre et de diacre, l’accomplissement de la profession comme une mission. Tous ces choix peuvent être une manière de vivre la vie chrétienne s’ils sont motivés par l’amour et non par l’égoïsme, s’ils comportent un engagement définitif, si les critères et le style de la vie quotidienne sont ceux de l’Évangile.
            Je vous écris, donc, pour vous dire avec quelle affection je suis proche de vous et que je partage votre souci que la vie de vos enfants, que vous aimez tant, ne soit pas perdue.

1 – La famille est une vocation
La première vocation dont je veux vous parler est la vôtre, celle d’être mari et femme, père et mère.
Aussi mon premier mot est précisément de vous inviter à prendre bien soin de votre amour en tant que mari et femme : au milieu de tant de choses urgentes, au milieu des si nombreuses sollicitations qui vous assaillent, il me semble qu’il est nécessaire de garder un peu de temps, de défendre un peu d’espace, de programmer un certain moment, qui soient comme un rite pour célébrer l’amour qui vous unit. L’inertie de la vie avec ses frénésies et ses ennuis, l’usure de la convivialité, le fait que chacun est un jour ou l’autre une déception pour l’autre quand apparaissent et s’aggravent des défauts et des méchancetés, tout cela finit par faire oublier la bénédiction que sont l’amour mutuel, le fait de vivre ensemble, de mettre au monde des enfants et de les introduire dans la vie.
 L’amour qui vous a convaincus de vous marier ne se réduit pas à l’émotion d’un moment un peu euphorique, il n’est pas seulement un attrait que le temps consume. L’amour sponsal est votre vocation : dans votre amour, vous pouvez reconnaître l’appel du Seigneur. Le mariage n’est pas seulement la décision d’un homme et d’une femme : c’est la grâce qui pousse deux personnes mûres, conscientes, heureuses, à donner un visage définitif à leur liberté. Le visage de deux personnes qui s’aiment révèle quelque chose du mystère de Dieu. Aussi voudrais-je vous inviter à garder la beauté de votre amour et à persévérer dans votre vocation : il en découle toute une conception de la vie qui encourage la fidélité, permet de supporter les épreuves, les déceptions, qui aide à traverser les crises éventuelles sans croire qu’elles sont irrémédiables. Celui qui vit son mariage comme une vocation professe sa foi : il ne s’agit pas seulement de rapports humains qui peuvent être un motif de bonheur ou de tourment ; il s’agit de traverser les jours avec la certitude de la présence du Seigneur, avec l’humble patience de prendre chaque jour sa croix, avec la fierté de pouvoir faire face, par grâce de Dieu, aux responsabilités.
Ce n’est pas toujours que les engagements professionnels, les réalisations familiales, les conditions de santé, le contexte dans lequel vous vivez, aident à voir avec lucidité la beauté et la grandeur de votre vocation. Il est nécessaire de réagir à l’inertie qu’engendre la vie quotidienne et de vouloir avec ténacité également des moments de liberté, de sérénité, de prière. Je vous invite donc à prier ensemble, dès ce soir, puis demain, puis toujours : une prière simple pour remercier le Seigneur, pour demander sa bénédiction pour vous, vos enfants, vos amis, votre communauté : quelques « Je vous salue, Marie » pour toutes ces attentes et ces peines que, peut-être, on ne réussit pas même à s’exprimer. Je vous invite à choisir quelques dates, à les distinguer par un signe, comme une visite à un sanctuaire, une messe même un jour de semaine, une lettre pour dire ces mots qui se bloquent dans notre gorge : la date de votre mariage, celle du baptême de vos enfants, celle de quelque deuil familial, pour ne donner que quelques exemples.
Je vous invite à trouver le temps de vous parler avec simplicité, sans transformer chaque point de vue en entêtement, toute divergence en litige : un temps pour parler, échanger des idées, reconnaître ses erreurs et demander pardon, se réjouir du bien accompli, un temps pour parler en se promenant tranquillement le dimanche après-midi, sans hâte. Et je vous invite à rester seuls pendant un petit moment, chacun pour son compte : un moment de détachement peut aider à être mieux et plus volontiers ensemble.
