Archive pour mars, 2011
Le vendredi de la 3e semaine de Carême: Tous les chrétiens sont appelés à la sainteté (LG)
31 mars, 2011du site:
http://www.levangileauquotidien.org/main.php?language=FR&module=commentary&localdate=20110401
Le vendredi de la 3e semaine de Carême
Commentaire du jour
Concile Vatican II
Constitution dogmatique sur l’Église « Lumen gentium » §42
Tous les chrétiens sont appelés à la sainteté
« Dieu est amour ; celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui » (1Jn 4,16). Or Dieu a « répandu son amour dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5) ; voilà pourquoi le don primordial et souverainement nécessaire est la charité, par laquelle nous aimons Dieu par-dessus toute chose et le prochain par amour pour lui. Mais pour que la charité, comme le bon grain, croisse et produise des fruits (Mt 13,35), chacun des fidèles doit s’ouvrir à la parole de Dieu et, avec l’aide de la grâce, accomplir effectivement la volonté divine, recevoir fréquemment les sacrements, surtout l’eucharistie, et participer souvent aux célébrations liturgiques. Ils s’appliqueront constamment à la prière, à l’abnégation d’eux-mêmes, à servir assidûment leurs frères et à la pratique de toutes les vertus. La charité, en effet, en tant que lien de la perfection et accomplissement de la Loi (Col 3,14; Rm 13,10), règle, informe et conduit à leur fin tous les moyens de sanctification. Ainsi la charité envers Dieu et envers le prochain est-elle la marque distinctive qui caractérise le vrai disciple du Christ.
Le coeur de l’homme, centre de l’intelligence spirituelle
31 mars, 2011du site:
http://eocf.free.fr/text_coeur_clement.htm
Le coeur de l’homme, centre de l’intelligence spirituelle
Si nous parcourons la Bible, surtout dans ses parties les plus archaïques, moins intellectualisées, nous voyons bien que le coeur n’est pas seulement un organe physiologique où retentissent les émotions, mais qu’il symbolise aussi, au sens le plus réaliste, le centre d’intégration personnelle des facultés humaines et le lieu du combat spirituel.
Le coeur est l’ » en-dedans » de l’homme, de sorte que le péché s’inscrit dans la divergence de la bouche et du coeur.
C’est l’organe des sentiments, de la volonté, de la passion, celle-ci pouvant se retourner en compassion. Dans la joie, » le coeur est bon « , il » a mal » dans la tristesse.
Surtout, le coeur est le lieu de l’intelligence, à la fois dans les racines contemplatives et l’expression réfléchie de celle-ci.
Il désigne ainsi la personne, c’est en lui que la nature s’ouvre sur le , » sans fond » irréductible de l’existence personnelle.
C’est pourquoi il est » impénétrable « , Dieu seul » sait les secrets du cœur » (Ps. 44, 22). » L’abîme du cœur » est ainsi le lieu de la rencontre avec Dieu, le lieu où l’homme ouvre ou ferme au Mendiant d’amour qui » attend à la porte « .
Le refus de Dieu, la crispation sur soi, la Bible les nomme , « endurcissement du cœur « . Le coeur fidèle, au contraire, » se fixe » en Dieu.
C’est pourquoi, à travers nos destins, Dieu laboure nos coeurs comme un bon laboureur qui brise la terre durcie par la sécheresse pour qu’elle puisse recevoir l’eau et les graines.
Dieu » est près de ceux qui ont le coeur brisé » (Ps. 34, 19).
Et le prophète, annonçant l’accomplissement ultime, pour nous christique, unit le coeur et l’esprit dans l’ouverture au Saint Esprit: » Je vous donnerai un coeur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, j’ôterai de votre chair le coeur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair… Je mettrai mon Esprit en vous » (Ez. 36, 26-27).
Olivier CLEMENT – Questions sur l’homme –
LE SALUT VIENT DES JUIFS (Jn 4,22) (Frédéric Manns)
31 mars, 2011du site:
http://www.christusrex.org/www1/ofm/sbf/dialogue/deux_alliances.html
LE SALUT VIENT DES JUIFS (Jn 4,22)
Frédéric Manns
L’histoire du salut affirme la continuité entre Israël et l’Eglise en même temps que la nouveauté apportée par Jésus de Nazareth. Nostra Aetate est respectueux de la façon différente dont le judaïsme se définit lui-même. Dès le début de son pontificat, à Mayence, le pape Jean-Paul II a osé déclarer: « Nos deux communautés religieuses sont liées au niveau même de leur propre identité »(12 mars 1979). A la grande synagogue de Rome, le pape déclara: « La religion juive ne nous est pas « extrinsèque » mais, en un certain sens elle est « intrinsèque à notre religion. Nous avons donc à son égard des rapports que nous n’avons avec aucune autre religion. Vous êtes nos frères préférés et, dans un certain sens, on pourrait dire nos frères aînés »(13 avril 1986).
Ces paroles s’inspirent de l’image paulinienne de l’olivier franc qu’est Israël sur lequel ont été greffés les rameaux de l’olivier sauvage que sont les païens (Rm 11,16-24).
Penser cette relation de continuité et de rupture à l’intérieur de l’unique dessein de Dieu est urgent pour qui vit en Israël. Peut-on affirmer qu’il n’existe qu’une seule alliance qui engendre l’unique peuple de Dieu? La continuité entre Israël et l’Eglise serait bien mise en évidence de la sorte. L’argument décisif souvent cité est la phrase de Paul: « les dons de Dieu sont sans repentance ». Israël et l’Eglise unies dans un même dessein de grâce et de miséricorde marcheraient ainsi vers le même but eschatologique. Le Christ n’apporterait aucune rupture alors, mais seulement une nouvelle interprétation de la Loi et une ouverture aux païens. La bénédiction d’Abraham rejoindrait ainsi toutes les nations. Le Christ serait l’anneau de jonction entre les deux communautés.
Cette affirmation contient cependant un risque: elle reprend subtilement la théologie de la substitution qui veut que l’Eglise réalise ce qui est implicite en Israël et le substitue dans le mystère de la rédemption. Elle réduit ensuite la nouveauté chrétienne à la seule ouverture aux païens. Comment expliquer alors la rupture et la discontinuité du message chrétien qu’on ne peut pas attribuer à Paul tout seul. La nouveauté chrétienne d’un Dieu incarné est totalement oubliée. Elle heurte de front le judaïsme. La venue du Messie que le judaïsme attend pour la fin des temps est au centre de la foi chrétienne. Jésus et le Messie de l’espérance hébraïque qui accomplit les promesses faites aux Pères. L’Eglise est consciente de porter l’espérance d’Israël, tout en se distinguant de lui. Les temps eschatologiques sont déjà inaugurés pour les croyants. C’est Jésus qui unit et qui divise à la fois les deux peuples. Il est vrai que les fêtes majeures de l’Eglise sont les fêtes juives célébrées par le Christ. Mais la fête de l’annonciation, de la nativité du Christ et de la Trinité n’ont pas d’antécédents dans le judaïsme.
La théologie des deux alliances a opposé longtemps le judaïsme et le christianisme jusqu’au point de présenter l’Eglise comme substitution d’Israël. Il est donc urgent de souligner que les deux alliances doivent être situées dans l’unique dessein de Dieu. Judaïsme et christianisme doivent demeurer deux réalités ouvertes, dépendantes de l’initiative divine dans l’histoire et orientées vers l’accomplissement des promesses divines. Les chrétiens doivent considérer à la fois le judaïsme dans son autonomie et dans son affinité avec le christianisme. Oublier la particularité historico-salvifique d’Israël signifie s’exposer à un appauvrissement pour le christianisme.
