Archive pour le 22 novembre, 2010
L’arche de Noé racontée par des tablettes d’argile
22 novembre, 2010le lien sont à les images, du site:
http://bible.archeologie.free.fr/archedenoetablettes.html
L’arche de Noé racontée par des tablettes d’argile
image : http://www.greatdreams.com
Les chapitres 6 à 8 de la Genèse relatent le récit bien connu du Déluge. Dieu en colère à cause de la perversité des hommes, décide d’éradiquer l’humanité par une inondation totale. Voulant cependant épargner la vie d’un homme sage appelé Noé, il ordonne à celui-ci de construire un grand navire, dans lequel il se réfugie après avoir embarqué sa famille et un couple de chaque espèce d’animaux. Des pluies torrentielles recouvrent alors toute la Terre, et l’eau submerge tout pendant plusieurs jours avant de commencer à s’assécher. Enfermé dans son arche, Noé attendant la réapparition de la terre ferme, libère trois fois une colombe jusqu’à ce qu’elle ne revienne pas, signe qu’elle a trouvé un lieu où se poser. Alors l’Arche s’échoue sur le mont Ararat, et ses occcupants en sortent sains et saufs.
Jusqu’au XIXème siècle de notre ère, on ne connaissait l’histoire du Déluge que par le récit biblique. Les fouilles archéologiques qui furent menées en particulier en Irak, allaient bientôt bousculer cette unicité.
Les recherches effectuées en Mésopotamie ont fourni une grande quantité de témoignages humains écrits, sous la forme de tablettes d’argile gravées de caractères cunéiformes. Cette écriture se présente sous la forme de coins ou de clous, que les scribes imprégnaient dans des plaques d’argile humide qui étaient ensuite séchées et cuites. Ces tablettes découvertes dans les sables des vestiges des villes disparues, se comptent par centaines de milliers. L’écriture cunéiforme a heureusement pu être déchiffrée par des spécialistes de l’Orient ancien, notamment le britannique Henry Creswicke Rawlinson en 1850. Les orientalistes se livrent depuis lors à un énorme travail de traduction de ces innombrables tablettes.
Tablette cunéiforme trouvée à Nippur.
image : http://physics.stmarys-ca.edu/classes
Tablette cunéiforme trouvée à Babylone,
relatant un déluge babylonien (19-18e s. av. J-C.).
image : http://www.earth-history.com/Clay-tablets.htm
Le déluge assyrien
En 1872, un jeune assyriologue, George Smith, participait au déchiffrement des tablettes d’argile trouvées dans la bibliothèque du roi Assurbanipal à Ninive. Il fut un jour très surpris de découvrir un texte qui ressemblait étrangement au récit du Déluge biblique. Ce texte faisait partie intégrante d’un autre récit plus vaste, « l’épopée de Gilgamesh », dont le récit complet occupait douze tablettes ; le passage relatif au Déluge mésopotamien figurait sur la onzième. Gilgamesh est présenté comme un roi d’Uruk, qui en cherchant l’immortalité rencontre un personnage nommé Utanapishtim. Celui-ci lui raconte l’histoire du Déluge auquel il a survécu.
La 11ème tablette cunéiforme trouvée à Ninive.
Elle relate l’épopée de Gilgamesh qui inclut un récit du Déluge.
image : http://www.suffragio.it/bassorilievi/arteassiri.htm
Bas-relief représentant le roi légendaire Gilgamesh maîtrisant un lion.
