Archive pour novembre, 2010
CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DU I DIMANCHE DE L’AVENT (2008)
26 novembre, 2010du site:
CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DU I DIMANCHE DE L’AVENT
HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI
Basilique Vaticane
Samedi 29 novembre 2008
Chers frères et sœurs!
Avec cette liturgie des vêpres, nous commençons l’itinéraire d’une nouvelle année liturgique, en entrant dans le premier des temps qui la composent: l’Avent. Dans la lecture biblique que nous venons d’écouter, tirée de la Première Lettre aux Thessaloniciens, l’apôtre Paul utilise précisément ce terme: « venue », qui en grec se dit « parusia » et en latin « adventus » (1 Ts 5, 23). Selon la tradition commune de ce texte, Paul exhorte les chrétiens de Thessalonique à demeurer irrépréhensibles « pour la venue » du Seigneur. Mais dans le texte original on lit « dans la venue » , comme si l’avent du Seigneur était, plus qu’un point du temps dans l’avenir, un lieu spirituel où cheminer déjà dans le présent, pendant l’attente, et au sein duquel être justement parfaitement gardés dans toutes nos dimensions personnelles. En effet, c’est précisément cela que nous vivons dans la liturgie: en célébrant les temps liturgiques, nous actualisons le mystère – dans ce cas-là, la venue du Seigneur – de manière à pouvoir, pour ainsi dire, « cheminer en elle » vers sa pleine réalisation, à la fin des temps, mais en puisant déjà sa vertu sanctificatrice, étant donné que les temps derniers ont déjà commencé avec la mort et la résurrection du Christ.
Le terme qui résume cet état particulier, où l’on attend quelque chose qui doit arriver, mais que dans le même temps l’on entrevoit et l’on pressent, est « espérance ». L’Avent est par excellence la saison spirituelle de l’espérance, et en lui, l’Eglise tout entière est appelée à devenir espérance, pour elle-même et pour le monde. Tout l’organisme spirituel du Corps mystique assume, pour ainsi dire, la « couleur » de l’espérance. Tout le peuple de Dieu se remet en chemin attiré par ce mystère: que notre Dieu est « le Dieu qui vient » et qui appelle à aller à sa rencontre. De quelle manière? Tout d’abord sous cette forme universelle de l’espérance et de l’attente qui est la prière, qui trouve son expression éminente dans les Psaumes, paroles humaines à travers lesquelles Dieu lui-même a placé et place continuellement sur les lèvres et dans le cœur des croyants l’invocation de sa venue. Arrêtons-nous donc quelques instants sur les deux Psaumes sur lesquels nous venons de prier et qui se suivent également dans le Livre biblique: le 141 et le 142, selon la numérotation juive.
« Seigneur, je t’appelle: accours vers moi! / Ecoute mon appel quand je crie vers toi! / Que ma prière devant toi s’élève comme un encens, / et mes mains comme l’offrande du soir » (Ps 141, 1-2). C’est ainsi que commence le premier psaume des premières vêpres de la première semaine du Psautier: des paroles qui, au début de l’Avent, prennent une nouvelle « couleur », parce que l’Esprit Saint les fait résonner en nous toujours à nouveau, dans l’Eglise en chemin entre le temps de Dieu et le temps des hommes. « Seigneur… accours vers moi » (v. 1). C’est le cri d’une personne qui se sent en grave danger, mais c’est aussi le cri de l’Eglise parmi les multiples pièges qui l’entourent, qui menacent sa sainteté, cette intégrité irrépréhensible dont parle l’apôtre Paul, qui doit en revanche être conservée pour la venue du Seigneur. Et dans cette invocation résonne également le cri de tous les justes, de tous ceux qui veulent résister au mal, aux séductions d’un bien-être inique, de plaisirs qui offensent la dignité humaine et la condition des pauvres. Au début de l’Avent, la liturgie de l’Eglise fait à nouveau sien ce cri, et elle l’élève à Dieu « comme un encens » (v. 2). L’offrande des Vêpres de l’encens est en effet le symbole de la prière, de l’effusion des cœurs tournés vers Dieu, vers le Très-Haut, ainsi que « les mains que j’élève, en offrande du soir » (v. 2). Dans l’Eglise, l’on n’offre plus de sacrifices matériels, comme cela advenait également dans le temple de Jérusalem, mais on élève l’offrande spirituelle de la prière, en union avec celle de Jésus Christ, qui est dans le même temps Sacrifice et Prêtre de l’Alliance nouvelle et éternelle. Dans le cri du Corps mystique, nous reconnaissons la voix même de la Tête: le Fils de Dieu qui s’est chargé de nos épreuves et de nos tentations, pour nous donner la grâce de sa victoire.
Cette identification du Christ avec le Psalmiste est particulièrement évidente dans le deuxième Psaume (142). Ici, chaque parole, chaque invocation fait penser à Jésus dans la passion, en particulier à sa prière au Père sur le Gethsémani. Lors de sa première venue, à travers l’incarnation, le Fils de Dieu a voulu partager pleinement notre condition humaine. Naturellement, il n’a pas partagé le péché, mais pour notre salut il en a souffert toutes les conséquences. En priant le Psaume 142, l’Eglise revit chaque fois la grâce de cette compassion, de cette « venue » du Fils de Dieu dans l’angoisse humaine jusqu’à en toucher le fond. Le cri d’espérance de l’Avent exprime alors, dès le début et de la manière la plus forte, toute la gravité de notre état, notre besoin extrême de salut. Comme pour dire: nous attendons le Seigneur non à la manière d’une belle décoration sur un monde déjà sauvé, mais comme unique voie de libération d’un danger mortel. Et nous savons que Lui-même, le Libérateur, a dû souffrir et mourir pour nous faire sortir de cette prison (cf. v. 8).
Ces deux Psaumes nous mettent, pour ainsi dire, à l’abri de toute tentation d’évasion et de fuite de la réalité; ils nous préservent d’une fausse espérance, qui consisterait à entrer dans l’Avent et aller vers Noël en oubliant le caractère dramatique de notre existence personnelle et collective. En effet, une espérance fiable, qui ne soit pas trompeuse, ne peut qu’être une espérance « pascale », comme nous le rappelle chaque samedi soir le cantique de la Lettre aux Philippiens, avec laquelle nous louons le Christ incarné, crucifié, ressuscité et Seigneur universel. Tournons vers Lui notre regard et notre cœur, en union spirituelle avec la Vierge Marie, Notre Dame de l’Avent. Plaçons notre main dans la sienne et entrons avec joie dans ce nouveau temps de grâce que Dieu offre à son Eglise, pour le bien de l’humanité tout entière. Comme Marie et avec son aide maternelle, soyons dociles à l’action de l’Esprit Saint, pour que le Dieu de la paix nous sanctifie pleinement, et que l’Eglise devienne signe et instrument d’espérance pour tous les hommes. Amen!