Les modèles herméneutiques proposés dans le passé pour comprendre la relation entre l’Eglise et la Synagogue ont varié: du dualisme d’opposition à la complémentarité en passant par l’allégorisme de la substitution. Plusieurs de ces modèles étaient déjà connus par le judaïsme.
Le modèle dualiste qui oppose le Dieu violent de l’Ancien Testament au Père aimant du Nouveau Testament remonte à Marcion. L’inspiration gnostique qui l’habite n’a pas de bases bibliques: elle oppose le monde, la matière et la chair à l’esprit. Le vin nouveau apporté par Jésus ne peut pas être versé dans les outres de l’Ancien Testament, répétaient les tenants de cette position.
Le modèle allégorique aboutit à la spiritualisation de l’Ancien Testament étudié malgré tout avec amour et zèle. La typologie et la lecture symbolique de l’école d’Alexandrie qui insistent sur le sens spirituel qui dépasse le sens littéral préparent une mentalité inspirée par le dualisme hellénistique où l’Ancien Testament risque de perdre sa consistance et sa valeur historique. Philon avait déjà ouvert cette voie.
Dans le désert de Juda un groupe d’esséniens a manifesté un autre modèle de séparation par rapport à la société juive contemporaine : celui du vrai Israël. Ce modèle de séparation est en fait un modèle de réduction de la communauté aux proportions d’un groupe de parfaits, se proclamant le seul et unique groupe des fils de lumière. Ces gens se partageaient Israël et le monde et plus encore la vérité avec les fils des ténèbres et du mensonge. Leur doctrine dualiste se durcit, il n’y eut plus vraiment d’Israël, mais une communauté retirée de saints assimilée à l’assemblée céleste des anges. Ce groupe vivait en situation permanente de sanctification et se voulait séparé de la masse des hommes. Ce modèle élitiste disparut dans la résistance contre Rome, mais continue à revivre de nos jours dans l’Eglise.
Si le modèle dualiste exploite une logique de contrastes, le modèle anthologique tend à intégrer les différences. Le meilleur de l’Ancien Testament est alors incorporé à l’identité spirituelle de l’Eglise. Un choix s’opère entre ce qui est retenu valable universellement et ce qui apparaît dépassé. Le modèle anthologique finit souvent par devenir un modèle apologétique. L’adage de St Augustin « Novum Testamentum in Vetere latet; Vetus in Novo patet » ouvre la voie à ce type de lecture.
Le modèle des deux voies parallèles de salut qui définit Jésus le sauveur des chrétiens tandis que la Loi aurait le même rôle pour les Juifs, oublie l’affirmation de Paul qui voit en Jésus l’unique médiateur. Cette médiation de salut se fait cependant dans la kénose totale.
Au modèle de la substitution ou du transfert d’alliance le concile Vatican II a voulu apporter d’heureux correctifs. Jésus n’est pas un substitut à Israël, mais l’accomplissement d’Israël. C’est la position officielle que les chrétiens répètent actuellement. Ce qui ne veut pas dire que le christianisme soit l’accomplissement d’Israël.
Un problème sérieux se pose cependant, car tout accomplissement véritable est exhaustif. Derrière et devant lui il n’y a plus rien. On est à nouveau dans une impasse. Les juifs définissent d’ailleurs le christianisme comme le déplacement d’Israël, non pas comme son accomplissement.
Le modèle qu’il faut instaurer lorsqu’on aborde les rapports entre Israël et l’Eglise est un idéal qui respecte la signification religieuse d’Israël et la valeur de l’Ancien Testament en soi. L’appartenance chrétienne à Israël appartient à un modèle original qui remonte à l’Eglise de la circoncision. L’Ancien Testament conserve sa valeur structurale pour le chrétien parce que Jésus l’a observé. L’alliance de Dieu avec son peuple demeure au coeur de l’existence juive. Jésus est le « oui » donné à l’alliance (2 Co 1,20). La réponse du juif proclamée dans le Shema : « tu aimeras » garde sa valeur, parce que Jésus l’a définie comme le premier commandement. Avec Jésus Dieu entre dans l’histoire des hommes pour la transfigurer.
Mais si des chrétiens de la gentilité et des Juifs religieux veulent dialoguer, il sera de moindre utilité de lire ensemble les Ecritures hébraïques qui sont communes. Les chrétiens auront tout à gagner à apprendre à lire les textes rabbiniques avec les Juifs et les Juifs auront tout bénéfice à apprendre à lire le Nouveau Testament avec des chrétiens. Il faut avoir le courage de se poser d’emblée comme différents et de s’instruire en priorité sur ce qui distingue plutôt que de souligner, comme on le fait en général, ce qui unit. Dans un deuxième temps, le problème de l’origine de l’un et de l’autre, celui des liens mutuels pourra être envisagé et approfondi pacifiquement, jusqu’à l’évocation des conflits et des drames du passé qu’on ne peut pas ignorer. Quitter la problématique du vrai ou du faux permet d’entrer dans celle du différent. Chacun se comprendra alors avec sa différence en fonction de ce qu’il doit à l’autre. C’est une démarche d’authenticité plus que de repentance qu’il faut accomplir. Parler de suite de succession ou d’héritage, même de façon corrigée, c’est s’avancer sur un terrain miné et mène à la division.
Dans cette ligne l’accomplissement d’Israël apparaît comme un faux problème. Jésus accomplit seulement les Ecritures. On se libère ainsi du poids bimillénaire d’une démarche polémique aux effets collatéraux nocifs. A l’origine il y eut l’argumentation de Jésus avec les scribes, les Pharisiens et les Sadducéens. Paul de Tarse et Ignace d’Antioche repensèrent ce problème dans un contexte polémique. Le fondateur du christianisme et les penseurs qui l’ont suivi firent un usage pédagogique de l’accomplissement des Ecritures. Avant eux les Esséniens utilisèrent largement ce procédé en vue de montrer que leur communauté donnait aux oracles des prophètes leur sens exact. La question posée est celle de l’interprétation juste des Ecritures et celle de leur signification ultime. S’il y a débat, l’enjeu ne peut être que celui de la vraie Loi, et non celui du véritable Israël. Jésus proclama l’avènement du royaume de Dieu et non pas d’un Israël vrai ou nouveau. Paul nommera la même réalité l’Israël de Dieu par opposition à l’Israël selon la chair. Royaume de Dieu et Israël de Dieu sont synonymes. Mais il s’agit de tout autre chose qu’Israël en tant que groupe national. Cette distinction est fondamentale et conditionne deux identités différentes.
Historiquement le débat devint crucial dans le Dialogue de Justin avec Tryphon. Les deux groupes, chrétien et juif, cherchaient alors à préciser leur identité, plus encore leur légitimité face à un héritage de culture commune. La polémique déjà présente dans le Nouveau Testament prit à chaque étape une charge nouvelle. Le problème herméneutique mal compris aboutira à des dérives, voire même des violences, en répétant le thème de l’accomplissement dont on ne saisissait plus l’objet. La théologie du transfert d’alliance est à évaluer dans ce contexte. Elle sera toujours récusée par les Juifs.