image : http://encarta.msn.com
Cette version du Déluge est l’histoire d’une inondation catastrophique provoquée par l’ensemble des dieux, dans le dessein de faire disparaître toute l’humanité. Utanapishtim est sauvé grâce à la bienveillance d’un seul dieu, Ea. Voici quelques extraits significatifs du récit [1][2] :
« (Le dieu dit:) Homme de cette ville, démolis ta maison et construis un bateau (…). Renonce à tes biens et sauve ta vie. Embarque avec toi un spécimen de chaque être vivant. Le bateau que tu vas construire, sa largeur et sa longueur doivent être semblables. Couvre-le d’un toit (…). Lorsque le bateau fut construit on procéda à son chargement, en attendant le Déluge. (Utanapishtim parle:) Le soir du septième jour, le bateau était achevé (…). Je chargeai à son bord tout ce que j’avais de spécimens d’espèces vivantes. Toute ma famille et ma parenté je fis monter sur le bateau (…). A la première lueur de l’aube, monta de l’horizon une sombre nuée (…). Le silence de mort de l’orage traversa le ciel et ce qui était lumineux se changea en ténèbres. Comme une bataille, le cataclysme passa sur les hommes (…). Même les dieux furent épouvantés par le Déluge, six jours et sept nuits (…). Le septiéme jour l’ouragan ralentit. Le déluge cessa. Tous les peuples étaient redevenus d’argile. Par la lucarne, la lumière du soleil tomba sur mon visage. Je me jetai à genoux et en pleurant, je cherchai les côtes, les rivages de la mer. Le bateau accosta sur le mont Nisir (…). Le septième jour je fis sortir la colombe : elle s’envola mais revint car aucun perchoir ne lui était offert. Je fis sortir l’hirondelle, elle revint. Je fis sortir un corbeau, il partit et voyant les eaux se retirer, il picora, voltigea et ne revint pas vers moi. Alors je fis une offrande et un sacrifice aux quatre vents. »
Comme on peut le constater, les ressemblances avec le récit biblique sont frappantes. Lorsque la traduction de ce texte fut publiée en Angleterre, cela produisit l’effet d’une bombe médiatique. Cette tablette datait du deuxième millénaire av. J.-C., mais semblait reprendre des traditions plus anciennes. En effet, d’autres documents mésopotamiens antérieurs parlant également de Déluge furent bientôt révélés.
Le déluge sumérien
Depuis la traduction de la tablette de Ninive, d’autres versions du mythe diluvien ont été trouvées. A Nippur, une tablette cunéiforme sumérienne révéla un récit analogue, centré sur un héros du nom de Ziusudra. La tablette, écrite vers 1700 avant notre ère, est malheureusement très déteriorée [3].
Le déluge babylonien
Il existe une troisième version du Déluge, écrite en babylonien, et datant de 1635 av. J-C. environ. Le personnage central est dénommé Atrahasis, ou « supersage » [4]. En outre, ce texte est précédé d’un récit de Création. A l’origine, les dieux auraient créé les hommes pour qu’ils fassent les travaux pénibles à leur place. Mais leur élimination par le moyen d’un déluge est décidée, parce que l’humanité est devenue trop envahissante et … trop tapageuse !
Tablette relatant une version babylonienne du récit du Déluge.
image : http://freestockphotos.com
La liste royale sumérienne
Une autre document un peu différent mais tout aussi intéressant est la fameuse « liste royale sumérienne », rédigée sur des tablettes trouvées dans les ruines de Nippur [5]. Il s’agit d’une énumération de souverains sensés avoir régné dans la région de Sumer. Cette chronologie s’arrête à une époque qui semble correspondre au XVIIIème siècle avant notre ère. Curieusement, au milieu de cette liste de rois est insérée cette phrase inattendue : « Après que le Déluge eut tout nivelé, la royauté s’établit à Kish ». Une dynastie de rois semble en effet être avoir régné à Kish vers 2900, dont une partie au moins paraît historique [6]. Plusieurs exemplaires de cette même liste de rois ont été retrouvés. Le fait que le Déluge soit mentionné dans une liste mésopotamienne d’anciens rois, est significatif du fait que les Mésopotamiens eux-mêmes le considéraient comme historique. Il s’agit cette fois d’un document ayant un caractère plus officiel que de simples textes littéraires.
Liste royale sumérienne.
image : http://www.earth-history.com
Tous ces éléments attestent que les peuples mésopotamiens possédaient dans leur culture le récit d’une inondation terrible, qui aurait eu lieu au cours de leur Histoire. Comment se fait-il que le l’on retrouve le même thème dans la Bible ? La convergence de ces témoignages anciens suggèrent qu’ils puissent correspondre à un évènement réel. Le saura-t-on jamais ? Contre toute attente, des indices géologiques sont venus compléter ces investigations.
Un déluge régional ou planétaire ?