L’AVENT – LA PRÉPARATION A LA VENUE DU SEIGNEUR.
26 novembre, 2010du site:
http://www.salve-regina.com/Spiritualite/Avent.html
L’AVENT – LA PRÉPARATION A LA VENUE DU SEIGNEUR.
d’après Pius Parsch
Quand, après les nombreuses semaines qui suivent la Pentecôte, nous chantons les premières vêpres du dimanche de l’Avent, nous nous rendons immédiatement compte de la différence. Auparavant la liturgie était simple, calme ; maintenant elle est poétique, débordante de sentiment. Le premier chant : » En ce jour la douceur coulera » nous dit expressément que nous entrons dans un temps plein d’espérance joyeuse, un temps d’attente, d’aspirations et de joie.
Qu’est précisément pour nous l’Avent? Après ce que nous avons exposé plus haut, la chose est claire, c’est une préparation à la venue de grâce du Seigneur. Le martyrologe romain annonce pour le premier dimanche de l’Avent « Le premier dimanche du temps de préparation à la venue de Notre Seigneur Jésus-Christ ».
L’Avent est donc nettement un temps de désir, d’aspirations, d’attente. Pour que la nourriture soit profitable, il faut que le corps ait la sensation de la faim. Dieu non plus ne veut pas imposer sa grâce à des âmes rassasiées. » Ceux qui ont faim, il les remplit de biens ; quant aux riches, il les renvoie les mains vides « . C’est là une des plus anciennes lois du royaume de Dieu. C’est pourquoi, pendant quatre semaines, l’Église nous fait ressentir la faim spirituelle, le besoin de Rédemption, afin de nous rendre dignes de recevoir la grâce de la Rédemption. Nous nous demandons comment éveille-t-elle en nous ce sentiment de faim spirituelle ? Elle le fait avec une grande maîtrise. Elle nous représente dramatiquement le premier avènement du Christ et, dans ce drame sacré, elle nous fait partager la faim spirituelle, l’ardent désir des plus nobles et des meilleurs hommes qui ont attendu la merveilleuse méthode éducative dont Dieu s’est servi pour préparer l’humanité à la venue du Rédempteur.
Cette préparation divine a été triple. Toute l’histoire sainte, l’Ancien Testament nous conduit comme un éducateur vers le Christ. Quand la plénitude des temps fut arrivée, Dieu envoya un précurseur spécial ; sa personne, sa vie annonçaient l’avènement du Christ. Enfin Dieu bâtit pour son Fils un temple de pierres précieuses : le corps et l’âme de la Mère de Dieu. Cette triple préparation à la venue du Christ doit nous instruire, nous aussi, à attendre, l’avènement de grâce du Christ. Nous comprenons maintenant pourquoi ces trois éléments occupent une place si large dans l’Avent : l’Ancien Testament, Saint Jean-Baptiste et la Sainte Vierge.
a) Le porte-parole et l’interprète de l’Ancien Testament est le prophète Isaïe. Il incarne à la fois a préparation de Dieu et les désirs de l’humanité.
Ce serait une méditation intéressante (on pourrait la faire les soirs d’Avent) de parcourir tout l’Ancien Testament et d’y rechercher les prophéties messianiques. On verrait comment, après s’être présentées en quelques traits obscurs, elles deviennent sans cesse plus précises, plus claires, plus vivantes. C’est ainsi que Dieu faisait l’éducation de l’humanité pour la conduire vers le Rédempteur. On passe ainsi du Protévangile (aux portes du paradis terrestre) à travers Noé, Abraham, la bénédiction de Jacob, Moïse, David, Salomon, jusqu’aux Prophètes dont Isaïe est le prince. Notre Mère l’Église a fait de cette révélation graduelle de Dieu un principe de sa liturgie. Nous le voyons particulièrement dans l’Avent.
L’Avent se partage en deux grandes parties : la première comprend les deux premières semaines de l’Avent. Pendant ces deux semaines, l’invitatoire salue le » Roi qui va venir « . A partir du troisième dimanche, l’Église accentue son attente : » Le Seigneur est tout près « . Dans la première partie, les deux dimanches représentent deux étapes. Le premier dimanche nous apporte le message : Le Roi vient ; le second annonce avec plus de précision : Il vient vers Jérusalem (c’est-à-dire dans l’Église). La seconde partie commence immédiatement avec un chant de joie : » Réjouissez-vous dans le Seigneur; je vous le dis de nouveau, réjouissez-vous car le Seigneur est proche « . C’est la première étape. La seconde est constituée par les Quatre-Temps qui nous apportent un nouveau message : Le Seigneur vient comme Homme. Nous entendons la préhistoire de sa naissance. Une troisième étape est constituée par les antiennes O. Ce sont les jours de l’attente la plus pressante de l’Avent. Au soir de la vigile de Noël, enfin, nous nous tenons devant les portes qui s’ouvrent et donnent au monde le Sauveur.
Dieu a révélé le Rédempteur d’une manière progressive et l’Église l’imite dans sa liturgie. C’est ainsi également que les choses se passent dans la vie de notre âme Dans notre âme aussi, la lumière du Christ se fait de plus en plus claire jusqu’à ce que nous ayons atteint notre maturité et que nous puissions voir la face rayonnante du Rédempteur, à l’heure de notre mort.
