Archive pour le 9 avril, 2011
La prière de Carême de Saint Ephrem le Syrien
9 avril, 2011du site:
http://www.assomptionorient.altervista.org/actualites/archivio/francia%2007/S%20Efr%2007.htm
La prière de Carême de Saint Ephrem le Syrien
« Seigneur et Maître de ma vie,
ne m’abandonne pas à l’esprit de paresse,
de découragement, de domination
et de vain bavardage !
Mais fais-moi la grâce, à moi ton serviteur,
de l’esprit de chasteté, d’humilité,
de patience et de charité.
Oui, Seigneur Roi,
Accorde – moi de voir mes fautes
et de ne pas condamner mon frère,
O Toi qui es béni dans les siècles des siècles.
Amen »
Cette prière est attribuée à l’un des grands maîtres de la tradition spirituelle orientale : saint Ephrem le Syrien.
On pourrait la définir comme la prière par excellence du temps de Carême.
On la récite en faisant une inclination à la fin de chacune de ses trois parties.
Dans sa simplicité, elle souligne bien les aspects du repentir, qui constituent l’essentiel de notre chemin de conversion pendant le temps du Carême.
Au début, elle présente quatre points négatifs, qui sont les obstacles à éliminer :
L’esprit de paresse
L’esprit de découragement
L’esprit de domination
Le vain bavardage
L’esprit de paresse est la maladie la plus dangereuse pour la vie spirituelle. Ce mauvais esprit empêche notre désir du bien de se développer et de s’épanouir. Il nous persuade, au regard de nos fautes répétées, qu’aucun changement n’est possible. Cette paresse est la racine de tout péché, car elle empoisonne l’énergie spirituelle à sa source.
La conséquence de la paresse c’est le découragement qui est l’expression de l’acédie. Le père provincial de France, dans son blog, nous donne une belle explication de ce que représente l’acédie : « …Je ne sais pas si vous connaissez ce sentiment qui ronge le religieux et que les Pères grecs appellent l’acédie? Il s’agit d’un mal sournois qui envahit le coeur du moine et qui lui fait perdre le goût des réalités divines. Dans les maladies de l’âme qu’explorent les psychanalystes, le terme qui conviendrait le mieux pour caractériser l’acédie est celui de dépression. Mais l’acédie est avant tout une crise spirituelle qui plonge le religieux dans la tristesse. L’acédie est une sorte de dégoût, d’ennui pour les « choses divines ». Le moine, le religieux n’a plus d’attrait pour la prière, la relation à Dieu dans l’oraison. Ignace de Loyola parlait quant à lui de « désolation »…»
Quand notre vie n’est pas orientée vers Dieu, inévitablement elle devient égoïste et centrée sur elle-même. Alors, la voie est libre pour l’esprit de domination qui nous conduit à considérer la réalité uniquement en fonction de nos idées, de nos désirs et de nos besoins. A travers l’exclusion de Dieu du centre de notre vie, nous réalisons un véritable meurtre spirituel, qui s’achève en suicide spirituel.
Le suicide spirituel consiste en ceci : empêcher la parole de Dieu d’engendrer la vie dans notre vie. Nous restons seulement avec notre parole, vide et vaine, qui devient un bavardage stérile.
Ces quatre aspects négatifs sont les obstacles à éliminer ; mais seule la grâce de Dieu peut nous permettre de l’accomplir.
« … fais-moi la grâce, à moi ton serviteur… »
Après cette constatation de l’impuissance humaine, la prière nous montre les buts positifs du chemin de conversion, qui sont eux aussi au nombre de quatre :
La chasteté
L’humilité
La patience
La charité
La chasteté s’oppose au désir de possession, qui habite mon cœur. Elle me permet de comprendre ma vie dans son intégralité. La chasteté me met dans la condition de reconnaître que tout seul je ne suis pas capable de réaliser les vrais désirs de mon cœur et que tout dans ma vie est le fruit de la bienveillance gratuite de Dieu.