La Mésopotamie n’est pas la seule région du Monde à avoir gardé mémoire de ce type d’évènement. Les traditions orales de nombreux pays répartis sur la planète ont conservé des récits évoquant une inondation totale, éradiquant toute vie terrestre à l’exception de quelques personnes sauvées grâce à un navire. On a ainsi retrouvé de tels mythes chez des peuples vivant dans des contrées aussi éloignées que l’Inde, la Grèce, l’Australie, l’Amérique du Nord ou la Scandinavie [7][8] … Dans son Dictionnaire biblique, l’Eglise adventiste du septième jour a publié une carte recensant les divers récits de Déluge locaux, ce qui représente une quantité impressionnante de témoignages [9]. La ressemblance entre toutes ces traditions ancestrales n’est peut-être pas totalement fortuite. Faut-il en déduire qu’il y eut réellement à une époque reculée de l’Histoire, une inondation planétaire ? Si l’on veut croire à un tel évènement, il devrait être possible d’en retrouver des traces géologiques. C’est apparemment ce que firent involontairement quelques archéologues, en effectuant des sondages dans une plaine irakienne.
Récit d’un Déluge fait par un Amérindien
image : http://www.shingwauk.auc.ca
Carte montrant les lieux où ont été recensées
les récits traditionels d’un Déluge local.
image : http://dialogue.adventist.org
Au désert comme au sanctuaire, une présence
22 novembre, 2010du site:
http://www.spiritualite2000.com/page-133.php
CÉLÉBRER LES HEURES
1 février 2001
Au désert comme au sanctuaire, une présence – Psaume 62
Alain Gignac
S’il est un psaume que l’on connaît par coeur et que l’on croit comprendre à force de le répéter, c’est bien le Psaume 62 de la liturgie des Heures, repris au matin du dimanche de la première semaine et de toutes les Jetés. Un psaume familier, trop familier peut-être. Alain Gignac, professeur à la faculté de théologie de l’Université de Montréal, nous invite à jeter un regard neuf sur ce texte à partir de la version de la Septante.
1. Psaume de David, lorsqu’il était dans le désert de Judée.
2.- Dieu, mon Dieu, devant toi je suis matinal ;
Mon être eut soif de toi,
Combien de fois ma chair (eut soif) de toi ?
En une terre déserte, sans chemin, sans eau.
3. Ainsi dans le sanctuaire je fus vu par toi
Pour voir ta force et ta gloire :
4. « Meilleure au dessus des vies est ta miséricorde,
Mes lèvres feront ton éloge ;
5. Ainsi je te bénirai en ma vie,
En ton Nom je lèverai mes mains ;
6. Comme si de graisse et d’huile mon être était rempli,
Aussi, lèvres d’allégresse, ma bouche louera. »
7. Si je faisais mémoire de toi sur ma couche,
Dans les matins je m’exerçais (méditant) sur toi :
8. « Ta devins mon défenseur,
Et je serai en allégresse sous la couverture de tes ailes.
9. Mon être fut soudé derrière toi,
Ta droite me saisit.
10. Eux, cependant, en vain cherchèrent mon être :
Ils iront vers (l’endroit) le plus bas de la terre,
11. Ils seront livrés aux mains du sabre,
Ils seront (les) parts des renards. »
12. Le roi cependant se réjouira en Dieu ;
Quiconque jurant sur lui sera digne d’éloge ;
Parce que la bouche de ceux qui disent des choses injustes fut obstruée.
Une version viable pour un nouveau regard
Le texte ci-dessus a de quoi étonner. Plutôt que de commenter la traduction liturgique française du psaume, faite à partir du texte hébreu, je propose une traduction qui colle à la version grecque, dite de la Septante. Cette antique version fut élaborée au 3e siècle avant notre ère par la communauté juive d’Alexandrie. Elle fût ensuite la Bible des premiers chrétiens. Elle est très proche du texte hébreu qui fonde le texte de nos bibles mais opère ça et là quelques glissements significatifs, Or, durant toute l’Antiquité et le Moyen-Âge, les chrétiens prièrent les psaumes à partir de cette version grecque ou de sa traduction latine, intégrée par Jérôme à sa Vulgate’. Encore aujourd’hui, la numérotation liturgique du psautier est celle de la Septante. ..
Plus que tout texte biblique, les Psaumes sont avant tout paroles, reprises et recontextualisées à chaque génération. Or, ce jeu de l’Écriture, actualisée au moment même où elle se fait Parole sur nos lèvres, est à l’oeuvre dans le Psaume 62 lui-même. Au fil des versets, pour peu qu’on soit sensible aux métaphores, aux contrastes et aux aspérités du texte, s’ouvre un horizon de compréhension qui se renouvelle sans cesse.