Cependant Isaïe nous présente aussi les nobles fruits de l’Ancien Testament. Il est le représentant de tous les justes qui, avec toute l’ardeur de leur âme, ont imploré le Rédempteur. Il doit évoquer dans notre âme cette ardeur de désirs. C’est pourquoi son imploration : » Cieux, répandez votre rosée; nuées, laissez tomber le juste (le Rédempteur) ; que la terre s’ouvre et fasse germer le Sauveur » est devenue la prière d’Avent la plus connue de la chrétienté.
b) Quand je commençais à vivre de la vie de l’Église, je m’expliquais assez mal le rôle que joue saint Jean-Baptiste dans l’Avent. Mais, au cours des années, je compris de mieux en mieux qu’il y avait sa place. Sa vie, sa parole, sa personne sont une préparation à la venue du Christ. Dieu en a fait le précurseur, le héraut du premier avènement du Christ ; l’Église en fait le héraut et le précurseur de l’avènement du Christ par la grâce., Quand il parut jadis, il prêcha au peuple juif la pénitence et là conversion : » Convertissez-vous, le royaume de Dieu est proche « . Il nous prêche la même chose aujourd’hui. Nous pouvons le dire, c’est le Baptiste qui a fait de l’Avent un temps de pénitence. Sa parole : » Préparez les voies du Seigneur, rendez droits ses sentiers ; toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline sera abaissée ; ce qui est courbe sera redressé « , cette parole est pour nous une exhortation à un véritable renouvellement de vie.
c) Il y a une manifestation particulière de la bonté et de l’amabilité de Dieu dans le fait qu’il a rendu l’oeuvre de la Rédemption si humainement proche de nous. Le Rédempteur devait devenir un Enfant des hommes, se soumettre au cours de la nature, être conçu et enfanté. Ceci nous montre la condescendance de Dieu dans l’oeuvre de notre salut ; il ne voulait pas nous apparaître comme le Dieu terrible ; il voulait, être un véritable Emmanuel (Dieu avec nous). Aussi il a introduit une noble figure de femme dans le plan de la Rédemption ; elle devait y coopérer. Tout cela est si aimable et si touchant que la chrétienté – et on le comprend sans peine, ne peut détacher son regard de ce souvenir. Elle ne cesse de voir la Mère avec son divin Enfant. Comprenons-nous maintenant pourquoi l’Église nous fait marcher à travers l’Avent en compagnie de Marie et nous fait puiser nos méditations dans le cœur de Marie ? Si l’Avent est en premier lieu une préparation à la venue du Christ par la grâce, quel plus beau modèle pouvons-nous trouver que Marie qui reçut corporellement le Christ, lui donna asile et eut le droit d’être appelée sa vraie Mère? Oui le mystère, de la maternité divine, le plus sublime symbole de l’habitation de Dieu en nous, doit trouver une large place dans l’Avent. C’est pourquoi nous entendons sans cesse retentir la cloche de l’Ave.
C’est là un triple accord merveilleux Isaïe, Jean, Marie, une harmonie dont chaque son est d’une Mélodie rare : saints désirs, pénitence, union à Dieu. Voilà ce que doit être pour nous l’Avent.
bonne nuit
26 novembre, 2010SONS OF SONGS SERIES SHEPHERD
25 novembre, 2010La manne céleste et l’eau du rocher – La nourriture du désert
25 novembre, 2010du site:
http://bible.archeologie.free.fr/manneceleste.html
La manne céleste et l’eau du rocher
La nourriture du désert
Lorsque les Hébreux traversèrent le désert du Sinaï, Dieu fit tomber quotidiennement sur son peuple une nourriture miraculeuse venue du ciel, ayant la consistance de la mie de pain. Grâce à cette manne, le peuple a pu se nourrir pendant tout son voyage vers la terre promise (Exode 16, 13-36).
Que pourraient nous apprendre chercheurs et archéologues à ce sujet, s’il s’agit a priori d’un phénomène miraculeux invérifiable ? Des orientalistes se sont pourtant penchés sur la question, et ont tenté de le relier à un phénomène naturel. En 1823, deux naturalistes allemands, Wilhelm Hemprich et Christian Gottfried Ehrenberg, partirent en mission en Orient. Ils y découvrirent une plante poussant dans les déserts, le tamaris, qui vivait avec un insecte parasite, la cochenille. Celle-ci avait la particularité de produire abondamment une substance naturelle, une sorte de « miellat » qui dans les régions arides perd son eau pour se cristalliser en un sucre parfaitement comestible [1]. Ils assimilèrent cette sécrétion naturelle à la manne consommé par les Hébreux durant l’Exode. Au siècle suivant, les biologistes Frederick Simon Bodenheimer et Oskar Theodor partirent à leur tour dans le Sinaï à la recherche de la manne céleste, et retrouvèrent cette plante qui est un arbuste à petites feuilles en écailles et à fleurs roses : le Tamarix mannifera Ehr [2][3].
Le produit comestible riche en sucres a une consistance fondante et un goût très doux ; il est sécrété par des cochenilles de l’espèce coccus manniparus. Au matin, cette nourriture tombe des arbres en grande quantité ; il se forme parfois sur le sol des tapis entiers de cette substance. C’est surtout dans le nord de la péninsule du Sinaï qu’elle est la plus abondante. Elle est traditionnellement vendue par les bédouins, trouve plusieurs utilisations et se conserve facilement. En enquêtant sur la manne biblique, les Occidentaux firent ainsi connaissance avec ce qui a pu nourrir le peuple d’Israël durant quarante ans.
Les cailles
La nourriture des Hébreux pendant l’Exode n’a pas seulement consisté en manne. Ils se plaignirent de la monotonie du menu et demandèrent à manger de la viande. Bien que très irrité, Dieu leur envoya des volées entières de cailles, pour qu’ils puissent s’en nourrir. Des oiseaux innombrables vinrent recouvrir entièrement le camp des Israélites. Mais les consommateurs les plus voraces furent apparemment frappés d’une mort subite, due à un fléau divin, en punition pour leur consommation excessive (Ex. 16, 13 ; Nb. 11, 4-35).
Sur l’épisode des cailles, une explication a été proposée qui tient aux grandes migrations. Lorsque les cailles provenant de l’Egypte traversent la mer Rouge et arrivent sur la côte ouest du Sinaï, elles se posent épuisées après avoir parcouru ce long parcours. Il suffit alors de tendre la main, et elles se laissent prendre vivantes facilement. C’est peut-être de cette manière, selon certains chercheurs, que les Hébreux ont pu compter sur cette nourriture. Ces caractéristiques géographiques s’observent encore aujourd’hui ; il suffit par exemple de lire la description du Sinaï faite par l’Ecole égyptienne de la langue arabe [4] :
« D’autres vallées comprennent Ras Mattarqua et al-Gharandel qui abondent aussi en végétaux, et Abu Gada où l’on trouve des tamaris et des variétés de cailles et de perdrix de montagne au moment de leurs périodes migratoires ».