C’est une théologie de la différence et du partenariat qu’il faut avoir le courage d’instaurer pacifiquement, plutôt que de parler d’accomplissement qui répète avec quelques variantes le thème de la substitution. L’image de l’olivier greffé de Paul peut intervenir ici pour justifier ce choix. Du sujet porteur qui reçoit le greffon il ne reste rien qui se distingue et que la vue puisse identifier. Il n’y a plus que l’arbre né de la variété greffée. Une autre image, celle des deux explorateurs qui reviennent du pays de Canaan portant sur leurs épaules une grappe immense, permet de mieux saisir le partenariat. Les deux portent la grappe qui symbolise le Christ. Mais le premier ouvre la voie sans voir celui qui suit, tandis que celui qui ferme la marche voit celui qui ouvre la route à travers la lumière du Christ. C’est ainsi que les Pères de l’Eglise ont expliqué cette scène biblique.
Le Nouveau Testament incarne l’Ancien au sens où l’alliance réalisée en Jésus rend possible la compréhension du pacte dans sa plénitude. Il n’est pas question d’une ou de deux alliances: l’économie du dessein de Dieu est une. Elle affirme l’unique dessein d’amour de Dieu pour son peuple. Il s’agit du mystère de Dieu qui veut englober tous les hommes dans le salut. Les formes de réalisation de ce dessein changent depuis l’alliance avec Noé, celle d’Abraham et celle du Sinaï. L’alliance scellée dans le sang du Christ ne nie pas les autres, mais les intègre toutes. Israël et l’Eglise doivent se définir en termes de différences et de complémentarité. Le Nouveau Testament illumine l’Ancien et l’Ancien donne au Nouveau ses racines solides tout en conservant sa valeur constitutionnelle. La permanence d’Israël en est le signe. L’Eglise n’annule pas Israël, qui continue sa recherche de Dieu à travers les Ecritures. La réconciliation entre les deux peuples a une dimension eschatologique et rappelle que le pèlerinage vers la Jérusalem céleste n’est pas encore achevé, car l’Eglise n’est pas le royaume. Peut-être arrivera-t-on un jour à la sagesse rabbinique qui affirme des écoles de Shammai et de Hillel: Celles-ci et celles-là sont les paroles du Dieu vivant. Ou bien reprendra-t-on la parabole de Jésus: Un père avait deux fils.
Parler du « mystère » d’Israël (Rm 11,25), c’est reconnaître que la signification dernière de l’histoire du salut nous échappe. Tout n’est pas dévoilé parce que tout n’est pas accompli. L’Eglise proclame que Jésus Christ est l’unique Sauveur du monde, et qu’elle vit de sa mort et de sa résurrection. Mais la permanence d’Israël est le signe de ce qui lui manque pour la complète réalisation de sa mission. Face au « déjà là » de l’Eglise, Israël est le témoin du « pas encore ». Le peuple juif et le peuple chrétien sont ainsi dans une situation d’émulation réciproque. Les chrétiens se réjouissent du « déjà là », tandis que les juifs rappellent le « pas encore ». Cette tension est au centre de toute la vie de l’Eglise, puisque dans la liturgie eucharistique elle appelle le retour de son Maître: « Viens. Seigneur Jésus
LIBAN : SA BÉATITUDE BÉCHARA RAÏ, UN NOUVEL ESPOIR POUR LES MARONITES
30 mars, 2011du site:
http://www.zenit.org/article-27387?l=french
LIBAN : SA BÉATITUDE BÉCHARA RAÏ, UN NOUVEL ESPOIR POUR LES MARONITES
Le nouveau patriarche invite à mettre de côté la politique
ROME, Jeudi 24 mars 2011 (ZENIT.org) – L’élection du atriarche Béchara Raï est « une nouvelle confirmation de l’action constante de l’Esprit Saint (…) Nous nous en sommes remis à lui pour mettre la bonne personne à la bonne place », ont commenté les évêques maronites après l’élection, le 15 mars dernier, du 77èeme patriarche d’Antioche des Maronites.
Le nouveau patriarche succède au cardinal Nasrallah Pierre Sfeir qui, après 26 ans, a présenté sa démission pour limite d’âge (cf. ZENIT, 15 mars 2011). Il est depuis le 19 mars en retraite spirituelle jusqu’au 25 mars, date à laquelle il sera désigné officiellement patriarche en l’Eglise patriarcale maronite de Bkerké.
En attendant, depuis l’annonce de sa nomination, commentaires et réactions de civils et religieux se sont multipliés au Liban, dont celle du premier ministre libanais, Naguib Miqati, qui a accueilli « avec joie » la nouvelle, souhaitant au nouveau patriarche d’être toujours « au service du Liban et des Libanais » et de contribuer au « renforcement de l’unité nationale qui est à la base de l’existence de la nation ».
« Je crois, a-t-il ajouté après une visite à sa résidence, que Sa Béatitude est bien consciente de la grandeur des défis qui l’attendent au niveau national et régional, et nous sommes sûrs qu’il aidera à mettre en valeur les principes d’unité nationale en même temps que les valeurs religieuses et morales ».
Muhammad al-Sammak, conseiller politique et religieux du Mufti de la République Libanaise, a quant à lui, défini le nouveau patriarche comme « un pionnier du travail pour l’unité à la fois des chrétiens et des Libanais », reconnaissant en lui un homme d’une « grande culture œcuménique » qui croit fermement à « l’importance du dialogue, de la coordination et de la collaboration entre les Eglises » et en « des rapports constructifs avec les musulmans, sans lesquels la nation ne saurait tenir ».
Mercredi, Mgr Bechara Raï, à l’occasion d’une conférence de presse au Centre catholique d’information à Jal-el-Dib, a invité à ne pas donner un ton politique à son installation.
Le directeur du centre, le père Abdo Abou Kassem, a fait savoir que le patriarche souhaite « un respect absolu de la dignité de toutes les personnes qui participeront à l’événement officiel et populaire » ; que cet événement soit « une communion spirituelle, un pèlerinage et un moment de prière ».
Le père Abou Kassem a insisté sur « l’interdiction de porter des drapeaux de parti ».
Les repas dans la Bible
30 mars, 2011du site:
http://www.stjosephdesepinettes.org/repas1.htm
1ère rencontre – Les repas dans la Bible
MANGER, UN ACTE SACRE ?
Après tout, pourquoi y a-t-il tant de moines sur les boîtes de fromage ? Pourquoi tant de vignobles portent-ils des noms de saints ? Pourquoi tant d’abbayes productrices de bières, de fromages, de liqueurs, de bonbons, de gâteaux, de chocolats et autres pâtes de fruits ? Pourquoi tant de bons religieux inventeurs d’élixirs en tous genres ? Mais aussi, pourquoi tant de mentions de repas dans l’Evangile ? La réponse paraît simple : c’est, bien sûr, parce que la nourriture est quelque chose de vital. Mais il faut aller plus loin : parce que c’est vital, parce que le boire et le manger sont, à toutes les époques, et en tous lieux, des éléments essentiels de la vie humaine, le boire et le manger sont très souvent intimement liés au sacré, et ce, dans toutes les religions.