Je vous invite à avoir confiance dans l’incidence de votre oeuvre d’éducation : trop de parents sont découragés par l’impression d’une certaine imperméabilité de leurs enfants, qui sont capables de beaucoup exiger, mais qui se montrent réfractaires à toute interférence dans leurs amitiés, leurs horaires, leur monde.
Votre vocation à éduquer est bénie de Dieu : aussi, transformez vos appréhensions en prière, en méditation, en calme confrontation. Éduquer, c’est comme semer : le fruit n’est pas garanti et il n’est pas immédiat, mais si l’on ne sème pas, il est certain qu’il n’y aura pas de récolte. Éduquer est une grâce que le Seigneur vous fait : accueillez-la avec gratitude et sens des responsabilités. Cela demandera parfois patience et gentille complaisance, parfois fermeté et détermination ; dans une famille, il arrive aussi que l’on se dispute et que l’on va se coucher sans se saluer : mais ne perdez pas courage, il n’y a rien d’irrémédiable pour qui se laisse conduire par l’Esprit de Dieu.
Et confiez souvent vos enfants à la protection de Marie, n’omettez pas de dire une dizaine de chapelet pour chacun d’eux : ayez confiance et ne perdez l’estime ni de vous-mêmes ni de vos enfants. Éduquer, c’est devenir collaborateurs de Dieu pour que chacun réalise sa vocation.

2 – L’éducation : collaboration à la joie des enfants
La joie que vous désirez pour vous et pour vos enfants est un don mystérieux de Dieu : elle nous parvient comme la lumière amicale des étoiles, comme une musique heureuse, comme le sourire d’un visage désiré. La collaboration que les parents peuvent donner à la joie des enfants, c’est l’éducation chrétienne. L’éducation n’est pas un mécanisme qui conditionne, mais l’accompagnement d’une jeune liberté pour que, si elle le veut, elle parvienne à son achèvement dans l’amour. Éduquer est donc un service humble, qui peut connaître l’échec ; c’est cependant aussi une entreprise formidable qu’un homme et une femme peuvent goûter avec une intensité inexprimable.
L’éducation chrétienne est le travail patient et tenace qui prépare le terrain au don de la joie de Dieu. En effet, la lumière des étoiles ne se voit pas si la lueur brutale des luminaires cache la nuit, la musique heureuse ne nous enveloppe pas de consolation quand le vacarme et le bruit se font assourdissants, et on n’a pas le temps de regarder un visage ami dans l’excitation d’une foule en délire. Pour préparer à la joie, une purification est donc nécessaire, qui ne va pas sans peine.
Je veux parler brièvement au moins de quelques purifications qui me semblent particulièrement nécessaires aujourd’hui.
La purification des affections signifie introduire à la joie que ne connaît pas celui qui imagine les rapports entre l’homme et la femme comme une façon de réduire l’autre à l’état d’instrument, pour son propre plaisir et l’affirmation de lui-même : alors, les affections dégénèrent en passion, possessivité, sensualité.
L’esprit de service et la disponibilité au sacrifice introduisent à cette joie qui se réjouit de voir les autres heureux, de voir que les initiatives marchent bien, que les communautés sont vivantes et animées. C’est une joie que ne connaît pas celui qui se repaît dans sa paresse, qui ne recherche aucun résultat. Comme cela me serre le cœur de voir le gaspillage de temps, de ressources jeunes et fascinantes, le gaspillage d’intelligence et d’argent que je vois s’accomplir de la part de si nombreux groupes de jeunes ! Comme il est urgent de réagir devant l’inertie et la mauvaise volonté pour construire une vie heureuse !