L’eau sortant du rocher
En s’enfonçant dans le désert du Sinaï, les Hébreux se trouvèrent rapidement sans eau potable. Ils firent remonter leur plainte auprès de Moïse, qui se tourna vers Yahvé. Alors Dieu dit à Moïse de prendre son bâton et d’en frapper un rocher. Il le fit, et de l’eau en jaillit (Ex. 17, 1-7).
Cette scène n’a rien d’étonnant pour un hydrogéologue d’aujourd’hui qui connaît la région du Sinaï. Les montagnes du sud de la péninsule sont constituées de granite, de gabbro et de porphyre ; des fissures dans le granite sont comblées par des filons de porphyre faciles à creuser. De sorte qu’au prix de quelques coups de pioche, on atteint rapidement la surface de la nappe phréatique. En effet, cette couche est très proche de la surface, et fournit encore de l’eau potable aux bédouins d’aujourd’hui [5].
Qui pourrait se douter que les sous-sols des déserts du Sinaï et du Néguev contiennent des quantités d’eau immenses ? Le géologue israélien Arie Issar, professeur à l’Université du Néguev, croit en l’existence d’un aquifère gigantesque qui s’étendrait dans tout le sous-sol de la péninsule jusqu’à la mer Morte. A l’appui de cette thèse, le chercheur montre les résultats de ses analyses isotopiques de l’eau, qui sont identiques dans quasiment toutes les sources de la région. Si l’hypothèse était confirmée, cela ferait du Sinaï une région possédant des ressources en eau colossales, à considérer si nous voulons répondre aux besoins futurs de la planète [6].
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Références :
[1] – I. Foldi : « Les cochenilles » (2ème partie). Insectes n° 130, 2003 (3), pp. 27-30 (lire).
[2] – F.S. Bodenheimer : « The Manna of Sinai ». The Biblical Archaeologist, Vol. 10, No 1 (feb. 1947), pp. 2-6.[3] – http://www.encyclopedie-universelle.com/abbaye-scriptorium4d3.html
[4] – http://www.4uarabicschool.com/Sudr.htm
[5] – A. Issar : « La Bible et la science font-elles bon ménage ? Les plaies d’Egypte et de l’Exode passées au crible de l’hydrogéologie ». La Recherche n° 283, janvier 1996.
[6] – A. Issar : « De l’eau fossile sous le Sinaï et le Néguev ». Pour la Science, septembre 1985.
« Lumière du monde ». Une première pour un pape (par Sandro Magister)
25 novembre, 2010du site:
http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1345703?fr=y
« Lumière du monde ». Une première pour un pape
Un livre tellement « à risque » est sans précédent pour un successeur de Pierre. « Chacun est libre de me contredire », c’est sa formule. À propos de la question controversée du préservatif, le professeur Rhonheimer explique pourquoi Benoît XVI a raison
par Sandro Magister
ROME, 25 novembre 2010 – Vers la fin de son livre-entretien « Lumière du monde », commercialisé depuis quelques jours en différentes langues, Benoît XVI fait allusion à son autre livre sur Jésus, son « dernier ouvrage majeur ».
Il rappelle qu’il avait voulu « de manière tout à fait consciente » que cet autre livre soit non pas un acte de magistère, mais l’offrande d’une interprétation personnelle.
Et d’ajouter : « Cela représente évidemment un risque énorme ».
Dans l’après-midi du lundi 22 novembre, lors d’un tête-à-tête avec le pape, le directeur de la salle de presse du Vatican, le père Federico Lombardi, a demandé à celui-ci s’il se rendait compte qu’il allait prendre un risque encore plus grand avec le livre-entretien qui était sur le point de paraître.
« À cette question que je lui posais, le pape a souri », a raconté le père Lombardi.
Et c’est la vérité. « Lumière du monde » est un livre d’une audace sans précédent pour un pape. Transcription intégrale de six heures d’interview spontanée et sans censure, il aborde un nombre incroyable de sujets, y compris les plus délicats.
Les réponses sont rapides et vont à l’essentiel. Le langage est familier mais précis et simple, les termes techniques en sont totalement absents. Ici ou là brillent des éclairs d’ironie.
Certes, le lancement du livre n’a pas été exempt de défauts. Le père Lombardi lui-même a reconnu que la publication en avant-première de quelques passages par « L’Osservatore Romano », dans l’après-midi du samedi 20 novembre, en plein consistoire, « n’a pas été bien gérée ». Dans le cas du passage relatif au préservatif, qui a été repris à grand fracas par les médias du monde entier, il a fallu prendre des mesures d’urgence, dimanche 21, sous la forme d’une note donnant des précisions, approuvée mot à mot par le pape.
Le livre a donc immédiatement couru un « risque ». Le pape s’est vu tout de suite lancé dans la mêlée, à propos d’un sujet auquel il n’avait consacré que deux pages sur 250, celui-là même qui, au printemps 2009, lui avait attiré un ouragan de critiques au début de son voyage en Afrique.
Mais si l’on examine ce qui s’est passé ces jours-ci, le test a eu des effets étonnamment bénéfiques tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Église.
À l’extérieur, les voix qui sont habituellement hostiles à ce pontificat ont reconnu cette fois-ci à Benoît XVI le mérite d’une « ouverture ». Et surtout elles ont été amenées à lire ses argumentations. On est impressionné en voyant comment la situation médiatique de ce pape s’est redressée en aussi peu de temps, lui dont on réclamait la démission il y a encore peu de mois.
À l’intérieur de l’Église, la discussion sur un sujet resté jusqu’à maintenant sous le boisseau est enfin venue à la lumière du jour. Le pape n’a pris aucun « tournant révolutionnaire » sur la question du préservatif. Mais le communiqué du dimanche 21 novembre a montré qu’il y avait en tout cas une nouveauté, puisqu’il y est écrit : « De nombreux spécialistes de la théologie morale et des personnalités ecclésiastiques faisant autorité ont soutenu et soutiennent des points de vue analogues ; cependant il est vrai que nous ne les avions pas encore entendus avec autant de clarté dans la bouche d’un pape, même si c’est sous une forme familière et non magistérielle ».
Il n’y a pas que cela. C’est une vraie discussion qui est maintenant portée à la lumière par le pape, avec des opinions parfois vivement opposées. « Chacun est libre de me contredire », avait écrit Benoît XVI dans la préface de son « Jésus de Nazareth ». C’est ce qui se passe aujourd’hui à propos du préservatif, certains groupes et dirigeants « pro life » se montrant très critiques à l’égard des points de vue exprimés par le pape dans le livre-entretien.