Péché d’interprétation par omission? (v. L et 10-11)
La traduction liturgique omet les versets 10 et II, ainsi que le verset l. Ce choix oriente la prière vers une contemplation individuelle, paisible et spiritualisante, plus universelle aussi. Toutefois, il nous prive d’une clé de lecture susceptible de renouveler la prière.
. Les versets 10-11 décrivent le combat du priant face à ses ennemis. Peut-on prier avec un sentiment de haine ? Oui, répond le psaume, il faut prier avec ce que nous sommes et ce que nous portons. Car la prière ne se limite pas à une relation « Je-Tu», «moi devant toi, mon Dieu ». Acte solitaire, face à l’Autre, la prière demeure néanmoins une référence aux autres. Ceux-ci y ont leur place, même (et surtout) si ces autres sont mes ennemis.
. Le verset l indique dans quel esprit l’éditeur du psautier priait le Psaume 62 : « Psaume de David, lorsqu’il était dans le désert de Judée ». C’est une invitation à relire les versets qui suivent à la lumière du Premier livre de Samuel, qui raconte les aventures de David (7 Samuel 22 – 30). Peu importe que David soit l’auteur du poème, et encore moins que cette notice soit historiquement vérifiée (ou vérifiable) ! La notice situe la prière au désert (v. 2), lieu du combat et de l’épreuve (v. 7-11), en tension avec le sanctuaire (v. 3), lui-même lieu de l’action de grâce émerveillée et volubile (v. 4-6). On le verra, cette alternance des deux lieux de la prière structure le psaume.
Bref, ces versets omis par la liturgie des Heures rappellent à Forant que la prière est ouverture sur l’altérité et combat. Cette omission n’est pas péché d’interprétation, mais elle-même actualisation du texte…
Le contraste entre tableaux (V. 2-8)
Au verset 2, David prend la parole. Au Néguev où il s’est réfugié, hors-la-loi et vagabond, le futur roi s’identifie à cette terre sans chemin et sans eau qui l’a accueilli – le mot désert encadre le paragraphe aux versets l et 2. Le psaume s’ouvre sur un paysage flamboyant, celui du désert à l’aube, lorsque la crainte et le froid disparaissent, que les couleurs s’illuminent et que la terrible chaleur se lève. Un cri jaillit, premiers mots de la prière que les autres versets ne font que développer : « Dieu, mon Dieu » – cri que l’on rencontre deux autres fois dans le psautier (21, 2 ; 42, 4). Cri inaugural, où l’être – l’âme qui est la personne en toute son intégralité et son intégrité – se réduit à un amas de chair (littéralement : de viande). La prière est un cri de finitude
Le verset 3 fait contraste, en une sorte de flash-back : « Dans le sanctuaire je fus vu par toi, pour voir ta force et ta gloire. » Là où la traduction de la liturgie des Heures présente un parallélisme (« je t’ai contemplé… j’ai vu ta force et ta gloire»), la Septante souligne un mouvement fort intéressant, qui est celui même de la prière, par un jeu de mots autour du verbe voir, conjugué au passif et à l’infinitif : je me laisse voir par Dieu, tel que je suis, et c’est ainsi que je peux le voir.
Les versets 4-6 aient ce qu’était la prière au sanctuaire. En opposition à la chair informe (v. 2), les mots décrivent un visage, avec ses lèvres et sa bouche, une personne complète, debout, les mains levées. Ici, l’être n’est pas assoiffé ou diminué, mais rempli de graisse et d’huile. La traduction liturgique, en rendant cette image par le mot festin, lui enlève sa connotation cultuelle. Or, c’est une référence aux sacrifices d’animaux. Dans le sanctuaire, il est facile de louer Dieu et d’offrir un sacrifice, tandis que dans le désert, quelle peut être la louange, et que peut-on offrir, sinon soi-même réduit à l’état de chair ?