La vision intégrale de la vie, fruit de l’esprit de chasteté, engendre la vertu d’humilité, qui est la capacité de voir et d’accueillir la vérité, c’est-à-dire, de se tenir les mains ouvertes devant Dieu dans la conscience que nous ne possédons rien et que tout nous est donné.
La chasteté et l’humilité sont suivies de la patience.
L’esprit de possession nous pousse à vouloir tout et tout de suite sans être jamais satisfait. Nous vivons continuellement dans l’anxiété de réaliser nos désirs sans jamais trouver pleine satisfaction. La patience, c’est le fruit de l’expérience que Dieu ne déçoit pas et que le véritable bonheur se découvre seulement quand nous prenons le temps de vivre ce qu’il nous est donné de vivre avec un regard profond et intégral.
Le chemin de conversion trouve son épanouissement dans la vertu de charité qui est don de Dieu et but de tout effort spirituel.
Le parcours quadragésimal est résumé dans la demande finale, qui nous invite à prier le Seigneur ainsi : « Accorde-moi de voir mes fautes et de ne pas condamner mon frère ».
L’orgueil est la source du mal et tout mal est orgueil.
Le chemin de Carême nous conduit au pied de la croix du Christ, pour reconnaître nos limites, notre besoin d’être guéri par sa miséricorde et faire à notre tour miséricorde à nos frères.
dimanche 10 avril 2011 – 5e de Carême Homélie
9 avril, 2011du site:
http://www.homelies.fr/homelie,5e.dimanche.de.careme,3115.html
dimanche 10 avril 2011 – 5e de Carême
Famille de Saint Joseph
Homélie-Messe
La résurrection de Lazare – et toute la liturgie de ce jour – se présente comme un face à face dramatique entre la Vie et la Mort, entre le Seigneur de la Vie, l’Envoyé du Père, Jésus-Christ, et le prince de la mort implicitement présent par ses œuvres : la maladie et le décès de Lazare, le complot contre Jésus.
Ce récit est d’ailleurs à la charnière entre les deux grandes sections du quatrième évangile : les dix premiers chapitres nous font découvrir les « signes » qui accréditent la messianité de Jésus et le posent par le fait même en rival du prince de ce monde ; les dix derniers nous introduisent dans l’affrontement entre la Lumière et les ténèbres conduisant à la victoire finale du Seigneur ressuscité. Le retour à la vie de Lazare est le septième et le dernier signe, le plus important, celui auquel saint Jean consacre le plus de versets et pour cause : il résume toute la première partie et annonce le déroulement et l’issue de la seconde.
D’emblée Jésus révèle l’enjeu de la maladie de son ami, qui dévoile aussi l’enjeu de sa passion : cette épreuve « ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle, le Fils de Dieu soit glorifié ». Certes Notre-Seigneur sait bien que la mort a fait son œuvre ; quelques instants plus tard il dira explicitement à ses Apôtres : « Lazare est mort ». Mais il sait que cette victoire n’est qu’apparente, éphémère, et que l’amour vivifiant du Père – sa « gloire » – aura le dernier mot.
Que le véritable enjeu du récit concerne la Passion du Seigneur apparaît clairement dans le dialogue avec les disciples qui veulent dissuader leur Maître de retourner en Judée, alors que les juifs cherchent à le lapider. La réponse de Jésus : « Lazare est mort, allons auprès de lui », annonce le chemin sur lequel il s’engage courageusement : c’est en descendant auprès de Lazare dans sa mort, que Notre-Seigneur pourra en triompher ; c’est en se rendant solidaire de notre humanité jusque dans cette ultime conséquence du péché, que le Christ nous sauve de la mort et nous donne part à sa vie.