La purification de la peur de l’avenir est urgente pour introduire à la joie de ce qui est définitif. Une vie s’accomplit quand elle se définit par le dévouement : le choix définitif doit être désiré comme le chemin de la paix, comme l’entrée dans l’âge adulte et dans ses responsabilités. Bénis soient ces parents qui, avec la fidélité de leur amour, enseignent que ce qui est définitif est une grâce et non pas un danger à redouter, ni une limitation de la liberté qu’il faut retarder le plus possible. Au contraire, dangereuses et sources d’inquiétude sont la précarité, la vie dans le provisoire, le désarroi qui laissent un jeune homme ou une jeune fille enfermé à part dans la vie, incertain de son identité et effrayé devant son avenir.
Éduquer à l’appartenance à l’Église
Vous, parents, ressentez la responsabilité de pourvoir au bonheur de vos enfants : vous êtes disposés à concéder beaucoup, parfois même trop, « pourvu qu’il (qu’elle) soit heureux (heureuse) ».
Cela devient un motif d’anxiété, un sentiment de faute, une exaspération, quand vous ne réussissez pas à obtenir de vos enfants qu’ils assument, qu’ils partagent vos indications, quand se révèlent impraticables les propositions qui semblaient tellement évidentes aux prêtres, aux enseignants, aux experts qui écrivent dans les journaux.
Il me semble qu’il est plus sage de considérer que les parents ne sont pas coupables de toutes les erreurs et de tous les malheurs de leurs enfants, de toute la misère de certaines jeunesses gâchées par le manque total de résultat ou la transgression. Il est excessif qu’un père ou une mère se sentent coupables de tout : il est plus prudent et plus apaisant de partager la responsabilité à l’intérieur d’une communauté.
Quand vous avez porté votre enfant à l’église pour demander le baptême, vous avez déclaré votre foi dans le Père qui est dans les cieux, et votre décision que l’enfant grandisse dans la communauté chrétienne.
Il me semble qu’une conséquence cohérente du choix de demander le baptême pour ses enfants est une oeuvre éducative qui se préoccupe de les insérer dans une communauté, de promouvoir la participation, d’insinuer chez les enfants et les jeunes un sentiment d’appartenance à la communauté chrétienne grâce auquel on éduque à la foi, à la prière, à la question concernant l’avenir. Une famille qui s’isole, qui défend sa propre tranquillité, en se soustrayant aux rendez-vous communautaires se révèle à la fin plus fragile et ouvre la porte à ce nomadisme des jeunes qui vont ici et là en goûtant à de nombreuses expériences, même contradictoires, sans se nourrir d’aucune nourriture solide.
S’insérer dans une communauté, cela peut exiger quelque fatigue et ne met pas à l’abri de quelque humiliation : je pense aux familles qui ont changé de maison et qui se sentent perdues dans de nouveaux quartiers ; je pense à celles qui ont souffert d’une incompréhension ; je pense à celles qui ont l’ardent désir d’aller ailleurs pour voir des gens, pratiquer un sport, respirer un peu de bon air. Voilà : vient le temps de choisir les priorités. L’avenir de vos enfants a besoin de choix qui déclarent ce qui est le plus important. Estimer que l’on ne peut absolument pas se passer de participer à la messe dominicale introduit une mentalité de foi qui estime que, sans le Seigneur, on ne peut rien faire de bon. Aussi, la fréquentation de la messe dominicale dans votre paroisse, la participation aux fêtes de la communauté, la prise de quelque responsabilité, le souci que vos enfants fréquentent le « patronage », la catéchèse, les engagements et les initiatives des jeunes de la paroisse, sont une manière de favoriser ce sentiment d’appartenance qui donne une stabilité et conduit à ce que l’on prenne en charge progressivement la communauté, décision qui peut mûrir aussi dans une vocation à son service.

3 – Estime des prêtres et appréciation de leur vie
Il m’arrive parfois d’être témoin chez les parents, d’une sorte de peur, d’appréhension, devant le soupçon qu’un de leurs enfants pourrait s’orienter vers le ministère sacerdotal.
Même les parents des séminaristes me font comprendre leur inquiétude, comme s’ils me demandaient : « Mais, quelle vie attend mon enfant s’il devient prêtre ? Sera-t-il heureux ? Sera-t-il seul ? ».