Bien évidemment, « Lumière du monde » ne se réduit pas à cela. C’est tout le panorama de ce pontificat qui apparaît d’un coup, en une magnifique synthèse. Même prise individuellement, chacune des questions que le pape traite l’une après l’autre porte l’empreinte de l’ensemble.
Les deux textes reproduits ci-dessous le confirment.
Le premier est le commentaire de « Lumière du monde » qui est paru en Italie dans « L’Espresso », hebdomadaire de pointe de la culture laïque.
Le second est un article du père Martin Rhonheimer, un Suisse, professeur d’éthique et de philosophie politique à l’Université Pontificale de la Sainte Croix, l’université romaine de l’Opus Dei.
Cet article a été publié en 2004 dans « The Tablet », revue catholique « liberal » de Londres, et il expose avec la maestria d’un spécialiste de la théologie morale les arguments qui sont à la base de « l’ouverture » de Benoît XVI en ce qui concerne l’utilisation du préservatif dans des cas déterminés et avec une finalité déterminée.
On est frappé de voir à quel point il y a une correspondance, y compris dans les mots, entre l’article de Rhonheimer paru il y a six ans et ce que Benoît XVI affirme aujourd’hui. À commencer par cet « acte de responsabilité » reconnu comme un mérite au « prostitué » qui utilise le préservatif afin de ne pas mettre en danger la vie de son partenaire, que le pape cite comme exemple.
À propos de cet exemple, le père Lombardi a indiqué que, pour le pape, il n’est pas important qu’il s’agisse d’un sujet de sexe masculin ou féminin : « Ce qui compte, c’est la responsabilité dans le fait de tenir compte de la mise en danger de la vie de la personne avec qui on a le rapport. Que ce soit un homme, une femme, ou un transsexuel qui le fasse, c’est pareil ».
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LE BON PASTEUR ET LA BREBIS PERDUE
par Sandro Magister
En six heures d’entretiens avec le journaliste bavarois Peter Seewald dans le calme estival de Castel Gandolfo – réparties sur six jours comme ceux de la création et transcrites telles quelles dans un livre qui vient d’être imprimé – Benoît XVI a transmis au monde l’image la plus véridique de lui-même. Celle d’un homme charmé par les merveilles de la création, joyeux, incapable de supporter l’idée d’une vie qui serait vécue toujours et seulement « contre », convaincu avec bonheur qu’en ce qui concerne l’Église « beaucoup de gens qui semblent être dedans sont dehors ; et beaucoup de gens qui semblent être dehors, sont dedans ».
« Nous sommes des pécheurs », dit le pape Benoît lorsque l’intervieweur le met dos au mur à propos de l’encyclique « Humanæ vitæ », celle qui condamne tous les actes contraceptifs non naturels. Paul VI l’a écrite et publiée en 1968 et, depuis cette année fatidique, elle est devenue l’emblème de l’incompatibilité entre l’Église et la culture moderne. Joseph Ratzinger ne désavoue pas une virgule d’ »Humanæ vitæ ». Elle est la « vérité » et elle le reste. « Fascinante », dit-il, pour les minorités qui en sont intimement convaincues. Mais le pape tourne tout de suite sa pensée vers les immenses foules d’hommes et de femmes qui ne vivent pas cette « morale élevée ». Pour dire que « tous, nous devrions chercher à faire tout le bien possible, nous soutenir et nous supporter mutuellement ».
Voilà le pape que fait apparaître le livre-entretien « Lumière du monde ». C’est le même qui s’était révélé tel lors de la première messe qu’il avait célébrée après son élection comme successeur de Pierre. Un pasteur qui va à la recherche de la brebis perdue, qui la prend sur ses épaules comme la laine d’agneau du pallium qu’il porte, et qui éprouve beaucoup plus de joie pour la brebis retrouvée que pour les quatre-vingt-dix-neuf qui sont dans la bergerie.
Seulement, à ce moment-là, peu de gens l’avaient compris. Longtemps le Ratzinger des images est resté le professeur glacial, l’inquisiteur de fer, le juge impitoyable. Il a fallu cinq ans, après la tempête parfaite des prêtres pédophiles, pour déchirer définitivement cette fausse image.
A la différence de beaucoup d’hommes d’Église, Benoît XVI ne se plaint pas de complots, il ne retourne pas les accusations contre les accusateurs. Au contraire, il dit dans son livre que « tant qu’il s’agit de mettre la vérité en lumière, nous devons leur en être reconnaissants ». Et d’expliquer : « La vérité, unie à l’amour bien compris, est la valeur numéro un. Et puis les médias n’auraient pas pu faire ces comptes-rendus s’il n’y avait pas eu du mal dans l’Église. Ce n’est que parce que le mal était dans l’Église que les autres ont pu le retourner contre elle ».
Ces propos, tenus par l’homme qui a été le premier, dans les instances dirigeantes de l’Église catholique, à diagnostiquer et à combattre cette « saleté » puis, en tant que pape, à porter le plus grand poids de fautes et d’omissions qui n’étaient pas les siennes, sont impressionnants. Mais c’est de cette manière-là que, dans le livre, Benoît XVI traite d’autres questions brûlantes. Il va directement au cœur des points les plus controversés. Le sacerdoce féminin ? Pie XII et les juifs ? La burqa ? Le préservatif ? L’intervieweur le harcèle et le pape ne se dérobe pas. À propos de la burqa, il dit qu’il ne voit pas de raison pour une interdiction généralisée. Si elle est imposée aux femmes par la violence, « il est clair que l’on ne peut pas être d’accord avec cela ». Mais si celles-ci la portent volontairement, « je ne vois pas pourquoi on devrait les en empêcher ».
On pourra objecter au pape qu’un voile qui couvre complètement le visage pose des problèmes de sécurité dans le domaine civil. L’objection est légitime, parce qu’il a aussi accordé l’interview pour ouvrir des discussions, pas pour les clore. Dans la préface qu’il avait écrite pour un autre de ses livres, celui sur Jésus qui a été publié en 2007, Ratzinger écrivait : « chacun est libre de me contredire ». Et il avait tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas d’un « acte magistériel » mais « uniquement d’une expression de ma recherche personnelle ».