Manger ensemble : le partage de la table crée entre les convives une communauté d’existence. Ce repas peut aussi avoir un caractère sacré, dans les religions païennes comme dans la Bible. Et on peut, en quelque sorte, s’asseoir à la table des démons ou à celle de Dieu : chacun réalise la communauté d’existence qu’il veut, avec Dieu ou avec les puissances d’en bas. Un exemple dans le Premier Testament de repas sacré d’alliance avec Dieu: Ex 24,7-11. Bien plus tard, on retrouvera cette notion de « repas d’alliance » dans la Cène de Jésus avec ses apôtres. A l’inverse, on trouve l’affaire du veau d’or : Ex 32,1-6.
ET EN FRANCE ?
Mais, pour l’instant, avant d’aller parcourir de plus près le monde biblique, puisque nous sommes en France, restons-y : la France qui aime tant donner des leçons au monde entier, et tout particulièrement quand il s’agit de cuisine, la France qui revendique haut et fort sa laïcité, la France qui a inventé une forme unique en son genre de séparation de l’Eglise et de l’Etat, la France donc, fait beaucoup dans le religieux quand il s’agit de manger et de boire.
Deux exemples de menu : vous pouvez faire un repas avec, grâce à un brave chanoine dijonnais, un Kir en apéritif ( à moins que vous ne préfériez un Cardinal, c’est la même chose mais avec du vin rouge ), des coquilles saint Jacques en entrée, du saint Pierre en plat de résistance, du saint Paulin en fromage et un saint Honoré en dessert, le tout arrosé, mettons, d’un vin blanc de st Véran.
Autre menu possible : un verre de saint Raphaël en apéritif, du jésus en entrée, des pieds de cochon à la sainte Menehould, une salade de capucine, et du saint Nectaire ; pour le dessert, vous avez le choix entre des clémentines, fruit inventé en Algérie par un Père Blanc, frère Clément, et des fruits de la passion, ainsi nommés parce que leurs fleurs figurent de manière paraît-il impressionnante le matériel de la passion de Jésus : la couronne d’épines, les fouets de la flagellation et les trois clous de la crucifixion. Le tout arrosé de st Amour, st Emilion ou st Estèphe ou, si vous le préférez, de st Yorre.
Pour les jours de fête, vous pouvez ouvrir une bouteille de champagne dom Pérignon : grâces soient rendues à ce bon religieux de l’abbaye de Hautvillers qui, au temps de Louis XIV, trouva la solution pour maîtriser et bonifier la fermentation capricieuse du vin des bords de Marne.
Restons, si j’ose dire, en odeur de sainteté, et parlons fromages. La France, dont le Général de Gaulle disait, paraît-il : « comment voulez-vous gouverner un pays qui possède 365 sortes de fromages ? », en réalité, en possède beaucoup plus. Or, beaucoup de fromages ont leur origine et souvent encore leur lieu de production dans des abbayes, comme l’Abondance, le Tamié, le Mont-des-Cats, le Belval, le Citeaux, le Maroilles, le Port Salut, le saint Marcellin, le saint Félicien, le sainte Maure, sans compter le Munster dont le nom vient semble-t-il du mot « monastère ». Faut-il parler du Caprice des Dieux ou du Chaussée aux Moines ?
Côté vignoble, c’est pas mal non plus : nombre de crus de Bordeaux s’appellent saint quelque chose. Pensez aussi au saint Pourçain ou au Châteauneuf-du-Pape ( dont le nom vient de la proximité d’Avignon où la Papauté s’installa quelque temps ). Et en plus, quand le vin est bon et qu’il flatte le palais, toutes opinions religieuses confondues, tout bon Français s’exclame : « c’est le petit Jésus en culotte de velours » ….
Côté bières, on pourrait faire une litanie avec les abbayes du Nord de la France et surtout de nos voisins belges : Leffe, Affligem, Chimay, etc. N’oublions pas, à tout péché miséricorde, de citer une très bonne bière qui s’appelle le « fruit défendu », dont Adam et Eve fort peu vêtus ornent l’étiquette. Pour compenser, d’autres étiquettes de bières portent d’ailleurs de très suggestifs portraits de diables.
Et que dire, côté liqueurs, de la Bénédictine ou de la Chartreuse ?
Comme on a l’esprit large, on peut même boire de l’eau : saint Yorre, saint Amand, san Pellegrino, sainte Enimie, saint Georges, sainte Marguerite, il n’y a que l’embarras du choix.
Côté sucreries, c’est la même chose : on trouve des nonnettes et des religieuses, mais aussi, fermons nos chastes oreilles, des pets de nonne. On trouve aussi des galettes saint Michel, ou des pains d’épice en forme de saint Nicolas, que certains enseignants du Nord de la France ont interdit dans leurs écoles au nom de la laïcité, mais ceci est une autre histoire. Il existe également des gâteaux moins connus qui s’appellent le Sacristain, le doigt de la Vierge ou le Jésuite.
Ou n’oubliera pas non plus de mentionner la galette des Rois, les crêpes de la Chandeleur, les cloches et les œufs de Pâques.
Et si avec tout cela vous avez une indigestion, pas de souci, on a de quoi vous soigner avec l’eau de mélisse des Carmes, les gouttes de l’abbé Chaupitre ou la Jouvence de l’abbé Soury.
Mais comme nous sommes un peuple très prévoyant, pour vous faire pardonner vos excès, vous pouvez vous adresser :
à saint Antoine, patron des charcutiers,
à saint Vincent, patron des vignerons,
à saint Amand, patron des brasseurs et cafetiers,
à saint Honoré, patron des boulangers,
à saint Pierre, patron des pécheurs et des poissonniers,
à saint Laurent, patron des rôtisseurs,
à saint Michel, patron des biscuitiers,
à saint Nicolas, patron des confiseurs, etc.
DANS LA BIBLE …
Plus sérieusement, la nourriture en général et les repas en particulier jouent un rôle prépondérant dans l’histoire humaine et donc dans l’histoire biblique. Du fruit cueilli par Adam et Eve ( dont la Bible n’a d’ailleurs jamais dit que c’était une pomme ) au repas de l’eucharistie, en passant par la manne au désert et les noces de Cana, beaucoup de moments décisifs se jouent autour d’un repas. Combien de fois ne voit-on pas Jésus partager le repas de gens très différents, de la famille de Lazare à une table de pharisien en passant par Zachée ou Lévi les publicains. Ce sera d’ailleurs un des points de friction entre Jésus et les religieux de son peuple : Mc 2,13-17, Mt 11,18-19.
Notons aussi que le récit de la multiplication des pains et du gigantesque repas qui en découle est le texte le plus fréquent des quatre Evangiles, puisqu’on en trouve pas moins de six narrations : 2 chez Matthieu, 2 chez Marc,1 chez Luc et chez Jean.
Nous allons donc, au fil des rencontres, essayer de mieux comprendre tout cela. Nous irons dans l’Ancien et dans le Nouveau Testament, en passant souvent de l’un à l’autre. Nous regarderons de près le sens de la Pâque juive pour mieux voir ce que le Nouveau Testament apporte de radicalement neuf dans l’eucharistie ; nous découvrirons quelques coutumes de repas à sens religieux à travers le monde ; et nous nous attacherons particulièrement à la messe.
LA NOURRITURE AUX TEMPS BIBLIQUES
Et d’abord : qu’est-ce qu’on mange ? Commençons par regarder comment les repas se passaient au quotidien dans le monde biblique.