Je voudrais répondre que la vie du prêtre, d’aujourd’hui et de demain, comme celle d’hier, est une vie chrétienne : aussi celui qui veut être un bon prêtre portera-t-il sa croix chaque jour, comme vous le faites, dans un dévouement qui ne sera pas toujours couronné de reconnaissance et de résultats, en exerçant des responsabilités où il rencontrera aussi la critique et l’incompréhension, dans tout un tas d’engagements et de prétentions qui seront parfois usants. Cependant, on ne pense pas assez – me semble-t-il – à ce qui rend belle la vie d’un prêtre, belle et heureuse, d’une manière unique.
Le prêtre, en effet, vit surtout de relations : il consacre son temps aux personnes. Il ne se préoccupe pas de choses, de papiers, de sous, sinon de manière secondaire. Il passe son temps à rencontrer des gens : les enfants et les personnes âgées, les jeunes et les adultes, les malades et les personnes en bonne santé, ceux qui l’aiment bien et qui l’aident comme ceux qui le critiquent, se moquent de lui et se montrent par trop exigeants. C’est une expérience humaine extraordinaire. Et il rencontre les personnes non pas pour leur vendre quelque chose, non pas pour en tirer quelque avantage, non pas par curiosité, non pas comme on rencontre un client, mais pour se préoccuper de leur vie, de leur vocation à la joie, de leur être de fils de Dieu. Les personnes ouvrent souvent leur cœur au prêtre avec une confiance qui n’a pas son égal dans les rapports humains et, en cette confiance, est semée la Parole qui dit la vérité, qui ouvre à l’espérance éternelle, qui guérit par le pardon.
Le prêtre vit une liberté extraordinaire : il s’est remis lui-même à l’Église, aussi, s’il est cohérent avec sa vocation, il n’a pas d’appréhensions pour son avenir, il ne s’attache pas aux choses, il n’est pas obsédé par l’idée de s’enrichir. Il s’est remis lui-même par son obéissance à l’évêque et, précisément pour exercer cette obéissance, il vit une grande liberté, dispose de son temps pour servir, dispose de ses qualités particulières pour être utile à sa communauté.
Le prêtre célèbre pour lui et pour le peuple les mystères du salut : ce ne sont pas des produits précaires qui sont l’œuvre de ses mains, des succès exposés au sort incertain des choses humaines. En célébrant les saints mystères, il donne au peuple la grâce d’entrer dans la vie éternelle, la communion avec Jésus. Même si sa parole n’est pas attendue, si le nombre de ceux qui recherchent le don offert peut paraître réduit, le prêtre vit la certitude que le Royaume de Dieu vient précisément comme cela, comme la semence qui meurt pour produire beaucoup de fruits. À la fin de sa vie, s’il jette un regard sur le passé, le prêtre pourra éprouver du repentir devant ses misères et du chagrin devant son inadéquation à la mission reçue, mais ne lui fera pas défaut l’incomparable consolation d’avoir offert aux hommes le pain de la vie éternelle et l’étreinte du pardon de Dieu.
Il me semble opportun de rappeler ce qui rend grande et belle la vie du prêtre, pour que l’accent mis sur la fatigue, le soulignement des difficultés n’obscurcissent pas cette forme splendide de vie chrétienne.
Je pense qu’un père et une mère peuvent comprendre, au-delà des lieux communs et des réactions émotives, quelle grande grâce est le don du sacerdoce, et ils peuvent alors se réjouir si un de leurs enfants se sent attiré par cette route : je vous assure que la joie ne lui manquera pas, s’il est un bon prêtre.
En tout cas, mal parler des prêtres et les désigner comme responsables de tout ce qui ne va pas dans les communautés chrétiennes ne peut certes pas aider à améliorer les choses et encore moins encourager un jeune à se présenter pour assumer un ministère si nécessaire pour l’Église et si beau pour celui qui le vit bien.