Là où le magistère de l’Église semble trembler, dans l’interview, c’est lorsque le pape parle du préservatif, en justifiant son utilisation dans des cas particuliers. Il n’y a aucun « tournant révolutionnaire », a promptement commenté le père Federico Lombardi, porte-parole officiel du Saint-Siège. En effet, depuis longtemps déjà, beaucoup de cardinaux, d’évêques et de théologiens, mais surtout d’innombrables prêtres de paroisses et missionnaires admettent paisiblement l’utilisation du préservatif pour beaucoup de personnes concrètes qu’ils rencontrent dans le cadre de leur « charge d’âmes ». Mais qu’eux le fassent est une chose et qu’un pape le dise à haute voix en est une autre. Benoît XVI est le premier pontife de l’histoire à franchir ce Rubicon, avec une tranquillité désarmante : lui qui, il n’y a que deux printemps, avait déchaîné dans le monde un chœur retentissant de protestations pour avoir dit, alors qu’il volait vers l’Afrique, que « l’on ne peut pas vaincre le fléau du sida en distribuant des préservatifs : mais au contraire, le risque est d’aggraver le problème ».
C’était en mars 2009. Benoît XVI fut accusé de condamner à mort des dizaines de milliers d’Africains au nom d’une condamnation aveugle du préservatif. Alors qu’en réalité le pape voulait attirer l’attention sur le danger – prouvé par les faits en Afrique – qu’une plus large utilisation du préservatif s’accompagne non pas d’une diminution mais d’une augmentation des rapports sexuels occasionnels avec des partenaires multiples et d’une augmentation des taux d’infection.
Dans l’interview, Ratzinger reprend le fil de son raisonnement, largement incompris à l’époque. Il souligne que, même en dehors de l’Église, il y a un consensus croissant parmi les plus grands experts mondiaux de la lutte contre le sida pour estimer qu’une campagne centrée sur la continence sexuelle et sur la fidélité conjugale est plus efficace que la distribution en masse de préservatifs.
« Se polariser sur le préservatif – poursuit le pape – cela veut dire banaliser la sexualité et cette banalisation est justement la dangereuse raison pour laquelle tant de gens ne voient plus dans la sexualité l’expression de leur amour, mais seulement une sorte de drogue qu’ils s’administrent eux-mêmes ».
À ce point du raisonnement, on s’attend à ce que Benoît XVI réitère la condamnation absolue du préservatif. Et bien pas du tout. Prenant le lecteur par surprise, il dit que dans différents cas son utilisation peut être justifiée, pour des raisons autres que contraceptives. Et il donne l’exemple d’ »un prostitué » qui utilise le préservatif pour éviter la contamination : l’exemple, donc, d’un acte qui reste en tout cas un péché, mais dans lequel le pécheur a un sursaut de responsabilité, que le pape voit comme « un premier pas vers une façon différente, plus humaine, de vivre la sexualité ».
Si cette compréhension affectueuse s’applique à un pécheur, elle doit à plus forte raison s’appliquer au cas classique que rencontrent en Afrique et ailleurs les prêtres et les missionnaires : celui de deux époux dont l’un est malade du sida et utilise le préservatif pour ne pas mettre la vie de l’autre en danger. On peut citer, parmi les cardinaux qui ont jusqu’à présent avancé, de manière plus ou moins voilée, la licéité de ce comportement et d’autres comportements analogues, les Italiens Carlo Maria Martini et Dionigi Tettamanzi, le Mexicain Javier Lozano Barragán, le Suisse Georges Cottier. Mais lorsqu’en 2006 « La Civiltà Cattolica », la revue des jésuites de Rome qui est imprimée après contrôle préalable de la secrétairerie d’état du Vatican, a confié le sujet à un grand expert en ce domaine, le père Michael F. Czerny, directeur de l’African Jesuit AIDS Network, organisation qui a son siège à Nairobi, l’article a été publié après élimination des passages admettant l’utilisation du préservatif pour freiner la contagion.
Il a fallu le pape Benoît pour dire ce que personne, au sommet de l’Église, n’avait osé dire jusqu’à présent. Et cela suffit à faire de lui un humble et doux révolutionnaire.
(Extrait de « L’Espresso » n° 48 de 2010).
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LA VÉRITÉ SUR LE PRÉSERVATIF
par Martin Rhonheimer
La plupart des gens sont convaincus qu’une personne porteuse du virus HIV et qui a des rapports sexuels doit utiliser un préservatif pour protéger son partenaire de l’infection. Indépendamment des opinions que l’on peut avoir sur les rapports sexuels avec des partenaires multiples comme mode de vie, sur l’homosexualité ou sur la prostitution, cette personne agit au moins avec un certain sens de ses responsabilités en cherchant à éviter de transmettre son infection aux autres.
On pense généralement que l’Église catholique n’appuie pas cette opinion. [...] On croit que l’Église enseigne que les homosexuels sexuellement actifs et les prostituées devraient éviter d’utiliser le préservatif, parce que celui-ci serait “intrinsèquement mauvais”. Beaucoup de catholiques sont également convaincus [...] que l’utilisation du préservatif, même quand c’est uniquement dans le but d’éviter l’infection du partenaire, ne respecte pas le caractère de fertilité que doivent avoir les actes conjugaux et ne permet pas le don personnel de soi réciproque et complet, violant ainsi le sixième commandement.
Mais tout cela n’est pas un enseignement de l’Église catholique. Il n’y a aucun magistère officiel à propos du préservatif, de la pilule anti-ovulation ou du diaphragme. Le préservatif ne peut pas être intrinsèquement mauvais, seules les actions humaines peuvent l’être. Le préservatif n’est pas une action humaine, c’est un objet.
Ce que le magistère de l’Église catholique désigne clairement comme “intrinsèquement mauvais”, c’est un type spécifique d’action humaine, défini par Paul VI dans son encyclique « Humanæ vitæ » (et ultérieurement par le n° 2370 du Catéchisme de l’Église catholique) comme une “action qui, soit en prévision de l’acte conjugal, soit dans son accomplissement, soit dans le développement de ses conséquences naturelles, se propose, comme but ou comme moyen, d’empêcher la procréation”.
La contraception est un type spécifique d’action humaine qui, en tant que telle, comprend deux éléments : la volonté de prendre part à des actes sexuels et l’intention d’empêcher la procréation. Une action contraceptive inclut donc un choix contraceptif. Comme je l’ai dit dans un article paru dans le « Linacre Quarterly » en 1989, “un choix contraceptif est le choix d’une action visant à empêcher les conséquences procréatives prévues de rapports sexuels librement consentis et c’est un choix fait précisément pour cette raison”.
