Echos de l’Irak crucifié
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Echos de l’Irak crucifié
ROME, Lundi 15 novembre 2010 (ZENIT.org) – Quand il s’agit d’enfants que l’on tue au nom d’une idéologie qui croie faire la volonté de Dieu en tuant des nouveaux-nés, des femmes enceintes, des prêtres et des personnes âgées, un bon journaliste chrétien à le devoir de clamer son indignation, de ne pas chercher seulement à rapporter les faits de manière indifférente, mais d’être une voix qui fait la différence ; d’être la voix de celui qui ne l’a plus car son cri a été étouffé par la violence et noyé par les larmes.
Tant de personnes voudraient aider les chrétiens persécutés en Irak, mais elles manquent souvent d’idées ou de moyens. La prière est sans aucun doute fondamentale, mais la vraie prière doit s’accompagner de gestes concrets. C’est pourquoi l’édition en langue arabe de ZENIT a décidé de donner la parole à des personnes impliquées de près dans le drame irakien, pour qu’elles nous fassent entendre, plus que les cris de désespoir des chrétiens crucifiés d’Irak, leurs raisons d’espérer, les échos d’une résurrection possible pour eux.
Dans le souci de préserver la vie privée et la sécurité des personnes que nous avons interpellées et celles de leurs proches en Irak, nous avons choisi de ne reporter que les initiales de leurs noms.
Le rôle des médias
Le prêtre irakien A. N., ami et collègue des pères martyrs Thaer et Wassim, nous écrit : « En tant que chrétien et irakien je demande à tous de s’engager à faire résonner dans le monde la voix des chrétiens irakiens en utilisant l’autorité des moyens de communication, car nos moyens à nous sont limités et pauvres, et nous avons vraiment besoin de moyens médiatiques puissants et multilingues qui fasse arriver notre cri aux autorités gouvernementales du monde ».
Il explique par ailleurs que ce que l’on sait des souffrances des chrétiens en Irak n’est qu’une goutte dans un océan. Leurs drames ne se limitant certainement pas au massacre de l’église de Saydet Al-Najat, il invite les médias à faire étalage de « tous les meurtres violents, les massacres, les persécutions et les enlèvements » auxquels les chrétiens, à l’ombre des projecteurs médiatiques, sont « exposés quotidiennement ». Cette action, insiste-t-il, est « un témoignage nécessaire à la vérité, seule capable de sauver le monde ».
Les irakiens en diaspora
Une autre lettre nous est arrivée d’un prêtre libanais, le père A. F. engagé depuis plusieurs années dans les secours aux réfugiés irakiens, musulmans et chrétiens, au Mont Liban. Le prêtre nous demande d’attirer l’attention non seulement sur les chrétiens présents en Irak, mais également sur le grand nombre d’Irakiens, chrétiens et musulmans, oubliés depuis des années dans de petites nations comme le Liban.
Ils sont oubliés parce qu’ils ne font pas la Une ou ne sont pas l’objet de scoop, or ces derniers « se comptent par milliers et ils réclament un réel soutien matériel et moral ». Des milliers d’irakiens ont été accueillis dans les pays limitrophes, et dans le cas du Liban, comme nous l’a expliqué le père A. F., il y a de sérieuses difficultés à poursuivre économiquement cet engagement entrepris avec gratuité et générosité.
Le père libanais appelle donc les grandes organisations humanitaires à venir en aide aux églises, aux couvents et aux petites communautés libanaises qui, depuis des années, apportent leur aide aux réfugiés irakiens.
Créer un avenir
Le docteur W. W., activiste humanitaire irakienne qui a perdu sept de ses amis dans le dernier attentat, décrit la situation de la façon suivante : « Les chrétiens en Irak se divisent entre ceux qui veulent résister et rester et ceux qui ont peur et veulent s’en aller car la situation s’est subitement aggravée ».
Elle ajoute : « Je sais que l’Église souhaite que les gens n’émigrent pas, mais la situation est maintenant beaucoup plus grave que le souci de préserver la tradition et la civilisation chrétienne si ancrée dans cette terre… ce sont les vies de personnes qui sont en jeu et je ne peux imaginer que l’Église, qui est mère et maître, préfère les pierres aux personnes ».
Elle invite tous les chrétiens du monde, et surtout en Occident, à faire des gestes concrets pour donner un avenir aux chrétiens d’Irak, en les aidant à aller s’installer dans d’autres nations : «Sachant que demander à chaque famille d’Europe d’adopter une famille irakienne est utopique, je suggère une chose pratique : que chaque paroisse adopte une famille chrétienne d’Irak, pour lui permettre de recommencer une vie digne ».
Une nouvelle diffusion de la foi
Enfin, le religieux P. M., demande aux autorités internationales et aux grandes communautés chrétiennes d’exiger des nations islamiques et des musulmans qu’ils dénoncent ouvertement et clairement ces actes barbares, et à ne pas rester des spectateurs passifs devant ce massacre « car s’ils le refusent vraiment ils doivent dénoncer ouvertement ».
En même temps que des gestes concrets, le religieux invite à lever les yeux vers notre espérance chrétienne, rappelant que « l’Eglise a commencé comme cela : après la Pentecôte est venue la persécution, et c’est avec la persécution que l’Eglise s’est diffusée ».
Il évoque dans ce contexte le récent synode des évêques pour le Moyen-Orient, organisé au Vatican du 10 au 24 octobre, et qui a été comparé à « une nouvelle Pentecôte », ajoutant : « Voilà, après cette nouvelle Pentecôte, le même vieux scénario se répète avec la persécution qui arrive. Réjouissez-vous chers martyrs car le Seigneur a entendu le cri de votre sang sur lequel s’élèveront les fondations de nouvelles églises et jaillira la semence de nouveaux chrétiens ».
Le religieux cite un passage très actuel des écrits de saint Ignace d’Antioche qui dit : « Pour les autres hommes ‘prier sans interruption’. En eux se trouve l’espérance d’une conversion qui leur fera trouver Dieu. Faites qu’ils apprennent de vos œuvres. Devant leur colère soyez doux ; devant leur mégalomanie soyez humbles ; répondez à leurs injures par vos prières ; devant leur erreur « ayez la foi solide » ; devant leur férocité soyez des hommes de paix, n’essayant pas de les imiter. Dans la bonté soyons leurs frères, en essayant d’être des imitateurs du Seigneur. Qui, plus que lui, a souffert d’injustice ? Qui comme lui a connu plus de privations ? ».
Il conclut en disant : « Tout ce que nous pouvons faire est de montrer au monde que l’amour est plus fort que l’épée ».
Robert Cheaib
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