Bien entendu, ce que je vais décrire ici est surtout vrai à partir du moment où Israël s’est sédentarisé, à partir du moment où les tribus revenant d’Egypte ont commencé à s’installer de manière un peu plus stable et un peu plus durable, autrement dit à partir du X° s. Et comme, contrairement à notre époque, en ces temps-là les choses de la vie courante évoluent assez lentement, ce sera, en gros, le quotidien que connaîtra Jésus. Avant cette sédentarisation, au temps de l’errance des tribus nomades, il faut évidemment imaginer une vie et donc une nourriture encore plus simple et fruste.
LA CREATION EST BONNE
Il faut d’abord dire que la religion juive est une religion très réaliste, très proche des réalités de la vie de chaque jour. Son point de départ est une conviction de foi : la création est bonne : et Dieu vit que cela était bon, répète le poème de la Création au livre de la Genèse. Dans toute la Bible, monte le chant d’action de grâce pour le créateur : Ps 65,10-14 ; 104,15.27-28. Les choses et les gestes les plus humbles de la vie sont sacrés parce qu’ils entrent dans le plan de Dieu. Un exemple : la Loi d’Israël exigeait de réciter une prière avant et après les repas. On demande à Dieu ce dont on a besoin : Pr 30,7-9. Les biens matériels ne sont pas méprisables, puisqu’ils viennent de Dieu, mais l’homme doit s’en souvenir. Ce que l’homme possède, il le doit à Dieu, et l’abondance matérielle doit être prise comme un signe de bénédiction de Dieu. Regardez comment Dieu récompense Job de sa fidélité dans l’épreuve : en multipliant ses biens ( Jb 42,10-15 ). Chez les prophètes, l’annonce d’un temps de paix et de joie après des temps d’épreuve, prend bien souvent des images de banquet : par exemple, chez Joël : vous mangerez à satiété, vous louerez le nom du Seigneur votre Dieu, qui a agi merveilleusement pour vous ( Jl 2,26 ) ; Ce jour-là, les montagnes dégoulineront de vin nouveau, les collines ruisselleront de lait, dans tous les ruisseaux de Juda les eaux couleront ( Jl 4,18 )
Mais que mangeait-on aux temps Bibliques ? Une nourriture simple, modeste. Connu depuis très longtemps au Moyen-Orient, le pain constituait l’essentiel de l’alimentation. Cela restera vrai dans beaucoup d’endroits et jusqu’à une époque récente : n’oublions pas qu’une des raisons de la prise de la Bastille en 1789 fut une augmentation telle du prix du pain que les pauvres ne pouvaient plus se nourrir. En hébreu, « manger son pain » signifiait « prendre un repas ». Il fallait donc traiter le pain avec respect : même si le pain durci servait parfois d’assiette, il était par exemple interdit de poser de la viande crue ou une cruche sur le pain, ou de placer un plat chaud à côté ; il était encore plus interdit de le jeter : on devait ramasser les miettes « à partir de la taille d’une olive ». On ne coupait pas le pain : on le rompait. Pensez aux paroles de la messe : Jésus prit du pain, et après avoir prononcé la bénédiction, il le rompit ( Mt 26,26 ).
Le pain n’était pas le même pour tous : les pauvres mangeaient du pain d’orge, les riches du pain de froment, toujours broyé entre deux meules de pierre, ce travail étant souvent celui de la femme. Les grains de blé pouvaient aussi être rôtis, et servir de garniture à la viande. Broyés un peu gros, cela donnait l’équivalent de la polenta savoyarde ou du couscous des Arabes. On en faisait aussi des gâteaux, parfumés à la menthe, ou au cumin, et même, eh oui, à la sauterelle. Existaient aussi les beignets de farine et de miel frits à la poêle, ce qui n’est pas sans rappeler certaines pâtisseries orientales d’aujourd’hui. Et l’on savait déjà faire des sortes de bonbons parfumés à la rose ou au jasmin, l’équivalent des loukoums d’aujourd’hui.
Au lait de vache on préférait celui de chèvre ou de brebis. Quant au miel, il avait une grande place dans l’alimentation, puisqu’il servait de sucre.
En revanche, l’œuf était quasiment inconnu : on n’en parle pas une seule fois dans l’Ancien Testament, et une fois ( dans la bouche de Jésus ) dans le Nouveau Testament.
Les légumes aussi avaient une grande place : fèves, lentilles ( qui ont rendu Esaü célèbre ! ), mais aussi les salades, les concombres, les oignons.
On mangeait peu de viande : c’était un aliment de luxe réservé aux grandes fêtes ou aux familles les plus riches. Le veau gras pour les grandes circonstances, l’agneau pour les fêtes religieuses, et plus ordinairement le chevreau, le pigeon, mais aussi la gazelle, la caille et la perdrix. Mais c’était surtout le poisson qui nourrissait le petit peuple, mangé le plus souvent grillé ou séché. Si bien que la base du menu habituel, et souvent le menu tout court, était composée de pain et de poisson. On retrouvera bien sûr cela dans les Evangiles : multiplication des pains, repas du Christ ressuscité …
Plus exotique pour nous, on mangeait beaucoup de sauterelles : pensez à Jean Baptiste : il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage ( Mt 3,4 ). Cuites à l’eau avec du sel, comme des crevettes, séchées ou confites dans le miel ou le vinaigre, ou bien réduites en poudre pour parfumer des galettes. Tout cela était cuisiné avec beaucoup d’épices : le sel, venant des bords de la Mer Morte, mais aussi cumin, câpres, coriandre, safran, etc.
Le beurre étant quasiment inconnu, tout était évidemment cuisiné à l’huile d’olive, qui servait aussi en médecine.
Enfin, une grande place était donnée aux fruits : melons, grenades et dattes, figues et raisins dont Jésus parlera souvent, mais aussi les fruits secs grillés : amandes, noix, pistaches.
La religion contrôlait soigneusement tout cela : l’agneau devait être rôti aux ceps de vigne, et surtout il y avait des interdits alimentaires absolus : le porc bien sûr, mais aussi d’autres : Lv 11,1-23. Et les gestes les plus simples étaient aussi très réglementés : Lv 11,29-35.
Le sang étant le symbole de la vie, il était évidemment impensable de manger la chair d’un animal qui n’aurait pas été saigné : c’est la viande kasher : Lv 17,10-14.
Manger c’est bien, mais il faut aussi boire. On buvait de l’eau bien sûr, mais aussi du lait, ou du vinaigre plus ou moins rallongé avec de l’eau ( pensez au Christ en croix : quelqu’un courut, emplit une éponge de vinaigre, et la fixant au bout d’un roseau, il lui présenta à boire ( Mc 15,36 ). On trouvait aussi des jus de fruits plus ou moins fermentés ( il fait chaud ) et même la schechar, une sorte de bière à base de mil et d’orge, qui paraît-il n’était pas sans rappeler la cervoise chère à Obélix et à ses amis Gaulois.
Mais la boisson par excellence était le vin. Il était sacré puisque, sans aucun doute, c’est Dieu qui avait inspiré Noé, premier viticulteur de la Bible. Ce bon Noé fut d’ailleurs le premier ivrogne identifié de la création : Gn 9,20-27. L’Ancien Testament cite le vin 141 fois, ce vin source de joie : le vin réjouit le cœur des humains en faisant briller les visages plus que l’huile. Le pain réconforte le cœur des humains ( Ps 104,15 ). Il peut être la meilleure et la pire des choses : Si 31,25-31. Il y a même de descriptions assez réalistes de l’alcoolisme : Pr 23,29-34. Comme on n’ignorait pas les conséquences d’une consommation excessive de vin, il était interdit aux magistrats qui allaient rendre la justice et aux prêtres en fonction : Lv 10,8-11.