Voilà pourquoi la contraception, comprise comme une action humaine qualifiée d’“intrinsèquement mauvaise” ou de désordonnée, n’est pas déterminée par ce qui se produit sur le plan physique. Que ce soit en prenant la pilule ou bien en interrompant le rapport à la manière d’Onan que l’on empêche la fertilité du rapport sexuel, cela ne fait pas de différence. De plus la définition qui vient d’être donnée ne fait pas de distinction entre “faire” et “s’abstenir de faire”, dans la mesure où le coït interrompu est une forme d’abstention, au moins partielle.
Ne sera donc pas définie comme un acte contraceptif, par exemple, l’utilisation de contraceptifs dans le but d’empêcher les conséquences procréatives d’un viol prévu. Dans une circonstance de ce genre, la personne violée ne choisit pas de participer au rapport sexuel ni d’empêcher une possible conséquence de son comportement sexuel, elle ne fait que se défendre contre une agression dont son corps fait l’objet et contre les conséquences indésirables de celle-ci. De même une athlète qui participe aux Jeux Olympiques et qui prend la pilule anti-ovulation pour empêcher son cycle menstruel ne fait pas un acte “contraceptif”, si elle n’a pas en même temps l’intention d’avoir des rapports sexuels.
L’enseignement de l’Église ne concerne pas le préservatif ni les outils physiques ou chimiques similaires, mais l’amour conjugal et le sens essentiellement conjugal de la sexualité humaine. Le magistère ecclésial affirme que, si deux époux ont une raison sérieuse pour ne pas avoir d’enfants, ils doivent modifier leur comportement sexuel en s’abstenant de l’acte sexuel, au moins périodiquement. Pour éviter de détruire soit le sens unitif soit le sens procréatif de l’acte sexuel et donc la plénitude du don réciproque de soi, les époux ne doivent pas empêcher la fertilité des rapports sexuels, au cas où ils en auraient.
Mais que peut-on dire des personnes qui ont des partenaires multiples, des homosexuels sexuellement actifs et des prostituées ? Ce que l’Église catholique enseigne à leur sujet, c’est simplement que ces personnes ne devraient pas avoir des partenaires multiples, mais être fidèles à un seul partenaire sexuel ; que la prostitution est un comportement qui porte gravement atteinte à la dignité de l’homme, surtout à celle de la femme, et qu’elle ne devrait donc pas être pratiquée ; et que les homosexuels, comme tous les autres êtres humains, sont enfants de Dieu et qu’il sont aimés par lui comme tous les autres, mais qu’ils devraient vivre dans la continence comme toute autre personne non mariée.
Mais si ces personnes ignorent cet enseignement et sont menacées par le virus HIV, devraient-elles utiliser le préservatif pour empêcher l’infection ? La norme morale qui condamne la contraception comme acte intrinsèquement mauvais n’inclut pas ces cas-là. Et il ne peut y avoir d’enseignement de l’Église à ce sujet ; créer des normes morales pour des comportements intrinsèquement immoraux n’aurait simplement pas de sens. L’Église devrait-elle enseigner qu’un violeur ne doit jamais utiliser un préservatif, parce que sinon, en plus de commettre le péché de viol, il manquerait au respect du don personnel de soi réciproque et complet, et transgresserait ainsi le sixième commandement ? Sûrement pas.
Que dirai-je, en tant que prêtre catholique, aux personnes à partenaires multiples, ou aux homosexuels, atteints du sida qui utilisent le préservatif ? J’essaierai de les aider à mener une vie sexuelle morale et réglée. Mais je ne leur dirai pas de ne pas utiliser le préservatif. Simplement, je ne leur en parlerai pas et je présumerai que, s’ils décident d’avoir des rapports sexuels, ils garderont au moins un certain sens de leurs responsabilités. En me comportant ainsi, je respecte pleinement l’enseignement de l’Église catholique en matière de contraception.
Ceci n’est pas un appel pour demander des “exceptions” à la règle qui interdit la contraception. La règle en matière de contraception est valable sans exception : le choix de la contraception est intrinsèquement mauvais. Mais, bien évidemment, la règle n’est valable que pour les actes contraceptifs tels qu’ils sont définis dans « Humanæ vitæ », c’est-à-dire ceux qui comportent un choix contraceptif. Les actions dans lesquelles est utilisé un dispositif qui, d’un point de vue purement physique, est “contraceptif”, ne sont pas toutes, d’un point de vue moral, des actes contraceptifs qui tombent sous le coup de la règle enseignée par « Humanæ vitæ ».
De même, un homme marié qui est porteur du virus HIV et utilise le préservatif pour protéger sa femme de l’infection n’agit pas pour empêcher la procréation, mais pour prévenir l’infection. Si une conception est empêchée, ce sera un effet collatéral (non intentionnel), qui ne donnera donc pas à cette action la signification morale d’un acte contraceptif. Il peut y avoir d’autres raisons de mettre en garde contre l’utilisation du préservatif dans un cas de ce genre, ou de recommander la continence totale, mais elles dépendront non pas de l’enseignement de l’Église en matière de contraception, mais de raisons pastorales ou simplement prudentielles (par exemple, le risque que le préservatif ne fonctionne pas). Évidemment, ce dernier raisonnement ne s’applique pas aux personnes qui ont de multiples partenaires, parce que, même si les préservatifs ne fonctionnent pas toujours, leur utilisation contribuera en tout cas à réduire les conséquences négatives de comportements moralement mauvais.
Arrêter l’épidémie mondiale de sida est une question qui concerne non pas la moralité de l’utilisation du préservatif, mais plutôt la manière de prévenir efficacement une situation dans laquelle les personnes provoquent des conséquences désastreuses par leur comportement sexuel immoral. Le pape Jean-Paul II a insisté à maintes reprises sur le fait que promouvoir l’utilisation du préservatif n’est pas une solution à ce problème, dans la mesure où il considérait qu’elle ne résout pas le problème moral des rapports avec des partenaires multiples. À la question de savoir si, d’une manière générale, les campagnes de promotion de l’utilisation du préservatif incitent à des comportements à risque et aggravent l’épidémie mondiale de sida, on peut répondre à partir de données statistiques qui ne sont pas toujours facilement accessibles. Que ces campagnes fassent diminuer, à court terme, les taux de transmission au sein de groupes fortement infectés comme les prostituées et les homosexuels, c’est indéniable. Leur capacité à faire baisser les taux d’infection au sein des populations à partenaires multiples “sexuellement libérées” ou, au contraire, à favoriser des comportements à risque, dépend de nombreux facteurs.