Désormais plus aucun homme ne meurt seul. Au moment du grand passage, chacun d’entre nous peut dire avec Thomas : « Allons-y nous aussi, pour mourir avec lui », afin de vivre de sa vie. Si du moins nous mettons toute notre espérance en cette Parole qui constitue le cœur lumineux du récit : « Moi je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; et tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais ». Si nous mettons notre foi en Jésus, le Père « met dès à présent en nous son Esprit, et nous vivons » de sa vie (1ère lect.) ; sur nous la mort n’a plus aucun pouvoir : elle n’est plus qu’un passage de ce monde éphémère vers notre patrie définitive : « Je vous installerai sur votre terre, et vous saurez que je suis le Seigneur : je l’ai dit, et je le ferai – Parole du Seigneur » (Ibid.).
Le retour à la vie de Lazare, pour spectaculaire qu’il soit, n’est toujours qu’un « signe » confirmant la Parole de Jésus, ou plutôt accréditant son autorité. Car Lazare, tout comme la fille de Jaïre ou le fils de la veuve de Naïm, ont tous déposé une seconde fois la vie naturelle qui leur avait été rendue pour un temps seulement. Par contre, celui qui est « ressuscité d’entre les morts, ne meurt plus » (Rm 6, 9) car il vit de la vie même de Dieu, c’est-à-dire de son Esprit. Or « si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous par la foi, celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous » (2ème lect.).
Nous attendons donc bien plus qu’un simple retour à la vie naturelle. Certes nous mourrons, car « notre corps est voué à la mort à cause du péché » (Ibid.) ; mais « si le Christ est en nous » et que nous sommes en lui par une foi vivante, notre âme vivra de sa vie divine, participant ainsi à son immortalité.
On pourrait s’étonner que saint Jean écrive : « Et le mort sortit ». N’est-ce pas parce qu’il est revenu à la vie que Lazare peut sortir ? De qui donc parle l’évangéliste ? En fait ce verset s’adresse à nous qui recevons aujourd’hui ce message. Saint Jean nous annonce qu’au moment de fermer les yeux sur ce monde qui passe, lorsque notre âme se séparera de ce corps corruptible, nous entendrons la voix de Notre-Seigneur bien-aimé nous appeler auprès de lui. Comment dès lors un chrétien pourrait-il envisager une « réincarnation », alors que nous entrerons pleinement dans la vie divine que le Christ nous donnera en partage dans l’Esprit ? Bien plus : nous croyons que par le baptême « nous avons été mis au tombeau avec le Christ, afin que nous menions dès à présent une vie nouvelle, nous aussi, de même que le Christ, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts » (Rm 6, 4).
Telle est la Bonne Nouvelle : les ténèbres mortelles n’ont plus aucune prise sur ceux qui se sont laissés illuminer par le Verbe Lumière qui donne la vie (cf. Jn 1, 4-5). Si l’évangéliste rapporte par deux fois la plainte que Marthe puis Marie formulent dans leur souffrance : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort », n’est-ce pas pour souligner que désormais, ce cri de détresse n’a plus lieu d’être ? Jésus ressuscité est définitivement présent au cœur de nos vies comme de notre mort, pour y faire régner sa vie divine immortelle, une fois pour toutes (cf. He 10, 10).
Mais pour que l’appel du Seigneur nous rejoigne au fond de nos tombeaux, quelle pierre nous faut-il rouler ? Quelle incrédulité, quel doute nous faut-il repousser ? A quelle conversion nous faut-il consentir, pour cesser de résister à la grâce et laisser la Parole nous recréer dans notre filiation divine ?
« “Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur ; Seigneur écoute mon appel” (Ps 129). Je le crois : “Tu es le Messie : tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde”. Tu es dès à présent ma résurrection et ma vie. Mais augmente ma foi, afin que libéré de la peur de la mort, je vive ici-bas en citoyen du Royaume qui ne passera pas, de sorte que lorsque viendra le moment du grand passage, Dieu soit glorifié par ma mort comme par ma vie, et que je puisse entrer dans la gloire que tu prépares pour tes amis ».
Père Joseph-Marie