4 – La prière pour les vocations au ministère
La beauté chrétienne de la vie d’un bon prêtre et la grâce extraordinaire que représente un saint prêtre pour une communauté doivent suggérer à tous de prier afin que les prêtres ne manquent pas dans nos communautés. La prière pour les vocations au ministère sacerdotal doit être partagée par toute la communauté.
Je vous invite vous aussi à prier en famille et à suggérer cette intention de prière également à vos enfants, en obéissance à la parole du Seigneur : « Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson » (Lc 10, 2).
Comme je l’ai écrit aux prêtres à l’occasion de la fête de saint Charles, cette prière n’est pas une sorte de délégation au Seigneur pour qu’il fasse ce que nous ne réussissons pas à faire : c’est plutôt un abandon intelligent et libre à la conduite de l’Esprit qui devient disponibilité à accomplir les oeuvres de Dieu. Aussi la prière pour les vocations devrait-elle être plus intensément pratiquée par ceux qui se trouvent à l’âge et dans les conditions du choix de leur état de vie. Je voudrais que tout adolescent ou jeune comprenne que la vérité de la prière pour les vocations est atteinte quand elle retentit au fond comme la prière d’Isaïe : «Seigneur, si tu le veux, envoie-moi !» (Is 6, 8).
Je vous invite à prier en ces termes :
Dieu, Père tout-puissant, nous te prions
d’envoyer des ouvriers de l’Évangile à notre sainte Église ambrosienne
dans laquelle, pendant des siècles, tu as opéré tes merveilles.
Nous te prions par l’intercession de nos saints évêques Ambroise et Charles,
du bienheureux cardinal Ferrari et du bienheureux cardinal Schuster.
Nous te prions par l’intercession de Marie, notre petite Vierge
qui, du haut du Duomo, prie pour notre Église.
Nous te prions pour nos communautés : qu’elles soient peuplées de personnes riches en foi,
empressées au service, portées à la reconnaissance
pour tous ceux qui se consacrent au saint ministère.
Nous te prions de répandre chez nos jeunes ton Esprit Saint,
pour qu’ils soient attirés par la contemplation de Jésus
et la marche à sa suite, qu’ils puissent faire l’expérience de la joie
d’une liberté qui se fait don, obéissance, empressement pour la foi des frères.
Nous te prions de répandre en nous tous ton Esprit Saint,
pour que nous soyons forts et intelligents dans la lutte contre les tentations de notre temps
et que nous soyons persévérants dans le bien,
pour mener à son achèvement notre vocation et parvenir à la joie éternelle
et parfaite que tu prépares pour tes enfants bien-aimés.
Amen.

Milan, le 24 juin 2002
En la fête de la Nativité de saint Jean-Baptiste
Carlo Maria cardinal MARTINI
————————————————

(*) Texte original italien du diocèse de Milan. Traduction de la Documentation Catholique.
La documentation catholique N° 2280 du 17/11/2002 – L’Église dans le monde
[1] Le 11 juillet dernier, le Pape Jean-Paul II a accepté la démission du cardinal Carlo Maria Martini, archevêque de Milan, âgé de 75 ans depuis le mois de février. Le cardinal Dionigi Tettamanzi, dont l’installation a eu lieu le dimanche 29 septembre, lui a succédé à la tête du plus grand diocèse du monde. Le 24 juin dernier, avant de conclure son ministère à Milan et de retourner à ses études bibliques, le cardinal Carlo M. Martini a adressé une lettre aux parents. Nous en publions le texte (*)
[2] Saint Charles Borromée fut un grand archevêque de Milan au XVI° siècle après le Concile de Trente. Il fut de ceux qui reprirent les décrets du Concile de Trente et les mis en œuvre opérant par là une vraie réforme dans l’Eglise catholique. 