La vigne était le symbole d’Israël, pensez aux paraboles de Jésus sur les vignerons. Le vin était donc lui aussi l’objet de nombreuses prescriptions rituelles.
C’était semble-t-il uniquement du vin rouge, sans doute assez épais, riche en alcool et en tanin. On le servait donc toujours mélangé avec de l’eau. Il était conservé soit dans de grandes jarres, soit dans des outres faites de peaux de chèvre tannées et fermées par une cheville de bois. Là encore, ces outres serviront à Jésus pour développer une parabole.
A TABLE …
On prenait volontiers les repas dehors, dans la cour qui servait à mille choses. On s’installait au moment du repas : on n’a pas retrouvé en Palestine ce qu’on a retrouvé par exemple à Pompéi, des « salles à manger » permanentes. Le peuple ne prenait souvent que deux repas par jour, un tôt le matin avant d’aller au travail, un le soir une fois le travail terminé.
Pour les repas de grande cérémonie ( noces par exemple ) les esclaves et les servantes transmettaient l’invitation, et l’habit de fête était de rigueur ( là encore, on retrouve cela dans les paraboles de Jésus ). Le maître de maison veillait à ce qu’on aie lavé les pieds des invités, lesquels devaient se laver les mains et surtout la droite, qui servait à prendre les aliments. Dans les très grands festins, l’usage était de parfumer la tête des invités de marque.
Très longtemps on a mangé assis, jamais debout, mais au temps de Jésus l’influence de la mode gréco-romaine avait introduit le repas couché sur des coussins, où on s’appuyait sur le coude gauche pour manger de la main droite : pensez aux préparatifs du dernier repas pascal de Jésus avec ses apôtres : vous trouverez à l’étage une grande pièce garnie de coussins ; faites-y les préparatifs ( Lc 22,12 ). Le Siracide explique très bien les choses : 31,12-21. Quand il y avait des invités, le maître de maison ou le maître du repas les servait lui-même : Jésus prit la bouchée qu’il avait trempée et la donna à Judas Iscariote, fils de Simon ( Jn 13,26 ). Bien entendu, la fourchette n’existait pas. En guise d’assiettes, des coupes larges en métal étamé ( jamais en terre, c’était impur ) ou de simples galettes de pain dur. Chez les gens riches, on trouvait de la vaisselle d’argent ou d’or, des cuillers d’ivoire ou de bois rare, et les romains avaient introduit l’usage de la louche.
Les repas des plus pauvres se composaient généralement de pain d’orge, d’olives, de sauterelles et de fruits. Les gens un peu plus aisés ajoutaient du poisson, ce qui a dû être le quotidien de Jésus. En montant encore un peu dans l’échelle sociale, on trouvait d’autres mets sur la table, par exemple du chevreau, des gâteaux et du vin.
C’est dans ce quotidien que Jésus, on l’a évoqué, puisera beaucoup d’images pour ses discours et paraboles.
Mais avant d’en arriver à l’Evangile, faisons à présent un long détour par le sens sacré des repas dans l’Ancien Testament.
PARCOURS BIBLIQUE sur la NOURRITURE
Commençons par le commencement : tout débute au jardin d’Eden. Tout ce qui est beau et bon existe là : Gn 2,9. Mais il y a une limite : Dieu met un frein à l’appétit des hommes, au désir de tout dévorer, de tout goûter : Gn 2,16. Accepter la Parole de Dieu sur la nourriture, c’est accepter une loi qui me rappelle Sa présence : le jardin et ses fruits sont offerts à l’homme, mais dans ce jardin la Parole de Dieu, elle aussi, est vie, est nourriture. On connaît la suite de l’histoire : en mangeant du fruit défendu, en voulant dévorer ce qui appartient à Dieu, l’homme et la femme s’éloignent de leur vocation et de leur proximité avec Dieu.
BENIR …
Ainsi, manger n’est pas anodin, il y a une manière de manger qui respecte Dieu, et ce jardin, mais aussi ce que nous sommes. Il y a une manière de manger qui, en voulant tout absorber, apporte la souffrance et la mort. La leçon pour nous est d’apprendre à manger en bénissant Dieu, en n’oubliant pas le donateur. C’est le sens du « benedicite » avant le repas et des grâces après.
… PARTAGER
On peut vouloir tout accaparer, mais on peut à l’inverser partager son pain avec d’autres, accueillir à sa table, s’asseoir à une même table. Le fait de manger ensemble entrera dans les rituels d’alliance, dans les alliances humaines comme dans l’alliance avec Dieu. Par exemple, avant de se faire un serment mutuel, Isaac et son ancien ennemi Abimélek commencent par un festin : Gn 26,26ss. Accepter de manger et de boire ensemble nous engage les uns envers les autres. Ici, le repas scelle l’alliance entre Isaac et Abimélek. Partager la table de son ancien ennemi, c’est rétablir la paix, la communion.
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29 mars, 2011Le « Parvis » de Paris. Un bilan (par Sandro Magister)
29 mars, 2011du site:
http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1347285?fr=y
Le « Parvis » de Paris. Un bilan
Confrontation du cardinal Ravasi et de l’agnostique Julia Kristeva. Et, avec eux, de dizaines d’autres chercheurs croyants et non croyants. Les prochaines étapes du dialogue voulu par Benoît XVI auront lieu à Chicago, au Québec et à Stockholm
par Sandro Magister
ROME, le 29 mars 2011 – L’idée est venue de Benoît XVI en personne. De même que le nom : Parvis des gentils. « Au dialogue avec les religions – avait-il dit en présentant ses vœux à la curie romaine le 21 décembre 2009 – doit aujourd’hui s’ajouter le dialogue avec ceux à qui Dieu est inconnu ».
Et l’idée a fait son chemin. Après un prologue le 12 février à Bologne, dans ce qui fut la première grande université d’Europe, la première rencontre du Parvis des gentils a eu lieu les 24 et 25 mars à Paris, dans la « Ville Lumière », qui symbolise les Lumières modernes.
Ces « gentils » qui, à Jérusalem, accédaient au temple dans l’espace qui leur était réservé, à eux les non-juifs, sont aujourd’hui les gens qui sont loin de Dieu, les non-croyants.
Mais, comme Paul le disait déjà dans sa lettre aux chrétiens d’Éphèse, leur parvis n’est pas un parvis fermé. Parce que le Christ a justement abattu ce mur de séparation qui dissociait les juifs des gentils, « afin de créer en sa personne les deux en un seul homme nouveau, faire la paix et les réconcilier tous deux en un seul corps ».
C’est ce que l’on a voulu faire à Paris. Des voix croyantes et des voix agnostiques ont débattu amicalement. Sur un terrain de frontière. Chacun avait les pieds plantés dans son terrain mais était prêt à écouter les raisons de l’autre.
Les endroits où s’est déroulée cette rencontre avaient également une signification symbolique. L’UNESCO, l’Institut de France, la Sorbonne sont des lieux laïques par excellence. Tandis que le Collège des Bernardins est un vieux cénacle de culture catholique. Et la cathédrale Notre-Dame a été l’un et l’autre en même temps : le parvis pour tous les hommes de bonne volonté et l’intérieur de la cathédrale pour la prière dirigée par la communauté de Taizé, les portes ouvertes.