Dans les pays africains les campagnes anti-sida fondées sur l’utilisation du préservatif sont généralement inefficaces [...]. C’est la raison pour laquelle – et cela constitue une preuve notable en faveur de l’argument du pape – l’un des rares programmes efficaces en Afrique est celui de l’Ouganda. Bien qu’il n’exclue pas le préservatif, ce programme encourage à un changement positif dans le comportement sexuel (fidélité et abstinence) qui le différencie des campagnes en faveur du préservatif, celles-ci contribuant à cacher ou même à détruire le sens de l’amour humain.
Les campagnes qui promeuvent l’abstinence et la fidélité sont en définitive le seul moyen efficace à long terme de lutte contre le sida. L’Église n’a donc aucune raison de considérer les campagnes de promotion du préservatif comme utiles pour l’avenir de la société humaine. Mais l’Église ne peut pas non plus enseigner que ceux qui adoptent des modes de vie immoraux devraient s’abstenir d’utiliser le préservatif.
(Extrait de « The Tablet », 10 juillet 2004).
bonne nuit
25 novembre, 2010Isaiah the prophet, events and portraits
24 novembre, 2010L’Avent : Savoir attendre … (Méditation de frère Alois)
24 novembre, 2010du site:
http://www.taize.fr/fr_article7710.html
Méditation de frère Alois
L’Avent : Savoir attendre …
Et si le temps de l’Avent venait renouveler l’espérance en nous ? Non pas un optimisme facile qui ferme les yeux sur la réalité, mais cette espérance forte qui jette l’ancre en Dieu et qui permet de vivre pleinement dans l’aujourd’hui.
L’année chrétienne commence par l’Avent, le temps de l’attente. Pourquoi ? Pour nous révéler à nous-mêmes l’aspiration qui nous habite et pour la creuser : le désir d’un absolu, vers lequel chacun tend de tout son être, corps, âme, intelligence, la soif d’amour qui brûle en chacun, du nourrisson jusqu’à la personne âgée, et que même l’intimité humaine la plus grande ne peut pas entièrement apaiser.
Cette attente, nous la ressentons souvent comme un manque ou un vide difficile à assumer. Mais loin d’être une anomalie, elle fait partie de notre personne. Elle est un don, elle nous conduit à nous ouvrir nous-mêmes, elle oriente toute notre personne vers Dieu.
Osons croire que le vide peut être habité par Dieu et que déjà nous pouvons vivre l’attente avec joie. Saint Augustin nous y aide quand il écrit : « Toute la vie du chrétien est un saint désir. Dieu, en faisant attendre, étend le désir ; en faisant désirer, il étend l’âme ; en étendant l’âme, il la rend capable de recevoir… Si tu désires voir Dieu, tu as déjà la foi. »
Frère Roger aimait cette pensée d’Augustin et c’est dans cet esprit qu’il priait : « Dieu qui nous aimes, quand nous avons le désir d’accueillir ton amour, ce simple désir est déjà le commencement d’une foi toute humble. Peu à peu au tréfonds de notre âme s’allume une flamme. Elle peut être toute fragile mais elle brûle toujours. »
La Bible met en valeur le long cheminement du peuple d’Israël et montre comment Dieu a lentement préparé la venue du Christ. Ce qui est passionnant dans la Bible, c’est qu’elle raconte toute l’histoire de l’amour entre Dieu et l’humanité. Cela commence par la fraîcheur d’un premier amour, puis viennent les limites et même les infidélités. Mais Dieu ne se fatigue pas d’aimer, il cherche toujours son peuple. En fait, la Bible est l’histoire de la fidélité de Dieu. « Une femme oublie-t-elle son petit enfant ? Même s’il y en avait une qui oubliait, moi je ne t’oublierai pas. » (Is 49.15)
Lire cette longue histoire peut éveiller en nous le sens des lentes maturations. Parfois nous voudrions tout, tout de suite, sans voir la valeur du temps du mûrissement ! Mais les psaumes nous ouvrent une autre perspective : « Mes temps sont dans ta main, Seigneur. » (Ps. 31.16)
Savoir attendre … Etre là, simplement, gratuitement. Se mettre à genoux pour reconnaître, même avec le corps, que Dieu agit tout autrement que nous l’imaginions. Ouvrir les mains, en signe d’accueil. La réponse de Dieu nous surprendra toujours. En nous préparant à Noël, l’Avent nous prépare à l’accueillir.
Même si nous n’arrivons pas toujours à exprimer notre désir intérieur par des paroles, faire silence est déjà l’expression d’une ouverture à Dieu. Pendant cette période de l’Avent, nous nous rappelons que Dieu lui-même est venu, à Bethleem, dans un grand silence.
Le vitrail de l’Annonciation, qui se trouve dans l’église de Taizé, fait voir la Vierge Marie toute recueillie et disponible, elle se tient en silence dans l’attente que se réalise la promesse de l’ange de Dieu.
Comme la longue histoire qui a précédé le Christ a été le prélude à sa venue sur la terre, de même l’Avent permet pour nous chaque année une ouverture progressive à la présence du Christ en nous. Jésus discerne notre attente comme il a discerné un jour celle de Zachée. Et comme à lui, il nous dit : « Il me faut aujourd’hui demeurer chez toi. » (Luc 19.5)
Laissons naître en nous la joie de Zachée. Alors nos cœurs comme le sien s’ouvriront aux autres. Lui décide de donner la moitié de ses biens aux pauvres. Nous, aujourd’hui, nous savons qu’une grande part de l’humanité a soif d’un minimum de bien-être matériel, de justice, de paix. Pendant le temps de l’Avent, y a-t-il des solidarités que nous pouvons assumer dans notre vie ?
Les textes qui sont lus dans la liturgie pendant l’Avent expriment comme un rêve de paix universelle : « grande paix jusqu’à la fin des lunes » (Ps 72,7), « une paix sans fin » (Is 9,6), une terre où « le loup habite avec l’agneau » et où il n’y a plus de violence (Is 11,1-9).
Ce sont des textes poétiques mais ils réveillent en nous une ardeur. Et nous voyons que « la paix sur la terre » peut germer dans des réconciliations qui s’accomplissent, dans la confiance que les uns retrouvent avec les autres. La confiance est comme un petit grain de moutarde qui va croître et, peu à peu, devenir le grand arbre du règne de Dieu où s’étend une « paix sans fin ». La confiance sur la terre est un humble début de la paix.