Pape Benoît: Aphraate, le Sage persan (21 novembre 2007)

26 juillet, 2011

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2007/documents/hf_ben-xvi_aud_20071121_fr.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 21 novembre 2007

Aphraate, le Sage persan

Chers frères et sœurs,

Dans notre parcours dans le monde des Pères de l’Eglise, je voudrais aujourd’hui vous guider dans une partie peu connue de cet univers de la foi, c’est-à-dire dans les territoires où fleurirent les Eglises de langue sémitique, qui n’étaient pas encore influencées par le pensée grecque. Ces Eglises, durant le IV siècle, se développent au proche Orient, de la Terre Sainte au Liban et à la Mésopotamie. Au cours de ce siècle, qui est une période de formation au niveau ecclésial et littéraire, ces communautés voient l’affirmation du phénomène ascétique et monastique avec des caractéristiques autochtones, qui ne subissent pas l’influence du monachisme égyptien. Les communautés syriaques du IV siècle représentent donc le monde sémite, dont la Bible elle-même est née, et elles sont l’expression d’un christianisme dont la formulation théologique n’est pas encore entrée en contact avec des courants culturels différents, mais qui vit sa propre forme de pensée. Ce sont des Eglises où l’ascétisme sous diverses formes érémitiques (ermites dans le désert, dans les grottes, reclus, stylites), et le monachisme sous des formes de vie communautaire, exercent un rôle d’importance vitale dans le développement de la pensée théologique et spirituelle.
Je voudrais présenter ce monde à travers la grande figure d’Aphraate, également connu sous le nom de « Sage », un des personnages les plus importants, et dans le même temps les plus énigmatiques, du christianisme syriaque du IV siècle. Originaire de la région de Ninive-Mossoul, aujourd’hui en Irak, il vécut dans la première moitié du IV siècle. Nous ne possédons que peu d’informations sur sa vie; il entretint cependant des rapports étroits avec les milieux ascétiques et monastiques de l’Eglise syriaque, dont il nous a transmis des informations dans son œuvre et auxquels il consacre une partie de sa réflexion. Selon certaines sources, il fut même responsable d’un monastère et, pour finir, il fut également consacré Evêque. Il écrivit 23 discours, connus sous le nom d’Expositions ou Démonstrations, dans lesquels il traite de divers thèmes de vie chrétienne, comme la foi, l’amour, le jeûne, l’humilité, la prière, la vie ascétique elle-même, et également le rapport entre judaïsme et christianisme, entre Ancien et Nouveau Testament. Il écrit dans un style simple, en employant des phrases brèves et en utilisant des parallélismes parfois contrastants; il réussit toutefois à formuler un discours cohérent avec un développement bien articulé des divers thèmes qu’il traite.
Aphraate était originaire d’une communauté ecclésiale qui se trouvait à la frontière entre le judaïsme et le christianisme. C’était une communauté profondément liée à l’Eglise-mère de Jérusalem, et ses Evêques étaient traditionnellement choisis parmi ceux qu’on appelle « les proches » de Jacques, le « frère du Seigneur » (cf. Mc 6, 3):  il s’agissait en fait de personnes liées par le sang et par la foi à l’Eglise hyérosolimitaine. La langue d’Aphraate est la langue syriaque, une langue donc sémitique comme l’hébreu de l’Ancien Testament et comme l’araraméen parlé par Jésus lui-même. La communauté ecclésiale dans laquelle se déroule la vie d’Aphraate était une communauté qui cherchait à rester fidèle à la tradition judéo-chrétienne, dont elle se sentait la fille. Celle-ci conservait donc un lien étroit avec le monde juif et avec ses Livres sacrés. Aphraate se définit de manière significative « disciple de l’Ecriture Sainte » de l’Ancien et du Nouveau Testament (Démonstrations 22, 26), qu’il considère comme son unique source d’inspiration, ayant recours à celle-ci d’une manière si fréquente qu’il en fait le centre de sa réflexion.