On peut trouver le programme des deux journées, avec les lieux de rencontre, la présentation des orateurs et les textes des interventions, sur un site en langue française créé pour l’occasion et géré par le conseil pontifical de la culture et l’Institut Catholique de Paris:
> Parvis des gentils, 24-25 mars 2011
Le message adressé par Benoît XVI aux personnes qui participaient à la rencontre – transmis par vidéo en grand écran sur le parvis de Notre-Dame, le soir du 25 mars – se trouve sur cette page de www.chiesa :
> « Sur ce parvis du Dieu Inconnu… »
Mais pour mieux comprendre la pensée de Benoît XVI qui est derrière le Parvis des gentils, il faut relire la partie finale du discours qu’il avait prononcé le 12 septembre 2008 à Paris, dans ce même Collège des Bernardins qui a été le théâtre de l’une des rencontres de ces jours derniers :
« Le schéma fondamental de l’annonce chrétienne ‘ad extra’ – aux hommes qui, par leurs questionnements, sont en recherche – se dessine dans le discours de saint Paul à l’Aréopage [...] : « On dirait un prêcheur de divinités étrangères » (Ac 17, 18). Ce à quoi Paul réplique : ‘J’ai trouvé chez vous un autel portant cette inscription : Au dieu inconnu. Or, ce que vous vénérez sans le connaître, je viens vous l’annoncer’ (cf. 17, 23). Paul n’annonce pas des dieux inconnus. Il annonce Celui que les hommes ignorent et pourtant connaissent : l’Inconnu-Connu. C’est Celui qu’ils cherchent, et dont, au fond, ils ont connaissance et qui est cependant l’Inconnu et l’Inconnaissable. Au plus profond, la pensée et le sentiment humains savent de quelque manière que Dieu doit exister et qu’à l’origine de toutes choses, il doit y avoir non pas l’irrationalité, mais la Raison créatrice, non pas le hasard aveugle, mais la liberté. Toutefois, bien que tous les hommes le sachent d’une certaine façon – comme Paul le souligne dans la Lettre aux Romains (1, 21) – cette connaissance demeure ambigüe : un Dieu seulement pensé et élaboré par l’esprit humain n’est pas le vrai Dieu. Si Lui ne se montre pas, quoi que nous fassions, nous ne parvenons pas pleinement jusqu’à Lui.
« La nouveauté de l’annonce chrétienne c’est la possibilité de dire maintenant à tous les peuples : Il s’est montré, Lui personnellement. Et à présent, le chemin qui mène à Lui est ouvert. La nouveauté de l’annonce chrétienne ne réside pas dans une pensée, mais dans un fait : Dieu s’est révélé. Ce n’est pas un fait nu mais un fait qui, lui-même, est Logos – présence de la Raison éternelle dans notre chair. ‘Verbum caro factum est’ (Jn 1, 14) : il en est vraiment ainsi en réalité, à présent, le Logos est là, le Logos est présent au milieu de nous. C’est un fait rationnel. Cependant, l’humilité de la raison sera toujours nécessaire pour pouvoir l’accueillir. Il faut l’humilité de l’homme pour répondre à l’humilité de Dieu.
« Sous de nombreux aspects, la situation actuelle est différente de celle que Paul a rencontrée à Athènes, mais, tout en étant différente, elle est aussi, en de nombreux points, très analogue. Nos villes ne sont plus remplies d’autels et d’images représentant de multiples divinités. Pour beaucoup, Dieu est vraiment devenu le grand Inconnu. Malgré tout, comme jadis où derrière les nombreuses représentations des dieux était cachée et présente la question du Dieu inconnu, de même, aujourd’hui, l’actuelle absence de Dieu est aussi tacitement hantée par la question qui Le concerne. ‘Quaerere Deum’ – chercher Dieu et se laisser trouver par Lui : cela n’est pas moins nécessaire aujourd’hui que par le passé. Une culture purement positiviste, qui renverrait dans le domaine subjectif, comme non scientifique, la question concernant Dieu, serait la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un échec de l’humanisme, dont les conséquences ne pourraient être que graves. Ce qui a fondé la culture de l’Europe, la recherche de Dieu et la disponibilité à L’écouter, demeure aujourd’hui encore le fondement de toute culture véritable ».
*
Après ses débuts à Paris, le Parvis des gentils, sous la direction du cardinal Gianfranco Ravasi, a déjà mis en chantier d’autres rendez-vous en différents points du monde : à Tirana, à Stockholm, aux États-Unis, au Canada et aussi en Asie, continent où l’on rencontre moins un athéisme de type occidental mais où sont répandues des formes de religiosité qui ne sont pas moins éloignées du Dieu chrétien.
On trouvera ci-dessous un premier bilan de la rencontre de Paris, effectué par le cardinal Ravasi, ainsi qu’une discussion avec une intellectuelle française d’origine bulgare, Julia Kristeva, qui a été l’une des participantes les plus convaincues au Parvis.
Ces deux interviews ont été réalisées par Lorenzo Fazzini pour le quotidien de la conférence des évêques d’Italie, « Avvenire ».
RAVASI : « CE QUI SERA DIFFICILE, CE SERA DE DIALOGUER AVEC LES INDIFFÉRENTS »
Q. – Éminence, le premier Parvis est terminé. Quel bilan en tirez-vous ?
R. – Très positif, à plusieurs niveaux. Tout d’abord au niveau thématique, où il y a eu beaucoup de créativité. Nous espérons réunir toutes les interventions afin de pouvoir en tirer des indications pour les futurs Parvis. En second lieu, on a eu une très forte expansion dans l’expression culturelle, du point de vue sociopolitique à l’Unesco, intellectuel à la Sorbonne et thématique au Collège des Bernardins. Pour l’avenir nous pensons aborder des thèmes plus sectoriels, par exemple foi et science ou bien foi et art.
Q. – Qu’avez-vous perçu comme réaction dans le monde de la culture et la société française à propos du thème de la confrontation entre athées et catholiques ?
R. – Hier le philosophe agnostique Jean-Luc Ferry m’a demandé audience à la nonciature parce qu’il veut à tout prix écrire un livre avec moi à propos de l’Évangile de Jean. Cela aurait été impensable autrefois ! Cet épisode est emblématique parce que, du côté laïque, on désire non seulement dialoguer mais aussi élaborer une réflexion en commun avec les croyants. Ferry est l’une des figures les plus remarquables de la culture française. Et le recteur de la Sorbonne lui-même m’a interpellé à propos du thème de la « laïcité », en me demandant ce que nous avions à dire, nous catholiques, à ce sujet. Le monde laïc français s’est révélé beaucoup plus disponible que nous ne le pensions en ce qui concerne la question religieuse, la réflexion théologique.
Q. – Y a-t-il chez les athées une crainte que l’Église ne tente une sorte d’évangélisation dissimulée ?
R. – Non. Je n’ai rencontré cette préoccupation que dans les médias. Je n’ai trouvé aucune crainte chez nos interlocuteurs. D’autre part toute l’initiative du Parvis a été présentée comme un moment strictement culturel.