Au verset 7, retour à la case départ, c’est-à-dire au désert. Le guerrier attend l’aube (clin d’oeil au v. 2), dans son campement de fortune. Les versets 8-11 citent ce que peut être la prière en ce lieu. Le vocabulaire est militaire : combat, droite, ont cherché, sabre. Nous ne sommes plus dans l’intimité du sanctuaire, mais dans l’inconfort de la guerre, perdus au sein d’un vaste espace sauvage où les animaux sont compagnons de l’humain, que ce soient les renards (v. 11) ou l’aigle, évoqué pour dire la protection divine (v. 8). Les versets 8-9 redisent en d’autres mots, car dans un autre contexte, la prière des versets 4-6. David, le chantre du sanctuaire, est devenu le proscrit persécuté par Saül et craignant pour sa vie. Métamorphose paradoxale de la présence divine.
Un mot pourtant unit les deux tableaux : l’allégresse. Dans la contemplation, Dieu était présent ; dans le combat, Dieu l’est tout autant. Dans les deux cas, l’allégresse est suscitée par la miséricorde, meilleure que la vie, et même que toutes les vies (curieux pluriel !), au-dessus d’elles (v. 4). Ce triple pléonasme marque une insistance. Or, la miséricorde apparaît comme une présence enveloppante (v. 8, « sous la couverture de tes ailes »), irrésistible et intime (v. 9, « Mon être fut soudé derrière toi, Ta droite me saisit »). Fait notable : si l’allégresse et la louange se conjuguent au futur, comme une nécessité à venir, la miséricorde se conjugue au passé, comme une certitude.
Une relecture de l’ensemble du Psaume (V. 12)
Le verset 12, peut-être parce qu’il semble hors d’ordre, est omis (lui aussi !) par la liturgie des Heures. Il se présente comme une conclusion moralisante ajoutée au psaume : celui qui prie et s’appuie sur Dieu est un exemple à suivre, car la prière ne peut s’enraciner dans l’injustice. On y reprend trois thèmes du psaume : la joie, la louange, le sort des ennemis.
Or, ce verset pourrait s’avérer une clé de lecture pour la prière. Je le comprends comme une actualisation de tout le psaume : « Le roi cependant se réjouira en Dieu ; Quiconque jurant sur lui sera digne d’éloge ; Parce que la bouche de ceux qui disent des choses injustes fut obstruée. » Formulation non exempte d’ambiguïté : on croirait entendre un programme de gouvernement et une critique du gouvernement, tout à la fois. Le roi sera fidèle à Dieu et juste… Ainsi sa prière pourra-t-elle être entendue, contrairement à celle de l’injuste. Ainsi le roi pourra-t-il être loué par ses serviteurs. Ainsi le serviteur fidèle à un tel roi sera-t-il à son tour digne d’éloge.
Quel est le lien entre l’expérience de David décrite aux versets 2-11 et ce programme politique ? Imaginons une liturgie royale, au Temple, conduite par un prêtre qui s’adresse au roi pour lui donner David en exemple. Le successeur de David ne peut déjà plus redire ce psaume à la manière du fugitif au désert. L’expérience spirituelle de David est transposée au plan politique, comme critère de validation de l’institution monarchique. Mais pour nous, c’est une invitation à écrire une suite au psaume, un treizième verset inspiré de notre vie.
Une invitation à nous souvenir des moments de contemplation qui ont fondé notre expérience spirituelle, alors même que la plongée dans l’action semble nous éloigner de cette expérience. Ma prière est souvent sèche et aride, mais elle doit alors se nourrir des moments intenses et privilégiés de jadis…
Une invitation aussi à accepter une sécularisation de la prière. La culture actuelle n’est plus soumise à un encadrement sacré, spatial ou temporel. Il est lointain ce temps où les Vêpres se célébraient en paroisse. La prière ne se vit plus seulement au sanctuaire ; au coeur du désert de la vie profane s’ouvre un nouvel espace sacré. Comment discerner et construire ce nouvel espace ? Peut-être est- ce la question la plus cruciale du 3e millénaire.
NOTE : « l . La Vulgate contient deux traductions latines des psaumes. Pourquoi ? Saint Jérôme voulait traduire la Bible en latin a partir de l’hébreu, texte originel et donc préférable, selon lui. Or, les chrétiens étaient si attachés a leur traduction latine de la Septante que Jérôme fut obligé de déroger à sa règle hébraïque et d’inclure dans son ouvre une version latine à partir de la Septante et une autre faite à partir du texte breu. »
Source : Revue «Célébrer les Heures». No 21, printemps 1999.