Aphraate développe plusieurs arguments dans ses Démonstrations. Fidèle à la tradition syriaque, il présente souvent le salut accompli par le Christ comme une guérison et, donc, le Christ lui-même comme un médecin. En revanche, le péché est vu comme une blessure, que seule la pénitence peut guérir:  « Un homme qui a été blessé lors d’une bataille, dit Aphraate, n’a pas honte de se remettre entre les mains d’un sage médecin…; de la même façon, celui qui a été blessé par Satan ne doit pas avoir honte de reconnaître sa faute et de s’éloigner d’elle, en demandant  le  remède de la pénitence » (Démonstrations 7, 3). Un autre aspect important de l’œuvre d’Aphraate est son enseignement sur la prière, et en particulier sur le Christ comme maître de prière. Le chrétien prie en suivant l’enseignement de Jésus et son exemple d’orant:  « Notre Sauveur nous a enseigné à prier ainsi, en disant:  « Prie dans le secret Celui qui est caché, mais qui voit tout »; et encore:  « Entre dans ta chambre et prie ton Père dans le secret, et le Père qui voit dans le secret te récompensera » (Mt 6, 6)… Ce que notre Sauveur veut montrer, c’est que Dieu connaît les désirs et les pensées du coeur » (Démonstrations 4, 10).
Pour Aphraate, la vie chrétienne est centrée sur l’imitation du Christ, sur le fait de prendre son joug et de le suivre sur la voie de l’Evangile. Une des vertus qui s’adapte le mieux au disciple du Christ est l’humilité. Celle-ci n’est pas un aspect secondaire dans la vie spirituelle du chrétien:  la nature de l’homme est humble, et c’est Dieu qui l’exalte pour sa sa propre gloire. L’humilité, observe Aphraate, n’est pas une valeur négative:  « Si la racine de l’homme est plantée dans la terre, ses fruits croissent devant le Seigneur de la grandeur » (Démonstrations 9, 14). En restant humble, même au sein de la réalité terrestre dans laquelle il vit, le chrétien peut entrer en relation avec le Seigneur:  « L’humble est humble, mais son coeur s’élève à des hauteurs éminentes. Les yeux de son visage observent la terre et les yeux de l’esprit, les hauteurs éminentes » (Démonstrations 9, 2).
La vision qu’Aphraate a de l’homme et de sa réalité corporelle est très positive:  le corps de l’homme, à l’exemple du Christ humble, est appelé à la beauté, à la joie, à la lumière:  « Dieu s’approche de l’homme qu’il aime, et il est juste d’aimer l’humilité et de rester dans la condition d’humilité. Les humbles sont simples, patients aimés, intègres, droits, experts dans le bien, prudents, sereins, sages, calmes, pacifiques, miséricordieux, prêts à se convertir, bienveillants, profonds, pondérés, beaux et désirables » (Démonstrations 9, 14). Chez Aphraate, la vie chrétienne est souvent présentée dans une claire dimension ascétique et spirituelle:  la foi en est la base, le fondement; elle fait de l’homme un temple où le Christ lui-même demeure. La foi rend donc possible une charité sincère, qui s’exprime dans l’amour envers Dieu et envers le prochain. Un autre aspect important chez Aphraate est le jeûne, qu’il entend au sens large. Il parle du jeûne de la nourriture comme d’une pratique nécessaire pour être charitable et vierge, du jeûne constitué par la continence en vue de la sainteté, du jeûne des paroles vaines ou détestables, du jeûne de la colère, du jeûne de la propriété des biens en vue du ministère, du jeûne du sommeil pour s’appliquer à la prière.
Chers frères et soeurs, revenons encore – pour conclure – à l’enseignement d’Aphraate sur la prière. Selon cet antique « Sage », la prière se réalise lorsque le Christ demeure dans le coeur du chrétien, et il l’invite à un engagement cohérent de charité envers son prochain. Il écrit en effet:
« Apporte le réconfort aux accablés, visite les malades,
sois plein de sollicitude envers les pauvres:  telle est la prière.
La prière est bonne,
et ses oeuvres sont belles.
La prière est acceptée lorsqu’elle apporte le réconfort au prochain.
La prière est écoutée
lorsque dans celle-ci se trouve également le pardon des offenses.
La prière est forte
lorsqu’elle est remplie de la force de Dieu » (Démonstrations 4, 14-16).