Q. – Comment pensez-vous agir en ce qui concerne les « nouveaux athées » ?
R. – D’un côté il y a un athéisme ironique et sarcastique, qui constitue désormais un élément significatif : Michel Onfray en fait partie, mais il a écrit à l’un de mes collaborateurs pour nous informer qu’il veut démontrer que ce qu’il propose ne relève pas de cette manière de voir. Nous étudierons donc également ces formes d’athéisme, « mineures » d’un point de vue intellectuel mais « majeures » en termes de diffusion. D’un autre côté il existe aussi le camp de l’indifférence, qui est selon moi plus grave et plus important. S’interroger sur les questions des « humanistes » – comme le fait, par exemple Julia Kristeva – est le dernier des problèmes pour les indifférents. Sur ce front nous n’avons pas de véritable interlocuteur. Nous ne disposons que d’un petit nombre d’études sur ce sujet, en dehors des travaux de sociologie de Charles Taylor, pour vérifier les structures profondes qui sont à la base de cette attitude. Ce sera le travail le plus difficile à effectuer pour l’avenir.
Q. – Quel avenir pour le Parvis ?
R. – Il faudra moduler la proposition en fonction des situations. Par exemple : au Québec ou à Chicago, où nous nous rendrons prochainement, nous devrons rester dans le domaine de la technologie et de la science, et ne pas apporter de propositions aussi « hautes » que celles que nous avons faites ici à Paris. Reste le problème de la continuité : une proposition comme le Parvis devrait être un espace normal dans l’activité pastorale de tous les diocèses.
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KRISTEVA : « AMIS LAÏCS, N’AYEZ PAS PEUR DE LA RELIGION »
Q. – Dans votre livre « Cet incroyable besoin de croire » vous écrivez que l’humanisme « n’est pas opposé aux religions, pas plus qu’il n’est d’accord avec elles ». Pouvez-vous nous expliquer pourquoi?
R. – Nous nous trouvons à un moment où le dialogue entre chrétiens et humanistes est très important. Rien ne facilite ce contact : ces deux communautés connaissent une crise d’identité, on voit qu’elles sont vulnérables et elles ont des difficultés avec leurs interlocuteurs. Selon moi, cet échange est absolument nécessaire pour faire face à la crise économique et politique actuelle. Mais avant tout il faut comprendre ce que j’entends par humanisme. Je me réfère à quelque chose qui est distinct de la religion, qui naît à la Renaissance avec Érasme, traverse la période des Lumières avec Rousseau et arrive jusqu’à nous, par exemple dans la psychanalyse. Il s’agit là de ce qu’Hannah Arendt et Alexis de Tocqueville appelaient « le fil rompu de la tradition ». Ce processus est irréversible et aujourd’hui il est confronté au risque de la liberté, de l’individualité extrême et des passions totalement libérées. Mais il nous conduit à la nécessité de relire notre tradition « rompue », parce que quelque chose a été perdu.
Q. – Donc même l’humanisme sans foi a besoin de la religion ?
R. – L’humanisme doit trouver une richesse propre plus profonde et une relation nouvelle avec les systèmes moraux. Pour moi, personnellement, cela signifie une confrontation avec le catholicisme, grâce auquel il m’est possible de refonder mes propres Lumières. Les nouvelles manifestations modernes de la question de la femme, de l’enfance, des jeunes, posent le problème d’un nouveau rapport avec l’expérience religieuse, par exemple dans la prière. Cette rencontre ne doit pas aboutir à une simple « grande fraternité » entre l’humanisme et les religions, mais bien plutôt à la refondation de toute une tradition. C’est pourquoi il est nécessaire que les croyances, habituellement dogmatiques, soient elles aussi capables de se remettre en question.
Q. – Au cours d’une conférence à la cathédrale Notre-Dame, vous avez affirmé que le christianisme a pratiqué une révolution en ce qui concerne la souffrance. On reproche souvent à la religion chrétienne un dolorisme antihumain…
R. – Je pense que le christianisme, surtout dans sa pratique, a été une innovation dans l’histoire de la compréhension de la douleur. Selon les chrétiens la souffrance ne constitue pas une défaite de l’homme et elle n’aboutit pas à exclure de la société celui qui souffre. La douleur ne constitue pas une diminution de l’homme et elle ne le rend pas moins homme. Au contraire, elle devient le chemin pour arriver à Dieu. En souffrant le Christ manifeste Dieu lui-même. L’être humain qui souffre devient digne d’être accompagné et respecté. À partir de là, deux voies s’ouvrent. D’un côté, un certain dolorisme qui porte à des excès (Nietzsche l’a qualifié de « victimiste » ; aujourd’hui on parle de « christianisme bio-négatif »). De l’autre, on trouve le christianisme triomphant qui, face la douleur, déclenche la compassion envers l’autre : c’est l’accompagnement de la charité. Il se manifeste dans la proximité vis-à-vis du pauvre, du marginal, du handicapé. Et face à la dérégulation morale du monde des shows et du capitalisme, qui interprète tout en termes de productivité, nous risquons de perdre le sens de la vulnérabilité de la personne. Nous avons besoin de la tendresse chrétienne et nous devons nous appuyer sur le christianisme pour vaincre ce monde qui veut nier la douleur.
Q. – Quels exemples voyez-vous de cette « tendresse » chrétienne ?
R. – Je pense à certaines organisations chrétiennes et catholiques qui viennent en aide aux derniers, là où l’État n’arrive pas. Aujourd’hui la figure qui me paraît la plus significative est celle de Jean Vanier. Pendant un an j’ai entretenu avec lui une correspondance à propos de notre expérience de la douleur, en particulier du handicap, à tous les niveaux : politique, social, intellectuel et existentiel. Jean Vanier est un exemple unique : il a fondé 140 communautés de son « Arche ». Il prolonge ce que Saint François a fait il y a plusieurs siècles en Italie.
Q. – Que pensez-vous du « Parvis des gentils » ?
R. – C’est une très belle initiative, même si je ne sais pas quels résultats elle donnera. Il s’agit de quelque chose de surprenant, un début de ce dialogue qui me paraît nécessaire mais qui inspire des craintes à beaucoup de gens. Aussi bien les croyants que les non-croyants marchent sur la pointe des pieds par peur de perdre. Cela me fait penser à l’appel de Jean-Paul II, que j’avais rencontré en Bulgarie. Nous nous souvenons tous de son « N’ayez pas peur ». Il s’adressait aux catholiques et faisant référence au communisme. Et l’on a vu les résultats : naissance de Solidarnosc et chute du Mur de Berlin. Je veux dire à mes amis laïcs : « N’ayez pas peur de la religion ». Vous avez les moyens de penser le besoin religieux sans avoir peur d’être engloutis par l’obscurantisme. Nous pouvons faire mieux que Voltaire, en dépassant les abus de la religion et en regardant ce qu’il y a de positif dans le fait de croire.
Q. – « Rendre Dieu présent dans le monde », c’est le programme de l’actuel pontificat. Voyez-vous un danger dans cet objectif de Benoît XVI ?
R. – Quand il parle de ‘rendre Dieu présent dans le monde’, le Pape fait son métier : il serait étonnant qu’il ne le fasse pas ! Du reste il faut souligner que, seul des monothéismes, le christianisme a promu l’idée d’universalité. Il me semble que la politique de ce pape va en ce sens. Les religions monothéistes sont exposées au risque de s’imposer comme vérité, y compris violente, mais en même temps elles proposent en elles-mêmes le thème de la pluralité, le germe de la diversité et de l’étranger. Mon souhait est que, à partir de la confrontation dans le cadre du Parvis, on puisse se lancer dans cette voie d’universalité.